-
Village des Pruniers, France, Mai 2014
Le Maître Zen Thich Nhat Hanh répond aux questions
-
Cher Thây,
-
notre ami parle d'un jeu
-
auquel des jeunes aiment jouer.
-
Ca s'appelle 'Loup-garous'.
-
Certains adultes disent
qu'ils ne devraient pas y jouer
-
car c'est en rapport avec la mort.
-
Et d'autres disent que
ce peut être un bon jeu.
-
Comment résoudre cette question?
-
Quel enseignement peut être utile
pour leur faire comprendre cela ?
-
Tu peux en dire plus sur ce jeu ?
-
C'est un jeu simple.
-
On doit choisir à la fin de chaque tour
qui on veut tuer.
-
Il y a des personnages spéciaux,
comme la sorcière.
-
Et il y a un vote
pour décider qui est loup-garou.
-
On doit préserver les habitants
et tuer le loup-garou.
-
Certains parents disent donc
que les enfants
-
doivent tuer, et choisir qui tuer.
-
Et on doit se défendre en disant
-
"je ne suis pas le loup-garou,
ne me tuez pas !"
-
Et tous les enfants doivent
se mettre d'accord et dire :
-
"je pense que c'est lui le loup-garou.
Tuons-le."
-
Alors qu'il est peut-être innocent.
-
Et le jeu se finit quand
-
les loup-garous gagnent
en tuant tous les villageois
-
ou les villageois gagnent
en tuant tous les loup-garous.
-
Soeur Hai Nghiem, peux-tu aider Thây
à répondre à cette question ?
-
Peut-être aussi Thay Phap Luu.
-
Tu tues vraiment ou tu fais semblant ?
-
Tu veux vraiment tuer ?
-
Micro pour Sr Hai Nghiem.
-
Cher Thây, chère Sangha
-
J'ai déjà joué à ce jeu.
-
Donc je crois comprendre un peu
l'esprit de ce jeu.
-
Ce qui est inspirant pour moi quand
j'y joue avec des enfants ou des ados
-
c'est qu'on joue des rôles.
-
Qu'on soit un villageois innocent,
ou un loup-garou
-
ou une sorcière,
ou une petite fille.
-
Evidemment, dans ces rôles
il y a le bien et le mal.
-
Les gens innocents
représentent le bien.
-
Ils veulent rester en vie.
-
Les loup-garous représentent le mal.
-
Ils veulent faire des victimes.
-
Il y a aussi des rôles où l'on peut
sauver la vie de quelqu'un
-
ou on peut...
-
faire en sorte de tuer
plus de personnes à la fois.
-
Bien sûr on fait semblant,
on ne doit pas vraiment faire de victimes.
-
C'est juste une façon de parler.
-
Mais certaines personnes
sont agitées par ce jeu.
-
Dans ce jeu on parle beaucoup
-
pour convaincre les autres
qu'on n'est pas un loup-garou
-
et qu'on ne devrait pas mourir.
-
Parfois, on est un loup-garou
et les autres veulent nous tuer.
-
Alors on ment, car on dit :
"non je ne suis pas un loup-garou"
-
Donc...
-
Je pense qu'on joue parfois avec le feu:
-
On ment ou...
-
on essaye de tuer un innocent.
-
Je pense que ce genre de jeu
nous enseigne que ...
-
on peut endosser des rôles ensemble
en communauté
-
mais ça ne doit pas forcément...
-
être si violent.
-
Peut-être les enfants pourraient réfléchir
à un jeu semblable au "loup-garou",
-
où on discute ensemble
et on a aussi des rôles,
-
mais où on ne tue personne.
-
Peut-être qu'au lieu de tuer...
-
on peut réaliser des projets ou...
-
gagner en sagesse ensemble
-
ou sauver les plus faibles
-
J'espère que Thây
va apporter sa contribution.
-
Je pense que les enfants peuvent
s'asseoir pour en discuter
-
et décider quoi faire.
-
Si...
-
Si un jeu n'est pas approuvé
par un certain nombre de personnes,
-
alors on peut changer les règles
pour que tout le monde soit d'accord.
-
Je viens d'un pays où l'on tuait
tous les jours, toutes les nuits
-
il y a eu de nombreux morts.
-
D'un côté il y avait les communistes.
-
Dans l'autre camp, les anti-communistes.
-
Et ils se tuaient mutuellement
chaque jour, chaque nuit
-
car ils pensaient que l'autre camp
représentait le mal.
-
et la souffrance a perduré
de nombreuses années.
-
C'est un jeu,
un jeu horrible.
-
Donc nos pensées sur le bien et le mal
sont très importantes.
-
Ne...
-
Ne dites pas : "C'est mal!
-
Et si quelque chose est mal,
on doit le tuer"
-
Ne pensez pas ainsi.
-
Imaginons que quelqu'un est malade.
-
Il a un virus ou une bactérie
qui le rendent très malade.
-
Et on veut...
-
On veut l'aider.
-
Nous devons tuer la maladie en lui/elle
mais pas lui ou elle, n'est-ce pas ?
-
On doit tuer le virus, la bactérie,
mais pas la personne, n'est-ce-pas ?
-
Donc quand quelqu'un est violent
car quelqu'un est injuste,
-
quand quelqu'un est un criminel,
-
on ne devrait pas essayer de le tuer lui,
mais plutôt la violence,
-
la colère en lui.
-
Ne tuez pas.
-
C'est pourquoi pendant la guerre
au Vietnam, Thây a écrit une chanson.
-
Et il a demander aux jeunes
de la chanter dans la rue.
-
"Nos ennemis ne sont pas les hommes.
-
Si nous les tuons, avec qui vivrons-nous ?"
-
C'est devenu une chanson folklorique.
-
C'est pourquoi
notre principe est "ne pas tuer".
-
On ne tue personne,
même si c'est un terroriste ou un criminel
-
On veut tuer la perception erronée
-
et...
-
l'ignorance, la haine,
la peur, la violence en lui ou en elle.
-
On ne veut pas tuer la personne.
-
Vous devez donc créer un jeu
-
où on ne tue pas la personne
mais le mal dans la personne.
-
Ce mal c'est la violence,
la colère, la haine.
-
Mais on doit être très habile
pour tuer cette violence, cette haine.
-
Avec la pratique de la parole
et l'écoute consciente
-
on peut aider une personne à retirer
la colère et la violence qui sont en elle
-
On ne peut pas faire ça
avec des pistolets.
-
C'est la première chose à apprendre :
ne jamais tuer un homme, une femme.
-
Mais seulement le mal en eux.
-
Mais on n'a pas besoin d'armes pour tuer
-
On a besoin de la pratique
de la compassion, de l'écoute.
-
C'est la première partie de la réponse.
La seconde partie est plus profonde.
-
Puisqu'on sait que
rien ne naît, rien ne meurt
-
alors on ne peut même pas tuer la colère.
-
On la transforme en quelque chose d'autre.
-
On ne peut pas tuer un nuage,
on peut l'aider à devenir pluie.
-
Il y a un moyen
de transformer colère et violence
-
en quelque chose de plus agréable,
-
comme de la compassion,
compréhension, et réconciliation.
-
Et ça se fait avec
la pratique de la méditation.
-
C'est ce que nous apprenons ici.
-
On ne tue même pas...
-
On ne veut même pas
tuer la colère ou la haine
-
car on sait que rien ne meurt.
-
Mais on sait qu'on peut transformer
colère et haine en quelque chose de positif
-
comme de la compréhension et de l'amour
-
Au Village des Pruniers, on apprend
à transformer la colère en compassion.
-
On apprend à transformer
la violence en douceur.
-
Les enfants peuvent apprendre cela.
-
Et quand ils retourneront
à l'école en Septembre,
-
ils sauront gérer
-
les enfants violents,
qui ont beaucoup de colère en eux.
-
On ne veut pas les punir ou les frapper.
-
Mais on veut les aider à devenir
moins violent, moins colérique.
-
On peut apprendre cela
au Village des Pruniers
-
Et on peut aider
nos camarades de classe.
-
Demandez à vos mentors, ici au Village
comment faire cela.
-
Et créez un jeu qui nous aide à apprendre.
-
Cette personne est sensée être "mauvaise"
-
et les gens disent qu'on doit la tuer
-
Peut-on tuer quelqu'un ?
-
Non !
-
On doit l'aider à ne pas être violent,
ni en colère
-
Mais comment ?
-
On peut créer plein de jeux.
-
Il y a beaucoup de jeux,
de très beaux jeux.
-
Pourquoi ne pas passer notre temps
à jouer de façon à apprendre.
-
Merci !
-
Se connecter, être inspiré, être nourri
