-
Fouteurs et fouteuses de trouble, salut.
-
Mon nom n'est pas important.
-
Les dernières années
ont été difficiles
-
pour celles et ceux qui rêvent
-
d'un monde sans frontières...
-
sans parler de toutes ces personnes
-
qui ont eu la malchance
-
de ne pas être nées
aux États-Unis...
-
et de tout de même avoir l'audace
-
de vouloir visiter Disneyland
-
une fois dans leur vie.
-
En tout cas...
-
Je suppose qu'Euro Disney
existe encore... Non?
-
En réaction aux valeurs fantaisistes
-
que sont le multiculturalisme,
l'égalité des chances
-
la solidarité et la valeur inhérente
-
de toute vie humaine,
-
une nouvelle forme
de nationalisme
-
vociférant a pris de plus en plus
-
de place dans de nombreux pays.
-
Souvent associé au Brexit,
-
à l'extrême droite européenne
-
et à l'élection de Donald Trump,
-
ce populisme raciste et alarmiste
-
est un phénomène mondial
-
aux racines très profondes.
-
Le nationalisme, après tout,
est un pilier central
-
du pouvoir étatique,
et une valeur sûre
-
en temps de crise.
-
Il n'est donc pas étonnant
qu'après presque
-
une décennie de mesures d'austérité
-
et plus de 15 années à subir
-
la prétendue
guerre au terrorisme,
-
de nombreuses personnes
succombent à l'illusion
-
de sécurité qu'évoquent
les murs étanches
-
et les politiciens qui promettent
d'en construire...
-
et de faire payer le Mexique.
-
Mais malgré ce contexte
de paranoïa généralisée
-
et de ressac nationaliste,
-
nous sommes nombreux-euses
à poursuivre la lutte
-
pour un meilleur monde,
un monde où les êtres humains
-
jouiraient de la même
liberté de circulation
-
actuellement réservées
aux marchandises.
-
Au fil des 30 prochaines minutes,
nous donnerons la parole
-
à des personnes qui résistent
-
comme elles peuvent
-
à la militarisation
des frontières,
-
luttent contre les lois d'immigration
-
et causent tout un tas de trouble...
-
Des gens traversent par ici
-
depuis... toujours.
-
Plusieurs régions où nous travaillons
-
sont des zones
de migration saisonnière
-
pour les gens
dont c'est le territoire,
-
comme les Tohono O'Odham et Yaqui.
-
Mais plus récemment,
l'idée est plus...
-
de venir aux ÉU à partir du Mexique.
-
Je suis bénévole
pour l'organisme
-
No More Deaths.
-
Nous sommes un collectif
horizontal,
-
qui fait de l'aide humanitaire
-
dans les régions frontalières.
-
Nous laissons de l'eau
sur les pistes connues.
-
Nous menons des opérations
de sauvetage.
-
Nous documentons les abus
de la police frontalière
-
et des vigilantistes,
nous aidons
-
les gens qui ont été expulsés
et distribuons
-
des kits de réduction des méfaits
aux gens
-
qui veulent traverser
le désert.
-
En grandissant, nous avons
commencé à travailler
-
dans d'autres secteurs,
-
comme les zones désertiques
plus à l'ouest
-
autour de Ajo Arizona,
où les gens traversent
-
la réserve nationale Organ Pipe,
-
le refuge faunique Cabeza Prieta,
puis une zone
-
de bombardement active
sur une trentaine de km.
-
Le voyage vers le Nord
a beaucoup changé
-
au cours des 15 dernières années.
-
Les centres urbains ont été
scellés dans les années 1990,
-
ce qui a repoussé les gens
dans le désert.
-
C'est une stratégie consciente
du gouvernement US
-
et de la police frontalière
-
pour augmenter la souffrance
et le nombre de morts à la frontière
-
afin de dissuader les migrant-e-s.
-
Au fil des ans,
les régions où
-
nous et d'autres groupes
portons de l'eau
-
sont devenues de plus en plus
éloignées.
-
Nous avons cartographié
-
les pistes sud-nord.
Nous sillonnons les routes
-
et allons porter de l'eau.
-
Mais dans les points de chute
proches des routes,
-
il y a eu une augmentation
-
du vandalisme,
et les points de chute
-
sont parfois dans des zones
extrêmement éloignées.
-
Des nombreux migrant-e-s
sont séparé-e-s de leur guide
-
parce que la police frontalière
les « ensablent ».
-
Ils les survolent de près
en hélicoptère,
-
ce qui les fait fuir et perdre
de vue leur guide, ils se perdent,
-
et passent souvent des semaines
à marcher en rond.
-
Les gens voyagent de nuit,
-
la cadence du groupe est très rapide.
-
Celles et ceux qui ne peuvent pas suivre
-
sons souvent abandonné-e-s.
-
De nombreux patients
qui arrivent au camp
-
sont à l'article de la mort.
-
On observe également
une militarisation accrue
-
des politiques migratoires au Mexique.
-
Le Mexique a expulsé plus de personnes
vers l'Amérique Centrale
-
que les ÉU l'an dernier.
-
En partie à cause du soutien
des ÉU,
-
par le Plan Frontera Sur.
-
Les ÉU donnent de l'argent
au gouvernement mexicain
-
pour renforcer sa sécurité
-
le long de sa frontière sud,
avec le Guatemala.
-
J'ai parlé à des gens qui ont
pris le train et qui,
-
pour éviter
les points de contrôle,
-
ont dû marcher pendant
8 ou 9 jours.
-
Quand ils arrivent,
ils voyagent parfois
-
depuis plus d'un mois.
-
Être identifié-e comme migrant-e du sud,
au Mexique,
-
rend les gens vulnérables à l’extorsion,
-
aux enlèvements
et aux agressions.
-
Je dirais qu'une grande partie
des femmes qui ont
-
traversé la frontière ont vécu
une forme ou une autre
-
de violence traumatique
au cours du voyage.
-
Le but est de rendre
la traversée tellement brutale
-
et traumatique que les gens
-
seront dissuadés
d'essayer à nouveau.
-
C'est très obtus comme approche,
et ça ne tient pas compte
-
des raisons pour lesquelles
les gens migrent vers le nord.
-
Les raisons qui poussent
les gens à migrer
-
depuis l'Amérique Centrale
sont liées aux politiques
-
économiques et extérieures des ÉU,
d'hier à aujourd'hui.
-
Ce qui se produit notamment,
sous le couvert
-
du renforcement de la démocratie,
avec le Plan Frontera Sur
-
ou le Merida Initiative,
-
est que le gouvernement US
finance l'armée
-
et les paramilitaires,
et facilite la torture et la répression
-
des mouvements sociaux.
-
Non seulement ils empêchent
les gens de voyager au nord
-
pour fuir la violence,
ils aggravent
-
et perpétuent la violence.
-
Si l'on prend
l'École des Amériques,
-
et le financement de l'armée mexicaine
-
pour combattre le terrorisme
et le narcotrafic,
-
l'un des groupes, les Zetas,
était au départ
-
une section de l'armée
qui s'est détachée d'elle
-
pour prendre le contrôle du narcotrafic
-
au Texas et à Matamoros et Tamaulipas,
-
et est devenue l'un des gangs
les plus violents.
-
Ils ont été entraînés, financés
-
et armés par le gouvernement US.
-
C'est comme un partenariat d'affaires
-
entre le gouvernement US et les cartels.
-
Ils ont des intérêts similaires
et ils exploitent
-
des personnes vulnérables
en les extorquant
-
le long de différents trajets.
-
Les cartels obligent les gens
-
à les payer pour traverser,
-
puis le gouvernement US
et les sociétés privées
-
font à leur tour des profits
en incarcérant les sans-papiers
-
avant de les expulser.
-
L'American Legislative
Exchange Council,
-
est constitué de législateurs
républicains, et d'intérêts privés,
-
L'une de ces compagnies est
Corrections Corporation of America,
-
l'un des plus gros consortiums
carcéraux privés au pays.
-
Ils ont rédigé le projet de loi
SB 10-70,
-
lequel a été adopté en Arizona
-
il y a quelques années
pour permettre à la police
-
de contrôler le statut d'immigration.
-
Nous vivons à moins de 160 km de la frontière,
-
ici, la police et les services
frontaliers ont toujours
-
eu les coudées franches.
-
Mais ce projet de loi a pris l'expérience
des zones frontalières,
-
l'a intériorisée et reproduite à
l'ensemble de l'Arizona,
-
puis des lois semblables
ont été passées ailleurs au pays.
-
Ça aggrave encore
le risque d'expulsion.
-
Si, par exemple, des employé-e-s
cherchent justice
-
parce que leur employeur
refuse de les payer,
-
il est très facile pour ce dernier
de menacer d'appeler l'Immigration.
-
Ça crée une population
extrêmement vulnérable.
-
Et ça semble voulu ainsi,
-
parce que de nombreuses compagnies
-
en profitent en exploitant
ces gens qui sont ici.
-
Je regarde Trouble...
-
Il faut y mettre fin.
-
L'entité coloniale connue
sous le nom de Canada
-
est souvent décrite
comme le gentil voisin
-
au nord des États-Unis.
-
Eh, salut, eh!
-
On se connaît?
-
Non, je ne crois pas.
-
Qu'est-ce que je peux faire pour toi?
-
C'est un cambriolage.
-
Pardon?
-
Ben, oui, désolé.
-
Je vais juste prendre
ce porte-feuille, là...
-
Ok!
-
Conformément à cette caricature,
-
de nombreux Canadien-ne-s
progressistes bien intentionné-e-s
-
voient leur pays comme
un bastion du multiculturalisme
-
et un foyer accueillant
pour les réfugié-e-s fuyant
-
la guerre et les persécutions.
-
Il y a une célébration
de la diversité ici
-
qu'on ne trouve
pas ailleurs.
-
Ça n'est pas tant une question
de règles
-
qu'un esprit d'ouverture,
dont nous sommes fiers,
-
un état d'esprit qui est
malheureusement
-
de plus en plus rare
dans le monde.
-
Derrière ce vernis prétentieux,
-
l'histoire du Canada et sa place
dans le monde
-
présentent une réalité
plus sinistre.
-
Même en laissant de côté
les faits gênants
-
que le pays est fondé
sur le génocide
-
de ses premiers habitants,
-
que l'immigration non européenne
y était pratiquement interdite
-
jusqu'en 1967,
-
et que le Canada est l'un des seuls pays
-
permettant la détention indéfinie
des migrant-e-s,
-
on oublie souvent que le Canada
partage sa frontière terrestre
-
avec un seul autre pays,
-
les États-Unis.
-
Je ne veux pas de mur
à la frontière canadienne.
-
Cette qualité géographique
a longtemps
-
conféré au Canada
un contrôle quasi total
-
sur l'immigration,
en plus de le mettre à l'abri
-
des grands flux de migration irrégulière,
-
à part quelques exceptions historiques,
-
comme le chemin de fer clandestin
et les déserteurs
-
de la Guerre du Vietnam,
ou plus récemment,
-
à l'été 2010, un navire transportant
-
490 migrant-e-s Tamoul-e-s
-
en soi-disant
Colombie-Britannique.
-
Mais alors que le climat politique
au sud de la frontière
-
continue de s'envenimer
pour les migrant-e-s sans papiers
-
et pour quiconque est perçu-e
comme Musulman-e,
-
le Canada voit une augmentation
des réfugié-e-s cherchant
-
à tirer parti de sa frontière poreuse
pour fuir
-
l'hostilité ouverte et la répression
de l'Amérique de Trump.
-
C'est de la cardamome.
-
Ça sent bon,
-
c'est délicieux dans le café.
-
C'est un kanafeh, c'est palestinien.
-
Je l'ai fait moi-même.
-
Quand tu bois le café,
-
tu peux le goûter, c'est savoureux.
-
Tu vas aimer.
-
Mon nom est Omar Ben Ali,
je suis Palestinien.
-
J'ai quitté mon pays
il y a presque dix ans.
-
J'ai quitté ma famille, mes enfants
J'ai tout quitté.
-
Parce que tout le monde ici
sait ce que l'occupation israélienne
-
fait subir au peuple de Palestine.
-
Voici mon fils, Yazan.
-
Ma fille, Tala.
-
Elle a 13 ans, aujourd'hui...
-
elle avait 3 ans
quand je suis parti.
-
C'est mon père, il est mort en 2014.
-
C'est ma mère, mon amour,
mon cœur.
-
Elle est décédée en septembre.
-
Je n'ai pas pu la voir.
-
J'ai fait une demande
du statut de réfugié en 2008.
-
Après trois ans,
j'ai eu un entretien
-
avec quelqu'un de l'Immigration.
-
Après 20 minutes,
il m'a refusé!
-
Il m'a envoyé une lettre
-
avec 38 raisons de refus.
-
38 raisons!
-
Il m'a rencontré 20 minutes!
-
Je ne peux pas y retourner,
car je serais en danger
-
si j'y retourne.
-
Ils ne m'ont pas permis
de faire venir ma famille.
-
Si tu me demandes
ce que je veux,
-
et bien, je vis ici en sécurité,
mais ma famille
-
n'est pas en sécurité.
-
J'ai besoin de ma famille,
je veux ma vie.
-
J'ai besoin de ma femme.
-
Nous sommes au poste frontalier de Lacolle
-
C'est le principal poste frontalier
entre le Québec
-
et les États-Unis.
-
Voici l'autoroute 15,
du côté canadien,
-
qui de l'autre côté de la frontière,
devient l'autoroute I-87,
-
pour aller à Plattsburgh,
-
puis Albany,
et plus loin New-York.
-
C'est le passage
qu'il faut éviter
-
si vous voulez demander
le statut de réfugié-e.
-
En vertu de l'Entente
sur les tiers pays sûrs,
-
si vous venez d'un soi-disant
tiers pays sûr,
-
ce que sont les ÉU,
en théorie,
-
si vous faites une demande
officielle ici,
-
au poste frontalier canadien,
-
on vous refusera l'entrée.
-
Si vous passez ensuite
irrégulièrement ,
-
ils vous interdiront
de faire une demande officielle.
-
Il y a un motif rationnel,
une logique,
-
tout à fait légitime
de ne pas vouloir
-
traverser régulièrement.
-
Nous sommes du côté québécois
de la frontière.
-
Voici la route Roxham.
-
Elle se termine ici,
puis continue
-
de l'autre côté,
en sol américain.
-
Ce lieu est très connu,
-
parce que les gens passent ici
à partir des ÉU
-
pour entrer au Canada
de manière irrégulière
-
et demander
le statut de réfugié-e.
-
La dernière fois que j'étais ici
il y avait
-
un landau abandonné
dans le fossé,
-
il y a des vêtements d'enfants
abandonnés...
-
Je ne peux pas aller plus loin.
-
Si je faisais un pas ou deux de plus,
-
je serais du côté US,
ce qui est techniquement
-
illégal, et je ne le ferai pas,
-
avec les flics qui sont là.
-
Les gens arrivent par là,
descendent de leur véhicule,
-
du taxi ou autre,
puis traversent...
-
« Stop! Si vous traversez ici,
vous serez arrêtés.
-
« Parlez-vous français?
Anglais? »
-
Plattsburgh, New York,
est la principale porte d'entrée.
-
Le trajet de New York à Plattsburgh
en autobus
-
ne dure que quelques heures.
-
Il y a aussi un aéroport.
-
De Plattsburgh,
on peut prendre un taxi.
-
Il n'y a rien de mystérieux
ou dangereux là-dedans.
-
La frontière fait des milliers de km.
-
Ici, la GRC surveille 24h sur 24,
-
mais il n'y a pas de murs,
il n'y a pas de drones.
-
Il y a bien des détecteurs
de mouvement,
-
mais c'est impossible
de tout contrôler.
-
Avec de bons réseaux d'entraide
des deux côtés de la frontière,
-
nous pourrions la rendre
essentiellement inopérante.
-
Nous sommes à Dundee, Québec.
La frontière est à quelques km d'ici.
-
Depuis janvier, un grand nombre
de personnes,
-
plus que d'habitude,
ont traversé par ici.
-
Les gens de la région l'ont constaté,
-
ils ont voulu aider,
-
et il se trouve
qu'un groupe communautaire
-
qui traite avec les autres
groupes communautaires
-
de la région a organisé
ce « souper spaghetti ».
-
Nous sommes venu-e-s de Montréal
-
pour leur passer de l'information.
-
Ce sont des gens
qui fuient les persécutions,
-
qui craignent pour leur vie,
-
des gens qui veulent trouver
une vie meilleure
-
et participer à la société.
-
Et on leur répond, « désolé
-
si vous voulez venir ici,
vous ne pouvez pas passer
-
par nos routes ou nos aéroports... »
-
C'est évident pour nous qu'il faut,
non seulement
-
passer l'info aux résidents
de la région,
-
mais aussi aux gens qui traversent,
-
pour les aider un peu à s'organiser.
-
Quels sont les obstacles
-
qu'ils devront surmonter?
-
Nous aimerions qu'ils
soient informés
-
avant de venir.
-
L'attitude que nous avons
en ce qui a trait à ces gens
-
est que, si quelqu'un vient ici
avec des intentions perfides
-
ou pour commettre des crimes,
nous voulons
-
tout mettre en œuvre pour
le savoir avant de les remettre
-
à l'Agence des services
frontaliers du Canada.
-
Une fois qu'ils ont traversé,
vous pouvez aider concrètement,
-
organiser dans votre communauté
pour les aider.
-
Il faut aussi dire
-
qu'il n'y a absolument
aucune raison de croire
-
que les gens qui ont traversé
-
de manière irrégulière,
ou illégale, si vous préférez,
-
sont plus dangereux
que quiconque dans cette salle.
-
Même de petits gestes,
comme de poser une affiche
-
« Bienvenue aux réfugié-e-s
et immigrant-e-s »,
-
peuvent faire une différence.
Ça donne le ton.
-
Durant l'été 2015,
le monde entier
-
est resté stupéfait devant
les dizaines de milliers
-
de migrant-e-s débarquant
sur les rives grecques
-
pour entamer leur lente migration
vers le nord,
-
à travers les frontières militarisées
de la Macédoine,
-
la Serbie, la Croatie, et la Hongrie
avant d'arriver
-
à destination, dans des pays
comme l'Allemagne et la Suède.
-
Au départ, le taux de sympathie
à l'égard des réfugié-e-s,
-
dont la plupart fuyaient
la guerre en Syrie,
-
en Afghanistan et en Iraq,
était élevé.
-
Mais l'opinion publique
s'est vite retournée.
-
Lors des célébrations du Nouvel An,
-
des agressions sexuelles
ont eu lieu dans plusieurs
-
villes d'Allemagne,
notamment à Cologne,
-
où des centaines de femmes
disent avoir été agressées
-
par des groupes
de jeunes hommes
-
du Moyen-Orient
et du Maghreb.
-
Même s'il s'est avéré que ces incidents
étaient en partie inventés,
-
de même qu'un incident similaire
-
impliquant des réfugiés Syriens
à Francfort,
-
ces événements horribles
ont tout de même
-
cimenté la caricature raciste
du réfugié violeur
-
dans l'imaginaire collectif,
et contribué à déchaîner
-
une violente réaction
anti-immigrante,
-
exacerbée par les attentats
terroristes en France
-
et en Belgique.
-
Dans les mois et années qui ont suivi,
-
les portes de la Forteresse Europe
se sont refermées,
-
et le traité Schengen garantissant
-
la libre circulation au sein
des frontières de l'Europe,
-
a essentiellement été rompu,
reléguant ainsi
-
des milliers de migrant-e-s
aux limbes éternels.
-
Pour pallier cette situation pénible,
de nombreux anarchistes
-
et militant-e-s se sont mobilisé-e-s
pour essayer
-
d'offrir des services
et un peu d'esprit de communauté
-
à celles et ceux qui
ont été rendu-e-s apatrides
-
en terre étrangère.
-
Nous avions des tentes,
au début,
-
pendant deux mois,
en périphérie d'Amsterdam.
-
Les gens campaient dans la boue,
-
la pluie, dans des tentes trouées,
et tombaient malades,
-
sans aide de l'État,
seulement le soutien
-
des voisins et des gens comme moi
-
qui étaient là pour les aider.
-
C'était difficile, ils souffraient,
-
puis l'hiver est arrivé,
et une église vide
-
a été occupée, avec l'aide
des squatteurs du voisinage.
-
À partir de là, ils ont pris
environ 25 bâtiments
-
pour donner refuge
à We Are Here.
-
We Are Here est
un collectif de réfugié-e-s
-
de différents pays et nationalités.
-
Nous aidons les gens qui demandent
-
le statut de réfugié-e
au Pays-Bas.
-
Depuis 2002, des nombreux
réfugié-e-s ont été mis-e-s à la rue.
-
Des femmes et enfants
ont été détenu-e-s.
-
En Hollande, il y a
une tradition,
-
surtout à Amsterdam,
de prendre des bâtiments vides
-
et de les convertir en
espaces de vie ou de travail,
-
en espaces culturels,
etc.
-
Toutefois, l'État a réussi
à contrôler
-
les squats
en les rendant illégaux,
-
alors c'est dur de squatter
et de rester en place.
-
Parce qu'ouvrir un espace
c'est une chose,
-
mais l'occuper pour y rester,
-
c'est une autre histoire.
-
On peut presque dire
que We Are Here
-
le collectif de réfugié-e-s,
a sauvé les squats.
-
Parce que c'est plus facile
pour les gens d'accepter
-
des squats pour les réfugié-e-s
que pour les punks anglais,
-
ou les touristes espagnols.
-
Les squatteurs avaient envie d'aider
-
à trouver des espaces
pour les réfugié-e-s.
-
Pour la police et la justice,
-
et les politiciens, ça n'est pas
si facile d'évacuer
-
cette chose qui génère
de la compassion,
-
de la solidarité et de la sympathie
-
dans la société en général.
-
Ils doivent se déplacer
d'un lieu à l'autre
-
parce que la menace d'expulsion
pèse toujours sur les espaces.
-
C'est important pour le système
de nous garder occupé-e-s,
-
parce que si on a le temps de relaxer
-
on pourrait réfléchir à notre situation,
-
et vouloir organiser des manifestations,
-
et cela menacerait le système.
-
C'est pourquoi ça qu'ils nous
tiennent occupé-e-s
-
à bouger d'un lieu à l'autre.
-
Nous sommes ici pour trouver
une meilleure vie
-
que celle que nous avions
en Somalie.
-
- La vie n'est pas
aussi bonne qu'au Canada!
-
- Et cet espace ici,
nous y resterons!
-
Nous n'avons rien,
mais nous attendons.
-
Nous avons l'espoir
que quelque chose arrivera.
-
La solidarité autogérée
avec les réfugié-e-s
-
s'est mise en place il y a
à peu près deux ans,
-
lorsque les premiers réfugié-e-s
Afghan-e-s sont arrivé-e-s à Athènes.
-
Il y avait un gros groupe de réfugié-e-s
-
qui restaient dans un parc,
dans le quartier Exarchia.
-
Nous avons voulu les aider
avec l'eau, des trucs comme ça.
-
Nous avons alors compris
qu'ils étaient environ 300,
-
et que l'eau ne suffirait pas.
-
Nous avons organisé
une assemblée
-
en espérant mobiliser
assez de monde
-
pour les aider encore cinq jours,
au moins.
-
Des centaines de personnes
sont venues
-
des quatre coins d'Athènes.
-
Ensemble, nous avons essayé
de nous autogérer,
-
et en même temps, avons réappris
ce qu'est l'autogestion.
-
Pendant des mois, nous avons donné
des soins de santé, des vêtements,
-
trois repas par jour, des tentes,
des sacs de couchage
-
qu'ils pouvaient apporter avec eux
dans leur voyage.
-
C'était le début de l'organisation
autogérée de la solidarité
-
envers les réfugié-e-s.
-
De là, deux autres projets
ont été conçus.
-
L'un était le squat Notara,
-
le premier squat d'habitation
pour les réfugié-e-s,
-
Et l'autre était Platanos,
-
un campement autogéré sur Lesbos,
-
en première ligne.
-
Sur l'île de Chios,
-
il y avait des manifestations.
-
Nous avons parlé avec eux et elles,
-
nous nous sommes lié-e-s d'amitié.
-
Ils nous ont dit,
« quand tu iras à Athènes,
-
nous connaissons un bon endroit ».
-
Alors quand nous sommes
arrivé-e-s à Athènes,
-
nous sommes allé-e-s à City Plaza.
-
Je dirais que City Plaza
est un espace d'hébergement
-
pour les réfugié-e-s, mais plus que ça,
c'est aussi un projet politique,
-
Plus de 400 personnes vivent
à l'intérieur de City Plaza.
-
Il y a une grande diversité
de nationalités, ici,
-
des gens avec différents parcours
et différentes intentions.
-
Je connais l'histoire de Plaza,
c'était un hôtel,
-
pour les Jeux olympiques d'Athènes.
-
Ça a été fermé,
puis laissé à l'abandon.
-
Ce sont les anarchistes
qui l'ont repris, réparé,
-
puis aidé beaucoup de monde,
beaucoup de réfugié-e-s,
-
à venir ici et vivre un peu mieux
-
que dans les autres camps.
-
Autant que je sache,
nous n'avons pas perdu un-e seul-e
-
immigrant-e ou réfugié-e.
-
Personne ne s'est suicidé
ou n'a été tué.
-
Dans les camps,
les suicides sont fréquents,
-
les gens perdent espoirs,
ils sont loin des centres-villes.
-
Au contraire, les squats
sont intégrés à la ville.
-
Surtout à Exarchia,
où il y a plus de six squats
-
des squats résidentiels,
pour les réfugiés.
-
Les gens dans les squats
ne sont pas... intégrés,
-
mais ils font partie d'une communauté.
-
Compte tenu du rôle central qu'elles jouent
-
dans le cours de nos vies,
-
et des ressources
extraordinaires investies
-
pour les militariser et les sécuriser,
-
il importe de se rappeler
qu'en fin de compte,
-
les frontières ne sont
que des lignes imaginaires.
-
Pour la majeure partie
de l’histoire de l'humanité,
-
les frontières n'existaient pas.
-
Elles sont, et ont toujours été,
des instruments de colonisation,
-
employées pour diviser le monde
en populations distinctes
-
pouvant être placées au service
de puissances rivales.
-
L'imposition de frontières a toujours
-
suscité des résistances,
et n'a toujours été possible
-
que par la mise en œuvre
d'une violence organisée à grande échelle.
-
Sous l'effet d'un système
capitaliste mondialisé,
-
la fonction première des frontières
est de découper le monde
-
en marchés distincts
qui peuvent être
-
facilement administrés
par les gouvernements locaux
-
au profit de l'élite du milieu
des affaires transnational.
-
Les politiciens et les médias
présentent simultanément
-
les frontières comme
des barrières impénétrables
-
et de fragiles remparts
de la civilisation,
-
constamment soumis à la menace
de dangereuses forces extérieures...
-
Mais la réalité est qu'elles sont
des lignes imaginaires,
-
dessinées arbitrairement
pour diviser les gens ordinaires
-
et les pousser à se battre entre eux.
-
En démystifiant les frontières
et en les privant
-
de leur emprise sur nos vies,
nous pourrons atteindre
-
une meilleure compréhension
de nos intérêts collectifs
-
en tant qu'humains
et commencer à agir
-
ensemble pour démanteler le système
qu'elles servent à maintenir en place.
-
Nous étions environ 80 personnes
sur le bateau.
-
C'était très dangereux.
-
Ils nous ont seulement dit,
« allez tout droit ».
-
« Vous n'avez qu'à aller tout droit,
-
et ces montagnes en face, là-bas,
-
c'est la Grèce.
-
« Est-ce que l'un d'entre vous
sait piloter ce bateau?»
-
Le climat politique actuel
est plutôt effrayant
-
pour les communautés
directement affectées,
-
et ce n'est pas clair du tout
comment tout ça va finir.
-
C'est un moment décisif
pour les personnes
-
qui travaillent et militent contre
l'intériorisation des frontières.
-
Le fait d'avoir un dossier criminel,
-
même si ça n'est dû qu'à
une traversée irrégulière,
-
prive une personne
du droit à l'assistance.
-
Ça veut dire que quiconque
se fait prendre
-
à traverser la frontière
perd pratiquement
-
toutes ses chances d'obtenir
un statut régulier
-
dans ce pays, actuellement.
-
Il est vraiment important de rejeter
-
cette idée qu'il est acceptable
d'expulser les criminels,
-
ou même que cette catégorie,
le « criminel »,
-
est une catégorie légitime.
-
Les gens devraient approcher
le travail local, où qu'ils soient,
-
avec le même sentiment d'urgence
que nous avons ici à la frontière.
-
Si l'on peut garder quelqu'un
dans sa communauté
-
en luttant contre son expulsion
-
ou en créant des réseaux
de protection,
-
cette personne
n'aura pas à tenter de revenir
-
en traversant le désert.
-
Ça peut être de monter
des kits de protection,
-
Ça n'est pas toujours sexy,
mais c'est extrêmement important
-
de garder les communautés ensemble.
-
Allez-y et restez humbles,
et soyez prêt-e-s
-
à écouter et à faire vos devoirs,
-
à apprendre ce qui se passe,
le cœur ouvert.
-
Une fois qu'ils sont ici,
qu'ils ont traversé la frontière,
-
où peuvent-ils aller?
-
Que peuvent-ils faire?
-
Comment peuvent-ils rester?
-
Comment pouvons-nous leur donner
-
le soutien communautaire
-
que nous aimerions recevoir
si nous étions à leur place?
-
Il faut rendre réguliers et normaux
les passages irréguliers.
-
Il faut rendre régulière
et normale cette l'idée
-
qu'il est parfaitement naturel
de simplement traverser,
-
que ces États
qui sont définis comme
-
l'État colonial canadien
et l'État colonial
-
impérialiste des ÉU,
sont des entités
-
auxquelles nous résistons,
et nous ne laisserons pas
-
les frontières nuire
à nos solidarités.
-
On ne peut pas dire,
« on ne veut pas de vous ici! »
-
et ensuite aller là-bas
et détruire leur pays
-
et piller leurs ressources...
-
Ils n'ont plus d'eau potable?
-
« Nous, on a de l'eau potable
à revendre chez nous...
-
nous ne vous aiderons pas.»
-
Chacun-e de nous a une histoire,
et une ascendance
-
qui nous a mené ici,
à ce lieu précis
-
sur cette planète.
-
Tu connais l'expression,
« la police dans notre tête »?
-
Selon moi, la frontière
-
est dans notre tête aussi.
-
Oui, si on traverse ici,
la GRC est là,
-
et il y a sûrement
une présence des services
-
d'immigration des ÉU (ICE)
quelque part...
-
Mais tout juste quelques
centaines de mètres par là,
-
ou par là, on peut traverser.
-
Il est impossible de contrôler
et défendre
-
plusieurs milliers de km
de frontières...
-
Je crois que fermer les frontières
-
n'est pas une solution
et que ça ne marchera pas.
-
Tant que les frontières
seront fermées,
-
les gens seront d'autant plus
motivés à communiquer
-
et à se retrouver.
-
Prends le mur de Berlin,
qui divisait l'Allemagne de l'Ouest
-
et l'Allemagne de l'Est.
-
Après tout ce temps,
les gens s'enfuyaient.
-
Et là, l'Allemagne est réunifiée.
-
Je ne sais pas pour toi,
moi je suis né avec deux jambes,
-
et elles fonctionnent,
alors je marche,
-
je vais où je veux,
-
ça s'appelle la liberté de circulation,
-
Nous avons compris nous-mêmes
dans la rue,
-
que la seule chose
que nous pouvons faire
-
est de rester ensemble
et de s'entraider,
-
c'est le point de départ.
-
La solidarité, et la visibilité.
-
Selon moi, la solidarité exige
que l'on puisse
-
se mettre à la place de l'autre.
-
Pas en effaçant les différences,
-
mais en utilisant la diversité
pour avancer.
-
Nous apprenons d'eux et elles
comment améliorer notre langage
-
et comment démanteler
les frontières
-
de nos propres
convictions politiques
-
de manière à mieux les écouter.
-
Le processus consistant
à chercher un terrain d'entente
-
avec des gens qui viennent
d'un tout autre contexte
-
culturel, social et politique,
-
et à se rencontrer
quelque part au milieu
-
pour créer un nouvel espace...
-
Je crois que c'est une
des meilleures actions politiques
-
que l'on puisse mener.
-
Parce que ce qui vient ensuite,
-
la personne qui est à tes côtés...
elle ne se dira
-
peut-être pas anarchiste,
mais tu sais qu'elle est
-
une camarade dans un sens
encore plus profond.
-
La charité est une mauvaise approche
à mon avis,
-
ça n'est pas de la solidarité
-
La compassion, d'accord.
-
Compassion, c'est d'essayer
de ressentir
-
ce que l'autre ressent
et d'avancer ensemble.
-
Mais la compassion à elle seule
ne suffit pas.
-
Il faut, individuellement,
utiliser ses forces
-
et ses compétences
et les mettre à profit
-
comme n'importe qui.
-
Nous pouvons apprendre
les un-e-s des autres
-
tant que nous sommes ancré-e-s
-
quelque part, géographiquement.
-
C'est bien de voyager
pour apprendre des luttes
-
des autres... pourvu qu'on
rapporte ces leçons à la maison.
-
Nous tendons à réagir aux événements.
-
Ils font quelque chose,
nous réagissons.
-
Nous devons créer les événements
-
qui forceront les autres à réagir.
-
Si c'est un mouvement,
il doit être partout à la fois.
-
Nous devons créer un réseau.
-
Il nous faut, tou-te-s ensemble,
nous organiser.
-
Nous organiser nous-mêmes
en quelque chose de plus grand.
-
Les migrant-e-s qui n'ont pas
le loisir de retourner
-
dans leur pays et n'ont pas
le droit de rester...
-
Où peuvent-ils aller?
-
Ils et elles ne demandent
qu'à vivre normalement.
-
Devant la perspective de guerres
toujours plus déstabilisantes,
-
d'inégalités toujours plus profondes
et de catastrophes écologiques
-
induites par les changements climatiques,
-
le prochain siècle risque de connaître
des taux sans précédent
-
de migration humaine.
-
Les formes que prendront
ces migrations dépendront
-
en partie de notre initiative collective,
-
et de notre capacité à mettre en place
des solidarités réelles
-
qui dépasseront, et ultimement,
détruiront,
-
les frontières
qui nous divisent aujourd'hui.
-
Nous vous rappelons que Trouble
-
est conçu pour être visionné en groupe,
-
et utilisé comme ressource
pour favoriser
-
la discussion
et l'organisation collective.
-
S'il n'y a aucun projet
d'aide aux migrant-e-s
-
dans votre région,
envisagez de projeter ce film
-
entre camarades
et définissez ensemble le projet
-
qui correspondrait le mieux
à votre milieu.
-
Vous aimeriez organiser
des projections à l'université,
-
à votre infoshop,
au centre communautaire,
-
ou même chez vous entre ami-e-s?
-
Devenez fouteurs et fouteuses de Trouble!
-
Pour 10 dollars par mois,
-
nous vous transférerons
une copie de l'épisode à l'avance
-
avec un kit comprenant
des ressources complémentaires
-
et des questions
pour lancer la discussion.
-
Si vous ne pouvez pas
nous donner des $$,
-
... pas de problème!
-
Vous pouvez télécharger ou diffuser
tous nos contenus gratuitement
-
à partir de notre site: sub.media/trouble.
-
Si vous avez des suggestions
de thèmes à traiter
-
ou souhaitez simplement
communiquer avec nous,
-
écrivez à [trouble@submedia.tv]
-
Nous sommes ravi-e-s
que des fouteurs de troubles
-
se rejoignent un peu partout
-
et voulons saluer
les nouvelles sections locales
-
de Williamsburgh, San Jose,
Santa Cruz, Cotali,
-
San Antonio, Cambridge,
Burlington, Amsterdam,
-
Milwaukee, Springfield,
Sockell, Sherbrooke,
-
Doonside, Ottawa, Chicago,
Madison et en Slovénie.
-
Cet épisode a pu être produit
-
grâce à l'aide généreuse
de Brandon, Julian et Ross.
-
Maintenant... sortez et causez du Trouble!