Le prix de la honte
-
0:01 - 0:03Vous êtes face à une femme
qui ne s'est pas exprimée -
0:03 - 0:06en public pendant dix ans.
-
0:06 - 0:09Comme vous le voyez, ça a changé,
-
0:09 - 0:10mais c'est tout récent.
-
0:11 - 0:13Ce n'est qu'il y a quelques mois
-
0:13 - 0:16que j'ai donné ma première
conférence en public, -
0:16 - 0:18au sommet Forbes 30 Under 30:
-
0:18 - 0:221 500 personnalités brillantes
de moins de trente ans. -
0:23 - 0:26Ce qui voulait dire qu'en 1998,
-
0:26 - 0:29les plus âgés du groupe
avaient 14 ans, -
0:29 - 0:32les plus jeunes,
juste quatre. -
0:33 - 0:37J'ai plaisanté en disant qu'ils avaient
peut-être entendu parler de moi -
0:37 - 0:39dans des morceaux de rap.
-
0:39 - 0:42Oui, je suis dans des morceaux rap.
-
0:42 - 0:45Quelque quarante morceaux.
(Rires) -
0:47 - 0:49Mais ce soir-là, il s'est passé
-
0:49 - 0:51quelque chose de surprenant.
-
0:51 - 0:56A 41 ans, je me suis fait draguer
par un gars qui en avait 27. -
0:57 - 0:59Dingue, je sais.
-
1:00 - 1:03Il était charmant,
j'étais flattée, -
1:03 - 1:05et je l'ai éconduit.
-
1:05 - 1:08Parce que sa malheureuse
approche était... -
1:09 - 1:12qu'il pouvait me faire retrouver
mes 22 ans ! -
1:12 - 1:18(Rires)
(Applaudissements) -
1:19 - 1:24Plus tard, je me suis rendu compte
que je devais être la seule quadra -
1:24 - 1:27à ne pas vouloir avoir de nouveau
22 ans. -
1:27 - 1:33(Rires)
(Applaudissements) -
1:35 - 1:40A 22 ans, je suis tombée
amoureuse de mon patron. -
1:40 - 1:43A 24 ans,
-
1:43 - 1:46j'en ai souffert
les conséquences dévastatrices. -
1:48 - 1:51Je voudrais voir lever
la main à ceux -
1:51 - 1:55qui n'ont pas commis d'erreur
à 22 ans ? -
1:57 - 2:00Je m'en doutais...
-
2:01 - 2:06Donc, comme moi, certains d'entre vous
ont pris le mauvais chemin, -
2:06 - 2:09sont tombés amoureux
de la mauvaise personne, -
2:09 - 2:11peut-être même
de leur patron. -
2:12 - 2:17Mais le vôtre n'était probablement
pas, comme le mien, -
2:17 - 2:19le président des États-Unis.
-
2:20 - 2:23Quoique,
on ne peut jurer de rien... -
2:24 - 2:29Il ne se passe pas un jour sans
qu'on me rappelle mon erreur, -
2:29 - 2:31que je regrette profondément.
-
2:33 - 2:40En 1998, après avoir été entraînée
dans une romance improbable, -
2:40 - 2:45j'ai été entraînée dans un
ouragan légal, politique et médiatique -
2:45 - 2:49comme on n'en avait jamais vu.
-
2:49 - 2:52Rappelez-vous, quelques
années en arrière, -
2:52 - 2:55on apprenait les infos
par seulement trois sources : -
2:55 - 2:57la presse écrite,
-
2:57 - 2:59la radio,
-
2:59 - 3:01la télévision.
-
3:01 - 3:02C'était tout.
-
3:03 - 3:06Mon destin était autre.
-
3:06 - 3:10Le scandale vous a été servi
-
3:10 - 3:12par la révolution numérique,
-
3:12 - 3:16grâce à laquelle on
pouvait suivre l'actu -
3:16 - 3:20quand et où on voulait.
-
3:20 - 3:25Et quand le scandale a éclaté,
en janvier 1998, -
3:25 - 3:28il a éclaté en ligne.
-
3:28 - 3:31Pour la première fois,
les médias traditionnels -
3:31 - 3:35étaient devancés par l'Internet
sur une affaire d'envergure, -
3:35 - 3:40un simple clic qui s'est répercuté
partout dans le monde. -
3:40 - 3:43Pour moi, cela a impliqué
-
3:43 - 3:48passer du jour au lendemain,
-
3:48 - 3:53de l'anonymat absolu
à l'humiliation internationale. -
3:53 - 3:58J'étais le patient zéro
de la perte de réputation -
3:58 - 4:02instantanée à l'échelle mondiale.
-
4:04 - 4:06Les jugements hâtifs,
facilités par la technologie, -
4:06 - 4:10ont poussé les foules
à me lapider virtuellement. -
4:10 - 4:13Certes, c'était avant les réseaux sociaux,
-
4:13 - 4:16mais on pouvait déjà commenter en ligne,
-
4:16 - 4:22envoyer par e-mail des articles
et bien sûr des blagues cruelles. -
4:23 - 4:26La presse utilisait mon image
à tout bout de champ -
4:26 - 4:30pour vendre des journaux,
des bandeaux publicitaires, -
4:30 - 4:32et garder l'audience
collée à la télé. -
4:34 - 4:37Vous rappelez-vous, concrètement
une photo de moi, -
4:37 - 4:40où je portais... un béret ?
-
4:41 - 4:44J'admets avoir commis des erreurs,
-
4:44 - 4:47notamment en portant ce béret.
-
4:48 - 4:53Mais l'attention, les jugements
portés sur moi - pas sur les faits, -
4:53 - 4:56ceux que j’ai personnellement reçus,
étaient sans précédent. -
4:57 - 5:00On m'a traitée de traînée,
-
5:00 - 5:06pétasse, salope, pute, bimbo,
-
5:06 - 5:08et bien sûr,
-
5:08 - 5:09j'étais « cette femme ».
-
5:10 - 5:13Tout le monde me regardait,
-
5:13 - 5:16mais très peu me connaissaient
en réalité. -
5:17 - 5:20Je comprends : c'était facile d’oublier
-
5:20 - 5:23que « cette femme » était réelle,
-
5:23 - 5:27avait une âme, et avait autrefois
une vie à elle. -
5:30 - 5:34Quand cela m'est arrivé il y a 17 ans,
il n'y avait pas un nom pour ça. -
5:34 - 5:39A présent, on parle de cyberintimidation
et de harcèlement en ligne. -
5:40 - 5:44Aujourd'hui, je veux partager
une partie de mon expérience, -
5:44 - 5:48parler de la façon dont elle a façonné
mes observations sociétales -
5:48 - 5:52et de comment
j'entends mettre mon vécu -
5:52 - 5:54au service d'un changement
-
5:54 - 5:56qui empêchera que d'autres souffrent.
-
5:58 - 6:03En 1998, j'ai perdu ma réputation
et ma dignité. -
6:03 - 6:07J'ai presque tout perdu,
-
6:07 - 6:10j'ai failli même perdre la vie.
-
6:13 - 6:15Laissez-moi décrire une scène :
-
6:17 - 6:21septembre 1998,
-
6:21 - 6:24je suis assise dans un bureau
sans fenêtre -
6:24 - 6:27au Bureau du Procureur Indépendant,
-
6:27 - 6:31sous l'éclairage des néons bourdonnants.
-
6:31 - 6:34J'écoute le son de ma propre voix,
-
6:35 - 6:39sur des bandes magnétiques
enregistrées sournoisement -
6:39 - 6:42l'année précédente
par une soi-disant amie. -
6:42 - 6:45J'y suis parce que j'ai
l'obligation légale -
6:45 - 6:51d'authentifier personnellement
les vingt heures d'enregistrements. -
6:53 - 6:57Pendant les huit mois précédents,
le mystérieux contenu de ces bandes -
6:57 - 7:00pendait sur ma tête
comme une épée de Damoclès. -
7:00 - 7:04Qui se rappelle une conversation
vieille d'un an ? -
7:06 - 7:09Effrayée et mortifiée, j'écoute,
-
7:11 - 7:15je m'écoute raconter
les anecdotes de la journée, -
7:15 - 7:19je m'entends avouer mon amour
pour le Président, -
7:19 - 7:21et bien sûr,
mon chagrin. -
7:23 - 7:27Je m'écoute être parfois vache,
parfois vulgaire, ou bête, -
7:27 - 7:32cruelle aussi, implacable,
méchante... -
7:33 - 7:36J'écoute, honteuse,
très honteuse, -
7:36 - 7:38la pire version de moi,
-
7:38 - 7:41un « moi » que j'ai du mal
à reconnaître. -
7:45 - 7:49Quand le rapport Starr
est remis au Congrès, -
7:49 - 7:54les bandes et leur transcription,
tous ces mots volés, en font partie. -
7:55 - 7:59C'était déjà assez terrifiant que les
gens puissent les lire, -
7:59 - 8:02mais quelques semaines
plus tard, -
8:02 - 8:05les bandes passaient à la TV,
-
8:05 - 8:09des passages considérables
se retrouvent sur Internet. -
8:11 - 8:15L'humiliation publique était une torture.
-
8:15 - 8:18La vie, presque insupportable.
-
8:21 - 8:26Ce n'était pas quelque chose qui arrivait
habituellement en 1998. -
8:26 - 8:32Je veux dire, on ne volait pas comme ça
les propos, actions, -
8:32 - 8:34conversation ou photos privés des gens,
-
8:34 - 8:37pour les publier ensuite,
-
8:37 - 8:39sans leur consentement,
-
8:39 - 8:42sans les remettre dans le contexte,
-
8:42 - 8:45et sans aucune pitié.
-
8:46 - 8:49Avance rapide sur douze ans.
On est en 2010, -
8:49 - 8:52les réseaux sociaux sont nés.
-
8:53 - 8:56Les cas comme le mien
sont, malheureusement, -
8:56 - 8:59beaucoup plus courants,
-
8:59 - 9:01que les gens aient fait quelque chose
ou pas, -
9:01 - 9:07et cela affecte aussi bien les célébrités
que le citoyen lambda. -
9:07 - 9:12Les conséquences pour certains
ont été terriblement néfastes. -
9:14 - 9:16Je parlais au téléphone avec ma mère
-
9:16 - 9:19en septembre 2010,
-
9:19 - 9:21on discutait à propos
-
9:21 - 9:24de l'étudiant de première
année à l'Université de Rutgers -
9:24 - 9:26Tyler Clementi.
-
9:27 - 9:30Tyler, sensible, doux, créatif,
-
9:30 - 9:31avait été filmé à son insu
-
9:31 - 9:34par son camarade de chambre
-
9:34 - 9:36alors qu'il embrassait
un autre garçon. -
9:37 - 9:39La cybersphère
s'est emparée de l'incident -
9:39 - 9:42et le persiflage et le harcèlement
en ligne se sont déchaînés. -
9:44 - 9:46Quelques jours plus tard,
-
9:46 - 9:50Tyler sautait du
George Washington Bridge -
9:50 - 9:51et mourait.
-
9:51 - 9:53Il avait 18 ans.
-
9:56 - 10:00Ma mère était très affectée par
le drame de Tyler et de sa famille, -
10:00 - 10:03en proie à un chagrin
-
10:03 - 10:07qui m'échappait,
-
10:07 - 10:09jusqu'à ce que je comprenne,
finalement, -
10:09 - 10:12qu'elle revivait 1998,
-
10:12 - 10:16la période où elle passait
chaque nuit à mon chevet, -
10:19 - 10:25où elle ne me laissait pas fermer
la porte de la salle de bains, -
10:25 - 10:29la période où elle et mon père
craignaient -
10:29 - 10:32que l'humiliation
ne me tue -
10:32 - 10:34littéralement.
-
10:36 - 10:39Aujourd'hui, trop de parents
-
10:39 - 10:43n'ont même pas la chance
d'essayer de sauver leurs enfants. -
10:43 - 10:47Trop nombreux sont ceux qui
apprennent leur souffrance -
10:47 - 10:49quand il est trop tard.
-
10:50 - 10:55La mort tragique et absurde de Tyler
a marqué un tournant pour moi. -
10:55 - 10:58Elle a servi à remettre en contexte
mes expériences. -
10:58 - 11:03J'ai commencé à observer
l'humiliation à notre époque, -
11:03 - 11:06et à voir quelque chose
de différent. -
11:06 - 11:12En 1998, on ne pouvait savoir
où cette invention incroyable, -
11:12 - 11:14l'Internet, allait nous mener.
-
11:14 - 11:18Depuis, le Web a connecté des gens
des façons les plus incroyables, -
11:18 - 11:20réunissant des frères perdus de vue,
-
11:20 - 11:24sauvant des vies,
lançant des révolutions, -
11:24 - 11:29mais le côté néfaste - le harcèlement,
la lapidation verbale que j'ai subis- -
11:29 - 11:31s'est démultiplié.
-
11:33 - 11:38Chaque jour, en ligne, des gens,
des jeunes surtout -
11:38 - 11:41qui n'ont pas eu le temps de mûrir
assez pour gérer ça, -
11:41 - 11:43sont victimes d’abus,
humiliés à tel point -
11:43 - 11:46qu’ils n’imaginent pas
vivre un jour de plus, -
11:46 - 11:49et certains, tristement,
n'y arrivent pas. -
11:49 - 11:52Et il n'y a rien de virtuel
là-dedans. -
11:53 - 11:59ChildLine, organisation britannique
à but non lucratif pour les jeunes, -
11:59 - 12:03a publié l'année dernière
des statistiques glaçantes : -
12:03 - 12:07entre 2012 et 2013,
-
12:07 - 12:10il y a eu une augmentation de 87 %
-
12:10 - 12:15d'appels et e-mails concernant
le cyberharcèlement. -
12:15 - 12:17Une méta-analyse faite aux Pays-Bas,
-
12:17 - 12:19montre que pour la première fois,
-
12:19 - 12:24la cyberintimidation éveillait
plus de pensées suicidaires -
12:24 - 12:28que le harcèlement « classique ».
-
12:28 - 12:32Aussi, j'ai été choquée,
pourtant j'aurais dû le savoir, -
12:32 - 12:35par une étude de l'année dernière
-
12:35 - 12:39montrant qu'on ressent l'humiliation
plus intensément -
12:39 - 12:43que le bonheur ou même la colère.
-
12:44 - 12:47La cruauté n'a rien de nouveau,
-
12:47 - 12:53mais sur le Web, les brimades
amplifiées par la technologie -
12:53 - 12:58n'ont pas de limites
et sont accessibles en permanence. -
12:59 - 13:04Avant, l'écho de la honte s'arrêtait
aux limites de la famille, -
13:04 - 13:07de l'école, du village,
de la communauté. -
13:07 - 13:11A présent, la limite, c'est le Web.
-
13:11 - 13:14Des millions de gens, souvent anonymes,
-
13:14 - 13:18peuvent te poignarder avec leurs mots,
la douleur est insoutenable. -
13:18 - 13:21Et il n'y a pas de clôture
pour limiter le nombre de personnes -
13:21 - 13:23qui peuvent vous observer
-
13:23 - 13:27et vous mettre au pilori.
-
13:27 - 13:30Il y a un prix très personnel à payer
-
13:30 - 13:32pour l'humiliation publique,
-
13:33 - 13:38et l'essor d'Internet
a multiplié ce prix. -
13:40 - 13:42Depuis deux décennies,
-
13:42 - 13:46on sème les graines
de l'humiliation et la honte publiques -
13:46 - 13:52dans notre sol culturel,
aussi bien en ligne qu'ailleurs. -
13:52 - 13:57Sites de ragots, paparazzis,
télé-réalité, politique, -
13:57 - 14:03médias et parfois hackers
font de la honte leur fonds de commerce. -
14:03 - 14:06Cela a mené à la désensibilisation,
à la permissivité en ligne, -
14:06 - 14:10qui a mené aux insultes,
aux violations de vie privée, -
14:10 - 14:13au cyberharcèlement.
-
14:13 - 14:17Ce changement a produit ce
que le Pr Nicolaus Mills appelle -
14:17 - 14:21la culture de l'humiliation.
-
14:21 - 14:26Quelques exemples juste
sur les six derniers mois. -
14:26 - 14:31Snapchat, cette appli utilisée
surtout par des jeunes -
14:31 - 14:34où les messages sont censés
avoir une durée de vie -
14:34 - 14:36de seulement quelques secondes.
-
14:36 - 14:39Vous pouvez imaginer le genre
de contenu qu'on y trouve. -
14:39 - 14:43Une appli tierce servant
à garantir la courte durée de vie -
14:43 - 14:46des messages, a été hackée,
-
14:46 - 14:53et cent mille conversations,
images et vidéos privés ont filtré, -
14:53 - 14:57et resteront accessibles en ligne
pour toujours. -
14:57 - 15:01Les comptes iCloud de Jennifer Lawrence
et d'autres stars ont été piratés, -
15:01 - 15:05et des photos privées déshabillées
ont été diffusées sur Internet -
15:05 - 15:07sans leur autorisation.
-
15:07 - 15:11Un site people a atteint
5 millions de clics, -
15:11 - 15:14grâce à cette histoire.
-
15:14 - 15:19Que dire du piratage de
Sony Pictures ? -
15:19 - 15:22L'attention s'est portée surtout
-
15:22 - 15:26sur les mails privés à potentiel
embarrassant maximal. -
15:28 - 15:31Mais dans cette culture de l'humiliation,
-
15:31 - 15:35il y a un autre prix attaché
à l'humiliation publique. -
15:36 - 15:39Un prix qui ne mesure pas
les coûts pour la victime, -
15:39 - 15:41le prix que Tyler et d'autres,
-
15:41 - 15:43notamment des femmes,
des minorités, -
15:43 - 15:47des membres de la communauté
LGBT ont payé, -
15:47 - 15:52et ce prix est le profit
pour ceux qui pillent leurs vies. -
15:53 - 15:57La razzia sur les autres
est une matière première, -
15:57 - 16:03utilisée avec une efficacité impitoyable
pour être emballée et vendue à profit. -
16:03 - 16:09C'est un nouveau marché,
où l'humiliation est un produit -
16:09 - 16:12et la honte, une industrie.
-
16:12 - 16:16La monnaie d'échange ?
-
16:16 - 16:18Les clics.
-
16:18 - 16:20Plus grande est la honte
plus nombreux sont les clics. -
16:20 - 16:24Plus nombreux sont les clics, plus
l'argent est engrangé via la publicité. -
16:25 - 16:28Un cycle très dangereux.
-
16:28 - 16:31Plus on clique sur
ce genre de contenus, -
16:31 - 16:34plus notre indifférence aux vies
des concernés grandit, -
16:34 - 16:38et quand l'indifférence grandit,
le nombre de clics aussi. -
16:38 - 16:43Entre-temps, certains
se remplissent les poches, -
16:43 - 16:45sur la douleur des victimes.
-
16:47 - 16:50Quand on clique,
on fait un choix. -
16:50 - 16:53Si on laisse se banaliser
l'humiliation publique, -
16:53 - 16:55elle semblera plus acceptable,
-
16:55 - 16:58et incitera au cyberharcèlement,
-
16:58 - 17:03les insultes, certains piratages
et l'intimidation en ligne. -
17:03 - 17:08Pourquoi ? Parce l'humiliation
est au cœur de ces pratiques. -
17:11 - 17:15Ce comportement est un symptôme
de la culture qu'on a créée. -
17:16 - 17:17Juste pensez-y.
-
17:19 - 17:21Un changement de comportement
-
17:21 - 17:23naît avec un changement
dans les croyances. -
17:23 - 17:26Nous l'avons vu avec le racisme,
l'homophobie, -
17:26 - 17:29et plein d'autres préjugés
tout au long de l'histoire. -
17:31 - 17:33Le changement des principes
sur le mariage homosexuel, -
17:33 - 17:37a permis à un plus grand nombre
de jouir des droits fondamentaux. -
17:37 - 17:40La prise de conscience écologique
-
17:40 - 17:42a poussé plus de gens à recycler.
-
17:44 - 17:46En ce qui concerne
la culture de l'humiliation, -
17:46 - 17:49nous avons besoin d'une
révolution culturelle. -
17:50 - 17:54Il faut arrêter cette mise à mort
qui est le cyberharcèlement, -
17:54 - 17:58une intervention s'impose,
sur Internet et dans la société. -
17:59 - 18:01La mutation commence
avec quelque chose de simple, -
18:01 - 18:03ce qui ne veut pas dire facile.
-
18:04 - 18:10Nous devons revenir aux valeurs
de compassion et empathie. -
18:10 - 18:15Il y a un déficit de compassion,
une crise de l'empathie en ligne. -
18:17 - 18:19Brené Brown, une chercheuse,
a dit : -
18:19 - 18:23« La honte ne survit pas à l'empathie. »
-
18:24 - 18:28La honte ne survit pas à l'empathie.
-
18:31 - 18:34J’ai vécu des jours noirs dans ma vie,
-
18:34 - 18:37et c'est grâce à l'empathie
et la compassion -
18:37 - 18:41de ma famille et de mes amis,
des professionnels qui m'ont aidée, -
18:41 - 18:44et parfois des inconnus,
qui m'a sauvée. -
18:45 - 18:49L'empathie d'une seule personne
peut tout changer. -
18:49 - 18:52La théorie de l'influence minoritaire
-
18:52 - 18:55du psychologue social
Serge Moscovici -
18:55 - 18:59dit que, même en petit nombre,
-
18:59 - 19:00lorsqu'on persévère,
-
19:00 - 19:03on peut créer le changement.
-
19:04 - 19:06On peut favoriser
l'influence minoritaire -
19:06 - 19:09sur Internet
si on tient nos positions. -
19:09 - 19:12Tenir nos positions implique
ne pas observer passivement -
19:12 - 19:18mais poster un commentaire positif
ou dénoncer une situation de harcèlement. -
19:18 - 19:23Croyez-moi, un commentaire aimable
aide à abattre la négativité. -
19:23 - 19:27On peut contrecarrer cette tendance
en soutenant des organisations -
19:27 - 19:29qui s'occupent de ces questions,
-
19:29 - 19:32comme la fondation Tyler Clementi
aux États-Unis, -
19:32 - 19:35Anti-Bullying Pro
au Royaume-Uni, -
19:35 - 19:38ou Project Rockit en Australie.
-
19:40 - 19:46On parle beaucoup du droit
à la liberté d'expression, -
19:46 - 19:48il faudrait parler davantage
-
19:48 - 19:51de la responsabilité qui
accompagne ce droit. -
19:52 - 19:54Nous voulons tous être entendus,
-
19:54 - 19:58mais on doit faire la différence
entre parler à bon escient -
19:58 - 20:02et dire n'importe quoi
pour attirer l'attention. -
20:04 - 20:07Internet est l'autoroute
de l'inconscient primitif, -
20:07 - 20:11mais montrer de l'empathie
en ligne bénéficie à tous -
20:11 - 20:15et aide à créer un monde
meilleur et plus sûr. -
20:16 - 20:19Nous devons communiquer
en ligne avec compassion, -
20:19 - 20:22suivre la presse avec compassion,
-
20:22 - 20:24cliquer avec compassion,
-
20:24 - 20:29nous mettre juste dans la peau
de la personne qui fait les gros titres. -
20:31 - 20:34Je voudrais finir sur
une note personnelle. -
20:35 - 20:38Au cours de ces derniers mois,
-
20:38 - 20:41la question qu'on m'a le plus posée
c'est « pourquoi ? ». -
20:41 - 20:45Pourquoi maintenant ?
Pourquoi sortir du bois maintenant ? -
20:45 - 20:48On peut lire l'arrière-pensée
derrière la question, -
20:48 - 20:52mais ma réponse n'a aucun rapport
avec la politique. -
20:52 - 20:57Ma réponse est, et reste,
qu'il était temps : -
20:57 - 21:00temps de cesser de prendre
des pincettes avec mon passé, -
21:00 - 21:03temps d'arrêter de vivre dans la honte,
-
21:03 - 21:06temps de me réapproprier mon histoire.
-
21:06 - 21:11Il ne s'agit pas juste de sauver ma peau.
-
21:11 - 21:15Quiconque subissant la honte
et l'humiliation publiques, -
21:15 - 21:17doit savoir quelque chose :
-
21:17 - 21:19on peut survivre,
-
21:19 - 21:21je sais que c'est dur,
-
21:23 - 21:25ce ne sera ni indolore, ni rapide,
ni facile, -
21:25 - 21:29mais si on s'accroche,
on peut changer la fin de l'histoire. -
21:31 - 21:33Traitez-vous avec compassion.
-
21:34 - 21:36On mérite tous la compassion,
-
21:36 - 21:42et vivre dans un monde plus
compatissant -
21:42 - 21:44aussi bien en ligne
que dans la réalité. -
21:44 - 21:45Merci pour votre attention.
-
21:45 - 21:48(Applaudissements)
- Title:
- Le prix de la honte
- Speaker:
- Monica Lewinsky
- Description:
-
En 1998, raconte Monica Lewinsky, « J'étais le patient zéro de la perte de réputation instantanée à l'échelle mondiale ». Aujourd'hui, pourtant, l'humiliation publique qu'elle a subie est devenue une constante. Dans cette courageuse conférence, elle analyse cette « culture de l'humiliation » qui est la nôtre, où la honte virtuelle se monnaye, et appelle à un changement de fond dans notre société.
- Video Language:
- English
- Team:
closed TED
- Project:
- TEDTalks
- Duration:
- 22:26
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eric vautier edited French subtitles for The price of shame | |
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eric vautier approved French subtitles for The price of shame | |
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eric vautier accepted French subtitles for The price of shame | |
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Marta de Tena edited French subtitles for The price of shame | |
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Marta de Tena edited French subtitles for The price of shame | |
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eric vautier declined French subtitles for The price of shame |