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La route est longue mais la voie est libre | Alexis Kauffmann | TEDxGeneva

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    Ma mère est d'origine grecque,
    mon père vient du Luxembourg.
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    Ils se sont rencontrés par hasard à Paris
    et me voici français.
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    Français au moment même où l'homme
    à la bonne idée de marcher sur la Lune,
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    mais la moins bonne idée
    de se l'approprier symboliquement
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    en y plantant le drapeau d'un pays.
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    À 15 ans, on me montre un ordinateur.
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    Cadeau d'anniversaire de mes parents.
  • 0:41 - 0:45
    Et là, rien.
  • 0:45 - 0:46
    Ou presque.
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    Je l'ouvre, je bidouille,
    je fais quelques programmes en basic.
  • 0:52 - 0:57
    Mais j'étais un garçon paresseux
    et pas très curieux.
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    À 20 ans, on me montre
    et m'explique cette formule magique :
  • 1:03 - 1:07
    la perfection mathématique,
    l'identité d'Euler.
  • 1:09 - 1:13
    Et là, rien.
  • 1:13 - 1:14
    Ou presque.
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    J'apprends quelques notions,
    je fais quelques démonstrations...
  • 1:18 - 1:23
    mais j'étais un étudiant paresseux
    et pas très curieux.
  • 1:25 - 1:27
    Je deviens professeur de mathématiques,
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    ce qui m'amènera en Afrique,
    à Paris, en banlieue parisienne -
  • 1:31 - 1:33
    pas le même métier, d'ailleurs -
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    et en Italie, pendant une dizaine d'années
    au lycée français de Rome,
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    ce qui est tout autre chose.
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    À 25 ans, on me montre Internet.
  • 1:49 - 1:52
    Et là, il se passe
    quand même quelque chose.
  • 1:53 - 1:55
    Je reste paresseux et pas très curieux,
  • 1:56 - 1:59
    mais je dois avouer
    que ça commence à m'intéresser.
  • 1:59 - 2:01
    Et puis, quand on est
    professeur de mathématiques,
  • 2:01 - 2:05
    ce n'est jamais idiot
    de se former à l'informatique.
  • 2:07 - 2:12
    À 30 ans, je lis sur le Web
    un article intitulé :
  • 2:12 - 2:17
    « Comment informatiser
    intelligemment les écoles ?»
  • 2:18 - 2:21
    Et là - ouf, il était temps -
  • 2:23 - 2:27
    là effectivement, il se passe vraiment
    quelque chose : une révélation.
  • 2:27 - 2:28
    Intelligemment.
  • 2:28 - 2:30
    D'où vient l'intelligence, ici ?
  • 2:31 - 2:34
    « Dans le logiciel libre, me dit l'auteur.
    - Le logiciel libre ?
  • 2:34 - 2:36
    Qu'est-ce qu'un logiciel libre ?
  • 2:36 - 2:38
    Un logiciel gratuit ?
  • 2:38 - 2:40
    - Non, non, un logiciel libre.
  • 2:40 - 2:42
    Rien à voir, un tout autre paradigme.
  • 2:43 - 2:44
    - Ah bon ?
  • 2:44 - 2:48
    - Mais oui, un logiciel libre
    qui garantit à l'utilisateur,
  • 2:48 - 2:53
    sans entraves, la liberté de l'utiliser,
    de l'étudier, de le modifier
  • 2:53 - 2:56
    et puis, de le copier, de le partager
    pour faire communauté. »
  • 2:59 - 3:00
    Waouh.
  • 3:01 - 3:02
    J'étais impressionné.
  • 3:02 - 3:06
    Je continue mes recherches et tombe
    sur le père fondateur du logiciel libre,
  • 3:06 - 3:07
    Richard Stallman,
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    qui ne me parle pas de technique,
    il me parle d'éthique.
  • 3:14 - 3:17
    Le mouvement du logiciel libre
    est un mouvement social.
  • 3:19 - 3:23
    Il commence invariablement ses conférences
    en français dans le texte ainsi :
  • 3:23 - 3:25
    « Je puis résumer
    le logiciel libre en trois mots :
  • 3:25 - 3:28
    (Avec l'accent anglais)
    Liberté, Égalité, Fraternité. »
  • 3:30 - 3:32
    Alors là vraiment je suis...
  • 3:32 - 3:34
    Là je me dis : « On tient quelque chose. »
  • 3:37 - 3:41
    Plus les nouvelles technologies
    vont se répandre,
  • 3:41 - 3:44
    plus elles vont imprégner nos vies,
    et plus on va avoir besoin
  • 3:45 - 3:48
    du logiciel libre, mais également
    de ses idées et ses valeurs.
  • 3:48 - 3:50
    J'en ai l'intime conviction,
    nous sommes en 1998.
  • 3:51 - 3:59
    Et nous n'étions pas si nombreux
    à l'époque à avoir cette intuition.
  • 3:59 - 4:01
    Sauf que qui dit logiciel libre,
    dit logiciel non libre.
  • 4:03 - 4:05
    Et, moi, malheureusement, zut alors,
  • 4:06 - 4:08
    je n'utilise que
    des logiciels non libres :
  • 4:09 - 4:12
    Microsoft Office - Word, Excel -
  • 4:13 - 4:17
    Photoshop, en version
    piratée qui plus est -
  • 4:17 - 4:19
    que cela reste entre nous -
  • 4:20 - 4:25
    le navigateur Internet Explorer
    et le système d'exploitation Windows.
  • 4:25 - 4:27
    J'avais un ordinateur avec Windows,
  • 4:27 - 4:29
    je ne m'étais pas posé
    la moindre question.
  • 4:30 - 4:34
    Je dois, après avoir eu cette révélation,
    je dois m'en libérer.
  • 4:34 - 4:39
    Alors, il existe des alternatives libres -
    merci les développeurs -
  • 4:40 - 4:44
    OpenOffice pour la bureautique,
    The Gimp pour le graphisme,
  • 4:44 - 4:46
    le navigateur Firefox
  • 4:46 - 4:49
    et évidemment le système
    d'exploitation libre GNU/Linux.
  • 4:49 - 4:52
    Mais, à l'époque,
    très peu de documentation.
  • 4:54 - 4:56
    Très, très peu, encore moins en français.
  • 4:57 - 4:59
    Peu de clarté, pas beaucoup de pédagogie.
  • 5:01 - 5:03
    On ne m'accompagne pas au changement.
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    On ne vient pas me tirer par la main,
    moi, petit utilisateur Windows,
  • 5:10 - 5:13
    pour m'aider à substituer
    mes logiciels non libres
  • 5:14 - 5:16
    par des logiciels libres.
  • 5:18 - 5:21
    Alors je prends des notes,
  • 5:21 - 5:24
    dès que je repère
    un logiciel libre intéressant,
  • 5:24 - 5:27
    je le garde dans un coin de ma mémoire
  • 5:28 - 5:31
    et puis je me dis que je vais raconter,
  • 5:33 - 5:36
    dans un coin du site de mon établissement
    scolaire en banlieue parisienne,
  • 5:36 - 5:38
    je vais raconter la chronique
  • 5:38 - 5:45
    de ma migration progressive
    et, je l'espère, réussie.
  • 5:47 - 5:51
    Voilà, Framasoft est né comme ça.
  • 5:53 - 5:59
    Et je dois dire que j'ai été très surpris
    parce que, ce que j'ai raconté là,
  • 5:59 - 6:05
    dans un petit bout d'Internet,
    ça a rencontré un certain public.
  • 6:05 - 6:07
    D'abord mes collègues,
    les collègues de mon établissement,
  • 6:07 - 6:12
    d'autres collègues enseignants
    et puis des personnes de tout bord,
  • 6:12 - 6:14
    puisque nous sommes sur Internet.
  • 6:15 - 6:18
    Échanges, collaborations, contributions...
  • 6:18 - 6:23
    Je m'aperçois que d'autres sont
    dans la même situation que moi,
  • 6:23 - 6:28
    se reconnaissent dans ma démarche
    et viennent me dire :
  • 6:28 - 6:31
    « Vous m'avez aidé
    à me libérer à mon tour,
  • 6:32 - 6:35
    à me déconditionner, à me désintoxiquer »,
  • 6:35 - 6:38
    disent-ils parfois -
    l'expression est un peu forte.
  • 6:39 - 6:42
    « Est-ce que moi aussi
    je peux vous prêter main forte ?
  • 6:45 - 6:46
    - Mais c'est merveilleux !
  • 6:46 - 6:47
    Tout ça bénévolement.
  • 6:47 - 6:48
    Bien sûr !
  • 6:48 - 6:51
    Mais faites, vous êtes
    le ou la bienvenue. »
  • 6:54 - 7:00
    Et ils seront de plus en plus nombreux.
  • 7:02 - 7:06
    Et, vous l'avez deviné,
  • 7:08 - 7:15
    ex personne paresseuse
    et pas très curieuse, tout a changé.
  • 7:16 - 7:21
    Je me rends compte
    qu'avec une idée forte -
  • 7:21 - 7:24
    le logiciel libre est une idée forte,
    comme il en arrive une dizaine par siècle,
  • 7:24 - 7:25
    selon moi -
  • 7:26 - 7:32
    avec une idée forte,
    avec de la passion, de l'écoute,
  • 7:32 - 7:35
    de la sueur et Internet,
  • 7:35 - 7:39
    on peut, ensemble,
    déplacer les montagnes.
  • 7:40 - 7:42
    Avec de la confiance aussi.
  • 7:42 - 7:44
    Et la confiance, elle vient du fait que
  • 7:45 - 7:50
    aucun pays, aucune
    multinationale, aucun individu
  • 7:50 - 7:55
    ne peut planter son drapeau
    sur un logiciel libre.
  • 7:55 - 7:58
    Il est, et restera pour toujours,
    un bien commun.
  • 8:00 - 8:03
    Et la confiance, elle vaut aussi pour moi.
  • 8:03 - 8:06
    Moi, tout d'un coup,
    là, je me donne à fond,
  • 8:06 - 8:10
    je me découvre des qualités
    pour accueillir, pour animer,
  • 8:10 - 8:14
    pour mettre les gens
    de bonne volonté en relation
  • 8:14 - 8:20
    et concrétiser des projets
    de plus en plus ambitieux.
  • 8:23 - 8:25
    Treize ans plus tard,
  • 8:27 - 8:28
    aujourd'hui donc,
  • 8:29 - 8:33
    Framasoft est devenu un vaste réseau
  • 8:33 - 8:37
    maintenu par une large communauté,
    de plusieurs centaines de bénévoles
  • 8:39 - 8:41
    et soutenu par une association
    à but non lucratif.
  • 8:46 - 8:50
    Il y a eu comme une sorte
    de cercle vertueux, contagieux.
  • 8:50 - 8:53
    L'entraide a appelé l'entraide,
    la contribution la contribution.
  • 8:53 - 8:59
    Et puis on a tous envie de rendre
    ce que le logiciel libre nous a donné
  • 8:59 - 9:01
    et d'agrandir le cercle des utilisateurs.
  • 9:03 - 9:08
    Parmi les projets,
    on a une maison d'édition.
  • 9:09 - 9:13
    À force de faire de la doc, on s'est dit :
    « Pourquoi pas en faire des livres ? »
  • 9:13 - 9:17
    La particularité, c'est que ces livres
    sont eux aussi libres.
  • 9:18 - 9:21
    Vous pouvez les acheter
    en librairie ou sur Internet,
  • 9:21 - 9:24
    mais vous pouvez aussi
    les télécharger dans leur intégralité
  • 9:25 - 9:27
    en version numérique, librement.
  • 9:27 - 9:32
    Les lire, les partager,
    « répandre la bonne parole ».
  • 9:33 - 9:35
    C'est là pour ça.
  • 9:35 - 9:38
    Et nous, notre objectif,
    c'est que ça se diffuse.
  • 9:40 - 9:44
    Autre projet, la communauté a développé
  • 9:46 - 9:48
    une clé bourrée de logiciels libres.
  • 9:49 - 9:54
    « A force de parler de logiciels libres,
    on va les mettre sur des supports DVD. »
  • 9:54 - 9:57
    Puis on les a mis sur des clés USB.
  • 9:59 - 10:01
    La particularité de cette clé,
  • 10:01 - 10:04
    c'est que non seulement elle contient
    des centaines de logiciels libres,
  • 10:04 - 10:07
    dont le système d'exploitation GNU/Linux,
  • 10:07 - 10:09
    que l'on peut tester en toute sécurité.
  • 10:10 - 10:12
    Non seulement elle contient
    de la culture libre,
  • 10:13 - 10:15
    car le logiciel libre m'intéresse,
  • 10:15 - 10:19
    mais aussi, ce sont les extensions
    du domaine du libre, j'ai envie de dire,
  • 10:19 - 10:22
    tel que Wikipédia, justement.
  • 10:22 - 10:24
    Il y a de la culture libre, de la musique,
  • 10:24 - 10:26
    des films libres, des photographies
  • 10:26 - 10:28
    et tous nos livres
    en version numérique sur la clé.
  • 10:28 - 10:31
    Et puis, on a poussé un peu,
  • 10:31 - 10:36
    on a réussi à mettre l'intégralité
    du Wikipédia francophone dessus.
  • 10:37 - 10:39
    Moi, cet objet me fascine littéralement.
  • 10:39 - 10:42
    La somme de tant de travail humain
    qu'il y a là-dedans,
  • 10:42 - 10:48
    le résultat de centaines de millions
    d'heures est mis à la disposition de tous.
  • 10:48 - 10:52
    Si un jour vous avez modifié ne serait-ce
    qu'une virgule sur Wikipédia,
  • 10:52 - 10:55
    su le Wikipédia francophone,
    vous êtes sur la clé.
  • 10:58 - 11:01
    Autre projet, et dernier exemple,
  • 11:01 - 11:04
    on développe aussi
    des services en ligne libres,
  • 11:04 - 11:07
    parce que les usages ont évolué,
    mais les risques également.
  • 11:11 - 11:15
    Il ne faut pas que Google et Facebook etc.
    occupent tout le terrain du Web.
  • 11:15 - 11:17
    Il faut re-décentraliser le Web
  • 11:17 - 11:21
    en étant respectueux de nos vies privées
  • 11:22 - 11:24
    et de nos données personnelles.
  • 11:24 - 11:28
    Framasoft, aujourd'hui,
    c'est une vaste communauté,
  • 11:28 - 11:32
    c'est un million de visites par mois,
    c'est une vingtaine de projets,
  • 11:32 - 11:35
    ce sont 10 serveurs,
    ce sont 250 000 messages sur le forum,
  • 11:35 - 11:39
    ce sont 2 000 billets de blog,
    ce sont 1 600 logiciels répertoriés,
  • 11:39 - 11:43
    c'est un million de téléchargements
    des versions numériques des livres mais...
  • 11:44 - 11:48
    le plus important,
    évidemment, il n'est pas là.
  • 11:48 - 11:50
    Le plus important,
    c'est l'aventure humaine,
  • 11:52 - 11:54
    et ça, je dois dire
  • 11:54 - 12:00
    que c'est quelque chose
    qui me transporte toujours autant.
  • 12:02 - 12:04
    Dans cette aventure humaine,
  • 12:04 - 12:10
    il y a évidemment
    la dimension « Je veux participer »,
  • 12:10 - 12:12
    il y aussi la dimension de gratitude.
  • 12:14 - 12:20
    Rares, trop rares,
    sont les domaines aujourd'hui
  • 12:21 - 12:27
    qui suscitent un tel enthousiasme
    et soulèvent de telles énergies.
  • 12:28 - 12:32
    L'aventure se poursuit,
    comme le souligne notre slogan
  • 12:33 - 12:35
    plein d'engagement et d'optimisme :
  • 12:35 - 12:37
    « La route est longue,
    mais la voie est libre. »
  • 12:38 - 12:42
    Et au-delà de tous ces chiffres,
    le plus émouvant, pour moi et pour nous,
  • 12:42 - 12:45
    ce sont tous ces témoignages de sympathie.
  • 12:46 - 12:50
    « Merci, j'ai découvert le libre
    grâce à Framasoft
  • 12:50 - 12:53
    et je pense, comme vous,
    qu'il peut profondément
  • 12:53 - 12:56
    et durablement, changer la société. »
  • 12:57 - 12:59
    (Applaudissements)
Title:
La route est longue mais la voie est libre | Alexis Kauffmann | TEDxGeneva
Description:

De Rome, à distance, Alexis a co-créé la communauté Framasoft dès 2004. Dix ans plus tard, c'est le principal réseau de partage d'outils pédagogiques sous licence libre sur le web. Chaque semaine, des milliers de contributeurs bénévoles y développent et diffusent des ouvrages pédagogiques, logiciels éducatifs, musiques, films, livres. L'occasion de découvrir tout un patrimoine de biens communs, immatériels et pourtant si utiles que Framasoft les diffuse aujourd'hui à des millions d'internautes francophones de par le monde.

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. En savoir plus : http://ted.com/tedx

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
13:11

French subtitles

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