Les princesses Disney et le cancer du sein : Amal Kouchkar à TEDxCasbah

Afin d’illustrer les facteurs augmentant le risque de contracter le cancer du sein, le Dr Kouchkar nous invite à deviner ensemble quelle princesse de Disney est la plus sujette à ce cancer. Elle conclue sa présentation en nous alertant sur le fait que « les princes » peuvent eux aussi être victimes de cette maladie.

Avant de rentrer dans le vif du sujet
et de parler de cancer du sein,

je voulais d'abord un peu
vous parler de l'organe.

Le sein en lui-même.

C'est un organe nourricier
par excellence -

j'ai oublié de vous dire

que ma présentation
est plutôt interactive,

donc j'aurais besoin
que vous m'aidiez à un moment donné

et que vous vous concentriez surtout.

Donc qu'est-ce que vous voyez ici ?

Cette image vous rappelle quoi ?

Un arbre, oui, mais pour moi non.

Ça fait un sein.

Je vois des seins partout d'ailleurs.

(Rires)

Donc, les petites feuilles au bout

seraient les usines à lait.

Les petites branches
et les grosses branches,

seraient les canaux

qui vont ramasser le lait
et le ramener vers le mamelon.

Donc voici mon sein.

Plus sérieusement,
on peut visualiser le sein ainsi :

un enchevêtrement de canaux

qui finissent tous au niveau du mamelon.

Et si on injecte du colorant,

on verra que le sein
est fait de plusieurs lobes différents

qui finissent vers le mamelon.

Celles-ci on était des plaques
qui ont été réalisées en 1840.

Donc c'est un [...] d'anatomie

réalisé par Sir Bart

qui avait dessiné le sein.

Et en 2004, on n'a pas fait mieux,

c'est une image numérisée
qui montre les canaux,

ces différents canaux
et ces différents lobes,

et sachez que c'est
à l'intérieur de ces canaux

que va se développer le cancer du sein.

Alors, j'ai quelques images
à vous montrer,

ce sont des coupes de sein
par transparence en trois dimensions.

Ici, on voit le mamelon

et tous les gros canaux dont j'ai parlé

qui arrivent au niveau du mamelon.

Ceci est un canal,
vu à fort agrandissement,

où va circuler le lait.

Et je vous parlais
de ces petites usines à lait,

eh bien, elles sont ici,

voilà, il y en a plein,

et qui déversent le lait
au niveau des canaux.

Et puisque on parle
de cancer du sein,

voici une image d'un petit cancer
qui fait quatre millimètres,

voilà le fameux cancer du sein,

et il est situé
pas loin de la peau qui est ici.

Alors, maintenant,
j'ai divisé mon sujet ce soir

en parlant d'abord
de l'histoire du cancer du sein.

Donc dans l'histoire,
comment le cancer du sein était vu ?

On sait que depuis l'antiquité,

les médecins savants
essayaient de comprendre son origine

et surtout comment le traiter.

En remontant très loin
au temps des pharaons et des Égyptiens,

on notait déjà dans les papyrus,

on parlait de huit cas
de ces cancers du sein,

bien sûr, qui n'étaient pas curables.

Et cette image vous montre
les différents instruments chirurgicaux

qu'utilisaient les Égyptiens
en ce temps-là.

Et il faut savoir
que c'est grâce à Hippocrate

que le nom « cancer »
nous est arrivé,

car il l'a comparé à un crabe,
« carcinoma, »

d'où le nom cancer.

Au temps des Romains,
monsieur Celsius

qui ne s'est pas occupé
que de température,

était le premier à nous parler
de la notion de métastase.

C'est-à-dire la présence
à distance du cancer

d'autres cancers.

Ce qui fait la gravité de la maladie.

Un autre Romain, lui,
a incriminé la théorie de la bile.

Cette théorie
nous paraît maintenant farfelue,

mais en ce temps-là, ça tenait la route,

et ils utilisaient plein de mixtures
afin de traiter ce cancer.

Il a été aussi le premier

à introduire la notion d'alimentation
comme facteur de risque.

Alors il s'est rendu compte

que les femmes qui habitaient
au nord de l’Europe,

avaient moins de cancers

que les femmes qui habitaient
au nord de l’Afrique.

Ce qui est tout le contraire actuellement.

Et ces Nord-Européennes
mangeaient beaucoup de lait,

alors que les dames
qui habitaient au nord de l'Afrique

mangeaient beaucoup de viande.

D'où il a soulevé
cette notion de risque alimentaire.

Arrivons à l'époque arabo-musulmane,

où plusieurs savants et médecins arabes,
chirurgiens entre autres,

ont jalonné les bases
de la chirurgie moderne.

Al Razi, lui, mettait en garde
contre une exérèse incomplète du cancer.

Abulcassis, lui, conseillait une exérèse
à des stades de tout début.

Ibn Sina ou Avicenne,

lui, ne recommandait pas

de réaliser une intervention chirurgicale.

À l'époque de la renaissance
et comme le lieu s'y prête,

beaucoup de peintres
ont dessiné malgré eux

des femmes
qui présentaient un cancer du sein,

mais eux ne le savaient pas.

Et donc ces peintures
qui sont exposées dans le monde entier

nous montre des seins,

mais on voit par exemple sur ce sein

qu'il y a une rétraction du mamelon
avec une voussure.

Donc cette dame avait un cancer du sein
mais elle ne le savait pas.

Cette dernière non plus,
où le sein paraît figé,

il n'est pas souple.

Donc en ce temps-là,
le traitement était chirurgical

mais sans anesthésie.

Et voyez, regardez ces images

de ces instruments assez barbares
d'ailleurs.

Les remèdes naturels étaient divers.

Ce n'est même pas la peine de les citer.

Alors à l'avènement du 19ème siècle,

le microscope a été inventé

et on s'est rendu compte
que c'était une pathologie cellulaire.

C'est la cellule qui était en cause.

Donc on eu la chirurgie,

l'avènement de la pathologie,

et Sir Belson, en 1896,
a découvert accidentellement,

c'est toujours comme ça
en matière de science,

en faisant une castration,

en enlevant les ovaires à une dame
qui avait un cancer du sein,

le cancer s'est mis en rémission,
il a arrêté de progresser.

D'où est venue l'idée
qu'il y a une hormono-dépendance,

que les hormones
sont la cause de ces cancers.

En 1937,
c'est l'avènement de la radiothérapie,

de la chimiothérapie
dans les années 50,

et début 2000, des thérapies ciblées.

C'est-à-dire des médicaments
ou des drogues que l'on administre

qui vont aller cibler
la cellule cancéreuse,

la tuer elle-même
et ne pas tuer tout le reste des cellules

comme le fait la chimiothérapie.

Maintenant arrivons
à l'histoire du cancer du sein.

Alors je vais vous la présenter
d'une certaine manière.

Qu'est-ce qu'on sait ?

On sait qu'une femme sur huit
va avoir un cancer du sein.

D'accord. Alors,
qui de ces héroïnes de Disney

risque d'avoir un cancer du sein ?

Et ça, c'est ce qu'on va voir ensemble.

Donc si l'on prend Jasmine et Mulan,

elles auront moins de risque
d'avoir un cancer du sein.

Pourquoi ?

Parce qu'elles font parties
des régions du monde

où l'incidence est la plus faible.

On sait qu'au niveau
de l’Europe occidentale,

les États-Unis, l'Australie,

l'incidence est très forte,

alors que dans le reste du monde,
elle l'est beaucoup moins.

L'âge.

Il est rare avant 30 ans,

et le risque augmente
après la cinquantaine,

après la ménopause.

Pour l'alimentation.

Comme pour tout le reste des cancers,

l'alimentation est importante.

L'obésité et la consommation
de graisses saturées,

alcool et tabac ensemble,
et des pesticides, sont incriminés.

Alors malheureusement pour Blanche-Neige,

bien qu'elle mange une pomme,

on sait, cinq fruits et légumes
par jour c'est bien, (Rires)

mais cette pomme était toxique.

Donc je pense que ses risques
vont être un peu plus augmentés.

Et hier, ma petite fille de 11 ans

me voyant passer les slides,

m'a dit : « Maman !

Blanche-Neige risque d'avoir
un cancer du sein ? »

Je lui ai dit : « Non, c'est juste ... »

« Maman, je ne la verrai plus
de la même manière Blanche-Neige.

C'est fini. »

Donc pour l'activité physique,

il paraît que ça diminue
le risque de cancer de 35 %.

J'ai trouvé que l'exemple de Pocahontas

qui faisait du Canoeing
et qui courait dans la forêt

était adéquat.

L'indice anthropométrique.

Eh bien, les femmes qui ont une taille
de plus de 10 cm

par rapport à la moyenne,

ont un risque aussi
de développer ce cancer.

Quant aux antécédents familiaux,

une histoire familiale,
quelle que soit la branche,

paternelle ou maternelle,

sœur, tante, mère ou grand-mère,

augmente le risque de cancer du sein

et surtout si certains gènes sont mutés.

Rappelez-vous l'histoire d'Angelina Jolie,

qui est obligée
d'enlever les deux seins

de mastectomie prophylactique,

parce que sa mère
avait un cancer du sein

et elle avait un gène qui était muté.

Donc il y a une anomalie dans son gène.

Les facteurs hormonaux.
On a parlé tout à l'heure d'hormones.

Donc les femmes
qui ont des règles précoces

et une ménopause tardive,

auront un risque plus élevé.

Par contre si elles ont
des grossesses multiples

et avant la trentaine,

elles sont protégées
contre le cancer du sein.

Quant à l’allaitement,
les contraceptifs oraux

et les traitements
hormonaux substitutifs,

il y a des débats
et les travaux ne sont pas bien validés.

Alors, qui dit cancer du sein dit femme.

On est tous d'accord.

Mais, sachez que les hommes
peuvent être atteints,

et que 1 % des hommes
peuvent avoir un cancer du sein.

Lorsque j'ai présenté un travail

sur le cancer du sein
chez l'homme en Algérie à l’étranger,

le chairman, le président de séance,

m'a dit : « Madame,
vous avez jeté un froid dans la salle ! »

Sachez que cette salle
était faite de médecins pathologistes,

alors je me demande
comment va être la réaction

des hommes de cette salle ce soir.

(Rires)

15 à 20 % des hommes atteints
ont une histoire familiale.

S'ils ont une sœur qui est atteinte,
le risque est plus élevé,

et si la mère et la sœur
sont atteintes en même temps,

le risque avoisine les dix.

En Algérie.

Le premier centre
anticancéreux en Algérie

est celui du CPMC,

le Centre Pierre-et-Marie-Curie d'Alger.

C'est lui qui drainait et traitait
tous les cancers du sein

de tout le territoire.

Mais il y a quelques années,
ça s'est un peu décentralisé,

et on les traite
un peu partout dans le territoire.

Pourquoi ? Tout simplement
parce que le taux d'incidence

ne fait qu'augmenter chez nous.

Regardez la courbe :
elle parle d'elle-même.

Et sachez que dans quelques années,

nous allons rejoindre
les taux d'incidence des occidentaux.

C'est le seul moment
où nous les Algériens

on va rattraper les occidentaux,
(Rires)

mais malheureusement,
pas du tout dans le bon sens.

On a une particularité
chez nous en Algérie,

c'est l'âge.

Eh bien, sachez
que les femmes chez nous

quand elles développent un cancer du sein,
c'est dix ans plus jeune que les autres.

Algériennes, Tunisiennes, Marocaines,
c'est au nord de l'Afrique,

elles ont des cancers
entre 45 et 55 ans,

alors qu'en Europe,
c'est entre 55 et 65 ans.

On ne sait pas pourquoi,
on ne l'a pas encore expliqué,

les gens cherchent.

Résumons.

Quelles sont les femmes
qui auront le moins de risque

de développer un cancer ?

Jeunes, asiatiques et africaines,
pas d'antécédents familiaux,

règles tardives,
beaucoup de grossesses,

allaitant ses enfants,

petites et minces.

Maintenant c'est à vous.

Dites-moi parmi ces huit,

laquelle aura le moins de risque
de développer un cancer du sein ?

Qui ?

Aucune ?

Si, toutes.

Encore ...
Audience : Pocahontas.

A. Kouchkar : Pocahontas,
parce qu'elle faisait du canoeing ?

Non, moi j'ai opté pour Jasmine.

Elle est petite -

il y a des gagnants dans la salle.

Elle est petite, elle est mince.

Comme elle vient
d'un monde arabo-musulman,

elle va sûrement se marier assez tôt,

avoir beaucoup d'enfants,
les allaiter.

Voila, donc ça,
c'est des facteurs qui l'aident.

Je vous remercie.

(Applaudissements)