Comment les bibliothèques se transforment et transforment les communautés | Ketzie Diaz | TEDxUCR

Pensez-vous que les bibliothèques sont des salles remplies de livres avec des petites vieilles dames qui les gardent ? Réfléchissez encore. La bibliothécaire Ketzie Diaz explore comment les bibliothèques se transforment chaque jour pour renforcer et sauver les communautés.

Ketzie Diaz est artiste et bibliothécaire au Palos Verdes Library District. Elle a reçu plusieurs subventions de l'État pour apporter des services de bibliothèque dans sa communauté, y compris une bibliothèque mobile pop-up et a présenté lors de conventions d'associations de bibliothèques nationales et internationales des services de bibliothèque uniques. Sa partie préférée de bibliothécaire est de travailler avec des artistes locaux pour les aider à présenter leur travail au public en les mettant en valeur dans la bibliothèque et en les aidant à présenter des programmes et des ateliers enrichissants pour la communauté.

Elle croit que les bibliothèques construisent des communautés en offrant un accès gratuit au savoir, à l'émerveillement et aux rêves pour tous.

Cette conférence a été donnée lors d'un événement TEDx utilisant le format de conférence TED, mais organisé indépendamment par une communauté locale. En savoir plus sur https://www.ted.com/tedx

Je vais commencer aujourd'hui

avec l'une de mes citations favorites
sur la bibliothèque.

« La bibliothèque est l'endroit qui
rassemble les pires gens de l'histoire.

Ils sont méchants, retors,
impolis, et très cultivés,

ce qui les rend très dangereux. »

Comme Leslie Knope, la plupart des gens
ont une image bien spécifique de ce lieu :

totalement silencieux,

et une bibliothécaire -
portant habituellement des lunettes -

qui vous fixe du regard si vous lachez
un livre et vous gronde si vous murmurez.

Je suis ici pour vous dire que
la bibliothèque que vous croyez connaitre

n'est pas celle d'aujourd'hui.

Je ne pense pas

que la bibliothèque est l'endroit qui
rassemble les pires gens de l'histoire,

mais je suis d'accord pour dire que nous
sommes cultivés et dangereux.

Les bibliothécaires ne sont pas les dames
silencieuses et calmes de notre enfance ;

ce sont des alliés bienveillants de la
communauté et de fervents militants.

Les bibliothèques se sont réinventées

afin de soutenir les communautés
et la démocratie, et les aider à survivre.

Ma relation avec la bibliothèque
a commencé quand j'étais jeune.

J'y allais tous les quinze
jours avec mon père,

pour dévorer livre après livre.

J'adorais aussi dessiner,

et je m'asseyais à la vieille table ronde
avec mes cahiers et livres d'art.

Copiant les toiles de Picasso et de Monet,

j'apprenais à dessiner des visages,
des arbres et des fleurs.

Et ensuite, peut-être comme vous,
j'ai grandi et j'ai arrêté d'y aller.

Je suis allée au lycée, à l'université,
j'ai réussi mon diplôme.

Puis, j'ai fait l'erreur de prendre
le premier emploi qu'on m'a offert.

Quinze ans plus tard, je faisais toujours
un travail que je détestais,

je forçais les gens à acheter des choses
dont ils n'avaient pas besoin,

et je sentais que je m'étais perdue
en chemin, que j'avais perdu ma voix,

et j'étais incapable de poursuivre
mes passions.

Alors j'ai démissionné.

Avec aucun projet en vue
et un petit bébé,

J'ai pris un mi-temps à la bibliothèque.

J'ai commencé par remplir les étagères,
aider les gens dans leurs recherches,

faire des recommandations de lecture
et gérer les retours de livres.

Peu de temps après,
j'ai travaillé à temps plein,

je suis retournée à l'école pour obtenir
une maîtrise pour devenir bibliothécaire.

Je gère à présent une équipe
dans une bibliothèque.

Outre les clubs de lecture,

j'aide à l'achat de livres
pour la bibliothèque.

Et - la partie préférée de mon travail -

j'accueille des expositions d'art
et je tiens des ateliers.

Depuis, j'ai réalisé que ce ne sont plus
les bibliothèques de notre enfance ;

elles ont changé.

Les livres et les bibliothécaires
sont certes encore là,

mais il y a eu une nette amélioration,
non seulement au niveau sonore

mais aussi par rapport aux activités.

Et tout comme la bibliothèque a changé,
elle m'a changée.

Je sais maintenant que c'est le lieu
où je veux être tous les jours,

où il n'y a pas de limite à
ce que je peux apprendre,

et où je peux décider quoi apprendre.

La bibliothèque m'a permis de trouver
ma voie, d'explorer mes passions

et d'aider d'autres personnes
à explorer les leurs.

Des gens pourraient dire,

« Nous n'en avons plus besoin.

Plus personne ne lit.

Les librairies disparaissent.

Nous avons nos smartphones munis
de Google et d'Internet.

À quoi servent-elles ? »

Mais c'est tellement faux.

Les bibliothèques ont évolué.

Elles ont une utilité

et sont plus importantes et utiles
à la communauté et à la démocratie

que jamais.

En 2016, le centre de recherche
Pew a estimé

que 66 % des Américains pensent que fermer
une bibliothèque publique

aurait un impact négatif
sur la communauté.

Tous les jours, les bibliothèques offrent
des espaces libres

pour apprendre,
s'enrichir et s'inspirer.

Allez dans une bibliothèque publique,

vous remarquerez cette hausse d'activité.

Les gens explorent les étagères,

demandent de l'aide pour leurs recherches,

participent à des travaux de groupe,

assistent à l'heure du conte,

lisent et jouent avec leurs enfants.

Certains y tiennent des entretiens
de recrutement

ou encore des réunions d'affaires.

Bien que ces activités soient typiques

des bibliothèques, d'une certaine manière,

celles-ci se sont transformées

et jouent un nouveau
rôle dans leurs communautés

pour les aider à survivre et les sauver.

En voici quelques exemples.

Selon Feeding America, un enfant sur
quatre souffre de la faim chaque jour.

Leur seule source de nourriture est
le repas gratuit de l'école.

Qu'en est-il lorsque ces enfants
sont en vacances l'été ?

Eh bien, les bibliothèques
ont pris le relais,

et en Californie,

plus de 130 bibliothèques servent
des repas à plus de 200 000 enfants.

Pendant que ces enfants sont
à la bibliothèque,

ils peuvent s'inscrire au programme
d'été de lecture,

assister à l'heure du conte

ou aux ateliers STEM pour y apprendre
à construire des robots.

Les enfants et leurs familles participent
aux activités de la bibliothèque

qui sont souvent proposées en partenariat
avec d'autres organismes locaux,

tels le service d'incendie
ou l'université.

Voici quelques commentaires des enfants
qui ont participé au programme :

« Je voudrais remercier ceux

ceux qui m'ont aidé à lire, à me nourrir
et à sentir en sécurité. »

« C'est super de faire partie d'un
programme fondé sur la bienveillance. »

« Ce programme me fait sentir que
la communauté se soucie de nous. »

Ce sont des enfants.

Il est clair que pour ces enfants
et leurs familles

les bibliothèques offrent
un ensemble complet :

nourriture, éducation, espace sûr
et services communautaires.

Elles y parviennent en remplissant
des rôles non traditionnels,

mais ayant comme but d'aider
les communautés à survivre et à prospérer.

D'août à novembre 2014,

une bibliothèque a aidé une communauté
lors d'une tragédie.

Des émeutes avaient éclaté,

des contestations et des vigiles
se poursuivaient dans Ferguson, Missouri.

C'était après que les policiers
aient tiré sur Michael Brown

et la décision de non-inculpation
de ces mêmes officiers.

Ils ont dû appeler la garde nationale
en renfort.

C'était le chaos total dans les rues.

Les magasins et les écoles étaient fermés.

J'ai suivi les nouvelles à la télé

et j'en ai vu diffusées
sur les réseaux sociaux.

J'étais attristée et bouleversée
par ce que je voyais.

Mais un article sur une bibliothèque
est apparu dans mon fil d'actualités.

Durant ces temps incertains,

l'un des seuls bâtiments resté
ouvert dans la communauté

était la bibliothèque municipale
de Ferguson.

Gérée par Scott Bonner, la bibliothèque
est restée ouverte 24 heures sur 24

pour offrir un espace sûr aux enfants
ainsi qu'à leurs familles.

La bibliothèque a organisé du bricolage,

tenu des spectacles de magie,

créé des kits de guérison qu'ils
pouvaient emprunter.

Ils ont organisé une exposition d'art
pour permettre aux artistes de s'exprimer.

Ils ont apporté leur aide aux adultes
et aux entreprises locales

pour les aider à se remettre sur pied.

Bonner aurait pu décidé
de fermer boutique,

comme tant d'autres l'avaient fait,

mais il savait que la bibliothèque
avait le devoir

d'aider cette communauté
à survivre et à guérir.

Les habitants de Ferguson l'approuvaient.

La bibliothèque était la seule à
fonctionner pendant cette crise.

Ces fâcheux événements ont vraiment changé
mon idée sur l'utilité d'une bibliothèque.

Le fait qu'une bibliothèque
soit restée ouverte

et ait accueilli étudiants et enseignants
quand l'école n'a pas repris

a donné des résultats extraordinaires.

La bibliothèque a beaucoup apporté.

Elle continue d'être l'étoile
étincelante de positivité

de la ville de Ferguson.

À tout le moins,

après ce que la communauté a traversé

et ce qu'elle a fait pour permettre
un retour à la normale,

on peut maintenant dire qu'elle est
certainement utile.

Les bibliothèques se réinventent pour
aider les communautés à prospérer.

mais elles ont intensifié leutrs efforts
quand d'autres ne le font pas

pour aider les communautés à survivre.

Vous savez que vous pouvez
y emprunter des livres,

utiliser votre tablette ou ordinateur.

Vous pouvez y apprendre
à utiliser une imprimante 3D

ou assister à un programme
sur comment obtenir la citoyenneté

ou parler à un bibliothécaire

pour savoir comment déterminer
les fausses informations des vraies.

Mais les bibliothèques offrent aussi
des repas aux enfants.

Elles offrent un espace sûr
pendant des temps incertains

et organisent des dialogues
entre des groupes divisés.

Leur personnel comprend
des travailleurs sociaux

afin d'aider les sans-abri
et les personnes défavorisées.

Elles font de leurs bâtiments
des espaces sûrs

pour les immigrés, les réfugiés
ainsi que pour les communautés LGBTQ.

Les bibliothèques se sont réinventées

pour aider les communautés
à survivre et à prospérer.

Les bibliothèques offrent aussi
une liberté pour tous,

pas seulement au niveau du porte-monnaie -

parce que, comme vous le savez peut-être,
elles sont entièrement gratuites -

elles vous laissent également
une liberté totale

relatives aux connaissances que
vous recherchez et obtenez.

Les bibliothèques pensent que la liberté
de lire ce que vous voulez

fait partie de vos droits fondamentaux
selon le Premier amendement.

Les bibliothèques ont toujours
la bonne réputation

d'être un organisme impartial,

mais nous sommes tout sauf impartiaux.

Les bibliothèques se battront pour votre
droit d'accéder à la vérité,

de lire ce que vous voulez

et d'exprimer votre avis.

Les bibliothèques ont toujours maintenu
le respect de la vie privée,

mais c'est plus récemment qu'elles ont dû
se battre pour cela.

Cette citation de 1999 de la romancière
Doris Lessing illustre cette idée :

« Dans une bibliothèque, vous êtes libre,

vous n'êtes pas confiné par les climats
politiques temporels.

C'est l'institution la plus démocratique
parce que personne - vraiment personne -

ne vous dit quoi lire et quand
et comment. »

En 2001, suite au 9/11

le gouvernement américain a fait passer
la loi Patriot, lui permettant ainsi

d'examiner vos relevés téléphoniques.

Vous ne savez peut-être pas

que les bibliothèques ne gardent pas
d'historique de vos emprunts,

donc le gouvernement ne peut
s'emparer d'aucuns reseignements.

Vous seriez surpris de l'apprendre,
mais notre société lit plus qu'avant.

Mais bien que nous lisions plus
grâce à Internet,

nous ne lisons pas intelligemment ;

fes études récentes l'ont démontré.

Nous privilégions l'efficacité
et l'immédiateté

aux dépends de la compréhension
et de l'interprétation.

Nous acceptons plus facilement
toute information, vraie ou fausse,

s'affichant sur nos smartphones
ou réseaux sociaux.

Cela aboutit, au mieux,
à un sentiment de complaisance

et, au pire, au partage de désinformations

et à des actions basées sur celles-ci,

avec souvent des effets dévastateurs.

Accéder à la vérité permet
de prendre de meilleures décisions,

de meilleures opportunités

et enfin une meilleure vie pour tous.

Mais avec ce raz-de-marée d'informations
qui nous submergent chaque jour,

comment savoir ce qui est faux ? Quelle
est l'alternative ? Quelle est la vérité ?

Selon l'étude Pew mentionnée plus tôt,

77 % des Américains estiment

que les bibliothèques sont essentielles
pour obtenir des ressources fiables.

Accéder à la vérité devrait être
considéré comme un droit

et les bibliothécaires, comme je l'ai dit,
sont des défenseurs des droits humains.

Les bibliothécaires ont toujours été

les gardiens et les détenteurs
de la flamme du savoir et de la vérité,

mais c'est une flamme fragile

qui peut facilement s'éteindre

et nous commençons à la voir vaciller
maintenant, sous nos propres yeux.

Mais tout comme les bibliothèques se sont
mobilisées contre la loi Patriot,

pour aider les citoyens de Ferguson

et pour nourrir les enfants,

elles se mobilisent une nouvelle fois

et se réinventent pour lutter contre
la définition changeante de la vérité.

Elles le font à haute voix,

comme le fait la bibliothèque
publique de Dallas

qui s'est joint aux journalistes
pour créer

Storytelling Without Borders [littérature
orale sans frontière] .

Ce programme éduque les adolescents
et jeunes adultes comment

consommer les medias de façon réfléchie
et rechercher des informations précises.

La bibliothèque d'Oakland, comme
beaucoup d'autres bibliothèques,

a créé des sites Internet

pour aider les gens à distinguer
les vraies informations des fausses.

L'Association américaine
de bibliothèques [AAB],

a récemment mis à jour le test CRAAP
[évaluation de l'actualité,

la fiabilité, l'autorité et la finalité
des informations]

un guide pour aider les gens
à évaluer l'information.

AAB recommande

que la partie « autorité »
soit scrutée de plus près,

et vous devez voir au-delà du titre
et de la fonction de la personne,

tel que directeur,
sénateur ou président.

L'Association américaine
de bibliothèques

a aussi créé des campagnes sur les réseaux
sociaux pour aider les bibliothèques

à rappeler au public l'importance
d'information et de connaissance précises,

et de la vérité.

Ces temps-ci, les bibliothèques entendent
de plus en plus de mots

tels que : couper, limiter, nier,

restreindre, réduire, atténuer, diminuer,
interdire.

Ces mots ne font pas partie des énoncés

sur lesquels se fondent la croyance
et la pratique des bibliothèques.

Les mots accès, précision, ouverture,

gratuit, tous, diversité, transformation,

font partie de monde de la bibliothèque

et cela aide à soutenir la communauté
et la démocratie.

En pensant aux bibliothèques,

j'espère que vous penserez que ce sont des
lieux qui se battent pour les communautés

et pour les droits humains.

Si vous êtes passionné
de votre communauté

ou des droits humains,

venez à la bibliothèque et soutenez
ce que nous faisons.

Les bibliothèques sont devenues
des lieux de militantisme.

Les bibliothécaires sont devenus
des militants.

Je suis bibliothécaire.

Je n'aurais pas pu imaginer un meilleur
moyen de passer ma vie à vous défendre.

Merci.

(Applaudissements)