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On se levait entre minuit
et une heure du matin
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et on travaillait toute la journée
pour préparer l'argile à mouler.
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On alignait les briques pour qu'elles
puissent sécher et ensuite on les retournait.
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J'aime lire,
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mais mon père devait m'emmener
travailler au four à briques
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parce qu'il n'avait pas d'argent.
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les enfants engagés dans les fours
à briques sont pénalisés de bien des manières.
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Ils sont privés de leur droit
fondamental à l'éducation,
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indépendamment de leur
participation au travail ou non.
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Leur santé se trouve fortement impactée.
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Ils ne vont pas bien.
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Mon aîné a 14 ans,
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le second 9 ans et le dernier 7 ans.
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Les enfants doivent travailler pour pouvoir manger.
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Ils n'ont pas le choix.
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La qualité de l'eau, stagnante et souillée,
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ne permet ni le lavage des
ustensiles, ni celui des vêtements.
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Elle est inutilisable.
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Notre journée commence
à 1 h du matin. D'abord on travaille,
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puis on prépare nos repas et on déjeune.
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Après deux heures de pose
on se remet au travail.
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On prépare l'argile et
on moule les briques dans des caisses.
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"Anti-Slavery International" s'est engagé dans la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants
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dans l'industrie des fours à briques,
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agissant à la fois au niveau des zones d'origine et de destination
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des migrants saisonniers.
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Nous intervenons dans trois États spécifiques : Chhattisgarh, l'Uttar Pradesh et le Punjab.
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J'ai quatre enfants.
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Ils sont tous partis au Pendjab pour travailler
dans des fours à briques
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Moi je reste seul à la maison.
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Sur notre terre, la survie est
difficile en raison des ressources limitées.
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C'est pourquoi beaucoup de gens vont s'installer ailleurs pour gagner leur vie,
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car le gouvernement ne fait rien.
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Que ferait-il?
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Les marchands s'emparent
de la totalité de l'aide alimentaire.
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Les gens n'ont pas d'autres choix
que de partir pour échapper à la famine
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mais ils survivent à peine
et reviennent les mains vides.
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C'est un cercle vicieux.
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Il existe un véritable déni
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autour du système
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de servitude pour dettes
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qui non seulement ne change pas
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mais tend même à s'aggraver
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à mesure que la nature de cette servitude évolue.
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Si le gouvernement ne prend pas conscience
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de cette réalité, le problème perdurera.
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Le gouvernement considère que les travailleurs sont libres de partir à tout moment.
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Ils ont gardé une vision archaïque de l'esclavage,
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qui consiste à retenir
physiquement les travailleurs.
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Mais la situation a changé.
Leurs libertés restent entravées,
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mais les moyens utilisés
pour les asservir sont différents.
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Ils incluent la rétention
des salaires assortie de menaces implicites
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de la part des patrons
et propriétaires des fours à briques.
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Après des décennies d'investigation sur la servitude au sein de l'industrie des fours à briques,
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nous avons constaté que de nombreuses problématiques
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découlent du système salarial en vigueur dans ce secteur:
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une rémunération à la pièce qui ne prend en compte que la valeur des briques
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au détriment des êtres humains.
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Les travailleurs perçoivent un salaire en fonction du nombre de briques moulées,
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peu importe le nombre de mains ou d'heures
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consacrées à cette fabrication.
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C'est ainsi que fonctionne
l'industrie des fours à briques.
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Un système qui ne prend pas en compte le travail des femmes,
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lesquelles ne sont jamais rémunérées,
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et qui contraint les enfants a travailler.
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Le recours au travail des
enfants est même encouragé,
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car sans leur contribution,
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il serait impossible d'atteindre
le niveau de production requis
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pour le salaire minimum.
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Les ouvriers, qu'il s'agisse
des mouleurs, chargeurs,
bruleurs ou tireurs de briques,
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ne perçoivent aucune rémunération.
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les promesses de paiement
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n'ont pas été tenues
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malgré nos efforts acharnés sur le site.
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J'ai trois enfants,
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deux filles d'un an et de quatre ans,
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ainsi qu'un fils du même âge.
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Tous ont été de m'accompagner.
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Notre détresse était telle
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que nous n'avions plus le moindre sou en poche.
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Nous avons poursuivi le moulage des briques et terminé notre travail,
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mais le paiement promis ne s'est jamais concrétisé.
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Nous manquions cruellement de nourriture.
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La situation est particulièrement
problématique pour les femmes,
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car il n'y a ni toilettes, ni salle de bain,
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Elles ne bénéficient d'aucune intimité
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alors qu'elles en ont particulièrement besoin.
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Le travail des femmes est
souvent ignoré, non comptabilisé
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et rarement rétribué.
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il n'est tout simplement pas reconnu.
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Nous avons travaillé pendant trois ans pour notre patron
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et n'avons toujours pas été payées.
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Cette année, nous avons
décidé de ne plus y retourner.
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Le patron a déposé plainte et réclame un dédommagement de 125 000 roupies.
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Il envoie la police chez nous deux fois par jour,
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il menace de s'en prendre à mes enfants
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et de les priver de la possibilité de travailler.
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Il me harcèle au téléphone, profére des injures
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et menaçe d'enlever mes filles.
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Douze membres de notre
famille étaient employés dans les fours,
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assurant le transport
et le stockage des briques cuites.
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On travailliait sans relâche, jour et nuit,
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manipulant des briques brûlantes.
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Seules les mains et les âmes
de nos enfants, peuvent témoigner
de la douleur infligée par ces briques.
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Elles étaient si chaudes
qu'elles nous brulaient les mains.
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Nos enfants ne pouvaient
même plus utiliser leurs mains pour manger.
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La police est intervenue
pour nous demander de payer l'employeur
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et nous a interrogé
sur les motifs de notre refus.
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C'est une plainte abusive.
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Avec quel argent pourrions-nous payer ?
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La machine judiciaire, plus particulièrement la police,
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inflige des sanctions aux citoyens.
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Les magistrats eux-mêmes
ne semblent pas comprendre
la notion de servitude pour dettes.
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Ils refusent de la qualifier comme telle. Le fait que l'employé
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ait pu rejoindre le tribunal en est la preuve.
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Il n'est ni enchaîné,
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ni retenu captif.
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Comment donc peut-on
prėtendre qu'il s'agit
d'un travailleur en servitude ?
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Rejeter les requêtes déposées
par les ONG et les travailleurs asservis
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constitue un obstacle majeur à l'obtention de la justice.
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Bien que le pays se soit développé économiquement,
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nous constatons que cette croissance
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ne profite pas
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aux personnes les plus défavorisées.
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Les travailleurs auprès desquels nous enquêtons sont lourdement endettés,
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et leurs enfants sont contraints de travailler dans les fours à briques.
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Pour remédier à cette situation nous privilégions une approche systémique
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s'inscrivant sur le long terme:
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nous entreprenons
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des actions en justice,
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plaidons en faveur de changements au niveau gouvernemental
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et auprès des employeurs,
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et tentons de mettre en place des committés de travailleurs et de citoyens
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engagés durablement dans la lutte contre l'esclavage,
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en collaboration avec les communautés concernées.
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afin de les sensibiliser
à cette forme d'esclavage.
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