Robert Legato : L'art de créer l'émerveillement
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0:01 - 0:03J'ai travaillé sur un film intitulé « Apollo 13 »,
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0:03 - 0:05et en travaillant sur ce film, j'ai appris quelque chose
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0:05 - 0:07sur le fonctionnement de notre cerveau,
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0:07 - 0:09et c'est que quand on est en quelque sorte saisi
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0:09 - 0:14d'enthousiasme, d'admiration,
d'affection, peu importe, -
0:14 - 0:16ça change et altère notre perception des choses.
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0:16 - 0:18Ça change ce qu'on voit.
Ça change ce dont on se souvient. -
0:18 - 0:22Pour faire une expérience,
parce que je me suis assigné -
0:22 - 0:26la tâche intimidante de recréer
un lancement de Saturn V -
0:26 - 0:29pour ce film là, parce que je m'étais engagé,
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0:29 - 0:31je me sentais un petit peu nerveux,
donc j'avais besoin de faire une expérience -
0:31 - 0:35et de rassembler un groupe de personnes
comme celui-ci dans une salle de projection -
0:35 - 0:37et de montrer ces séquences d’archive,
et quand j'ai montré cette séquence, -
0:37 - 0:40je voulais simplement savoir
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0:40 - 0:44ce dont les gens se rappelaient,
ce qu'il y avait de mémorable à ce sujet. -
0:44 - 0:46Que devrais-je essayer de reproduire, en fait ?
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0:46 - 0:49Que devrais-je essayer d'imiter au mieux ?
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0:49 - 0:52Voilà donc la séquence
que je montrais à tout le monde. -
0:52 - 0:55Et ce que j'ai découvert,
c'est que de par la nature -
0:55 - 0:57de cette séquence
et du fait que nous étions en train de faire ce film, -
0:57 - 0:59elle portait une émotion par elle-même,
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0:59 - 1:02dans la mémoire collective de ce que ce lancement représentait pour nous
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1:02 - 1:04et toutes ces choses.
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1:04 - 1:06Quand je l'ai montrée,
j'ai immédiatement demandé, -
1:06 - 1:09dès que la projection était finie,
ce qu'ils en pensaient, -
1:09 - 1:11quelles étaient les plans les plus marquants,
ils les ont changés. -
1:11 - 1:14Ils y ont rajouté des mouvements de caméra.
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1:14 - 1:16Ils y ont rajouté toutes sortes de choses.
Les plans étaient mélangés, -
1:16 - 1:19et j'étais très curieux -- je veux dire,
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1:19 - 1:21que diable regardiez-vous
il y a juste quelques minutes -
1:21 - 1:24et d'où sortez-vous
une telle description ? -
1:24 - 1:28Ce que j'ai découvert,
c'est que je ne devais pas reproduire -
1:28 - 1:32ce qu'ils ont vu,
mais reproduire ce dont ils se souvenaient. -
1:32 - 1:36Voici notre séquence du lancement,
basée principalement sur les notes -
1:36 - 1:39qu'on a prises en demandant aux gens
ce qu'ils pensaient, -
1:39 - 1:41et puis la mise en commun
de tous les différents plans -
1:41 - 1:43et des différentes choses combinées
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1:43 - 1:45recréait en quelque sorte la conscience collective
de ce dont ils se souvenaient, -
1:45 - 1:47mais pas ce à quoi ça ressemblait vraiment.
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1:47 - 1:50Voilà donc ce que nous avons créé
pour « Apollo 13 ». -
1:50 - 1:54(Bruit du lancement)
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1:54 - 1:57Littéralement, ce que vous voyez
c'est la confluence -
1:57 - 1:59d'une série de différentes personnes,
une série de souvenirs différents, -
1:59 - 2:02y compris les miens,
et la prise de quelques petites libertés -
2:02 - 2:04avec le sujet.
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2:04 - 2:07Fondamentalement j'ai tout tourné
avec des courtes focales, -
2:07 - 2:09ce qui signifie que vous êtes tout près de l'action,
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2:09 - 2:11mais j'ai cadré comme si c'était
des longues focales, -
2:11 - 2:14ce qui vous donne un sens de la distance,
donc, au fond, -
2:14 - 2:16je créais un dispositif qui devait vous rappeler
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2:16 - 2:19quelque chose que vous n'aviez jamais vraiment vu.
(Musique) -
2:19 - 2:22Je vais ensuite vous montrer exactement ce à quoi
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2:22 - 2:25vous avez réagi quand vous avez réagi.
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2:25 - 2:38(Musique)
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2:38 - 2:40Tom Hanks : Bonjour, Houston, ici Odyssey.
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2:40 - 2:43Content de vous revoir.
(Bravos) (Musique) -
2:43 - 2:45Rob Legato : Je fais semblant qu'ils m'applaudissent.
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2:45 - 2:48(Rires)
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2:48 - 2:51Là je suis dans un parking.
Fondamentalement, c'est une boite de conserve, -
2:51 - 2:53et je suis en train de recréer le lancement
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2:53 - 2:57avec des extincteurs, du feu,
j'ai de la cire que je lance -
2:57 - 3:00devant l'objectif pour que ça ressemble
à de la glace, et donc -
3:00 - 3:03si vous avez cru à ce que je vous ai montré,
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3:03 - 3:06ce à quoi vous avez réagi,
ce qui vous fait éprouver des émotions, -
3:06 - 3:09ce n'est qu'un complet mensonge,
et j'ai trouvé ça -
3:09 - 3:10assez fascinant.
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3:10 - 3:13Et ce cas en particulier,
c'est le point culminant du film, -
3:13 - 3:17et, vous savez, la réalisation en a été simple,
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3:17 - 3:20il suffisait de prendre un modèle,
le lancer d'un hélicoptère et tourner. -
3:20 - 3:22Et c'est tout simplement ce que j'ai fait.
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3:22 - 3:25Me voilà en train de tourner,
je suis un cadreur assez médiocre, -
3:25 - 3:28mais j'ai ce sens de la vraisemblance,
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3:28 - 3:31vous savez, de suivre la fusée jusqu'au bout,
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3:31 - 3:33et compte tenu de cet enjeu,
je cherchais désespérément -
3:33 - 3:36à la maintenir dans le cadre.
J'en viens à la suite. -
3:36 - 3:39Nous avions un consultant de la NASA
qui était en fait un astronaute, -
3:39 - 3:42qui avait vraiment participé à certaines missions,
à Apollo 15, -
3:42 - 3:45et il était là pour contrôler les aspects scientifiques.
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3:45 - 3:49Je suppose que quelqu'un a cru
que c'était nécessaire. -
3:49 - 3:50(Rires)
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3:50 - 3:53Je ne sais pas pourquoi,
mais c'est ce qu'ils ont cru. -
3:53 - 3:57Donc nous voilà, c'est un héros, un astronaute,
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3:57 - 4:00et nous sommes tous enthousiasmés,
et j'ai pris la liberté de dire -
4:00 - 4:02que certaines des prises que j'avais faites
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4:02 - 4:05n'étaient pas si nulles que ça.
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4:05 - 4:08Et peut-être, vous voyez,
que nous en étions -
4:08 - 4:11assez satisfaits,
je l'ai donc amené la bas, -
4:11 - 4:13et il fallait vraiment qu'il vérifie
ce que nous étions en train de faire, -
4:13 - 4:16et nous donner un 20 sur 20,
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4:16 - 4:18je lui ai donc montré des plans
sur lesquels nous travaillions, -
4:18 - 4:21et j'ai attendu la réaction dont vous vous doutez,
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4:21 - 4:24et je l'ai obtenue.
(Musique) (Bruits de lancement) -
4:24 - 4:26Je lui ai donc montré ces deux plans,
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4:26 - 4:30et il m'a dit ce qu'il en pensait.
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4:30 - 4:32("Ça ne va pas")
(Rires) -
4:32 - 4:35Ok.
(Rires) -
4:35 - 4:37C'était ce dont je rêvais.
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4:37 - 4:40(Rires)
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4:40 - 4:44Ce que j'ai obtenu de lui
c'est qu'il s'est tourné vers moi en disant, -
4:44 - 4:47« On ne dessinerait jamais une fusée comme ça,
jamais. -
4:47 - 4:48On ne ferait jamais décoller une fusée
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4:48 - 4:50en même temps que les bras de la tour de lancement
se rétractent. -
4:50 - 4:52Vous imaginez le drame qui pourrait se produire ?
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4:52 - 4:55On ne dessinerait jamais une fusée comme ça,
jamais.» -
4:55 - 4:57Il me regardait.
Hé, je ne sais pas -
4:57 - 4:59si vous avez remarqué,
mais je suis le gars sur le parking -
4:59 - 5:01qui a recréé l'un des plus beaux moments
de l’Amérique -
5:01 - 5:03avec des extincteurs.
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5:03 - 5:05(Rires)
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5:05 - 5:08Je ne vais pas vous contredire.
Vous êtes un astronaute, -
5:08 - 5:11un héros, et je suis du New Jersey, donc...
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5:11 - 5:12(Rires)
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5:12 - 5:14Je vais juste vous montrer des images.
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5:14 - 5:17Je vais vous montrer des images,
et vous me dites ce que vous en pensez. -
5:17 - 5:19Et là, j'ai obtenu la réaction que j'espérais.
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5:19 - 5:21Je lui ai montré ceci,
ce sont les vraies images -
5:21 - 5:25sur lesquelles il était.
C'est Apollo 15. C'était sa mission. -
5:25 - 5:30Je lui ai montré ceci,
et la réaction que j'ai eue était intéressante. -
5:30 - 5:33(« Ça ne va pas non plus. »)
(Rires) -
5:33 - 5:36Ce qui s'est passé, ce que j'en ai déduit,
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5:36 - 5:39c'est qu'il s'en souvenait différemment.
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5:39 - 5:41Il se souvenait d'une tour de lancement
complètement sécurisée, -
5:41 - 5:44d'un lancement parfaitement sûr,
parce qu'il était assis -
5:44 - 5:46dans une fusée qui avait, genre,
50 tonnes de poussée, -
5:46 - 5:48construite par le moins-disant.
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5:48 - 5:51Il espérait que ça allait bien marcher.
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5:51 - 5:53(Rires)
(Applaudissements) -
5:53 - 5:55Il a donc modifié ses souvenirs.
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5:55 - 5:59Ron Howard a rencontré Buzz Aldrin,
qui n'était pas dans le film, -
5:59 - 6:01il n'avait donc aucune idée
que nous étions en train de truquer -
6:01 - 6:03ces images, et il a réagi
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6:03 - 6:06comme il devait réagir,
et je vais vous le passer. -
6:06 - 6:08Ron Howard : Buzz Aldrin est venu me voir
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6:08 - 6:13et a dit, "Hé, les images du lancement.
J'ai vu quelques plans -
6:13 - 6:18que je n'avais jamais vu avant.
Dans quelle cave est-ce que vous avez trouvé ça ?" -
6:18 - 6:20Et j'ai dit, « Hé bien, nulle part, Buzz,
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6:20 - 6:24nous avons fabriqué tout ça à partir de rien. »
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6:24 - 6:28Et il m'a dit, « Mmm, c'est pas mal du tout.
On peut s'en servir ? » -
6:28 - 6:31(Explosion) (« Bien sûr »)
(Rires) -
6:31 - 6:33RL : C'est un Américain génial.
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6:33 - 6:37(Rires)
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6:37 - 6:40« Titanic », si vous ne connaissez pas l'histoire,
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6:40 - 6:42se termine mal.
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6:42 - 6:45(Rires)
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6:45 - 6:48Jim Cameron a filmé le vrai Titanic.
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6:48 - 6:50Il a au fond installé,
ou plutôt il a cassé la suspension de l'incrédulité, -
6:50 - 6:52parce que ce qu'il a filmé était la réalité,
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6:52 - 6:56un sous-marin Mir qui descend, ou plutôt
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6:56 - 6:58deux sous-marins Mir qui descendent
vers la vraie épave, -
6:58 - 7:00et il a créé ces images envoûtantes.
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7:00 - 7:03C'est vraiment magnifique,
et ça évoque toutes ces -
7:03 - 7:05émotions différentes,
mais il n'a pas pu tout filmer, -
7:05 - 7:08et pour tout vous dire,
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7:08 - 7:10j'ai dû remplir les vides,
ce qui est assez difficile, -
7:10 - 7:12parce qu'il faut recréer coup sur coup
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7:12 - 7:15ce qui s'est réellement passé
et à ce moment là, -
7:15 - 7:20j'étais le seul qui aurait pu tout foutre en l'air.
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7:20 - 7:22Voici donc les images qu'il a tournées,
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7:22 - 7:26et c'était assez émouvant et impressionnant.
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7:26 - 7:29Je vais la laisser tourner,
pour que vous absorbiez tout ça, -
7:29 - 7:32et je vous décrirai mes réactions
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7:32 - 7:35quand je les ai vues la toute première fois.
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7:35 - 7:39J'ai eu la sensation que mon cerveau voulait
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7:39 - 7:41le voir reprendre vie.
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7:41 - 7:43J'ai voulu automatiquement voir ce navire
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7:43 - 7:46ce merveilleux navire, dans toute sa gloire,
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7:46 - 7:49et inversement,
j'ai voulu le voir sans sa gloire, -
7:49 - 7:52au fond revenir à ce à quoi il ressemblait.
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7:52 - 7:55J'ai donc réalisé un effet
que je vais vous montrer tout à l'heure. -
7:55 - 7:58Ce que j'ai essayé de faire,
qui est en fait le cœur du film, -
7:58 - 8:01pour moi,
c'est pourquoi j'ai voulu faire le film, -
8:01 - 8:05c'est pourquoi j'ai voulu créer le genre de choses
que j'ai créées. -
8:05 - 8:07Je vais vous montrer une autre chose
que j'ai trouvé intéressante, -
8:07 - 8:09qui est ce qui nous touche vraiment
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8:09 - 8:10quand nous le regardons.
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8:10 - 8:13Voici les coulisses du tournage,
deux ou trois plans. -
8:13 - 8:15Quand vous avez vu mes images,
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8:15 - 8:18vous avez vu ça :
fondamentalement une bande de types -
8:18 - 8:21qui renversent un navire,
et les petits sous-marins Mir -
8:21 - 8:24ont en fait la taille d'un petit ballon de foot,
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8:24 - 8:26et sont filmés dans de la fumée.
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8:26 - 8:28Jim est descendu à 5 km de profondeur,
moi je suis allé -
8:28 - 8:29à 5 km du studio
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8:29 - 8:32et j'ai filmé ça dans un garage.
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8:32 - 8:34Mais ce qui vous touche,
ce que vous êtes en train de regarder, -
8:34 - 8:37reproduisait les mêmes sensations,
la même qualité d'envoûtement, -
8:37 - 8:41que les images de Jim,
j'ai donc trouvé fascinant -
8:41 - 8:45que nos cerveaux, dès lors que vous croyez
à la réalité d'une chose, -
8:45 - 8:48y projettent tous nos sentiments,
-
8:48 - 8:50cette qualité qu'on y retrouve,
alors que tout est artificiel. -
8:50 - 8:54C'est imaginé de toutes pièces,
mais pas à vos yeux, -
8:54 - 8:56et j'ai trouvé cela très intéressant
-
8:56 - 8:59à explorer et utiliser,
et ça m'a poussé à créer -
8:59 - 9:01l'effet suivant que je vais vous montrer,
qui est une sorte -
9:01 - 9:04de transition magique.
Tout ce que j'essayais de faire, -
9:04 - 9:08c'est d'obtenir que ce soit le spectateur
qui me donne le signal, -
9:08 - 9:10pour que ça devienne une expérience fluide,
-
9:10 - 9:13où je n'étais pas en train de vous montrer
mon interprétation, -
9:13 - 9:16mais ce que le public voulait voir.
-
9:16 - 9:22Le plan suivant, tout de suite après ça...
-
9:22 - 9:24C'est pour que vous puissiez voir ce que j'ai fait.
-
9:24 - 9:26Fondamentalement, s'il y a deux sous-marins
dans le même plan, -
9:26 - 9:29c'est moi qui l'ai tourné,
parce que où est placée la caméra ? -
9:29 - 9:30Quand c'est Jim qui l'a tourné,
il n'y a qu'un seul sous-marin, -
9:30 - 9:32parce qu'il filmait de l'autre,
-
9:32 - 9:33et je ne me souviens pas si c'est moi ou Jim
qui a fait ça. -
9:33 - 9:37Disons que c'est Jim,
parce qu'il aurait bien besoin de félicitations. -
9:37 - 9:43(Rires)
-
9:43 - 9:45Ok. Maintenant la transition du Titanic.
-
9:45 - 9:48Je faisais allusion à ça
quand je disais que je voulais -
9:48 - 9:51passer comme par magie d'un état du Titanic
à l'autre. -
9:51 - 9:55Je vais passer le plan une seule fois.
(Musique) -
9:55 - 9:59(Musique)
-
9:59 - 10:04Ce que j'espérais,
c'est que ça se fonde sous vos yeux. -
10:10 - 10:14Gloria Stuart : C'est la dernière fois que le Titanic a vu la lumière du jour.
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10:14 - 10:17RL : Ce que j'ai fait, c'est de recommencer
-
10:17 - 10:20l'expérience de la salle de projection,
où j'ai enregistré l'endroit -
10:20 - 10:22où je regardais,
où nous regardions, -
10:22 - 10:25et bien sûr, on regarde le deux personnes
à la proue du navire, -
10:25 - 10:27et puis, à un certain moment,
-
10:27 - 10:29je modifie la périphérie du plan,
-
10:29 - 10:31je change, ça devient l'épave rouillée.
-
10:31 - 10:34Je la passais tous les jours,
jusqu'à ce que je trouve -
10:34 - 10:37l'instant précis où j'arrête de les regarder
-
10:37 - 10:39et où je commence à remarquer le reste,
et l'instant où mes yeux se déplacent, -
10:39 - 10:42nous l'avons marqué sur le photogramme.
-
10:42 - 10:44A l'instant où mes yeux se déplacent,
je commence immédiatement -
10:44 - 10:47à les changer,
de façon à ce qu'on ne remarque pas -
10:47 - 10:49quand ça commence ni quand ça s'arrête.
-
10:49 - 10:51Je vais vous le montrer à nouveau.
(Musique) -
10:51 - 10:54C'est fait littéralement en se servant
de ce que nos cerveaux -
10:54 - 10:58font naturellement,
c’est-à-dire, dès que vous détournez l'attention, -
10:58 - 11:00quelque chose change, et ensuite
-
11:00 - 11:02je laisse continuer l'écharpe,
parce que ça devait vraiment être -
11:02 - 11:06un plan fantomatique,
pour qu'ils paraissent vraiment être -
11:06 - 11:09encore sur l'épave.
C'est là où ils sont enterrés pour toujours. -
11:09 - 11:11Ou quelque chose dans ce genre là.
Je viens de l'inventer. -
11:11 - 11:14(Rires)
-
11:14 - 11:16Entre parenthèses, c'est la dernière fois que j'ai vu
la lumière du jour. -
11:16 - 11:19Ça a été un long un film sur lequel travailler.
(Rires) -
11:19 - 11:22« Hugo Cabret » était un autre film intéressant,
parce que -
11:22 - 11:24le film lui-même parle
d'illusions cinématographiques. -
11:24 - 11:27Il parle de la façon
dont notre cerveau est trompé -
11:27 - 11:29par la persistance rétinienne
qui créée un film, -
11:29 - 11:33et l'une des choses que j'ai dû faire,
c'est qu'on... -
11:33 - 11:36Sasha Baron Cohen est un gars très intelligent,
très malin, -
11:36 - 11:38c'est un acteur,
il voulait rendre un hommage -
11:38 - 11:41aux comédies burlesques à la Buster Keaton,
et il voulait -
11:41 - 11:44que son attelle à la jambe se coince
dans un train en marche. -
11:44 - 11:46Très dangereux, totalement impossible à faire,
et spécialement sur notre plateau, -
11:46 - 11:49parce qu'il n'y a littéralement pas moyen
-
11:49 - 11:54de faire vraiment bouger le train,
parce qu'il est tellement ajusté sur notre plateau. -
11:54 - 11:57Je vais vous montré la scène,
j'ai utilisé le truc -
11:57 - 12:00que Sergei Eisenstein avait repéré,
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12:00 - 12:04c’est-à-dire que si vous avez une camera
qui se déplace -
12:04 - 12:06avec un objet en mouvement,
ce qui ne bouge pas à l'air de bouger, -
12:06 - 12:09et ce qui bouge à l'air d'être arrêté,
-
12:09 - 12:12donc ce que vous voyez en fait
c'est que le train -
12:12 - 12:17ne bouge pas du tout,
et ce qui bouge en fait, c'est le sol. -
12:17 - 12:20Voici le plan. Il y a une petite vidéo
-
12:20 - 12:23de ce que vous voyez, là,
c'est notre petit test, -
12:23 - 12:26donc voici en fait ce que vous voyez,
et j'ai pensé -
12:26 - 12:28que c'était assez intéressant,
parce que ce truc génial, -
12:28 - 12:31pour lequel je n'ai aucun mérite,
-
12:31 - 12:34faisait un peu partie de l'hommage du film lui-même.
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12:34 - 12:37J'aimerais m'en attribuer le mérite
mais je ne peux pas, -
12:37 - 12:41parce que ça a été inventé en 1910,
dans ces eaux là, je l'ai dit à Marty, -
12:41 - 12:43et c'est un de ces trucs mentaux
très difficiles à comprendre -
12:43 - 12:45tant que vous n'avez pas vu comment ça marche,
-
12:45 - 12:48et je lui ai dit ce que j'allais faire, vous voyez,
et il a répondu, -
12:48 - 12:50« Bon, voyons si j'ai bien compris. Le truc avec les roues ?
-
12:50 - 12:52Ça ne bouge pas. »
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12:52 - 12:56(Rires)
(Applaudissements) -
12:56 - 13:00« Et le truc sans les roues, ça bouge. »
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13:00 - 13:02Exactement.
(Rires) -
13:02 - 13:05Ce qui m'amène au suivant, et dernier...
-
13:05 - 13:09Marty ne verra pas ça, n'est-ce pas ?
(Rires) -
13:09 - 13:13Personne ne le verra en dehors de...
(Rires) -
13:13 - 13:17L'illustration suivante c'est un peu la théorie
de la séquence en un seul plan. -
13:17 - 13:20C'est une manière très élégante
de raconter une histoire, -
13:20 - 13:22spécialement si vous suivez quelqu'un
dans un déplacement, -
13:22 - 13:25et que ce déplacement vous raconte quelque chose
-
13:25 - 13:27sur sa personnalité de manière très concise,
-
13:27 - 13:29et ce que nous voulions faire,
comme pour la séquence des « Affranchis », -
13:29 - 13:31qui est l'un des plus beaux plans du cinéma,
-
13:31 - 13:35un film de Martin Scorsese qui suit Henry Hill
-
13:35 - 13:37dans sa découverte de ce que c'est
que de traverser Copacabana -
13:37 - 13:39comme un caïd,
et d'être traité avec tous les égards. -
13:39 - 13:43Il était le maitre de son univers,
et nous voulions que Hugo -
13:43 - 13:45ressente la même chose,
nous avons donc réalisé ce plan. -
13:45 - 13:49(Musique)
-
13:49 - 13:54Voici Hugo.
(Musique) -
13:54 - 13:57Et nous avons pensé que
si nous pouvions déplacer la camera avec lui, -
13:57 - 14:00on ressentirait ce que ça signifie
qu'être ce garçon -
14:00 - 14:02qui est le maitre de son univers,
-
14:02 - 14:05et son univers est dans les coulisses,
vous voyez, -
14:05 - 14:07dans les entrailles de cette gare là
-
14:07 - 14:10qu'il est le seul à pouvoir traverser
de cette manière, -
14:10 - 14:12et il fallait que ça ait l'air normal,
-
14:12 - 14:14sa vie quotidienne,
-
14:14 - 14:17alors l'idée de le faire en un seul plan
était essentielle, -
14:17 - 14:20et bien sûr, en tournant en 3D,
ce qui signifie -
14:20 - 14:24une énorme camera pendue à un mât géant,
-
14:24 - 14:27le but était de recréer l'effet d'un steadicam,
-
14:27 - 14:30et de vous donner la même impression
-
14:30 - 14:32que quand vous avez vu la scène
dans « Les Affranchis ». -
14:32 - 14:36Ce que vous allez voir maintenant,
c'est la façon dont on s'y est pris. -
14:36 - 14:39Il y a en réalité cinq plateaux différents,
filmés à cinq moments différents, -
14:39 - 14:40avec deux garçons différents.
-
14:40 - 14:42A gauche,
c'est là où se termine le plan, -
14:42 - 14:48et à droite, c'est celui qui prend le relais,
-
14:48 - 14:51et là nous changeons de garçon,
nous passons de Asa Butterfield, -
14:51 - 14:55qui est la star du film, à sa doublure.
(Musique) -
14:55 - 14:57Ce n'est pas vraiment sa doublure
pour les cascades. -
14:57 - 14:59Nous avons construit un décor incroyable
pour faire ça. (Musique) -
14:59 - 15:03Et nous sommes maintenant
sur le plateau numéro 3, -
15:03 - 15:07et nous passons ensuite
-
15:07 - 15:10aux derniers instants du plan,
qui sont en fait -
15:10 - 15:12tournés avec un steadicam.
Tout le reste a été filmé avec des grues -
15:12 - 15:14et des choses comme ça,
et ça a été fait littéralement -
15:14 - 15:18sur 5 plateaux différents, deux garçons différents,
à des moments différents, -
15:18 - 15:20et tout devait apparaître comme un seul plan,
-
15:20 - 15:25et ce qui est formidable,
c'est que ça a probablement été -
15:25 - 15:28l'une des scènes les plus appréciées
sur lesquelles j'ai jamais travaillé, -
15:28 - 15:30et j'en étais assez fier une fois terminée,
vous voyez, -
15:30 - 15:35alors qu'en fait il ne faudrait jamais être fier
de ces choses-là, je crois. -
15:35 - 15:38J'en étais donc assez fier,
et je suis allé voir un ami, -
15:38 - 15:40et j'ai dit, « Tu sais, c'est une des scènes
-
15:40 - 15:42les plus appréciées
sur laquelle j'ai jamais travaillé. -
15:42 - 15:45Selon toi, quelle en est la raison ? »
-
15:45 - 15:46Et il a répondu, « Parce que personne ne sait
-
15:46 - 15:48que c'est toi qui t'en es occupé. »
-
15:48 - 15:51(Rires)
-
15:51 - 15:55Tout ce que je peux dire, c'est merci,
-
15:55 - 16:00c'était mon exposé pour vous.
(Applaudissements) -
16:00 - 16:05(Applaudissements)
- Title:
- Robert Legato : L'art de créer l'émerveillement
- Speaker:
- Rob Legato
- Description:
-
Rob Legato crée des effets cinématographiques tellement bien fait (parfois) qu'ils trompent la réalité. Dans ce discours amusant et passionné, il nous décrit sa manière d'améliorer la réalité à l'écran dans des films comme Apollo 13, Titanic et Hugo Cabret.
- Video Language:
- English
- Team:
closed TED
- Project:
- TEDTalks
- Duration:
- 16:27
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Anna Cristiana Minoli edited French subtitles for The art of creating awe | |
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Patrick Brault accepted French subtitles for The art of creating awe | |
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Patrick Brault declined French subtitles for The art of creating awe | |
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