Devdutt Pattanaik: L'Orient contre l'Occident – les mythes qui mystifient
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0:02 - 0:05Pour comprendre le monde de la mythologie,
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0:05 - 0:09et ce dont un Officier en chef des Croyances est chargé,
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0:09 - 0:11vous devez écouter l'histoire
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0:11 - 0:13de Ganesh,
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0:13 - 0:15le dieu à la tête d'éléphant
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0:15 - 0:18qui est le scribe des conteurs,
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0:18 - 0:19et de son frère,
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0:19 - 0:21le guerrier athlétique des dieux,
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0:21 - 0:23Kârttikeya.
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0:23 - 0:26Un jour, les deux frères décidèrent de faire une course,
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0:26 - 0:29trois fois autour du monde.
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0:29 - 0:32Kârttikeya sauta sur son paon
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0:32 - 0:35et vola autour des continents
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0:35 - 0:40et des montagnes et des océans.
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0:40 - 0:42Il en fit le tour une première fois,
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0:42 - 0:44une deuxième fois,
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0:44 - 0:47une troisième fois.
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0:47 - 0:50Mais son frère, Ganesh,
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0:50 - 0:53marcha simplement autour de ses parents,
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0:53 - 0:55une, deux, trois fois,
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0:55 - 0:58et dit, « J'ai gagné. »
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0:58 - 1:00« Comment se fait-il? » dit Kârttikeya.
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1:00 - 1:01Et Ganesh dit,
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1:01 - 1:04« Tu as fait le tour 'du monde'
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1:04 - 1:07J'ai fait le tour de 'mon monde' »
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1:07 - 1:10Lequel est le plus important?
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1:10 - 1:13Si vous comprenez la différence entre 'le monde' et 'mon monde'
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1:13 - 1:17alors vous comprenez la différence entre logos et mythos.
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1:17 - 1:19'Le monde' est objectif,
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1:19 - 1:22logique, universel, factuel,
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1:22 - 1:24scientifique.
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1:24 - 1:27'Mon monde' est subjectif.
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1:27 - 1:30Il est émotionnel. Il est personnel.
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1:30 - 1:33Ce sont les perceptions, les pensées, les sentiments, les rêves.
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1:33 - 1:36C'est le système de croyances que nous portons.
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1:36 - 1:39C'est le mythe dans lequel nous vivons.
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1:39 - 1:42'Le monde' nous dit comment le monde fonctionne,
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1:42 - 1:45comment le soleil se lève,
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1:45 - 1:48comment nous sommes nés.
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1:48 - 1:51'Mon monde' nous dit pourquoi le soleil se lève,
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1:51 - 1:55pourquoi nous sommes nés.
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1:55 - 1:59Chaque culture essaie de comprendre,
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1:59 - 2:01« Pourquoi existons-nous? »
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2:01 - 2:04Et chaque culture propose sa propre compréhension de la vie,
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2:04 - 2:09sa propre version personnalisée de la mythologie.
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2:09 - 2:12La culture est une réaction à la nature,
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2:12 - 2:14et cette compréhension de nos ancêtres
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2:14 - 2:17est transmise de génération en génération
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2:17 - 2:20sous forme de contes, de symboles et de rituels,
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2:20 - 2:26qui n'ont jamais de rapport avec le rationnel.
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2:26 - 2:28Et alors, quand vous l'étudiez, vous vous rendez compte que
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2:28 - 2:30différentes personnes dans le monde
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2:30 - 2:33ont une compréhension différente du monde.
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2:33 - 2:35Différentes personnes voient les choses différemment:
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2:35 - 2:37différents points de vue.
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2:37 - 2:39Il y a mon monde et il y a votre monde,
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2:39 - 2:42et mon monde est toujours meilleur que votre monde,
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2:42 - 2:45parce que mon monde, voyez-vous, est rationnel,
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2:45 - 2:47et le vôtre n'est que superstition,
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2:47 - 2:49le vôtre n'est que foi,
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2:49 - 2:52le vôtre est illogique.
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2:52 - 2:55Voici l'origine du choc des civilisations.
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2:55 - 2:59Ceci se passa, une fois, en l'an 326 av. J.-C.
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2:59 - 3:02sur les rives d'une rivière appelée l'Indus,
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3:02 - 3:04qui se trouve maintenant au Pakistan.
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3:04 - 3:07Cette rivière prête son nom à l'Inde.
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3:07 - 3:09Inde. Indus.
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3:12 - 3:15Alexandre, un jeune Macédonien,
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3:15 - 3:19y rencontra ce qu'il appela un ''gymnosophiste'',
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3:19 - 3:22qui veut dire ''homme sage nu''.
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3:22 - 3:24On ne sait pas de qui il s'agit.
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3:24 - 3:26Peut-être était-ce un moine Jain,
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3:26 - 3:28comme Bahubali, ici,
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3:28 - 3:29le Gomateshvara Bahubali,
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3:29 - 3:31dont l'image n'est pas loin de Mysore.
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3:31 - 3:33Ou peut-être n'était-il qu'un yogi,
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3:33 - 3:35qui était assis sur une roche, contemplant le ciel,
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3:35 - 3:37et le soleil, et la lune.
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3:37 - 3:40Alexandre demanda, « Que fais-tu? »
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3:40 - 3:42Et le gymnosophiste répondit,
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3:42 - 3:45« J'éprouve le néant. »
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3:45 - 3:48Puis le gymnosophiste demanda,
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3:48 - 3:50« Que fais-tu? »
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3:50 - 3:53et Alexandre dit, « Je conquiers le monde. »
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3:53 - 3:56Et les deux rirent.
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3:56 - 4:00Chacun pensait que l'autre n'était qu'un idiot.
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4:00 - 4:04Le gymnosophiste se dit, « Pourquoi conquiert-il le monde?
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4:04 - 4:07Ça n'a pas de sens. »
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4:07 - 4:09Et Alexandre pensa,
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4:09 - 4:11« Pourquoi est-il assis là, à ne rien faire?
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4:11 - 4:13Quel gâchis. »
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4:13 - 4:17Pour comprendre cette différence de point de vue
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4:17 - 4:20nous devons comprendre
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4:20 - 4:23la réalité subjective d'Alexandre:
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4:23 - 4:28son mythe, et la mythologie qui l'a construit.
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4:28 - 4:31La mère d'Alexandre, ses parents, son maître Aristote
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4:31 - 4:34lui ont raconté l'histoire de l'''Illiade'' d'Homère.
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4:34 - 4:37Ils lui ont parlé d'un grand héros nommé Achille,
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4:37 - 4:40qui, quand il participait à une bataille, victoire était assurée,
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4:40 - 4:43mais quand il se retirait de bataille,
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4:43 - 4:46la défaite était inévitable.
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4:46 - 4:49« Achille était un homme qui pouvait façonner l'histoire,
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4:49 - 4:52un homme de destinée,
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4:52 - 4:55et voilà comment tu dois être, Alexandre. »
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4:55 - 4:57Voilà ce qu'il avait entendu.
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4:57 - 5:00« Que ne dois-tu pas être?
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5:00 - 5:03Tu ne dois pas être Sisyphe,
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5:03 - 5:05qui roule une pierre jusqu'en haut d'une montagne le jour
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5:05 - 5:10pour constater que la pierre est redescendue la nuit.
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5:10 - 5:13N'aies pas une vie monotone,
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5:13 - 5:15médiocre, sans aucun sens.
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5:15 - 5:18Sois spectaculaire! -
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5:18 - 5:20comme les héros grecs,
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5:20 - 5:22comme Jason, qui traversa l'océan
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5:22 - 5:26avec les Argonautes et rapporta la toison d'or.
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5:26 - 5:29Sois spectaculaire comme Thésée
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5:29 - 5:35qui entra dans le labyrinthe et tua le Minotaure à la tête de buffle.
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5:35 - 5:39Quand tu participes à une course, gagne! -
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5:39 - 5:42parce que quand tu gagnes, l'euphorie de la victoire
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5:42 - 5:47est le plus près que tu pourras être de l'ambroisie des dieux. »
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5:47 - 5:50Parce que, voyez-vous, les Grecs pensaient
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5:50 - 5:52qu'on ne vivait qu'une fois,
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5:52 - 5:56et que quand on mourrait, on devait traverser la rivière Styx,
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5:56 - 5:59et que si on avait eu une vie extraordinaire,
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5:59 - 6:02on serait accueilli à l'Élysée,
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6:02 - 6:06ou ce que les Français appellent ''les Champs-Elysées''
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6:06 - 6:07(Rires)
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6:07 - 6:10le paradis des héros.
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6:13 - 6:17Mais ce ne sont pas les histoires qu'a entendues le gymnosophiste.
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6:17 - 6:20Il a entendu une histoire bien différente.
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6:20 - 6:23Il a entendu parler d'un homme nommé Bharat,
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6:23 - 6:26de qui l'Inde tient le nom de 'Bharata'.
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6:26 - 6:29Bharat aussi avait conquis le monde.
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6:29 - 6:32Et alors il alla au plus haut pic
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6:32 - 6:35de la plus grande montagne au centre du monde
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6:35 - 6:36appelée Meru.
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6:36 - 6:39Et il voulait y hisser son drapeau pour dire,
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6:39 - 6:42« J'ai été ici le premier. »
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6:42 - 6:44Mais quand il arriva en haut de la montagne,
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6:44 - 6:49il découvrit le pic couvert d'innombrables drapeaux
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6:49 - 6:52de conquérants du monde avant lui,
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6:52 - 6:56chacun clamant, ''J'ai été ici le premier'' …
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6:56 - 7:00voilà ce que je pensais jusqu'à ce que je vienne ici. »
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7:00 - 7:03Et soudain, devant ce canevas de l'infini,
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7:03 - 7:07Bharat se sentit insignifiant.
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7:07 - 7:11Voici la mythologie du gymnosophiste.
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7:11 - 7:16Voyez-vous, il avait des héros, comme Ram – Raghupati Ram
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7:16 - 7:18et Krishna, Govinda Hari.
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7:18 - 7:22Mais ils n'étaient pas deux personnages de deux différentes aventures.
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7:22 - 7:26Ils étaient les deux vies du même héros.
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7:26 - 7:30Quand le Ramayana touche à sa fin, le Mahabharata débute.
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7:30 - 7:32Quand Ram meurt, Krishna naît.
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7:32 - 7:35Quand Krishna meurt, il sera éventuellement de retour comme Ram.
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7:35 - 7:38Voyez-vous, les Indiens aussi avaient une rivière
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7:38 - 7:41qui séparait le monde des vivants de celui des morts.
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7:41 - 7:43Mais on ne la traverse pas qu'une fois.
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7:43 - 7:46On y va et vient continuellement.
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7:46 - 7:49On l'appelait le Vaitarni.
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7:49 - 7:52On y va encore, encore et encore.
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7:52 - 7:53Parce que, voyez-vous,
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7:53 - 7:56rien ne dure éternellement en Inde, pas même la mort.
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7:56 - 7:59De ce fait, on a ces grands rituels
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7:59 - 8:02où de grandes images de la Déesse Mère sont faites
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8:02 - 8:04et vénérées pendant 10 jours …
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8:04 - 8:06Et que fait-on après 10 jours?
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8:06 - 8:09On la plonge dans la rivière.
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8:09 - 8:11Parce que cela doit s'arrêter.
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8:11 - 8:14Et l'an prochain, Elle sera de retour.
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8:14 - 8:16Tout n'est que cycle,
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8:16 - 8:19et cette règle ne s'applique pas qu'à l'homme
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8:19 - 8:21mais aussi aux dieux.
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8:21 - 8:24Voyez-vous, les dieux
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8:24 - 8:26doivent revenir encore, encore et encore
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8:26 - 8:28en tant que Ram, en tant que Krishna.
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8:28 - 8:31Non seulement ils vivent infiniment,
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8:31 - 8:34mais la même vie est vécue infiniment
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8:34 - 8:39jusqu'à en comprendre le sens.
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8:39 - 8:41Le Jour de la marmotte d'Amérique.
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8:41 - 8:44(Rires)
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8:46 - 8:49Deux mythologies différentes.
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8:49 - 8:51Laquelle est la bonne?
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8:51 - 8:54Deux différentes mythologies, deux différentes façons de voir le monde.
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8:54 - 8:56Une linéaire, l'autre cyclique.
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8:56 - 8:58L'une croit que c'est la seule et unique vie.
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8:58 - 9:03L'autre croit que c'est une de nombreuses vies.
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9:03 - 9:07Et ainsi, le dénominateur de la vie d'Alexandre était un.
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9:07 - 9:10Alors la valeur de sa vie est la somme totale
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9:10 - 9:12de ses accomplissements.
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9:12 - 9:16Le dénominateur de la vie du gymnosophiste était l'infini.
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9:16 - 9:19Donc, peu importe ce qu'il faisait,
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9:19 - 9:21c'était tout le temps zéro.
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9:21 - 9:24Et je crois que c'est ce paradigme mythologique
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9:24 - 9:27qui a inspiré les mathématiciens Indiens
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9:27 - 9:29à découvrir le nombre zéro.
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9:29 - 9:31Qui sait?
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9:31 - 9:34Et cela nous amène à la mythologie des affaires.
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9:34 - 9:37Si les croyances d'Alexandre ont influencé son comportement,
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9:37 - 9:41si les croyances du gymnosophiste ont influencé son comportement,
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9:41 - 9:46alors elles devraient influencer les affaires dans lesquelles ils étaient engagés.
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9:46 - 9:48Voyez-vous, qu'est-ce le commerce
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9:48 - 9:50sinon le résultat de comment se comporte le marché
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9:50 - 9:53et comment se comporte l'organisation?
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9:53 - 9:56Et si on jette un oeil aux cultures du monde,
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9:56 - 9:58on n'a qu'à en comprendre la mythologie
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9:58 - 10:01et on verra comment elles se comportent, et comment elles agissent en affaires.
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10:01 - 10:05Prenons un exemple.
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10:05 - 10:08Si on ne vit qu'une fois, dans les cultures à vie unique du monde,
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10:08 - 10:10on verra une obsession avec la logique binaire,
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10:10 - 10:13la vérité absolue, la standardisation,
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10:13 - 10:16l'absolu, des motifs linéaires dans le design.
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10:16 - 10:19Mais si on regarde les cultures qui sont cycliques
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10:19 - 10:24et qui sont basées sur des vies infinies, alors on verra une aise avec une logique floue,
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10:24 - 10:26avec la subjectivité,
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10:26 - 10:28avec une pensée contextuelle,
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10:28 - 10:31où tout est relatif, à peu près -
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10:31 - 10:32(Rires)
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10:32 - 10:34plus ou moins.
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10:34 - 10:35(Rires)
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10:35 - 10:38Prenons l'art. Regardons la ballerine.
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10:38 - 10:40Qu'elle est linéaire dans sa performance.
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10:40 - 10:42Et puis regardons la danseuse classique de l'Inde,
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10:42 - 10:44la danseuse de Kuchipudi, la danseuse de Bharatanatyam,
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10:44 - 10:46ondulante.
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10:46 - 10:49(Rires)
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10:49 - 10:51Et puis regardons le monde des affaires.
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10:51 - 10:53Le modèle commercial standard:
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10:53 - 10:57vision, mission, valeurs, procédés.
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10:57 - 10:59Ça sonne beaucoup comme la traversée
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10:59 - 11:01du désert jusqu'à la terre promise,
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11:01 - 11:03avec les commandes aux mains du chef.
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11:03 - 11:08Et si on obéit, on ira au paradis.
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11:08 - 11:10Mais en Inde, ''la'' terre promise n'existe pas.
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11:10 - 11:13Il existe plusieurs terres promises,
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11:13 - 11:16dépendant de votre statut dans la société,
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11:16 - 11:18dépendant de votre phase de vie.
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11:18 - 11:22Voyez-vous, les affaires ne sont pas dirigées comme des institutions,
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11:22 - 11:25par les idiosyncrasies des individus.
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11:25 - 11:28C'est tout le temps une affaire de goût.
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11:28 - 11:32Il s'agit toujours de mes goûts.
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11:32 - 11:34Voyez-vous, la musique indienne, par exemple
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11:34 - 11:36ne connaît pas le concept d'harmonie.
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11:36 - 11:40Il n'y a pas de chef d'orchestre.
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11:40 - 11:43On a un artiste là, et tout le monde suit.
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11:43 - 11:47Et on ne peut jamais reproduire cette même performance une deuxième fois.
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11:47 - 11:49Il n'est pas question de documentation et de contrat.
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11:49 - 11:53Il s'agit de conversation et de foi.
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11:53 - 11:57Il ne s'agit pas de conformité. Il s'agit de la situation,
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11:57 - 12:01d'accomplir les choses, en maniant les règles -
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12:01 - 12:03regardez simplement les Indiens présents ici,
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12:03 - 12:05vous les verrez sourire; ils savent ce que c'est.
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12:05 - 12:06(Rires)
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12:06 - 12:08Et puis regardez les gens qui ont fait du commerce en Inde,
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12:08 - 12:10vous verrez de l'exaspération sur leurs visages.
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12:10 - 12:11(Rires)
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12:11 - 12:15(Applaudissements)
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12:15 - 12:17Voyez-vous, voilà ce qu'est l'Inde d'aujourd'hui. La réalité des choses
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12:17 - 12:19est basée sur le point de vue d'un monde cyclique.
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12:19 - 12:22Alors, elle change rapidement, elle est grandement diverse,
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12:22 - 12:25chaotique, ambiguë, imprévisible.
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12:25 - 12:28Mais les gens s'y font.
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12:28 - 12:30Et puis la mondialisation opère.
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12:30 - 12:34La demande d'une pensée institutionnelle moderne s'installe.
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12:34 - 12:38Qui est basée sur une culture à vie unique.
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12:38 - 12:40Et il y aura un choc,
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12:40 - 12:43comme sur les rives de l'Indus.
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12:43 - 12:46C'est inévitable.
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12:46 - 12:49Je l'ai personnellement vécu. J'ai été formé comme médecin.
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12:49 - 12:52Mais la chirurgie ne m'intéressait pas. Ne me demandez pas pourquoi.
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12:52 - 12:54J'aime trop la mythologie.
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12:54 - 12:56Je voulais apprendre la mythologie. Mais on ne peut l'étudier nulle part.
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12:56 - 12:58Alors, j'ai dû l'étudier par mes propres moyens.
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12:58 - 13:01Et la mythologie n'est pas rentable, enfin, jusqu'à maintenant.
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13:01 - 13:05(Rires)
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13:05 - 13:08Alors j'ai dû prendre un emploi. Et j'ai travaillé dans l'industrie pharmaceutique.
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13:08 - 13:10Et j'ai travaillé dans les services médicaux.
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13:10 - 13:12Et j'ai travaillé comme agent commercial, et comme vendeur,
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13:12 - 13:15et comme agent d'information, et comme agent de bien mobilier, et comme formateur,
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13:15 - 13:18J'ai même été conseiller en affaires, élaborant des stratégies et tactiques.
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13:18 - 13:20Et je pouvais voir l'exaspération
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13:20 - 13:23de mes collègues Américains et Européens,
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13:23 - 13:25quand ils avaient affaire à l'Inde.
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13:25 - 13:28Par exemple: Veuillez nous indiquer la procédure
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13:28 - 13:31de facturation pour les hôpitaux.
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13:31 - 13:35Étape A. Étape B. Étape C. Plus ou moins.
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13:35 - 13:37(Rires)
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13:37 - 13:39Comment paramétrer « plus ou moins »?
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13:39 - 13:43Comment l'insérer dans un joli petit logiciel? On ne peut pas.
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13:43 - 13:45J'aurais bien partagé mon point de vue avec les autres.
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13:45 - 13:47Mais personne n'était intéressé,
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13:47 - 13:51voyez-vous, jusqu'à ce que je rencontre Kishore Biyani du groupe Future.
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13:51 - 13:56Voyez-vous, il a établit la plus grande chaîne de vente au détail, appelée Big Bazaar.
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13:56 - 13:58Et il y a plus de 200 formats,
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13:58 - 14:00à travers 50 villes et cités en Inde.
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14:00 - 14:04Et il travaillait avec des marchés divers et dynamiques.
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14:04 - 14:06Et il savait très intuitivement que,
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14:06 - 14:08les meilleures pratiques,
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14:08 - 14:11développées au Japon, en Chine, en Europe et en Amérique
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14:11 - 14:14ne marcheront pas en Inde.
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14:14 - 14:18Il savait que la pensée institutionnelle ne marche pas en Inde. La pensée individuelle, oui.
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14:18 - 14:22Il avait une compréhension intuitive de la structure mythique de l'Inde.
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14:22 - 14:24Alors il m'a demandé d'être l'Officier en chef des Croyances, et m'a dit,
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14:24 - 14:27« Je voudrai seulement que tu alignes les convictions . »
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14:27 - 14:29Facile à dire.
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14:29 - 14:31Mais la foi ne peut être mesurée.
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14:31 - 14:33On ne peut pas la mesurer. On ne peut pas la gérer.
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14:33 - 14:35Alors, comment construit-on la foi?
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14:35 - 14:39Comment améliorer la sensibilité des gens à ce qui est typiquement indien?
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14:39 - 14:43Même si on est Indien, ce n'est pas très explicite, ce n'est pas très évident.
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14:43 - 14:47Alors j'ai essayé de travailler sur le modèle standard de la culture,
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14:47 - 14:49qui est le développement de contes, de symboles et de rituels.
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14:49 - 14:52Et je vais partager avec vous un des rituels.
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14:52 - 14:55Voyez-vous, il se fonde sur le rituel hindou de Darshan.
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14:55 - 14:57Les Hindous n'ont pas le concept de commandements.
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14:57 - 14:59Alors, il n'y pas de mal ou de bien dans ce qu'on fait dans la vie.
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14:59 - 15:02De ce fait, on n'est pas très sûr de la place qu'on tient aux yeux de Dieu.
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15:02 - 15:05Alors, quand on va au temple, on ne demande qu'une audience avec Dieu.
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15:05 - 15:07On veut voir Dieu.
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15:07 - 15:11Et on veut que Dieu nous voie, d'où le fait que les Dieux ont de très grands yeux,
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15:11 - 15:13de grands yeux qui ne clignent jamais,
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15:13 - 15:16parfois en argent,
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15:16 - 15:18pour qu'ils nous regardent.
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15:18 - 15:20Parce qu'on ne sait pas si on a tort ou raison, alors on ne cherche
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15:20 - 15:24que l'empathie divine.
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15:24 - 15:27« Je veux seulement que tu saches d'où je viens, et pourquoi j'ai agi de façon pas très catholique. »
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15:27 - 15:28(Rires)
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15:28 - 15:30« Pourquoi j'ai agi ainsi,
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15:30 - 15:35pourquoi je n'ai aucune considération pour la procédure, comprends-moi seulement, je t'en prie. »
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15:35 - 15:38Et se basant dessus, nous avons mis au point un rituel pour les managers.
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15:38 - 15:42Après qu'un manager complète sa formation et s'apprête à prendre charge du magazin,
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15:42 - 15:46on lui bande les yeux, on l'entoure de tous ceux concernés,
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15:46 - 15:50le client, sa famille, son équipe, son patron.
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15:50 - 15:53On lit à haute voix ses domaines clés de responsabilité, ses indicateurs clés de performance, on lui donne les clés,
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15:53 - 15:55et puis on enlève le bandeau.
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15:55 - 15:58Et invariablement, on voit une larme,
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15:58 - 16:00car ça a fait tilt!
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16:00 - 16:04Il se rend compte, que pour réussir,
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16:04 - 16:07il ne doit pas être un professionnel,
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16:07 - 16:10il ne doit pas supprimer ses émotions,
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16:10 - 16:13il doit inclure toutes ces personnes
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16:13 - 16:17dans son monde pour réussir, pour les rendre heureux,
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16:17 - 16:19pour donner satisfaction au boss, pour que tout le monde soit content.
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16:19 - 16:22Le client doit être content, parce que le client est comme Dieu.
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16:22 - 16:25Voilà la sensibilité dont on a besoin. Dès que cette conviction s'installe,
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16:25 - 16:28le comportement désiré en résultera, et les affaires auront lieu.
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16:28 - 16:31Et ça s'est passé.
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16:31 - 16:34Donc, nous revenons ensuite à Alexandre
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16:34 - 16:36et au gymnosophiste.
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16:36 - 16:40Et tout le monde me demande, « Quelle est la meilleure voie, celle-là ou l'autre? »
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16:40 - 16:42Et c'est une question très dangereuse.
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16:42 - 16:46Parce qu'elle peut mener au fondamentalisme et à la violence.
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16:46 - 16:48Donc, je ne répondrai pas à cette question.
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16:48 - 16:50Mais je vous donnerai la réponse indienne,
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16:50 - 16:52le signe de tête indien.
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16:52 - 16:54(Rires)
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16:54 - 16:58(Applaudissements)
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16:58 - 17:00Dépendant du contexte,
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17:00 - 17:02dépendant du résultat,
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17:02 - 17:05choisissez votre paradigme.
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17:05 - 17:08Voyez-vous, parce que ces deux paradigmes sont des constructions humaines.
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17:08 - 17:11Ce sont des créations culturelles,
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17:11 - 17:14pas des phénomènes naturels.
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17:14 - 17:17Et ainsi, la prochaine fois que vous rencontrerez quelqu'un, un étranger,
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17:17 - 17:19voici une requête:
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17:19 - 17:22Comprenez que vous vivez dans une réalité subjective,
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17:22 - 17:24ainsi que lui.
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17:24 - 17:26Comprenez ceci.
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17:26 - 17:31Et quand vous comprendrez ceci, vous allez découvrir quelque chose de spectaculaire.
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17:31 - 17:33Vous découvrirez qu'à l'intérieur de mythes infinis,
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17:33 - 17:35se trouve la vérité éternelle.
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17:35 - 17:37Qui en voit l'intégralité?
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17:37 - 17:39Varuna n'a que mille yeux,
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17:39 - 17:42Indra, une centaine,
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17:42 - 17:44Vous et moi, que deux.
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17:44 - 17:47Merci.
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17:47 - 18:05(Applaudissements)
- Title:
- Devdutt Pattanaik: L'Orient contre l'Occident – les mythes qui mystifient
- Speaker:
- Devdutt Pattanaik
- Description:
-
Devdutt Pattanaik jette un coup d'oeil révélateur aux mythes de l'Inde et de l'Occident – et montre comment ces deux systèmes de croyances fondamentalement différents à propos de Dieu, de la mort, et du ciel font que nous nous méprenons invariablement.
- Video Language:
- English
- Team:
closed TED
- Project:
- TEDTalks
- Duration:
- 18:08