Le travail vers la rédemption | Heather Lavelle | TEDxMuncyStatePrison

Ayant un diplôme universitaire, Heather Lavelle réussissait professionnellement jusqu'à ce que l'alcoolisme et la toxicomanie la poussent à commettre un crime violent ayant pour conséquence une peine de prison à vie. Elle détaille son parcours douloureux et difficile vers la rédemption et apporte des encouragements aux autres.

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. En savoir plus : http://ted.com/tedx

John Wetzel : L'espoir
est une ressource si importante ici,

mais je pense qu'il y a
une autre ressource

que nous, en tant que société,

et peut-être en tant que département,
peut-être en tant que personnes,

ne faisons pas très bien :

la notion de pardon.

Je crois que plus tôt, quelqu'un a parlé
de juger quelqu'un d'après son pire jour.

Nous sommes très bons pour en recevoir,

mais pour en donner,

du pardon,

nous ne sommes pas si bons.

Pour en parler, j'ai l'honneur
de présenter Heather Lavelle.

(Applaudissements) (Encouragements)

Heather Lavelle : Il y a neuf ans,

des suites d'une dépression,
de l'alcoolisme et de la toxicomanie,

j'ai tué un de mes amis.

Ce n'est pas quelqu'un
dont j'ignorais le nom avant ce soir-là.

C'est quelqu'un
que je connaissais bien, que j'aimais.

Je connaissais ses espoirs
et ses rêves pour l'avenir.

Je savais qu'il m'aimait.

C'est pour cela que c'est si difficile.

Comment s'en remettre
après avoir commis un crime si horrible ?

C'est l'histoire des hasards de la vie
qui m'ont menée vers un chemin

de découverte de moi-même
et, finalement, de pardon de moi-même.

A un moment dans ma vie,
je réussissais bien en affaires.

J'avais obtenu un diplôme universitaire.

J'étais issue d'une famille aimante,
avais des amis qui me soutenaient.

De l'extérieur, tout semblait aller

mais il y avait des défauts
dans la cuirasse.

Quand les choses ont commencé
à mal tourner dans ma vie,

j'ai plongé dans la dépression.

Je l'ai caché aux yeux des autres
et j'ai commencé à beaucoup boire,

ce qui m'a rendue plus déprimée.

J'avais l'impression
de vivre une double vie.

Il y avait le moi que ma famille voyait,
qui ne buvait pas devant eux

et qui avait réussi, était heureux,
maintenait de bonnes apparences.

Puis il y avait le moi qui était
plein de colère et d'amertume

et qui, tous les soirs,
buvait jusqu'à perdre conscience.

Mon niveau croissant de débauche
était nourri par les drogues et l'alcool.

J'ai commencé à laisser filer
les choses importantes dans ma vie

et je ne tenais plus le coup.

Ces deux mondes sont entrés en collision

et je ne pouvais rien faire
pour empêcher cela.

J'ai commencé à consommer
de la cocaïne, puis à fumer du crack.

Une fois que j'avais fumé,
plus rien n'avait d'importance.

Mon monde est devenu très petit et sombre.

Ma vie et celle des autres
n'avaient plus d'importance à mes yeux.

Je ne connaissais que le recours
aux drogues et à l'alcool

pour servir de barrière protectrice,

pour m'isoler de mes émotions
et étouffer mes sentiments.

Après mon arrestation,
je n'avais plus de protection

et j'ai dû faire face à la réalité
de ce que j'avais fait.

Je me détestais.

M'en remettre semblait impossible
après être devenue si mauvaise.

Je me sentais comme morte,
mon âme s'en était allée.

Une fois mort, d'où vient
l'étincelle de vie ?

A ce moment-là,
le point le plus bas de ma vie,

Dieu m'a fait connaître sa présence
d'une façon très puissante.

Sans son intervention,

je n'aurais peut-être pas pu dépasser
ce sombre moment dans ma vie.

J'ai appris que le procureur

allait demander la peine de mort
dans mon affaire.

Cela a déclenché quelque chose en moi.

Pour la première fois
depuis des années, je voulais vivre.

Ce n'était pas qu'une réaction de colère.

Comment osez-vous penser que vous pouvez
me dire quand je vais mourir ?

Quelle qu'en soit la raison,
ma vie a pris de l'importance à mes yeux.

Ne sachant pas si qui que ce soit
voudrait un jour me parler de nouveau,

j'ai réuni le courage nécessaire
pour appeler ma mère.

Avant que je ne puisse
dire quoi que ce soit,

ma mère a dit :

« Heather, tu es ma fille et je t'aime.

J'ignore ce qu'il s'est passé,

mais tu es ma fille
et je t'aimerai toujours. »

Tant que je vivrai,
je n'oublierai jamais cette conversation.

Elle a eu un effet sur moi,
mon cœur s'est ouvert.

Quand j'ai appelé mon père, il a dit :

« Tout ce que tu peux faire à présent
est te racheter. »

Ces mots me sont restés.

Cette idée selon laquelle ma famille
et Dieu m'avaient pardonnés

m'a permis d'aller de l'avant.

Cela m'a époustouflée que les gens
soient prêts à me pardonner

pour une chose
que je considérais impardonnable.

J'ai commencé à croire
qu'il y avait peut-être de l'espoir.

Les années qui ont suivi,
des gens sont entrés dans ma vie

pour des raisons que je ne pouvais pas
comprendre à l'époque.

Beaucoup d'amis m'ont aidée :
de nouveaux amis, de vieux amis.

De nouveaux amis, comme Ginger,
m'écoutaient pleurer au début

quand je ne pouvais pas imaginer dire
ce que j'avais fait à qui que ce soit.

Ginger était une si belle femme

et je me souviens de lui avoir dit
qu'elle était si bonne

et que je ne voulais pas la contaminer
avec la laideur qui était en moi,

telle une boue noire
recouvrant mes entrailles.

Et il y avait de vieux amis comme Myrna,
rencontrées des années auparavant aux A.A.

Myrna a entendu parler de mon arrestation
et elle m'a contactée.

Avant qu'elle ne décède,
elle a parcouru les étapes avec moi.

Elle s'est assurée
que cela allait aller pour moi

en me mettant en contact
avec d'autres membres des A.A.

Mes amis m'ont aidée
à accepter qui j'étais,

mon addiction, mon enfance,
tous les autres problèmes de ma vie.

Mais je laissais un mur de déni
se bâtir autour de mon crime

et de la raison pour laquelle
j'étais en prison.

Il était facile de laisser les gens penser

que c'était de la faute
de mon codéfendeur.

Je ne corrigeais pas les gens
quand ils supposaient cela.

Ce n'est qu'après avoir participé
à un groupe de prévention de la violence

que ce mur de déni
à commencer à s'effriter.

Ce groupe m'a poussée à confronter
la réalité de qui j'étais et de mes actes.

Je disais : « Je ne suis pas
quelqu'un de violent. »

Et ils disaient : « Mais tu as
commis un crime violent. »

J'ai commencé à voir
un psychologue régulièrement.

Au début, je ne pouvais même pas
prononcer le nom de ma victime,

mais je savais qu'il me fallait
faire face à mes actes.

Il était temps d'accepter mon passé.

Quelque part en chemin,
j'ai pris la décision

d'effectuer le dur travail nécessaire
à accepter mon passé

même si c'était l'une des choses
les plus dures que j'aie jamais faites.

J'ai arrêté d'écarter
les suggestions du psychologue

et j'ai commencé à effectuer le travail.

J'ai effectué le travail consistant
à faire face à ma culpabilité et ma honte.

J'ai parlé de comment
j'en étais arrivée là dans ma vie.

J'ai parlé de comment je pouvais m'assurer

de ne jamais en arriver
à nouveau au même point.

Je tenais un journal de mes sentiments

et des choses que je voulais
dire à ma victime.

J'ai parlé des événements de ce soir-là

et des jours précédents
de façon affreusement détaillée.

J'ai dû vivre ce soir-là
du point de vue de ma victime.

C'était un travail douloureux
mais nécessaire à ma survie.

La douleur et l'angoisse me tuaient.

Je devais atteindre l'acceptation.

Je ne pouvais plus prétendre

que la partie de moi ayant commis
cet horrible acte violent

n'existait pas.

Après des années à ne pas me sentir digne
de parler à la famille de ma victime,

je leur ai écrit une lettre.

Envoyer cette lettre
a libéré quelque chose en moi.

Cela m'a permis de commencer
à partager mon expérience.

Quand des femmes viennent me voir

avec leur culpabilité,
leur honte et leurs remords,

je peux leur dire combien
écrire cette lettre m'a aidée

et les encourager à commencer
le travail nécessaire

pour qu'elles soient en position
d'écrire une lettre similaire.

Je n'aurais jamais pu écrire une lettre
si honnête et introspective

si je n'avais pas effectué
tout le travail qui m'y a menée.

J'ai rencontré un homme
qui avait pardonné le tueur de son fils.

J'ai été émerveillée que qui que soit
ait une telle capacité à pardonner.

Le rencontrer m'a permis

d'exprimer mes pensées
et mes sentiments au sujet de mon crime.

Il symbolise la famille de ma victime,

que je ne pourrais peut-être
jamais rencontrer.

J'ai pu parler de ce que j'ai fait,
de pourquoi je l'ai fait,

de ce que j'ai ressenti sur le moment
et de ce que je ressens maintenant.

Il m'a dit qu'il était normal
de demander pardon.

Il m'a aussi dit de vivre ma vie
comme si je m'étais pardonnée.

Il a raison.

Je ne me contiens plus
par culpabilité et honte.

Je tiens aux gens dans ma vie.

Ma santé physique, mentale et spirituelle
a de la valeur à mes yeux.

La vie est précieuse.

Je suis impliquée dans ma vie et je vis
intentionnellement et délibérément.

J'ai de l'espoir pour l'avenir.

Je ne suis plus la personne que j'étais.

Me pardonner ne signifie pas que j'oublie.

Je ne pourrai jamais oublier.

Ce que j'ai fait fait partie de moi,
mais je peux aller de l'avant.

Je n'ai pas à rester coincée
jusqu'à la fin de ma vie.

Je crois que quelque chose
de plus grand que la chance ou le destin

a mis ces gens dans ma vie.

Ils sont tous entrelacés sur mon chemin
de découverte de moi-même et de pardon.

Chacun d'entre eux, mis dans ma vie
exactement quand j'en avais besoin,

m'a apporté du soutien, des conseils,
de la compassion, de la force,

de la sagesse et du pardon à sa façon.

Ils sont tous comme des fils
entrelacés dans la tapisserie de ma vie.

Chaque fil est tissé au bon moment
et au bon endroit

pour former un dessin
unique et magnifique.

Vous pouvez vous remettre
d'un moment si incroyablement mauvais.

J'en suis la preuve vivante.

Mesdames et messieurs,
n'abandonnez jamais,

peu importe à quel point vous êtes brisés.

Créer votre propre chemin
de guérison et de rédemption.

Que Dieu vous bénisse.

Je suis Heather Lavelle.

(Applaudissements) (Encouragements)