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Bonjour,
je m’appelle Philippe Corbé,
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je suis le correspondant
de RTL à New-York,
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et voici un nouvel épisode
d’une Lettre d’Amérique.
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Avant de vous la diffuser,
je voudrai vous remercier
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pour les premiers retours encourageants
pour ce nouveau podcast.
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Abonnez-vous d’ailleurs pour recevoir
chaque semaine un nouvel épisode.
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Je vais m’arrêter quelques
semaines cet été,
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je vais aussi aller présenter quelques RTL
Soir depuis les studios de RTL à Neuilly.
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Mais promis, dès la fin août,
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vous retrouverez de nouveaux épisodes
d’Une Lettre d’Amérique.
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Hi everyone.
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Je vous avais dit il y a quelques
semaines,
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lors d’un des premiers épisodes, que ces Lettre d’Amérique
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seraient des cartes postales
que je vous enverrai d'un peu partout
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aux États-Unis et aujourd'hui
je vais tenir promesse.
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C'est vraiment, vraiment
une image de carte postale
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qui est devant moi à cette heure-ci
au coucher du soleil.
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Je me trouve, vous l’entendez
certainement derrière moi sur une plage,
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une belle plage, longue plage
de sable blanc, à 5 mètres de moi,
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les rouleaux
et d’ailleurs, la mer monte
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donc je ne vais pas trop traîner parce que
je n’ai pas envie de me faire mouiller.
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Je suis avec mon magnétophone posé
sur le sable de la plage de Fire Island,
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qui est une île ou plutôt une bande côtière
à Long Island donc au nord-est de New-York.
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En fait, on se trouve ici
à environ 85, 90 kilomètres de Manhattan,
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Vous savez que les Américains
n’ont pas beaucoup de vacances,
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donc quand ils le peuvent, ils s’échappent
dès le vendredi midi l’été,
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pour passer un jour
ou deux près de la plage.
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Les New Yorkais qui ont beaucoup d’argent
vont un peu plus au nord à Long Island,
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dans ce qu’on appelle
les Hamptons. C’est très chic.
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Ça me rappelle un peu les alentours
de Deauville en Normandie,
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de très belles villas,
vraiment, c’est très beau.
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Les plus riches d'ailleurs partent
en hélicoptères de Manhattan
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pour éviter
les embouteillages
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Les moins riches eux,
prennent le bus.
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Moi je suis arrivé tout à l’heure en train
de banlieue, au départ de New-York
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et ensuite j'ai pris un ferry
pour arriver ici à Fire Island.
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D'ailleurs ici à Fire Island, pas de grande
villas aux pelouses soignées. Non,
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c’est très rustique,
il n’y a pas de voiture,
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on marche à pied sur des chemins parfois
recouverts de planches de bois.
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Des chemins entourés de pin,
ça sent très bon.
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Des maisons assez simples, entourés
de marais, le long de cette superbe plage.
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Je viens ici quand je peux
m’échapper l’été de Manhattan,
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quand l’actualité me laisse
un peu de répit.
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Parfois je fais l’aller-retour le dimanche.
Ça fait du bien, évidemment.
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Mais je dois vous avouer que,
tout à l’heure, quand j’ai posé le pied
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sur le ponton de Fire Island,
quand je suis descendu du ferry,
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j’avais une petite anxiété
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Je crois que je ne suis pas
le seul à avoir été traumatisé
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quand j’étais petit par
cette musique de John Williams,
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que Steven Spielberg
a su utiliser habilement
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pour terrifier les spectateurs
de son film Les Dents de la Mer.
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Quand on y pense d’ailleurs,
la peur venait presque
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de la musique plus que
des images de requin.
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Ici aux États-Unis,
le film s’appelle Jaws, Machoires.
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Alors je n’ai pas grandi en ayant
peur des requins.
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On n’en croise pas beaucoup
sur les plages
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du nord-Finistère où
j’ai eu la chance de grandir.
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Mais je dois vous avouer qu’aujourd’hui ici,
à Fire Island, sur cette plage,
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je ne peux pas m’empêcher de penser aux
films de Spielberg Les dents de la mer,
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et pas seulement parce qu’il a été tourné
dans une station balnéaire
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du nord-est des États Unis,
pas très loin d'ici.
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Non, ici à Fire Island, sur cette plage,
l’été dernier,
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deux jeunes de 12 et 13 ans
ont été mordus
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à deux endroits différents
de la plage par deux requins.
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Et quand je dis requins, je ne parle pas
de petits requins d’aquarium.
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Non, 2 mètres 40, quand même,
vraiment impressionnant.
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Surtout que
l’un d’entre eux a laissé
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une dent plantée dans la peau
du petit de 13 ans,
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qui était sur
une planche de surf.
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Et tous les deux, je vous rassure,
ont survécu sans blessure trop grave.
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Alors ça a surpris tout le monde,
ici l’été dernier, car depuis 1837,
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depuis que les relevés existent
dans l’État de New York,
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les autorités n’ont compté que 12 attaques
de requins sur des humains.
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Et donc deux la même journée,
en juillet 2018.
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Des attaques de requins,
c’est assez fréquent aux États Unis,
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mais dans les eaux chaudes de Floride,
d’Hawaï, de Californie, de Caroline du Sud.
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Ici, Long Island, dans l’État
de New York, on est très au Nord ,
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très au nord
par rapport à la Floride.
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Et il y a même eu
un mort plus au nord,
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l’été dernier dans l’État
du Massachussetts
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l’État de Boston, à quelques heures
de route du Canada.
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C’était la première attaque mortelle
de requin dans le Massachusetts depuis 1936.
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Alors, ces dernières semaines, il y a déjà eu
plusieurs attaques sur la côte Atlantique.
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Un petit de 8 ans a été mordu
en Caroline du Nord.
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C’est là aussi qu’une ado
de 17 ans, Page, début juin,
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a perdu presque toute sa
jambe gauche et plusieurs doigts.
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Et je dois vous dire qu’il y a
quelques semaines, au réveil,
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quand j’ai branché la matinale
de ABC et que j'ai entendu
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le témoignage de Page racontant
ce qu’elle avait vécu,
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et ce moment où le requin a mordu
dans sa jambe, c’était assez curieux.
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Je vous propose d’écouter
ce témoignage,
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de cette jeune fille de 17 ans qui a perdu
sa jambe début juin 2019.
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« Je rigolais,
parce que je me suis dit…
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vous savez vous allez
à la plage avec votre famille,
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et ils attrapent votre jambe sous l’eau,
comme une blague.
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Et donc Ah ah ah…
très drôle… Aiiiie…
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Et là je me suis débattue,
à repousser,
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je sentais que ça m’entourait,
mais qu’est ce qui se passe ???
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Je me souviens qu’un instant
je me suis laissée faire,
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et je me suis dit, non,
attend un peu,
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je peux pas faire ça, c’est pas possible.
Je me suis mise à prier.
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J’ai 17 ans, s’il te plait,
ne me laisse pas mourir !
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Je suis pas prête
à mourir…
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Et là mon père
m’a soulevée de l’eau.
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Je voyais où elle était
car l’eau était rose.
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Je l’ai soulevée,
et le requin est venu avec elle.
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Vous vous mettez immédiatement
à taper dessus comme vous pouvez.
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Il me regardait de côté.
Un œil énorme, noir, perçant.
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Heureusement que son père
est pompier, secouriste.
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Il a su réagir au plus vite
pour sauver sa fille de 17 ans, Page,
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qui on l’entend dans
ce témoignage à ABC,
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a malgré tout une énergie incroyable,
une forme d’optimisme communicatif.
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Je ne suis pas le seul habitant de la côte
est des États-Unis, la côte Atlantique,
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à m’inquiéter
en venant à la plage.
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Je me rassure
en regardant les chiffres.
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Statistiquement, j’ai plus de risques
de mourir en étant mordu par un chien,
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ou en prenant mon vélo
en bas de chez moi à Manhattan,
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que de croiser un requin ici en venant
sur la plage de Fire Island.
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Mais malgré tout ce n’est
pas totalement infondé.
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Il y a plus de
requins qu’avant.
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Des équipes de spécialistes
se chargent de placer
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des puces sur les requins
pour suivre leur parcours.
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Et on voit qu’ils remontent très au nord,
vers le Massachussets,
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ou ici, autour de Long Island. Et d'ailleurs,
entre Long Island et le Connecticut,
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on ne cesse de nous dire
qu’il va falloir qu'on s'y habitue,
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que ces attaques seront
de plus en plus fréquentes,
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car les experts préviennent
que le nombre
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de grand requins blancs
est en augmentation,
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ici, dans les eaux longeant
les côtes du nord-est des États-Unis.
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Ce n’est pas directement
un effet du dérèglement climatique.
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C'est plus un effet de
la protection des phoques.
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Les phoques sont mieux protégés
qu’avant donc il y en a davantage.
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Plus de phoques,
c’est plus de proies pour les requins,
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qui les suivent
au plus près de la côte.
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Puisqu’il y a plus
de nourriture,
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il ne faut pas s’étonner
qu’il y ait plus de requins.
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Alors est-ce qu’il va falloir
trouver un moyen
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pour limiter la reproduction
des phoques,
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avec des programmes
de contraception
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que les requins prédateurs aient moins
à manger dans le coin et s’éloignent ?
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Sauf que les phoques sont
protégés par la loi, donc c'est compliqué.
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Certaines villes côtières se demandent
s’il serait possible d’imaginer
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des barrières physiques pour empêcher
que ces grands requins
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arrivent jusqu’aux plages ?
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Des habitants se mobilisent. Ils apprennent
les gestes de premiers secours,
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les gestes spécifiques
en cas d’attaque de requin.
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Par exemple comment limiter très vite
le saignement après une morsure.
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Et donc il y a des panneaux sur un certain
nombre de plages le long de Fire Island,
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Il y a même des drapeaux
avec des figurines,
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des figures de requins,
des dessins de requin.
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C’est assez frappant quand
on arrive sur ces plages.
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Des téléphones fixes
ont été installés
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depuis l’été dernier sur un certain nombre
de chemins d’accès aux plages
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car les connexions de téléphone portables
ne sont pas toujours très bonnes ici.
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Donc ici au moins, il y a des téléphones
qui peuvent permettre d’appeler les secours.
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Ce n’est pas très facile d’accéder ici,
donc chaque minute est importante.
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Des boites ont d'ailleurs été plantées
avec tout le nécessaire
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pour les premiers soins
après une morsure de requins.
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Des boites qui sont accessibles aussi
quand on arrive sur les chemins.
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Tout cela évidemment
peut vous sembler excessif,
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il y a eu ici « que » deux attaques
de requins sur la plage,
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plus deux
dans le Massachussetts.
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Mais il s’agit surtout
de rassurer les visiteurs comme moi.
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Parce que la peur que je ressens,
je ne suis pas le seul à y penser,
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je vous rassure. Elle existe,
elle est un peu irrationnelle,
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mais elle peut coûter cher
à ces villages,
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à ces villes
qui vivent du tourisme,
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qui se sont enrichies grâce aux visiteurs
des week-ends d’été.
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Si ces plages deviennent dangereuses,
ou un peu dangereuse,
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même l’immobilier
va prendre un coup,
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et donc le patrimoine
de ceux qui ont investi
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ici parfois depuis
plusieurs générations.
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Donc c’est important pour eux,
et c’est d’abord pour ça
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que les habitants
sont nerveux.
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Bon, je vais essayer de ne pas trop y penser
et je vais me baigner dès que j’aurai fini ce podcast.
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J’espère revenir en un seul morceau,
je vous tiendrai au courant si ce n'est pas le cas !
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Merci en tout cas d’avoir suivi ce nouvel
épisode d’une Lettre d’Amérique.
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Merci d'ailleurs au passage
pour vos encouragements,
-
vous avez été nombreux à avoir écouter
les premiers épisodes
-
qui sont toujours disponibles
sur RTL.FR.
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et à m'envoyer quelques retours.
Donc n’hésitez pas à le faire.
-
N’oubliez pas
de vous abonnez,
-
pour recevoir chaque semaine
une nouvelle Lettre d’Amérique.
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On se retrouve à la rentrée,
dans quelques semaines,
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j’ai prévu de vous envoyer
des lettres de Floride,
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d’Alaska, et Dieu sait où l’actualité
me mènera à la rentrée.
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Je vous laisse évidemment avec…
John Williams
-
la bande originale de ce film
des Dents de la Mer
-
qui me faisait si peur
quand j’étais petit.
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Thank you and goodbye.