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« Vous avez le rite »

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    Mon fils et moi portons des chaussures
    de la même pointure.
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    Il veut une paire
    d'Air Jordan 4 pour Noël.
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    Je les lui achète,
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    puis je les vole dans son armoire
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    tel un épisode tordu
    de « Black-ish » à la « The Grinch ».
  • 0:18 - 0:20
    (Rires)
  • 0:20 - 0:22
    Les chaussures sont
    des totems célébrant ma jeunesse.
  • 0:23 - 0:25
    Elles deviennent du mercure
    sur mes pieds d'homme noir.
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    Je ne peux pas retrouver assez vite
    ces jeunes jours de liberté.
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    J'ai été rapide quand j'avais 16 ans,
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    échappant à un concierge
    de l'Upper East Side.
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    Il m'a surpris en train
    de vandaliser son bâtiment,
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    même pas un dessin malin,
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    juste... stupide.
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    De tous les genres,
    les garçons sont les plus stupides.
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    (Rires)
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    De mes seize ans, il ne reste
    que des fuites éperdues ;
  • 0:51 - 0:52
    je n'ai jamais rien dit à mes parents.
  • 0:52 - 0:55
    Je suppose que mon fils
    préserve cette tradition avec adresse.
  • 0:56 - 0:58
    Mes seize ans,
    c'était « The Low End Theory »
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    et Marvin Gaye en boucle.
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    À seize ans, on est plus jeune que Trayvon
    mais plus âgé qu'Emmet Till.
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    En attendant son permis,
    mon garçon fait la queue
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    pour officiellement entrer
    dans la fleur de l'âge d'un suspect :
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    jeune, de couleur et derrière le volant,
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    une muléta en mouvement, signalant
    la menace des communautés venant du bas.
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    Au sommet de la chaîne alimentaire,
    pas de prédateur naturel,
  • 1:20 - 1:24
    mais l'Amérique reproduit une chose
    génétiquement intégrée et instinctive
  • 1:24 - 1:27
    dans son appétit pour le corps noir.
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    L'Amérique abat les corps noirs,
    passe près d'eux, les contourne,
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    blasée,
  • 1:31 - 1:35
    tels des lions laconiques
    à côté de gazelles à moitié dévorées,
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    le goût du sang aux lèvres...
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    « L'Amérique et le Corps noir »,
    un reportage du National Geographic.
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    Mon fils a réussi son permis
    auprès de la préfecture.
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    Il se pavane, fait un Crip-Walk
    déconstruit à la « Fornite »
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    en chemin pour finir sa paperasse,
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    de la joie pure et du cool calibré
    sous l’œil de mon iPhone qui filme,
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    la danse de la victoire de quelqu'un
    qui vient de sauver un match nul.
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    Il a mérité sa victoire,
    mais il a aussi tellement 16 ans
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    qu'il ne peut pas vraiment laisser
    son corps être complètement libéré.
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    Quand il avait trois ans,
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    j'étais menotté dans le centre d'Oakland.
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    Cinq minutes auparavant,
    j'étais illégalement stationné.
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    Me voilà à l'arrière
    d'une voiture de police,
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    estimant les risques que je meure
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    ici, à 15 minutes de mon fils
    qui s'attend à ce que dans 18 minutes,
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    son papa aille le chercher
    à la maternelle.
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    Il n'y a pas de caméras de poche
    pour filmer ce moment.
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    J'ai appris beaucoup de gros mots
    pour les examens quand j'avais 16 ans
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    mais aucun ne me vient à cet instant.
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    Dans la voiture de police,
    la seule chose qui parle, c'est ma peau.
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    Je sais ceci :
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    j'étais stationné sur une zone
    pour les bus à la 12ème et Broadway,
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    je vais au distributeur du coin.
  • 2:40 - 2:43
    Je retire l'argent juste
    quand la voiture de police se range,
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    je lui fais cette tête sincèrement
    désolée d'homme noir.
  • 2:46 - 2:50
    Il attend que je sois dans la voiture
    et actionne la sirène,
  • 2:50 - 2:52
    prend mon permis
    avec sa main sur son arme,
  • 2:52 - 2:54
    revient deux minutes plus tard,
    l'arme sortie,
  • 2:54 - 2:57
    une autre voiture de patrouille,
    quatre flics maintenant,
  • 2:57 - 3:00
    mon visage contre le trottoir,
    les mains dans le dos, menottées.
  • 3:00 - 3:02
    Je suis en colère et humilié,
  • 3:02 - 3:05
    seulement jusqu'à ce que
    j'aie peur puis que je sois triste.
  • 3:05 - 3:09
    Je sens comme mon dernier soupir
    avant ma propre mort.
  • 3:09 - 3:12
    Combien de temps mon garçon
    devra-t-il attendre avant de comprendre
  • 3:12 - 3:14
    que papa ne viendra pas ?
  • 3:14 - 3:17
    Je pense que son dernier
    souvenir de moi à peine formé
  • 3:17 - 3:20
    sera le récit de comment
    je ne suis jamais venu le chercher.
  • 3:20 - 3:23
    J'essaye de dire au revoir par télépathie.
  • 3:23 - 3:25
    Le silence ne m'apporte aucune paix.
  • 3:25 - 3:27
    Le calme rend le repos difficile.
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    Dans le vide, la colère se prolifère
    dans la mousse au pied de mes pensées,
  • 3:31 - 3:34
    un champignon poussant sur l'échine
    de mes tentatives de liberté.
  • 3:34 - 3:37
    Je suis libéré de tout sauf du mépris,
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    l'esprit d'un civil non armé
    à une ère d'instabilité civile,
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    aucune paix, que des faussets
    de Marvin Gaye
  • 3:44 - 3:46
    qui s'arquent tel un moineau
    à l'aile brisée,
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    rivalisant contre les sirènes vides,
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    chantant la police.
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    Apparemment, un type de Richmond
    avait un mandat contre lui
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    et quand le flic a dit
    mon nom à l'opérateur,
  • 3:56 - 3:58
    le mec n'a pas entendu « Marc Joseph »
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    mais « Mike Johnson ».
  • 4:00 - 4:03
    Je compte maintenant sept voitures
    et 18 flics à l'intersection,
  • 4:03 - 4:06
    une meute autour d'un kilo de viande.
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    Par la grâce de Dieu,
    je ne suis pas jeté à la bête aujourd'hui.
  • 4:10 - 4:13
    Magnanimement, le premier flic
    veille à me donner une amende
  • 4:13 - 4:15
    pour stationnement interdit
  • 4:15 - 4:16
    avant de me libérer.
  • 4:17 - 4:19
    Maintenant, mon garçon a 16 ans.
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    Il a un permis pour conduire
    dans la ville sans but,
  • 4:23 - 4:25
    assez de corps pour marcher dans mes pas.
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    J'ai du gris dans ma barbe
  • 4:27 - 4:28
    et cela dit la vérité.
  • 4:28 - 4:32
    Il peut naviguer dans la circulation
    à l'âge des véhicules autonomes.
  • 4:32 - 4:35
    Vous savez, les gens disent
    « la conversation »
  • 4:35 - 4:37
    comme si cela n'arrivait qu'une fois,
  • 4:37 - 4:40
    que ma mémoire avait été effacée
    et mon internet en panne,
  • 4:40 - 4:42
    que je ne lisais pas
    le nom du martyr du jour,
  • 4:42 - 4:44
    que c'était le jour
    où je n'aimais pas assez mon fils
  • 4:44 - 4:47
    pour lui dire : « Mec, je me fous
    complètement de tes droits.
  • 4:47 - 4:49
    Ta mission, c'est de rentrer à la maison.
  • 4:50 - 4:52
    Reste en vie pour raconter l'histoire.
  • 4:52 - 4:54
    Rentre à la maison, auprès de moi. »
  • 4:54 - 4:57
    La conversation d'aujourd'hui
    est surtout dans ma tête
  • 4:57 - 5:01
    alors qu'il s'engage sur l'autoroute
    et que Marvin Gaye passe à la radio.
  • 5:01 - 5:03
    Je porte les chaussures de mon fils
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    et le morceau dans ma tête est l'au revoir
    que j'ai failli ne jamais dire,
  • 5:06 - 5:08
    un au revoir de la durée d'un requiem,
  • 5:08 - 5:11
    un baiser, l'odeur de son cou,
  • 5:11 - 5:12
    la durée d'une révélation
  • 5:12 - 5:15
    et une requête s'envolant haut
    dans le ciel amical
  • 5:15 - 5:17
    sans jamais quitter le sol.
  • 5:17 - 5:19
    Ma douleur est
    une ligne de basse ambulante,
  • 5:19 - 5:23
    un refrain, du stress placardé
    contre une ligne de base évanescente.
  • 5:23 - 5:26
    Écoutez, ce n'est pas
    pour être romantique,
  • 5:26 - 5:30
    mais pour invoquer un scénario plausible
    pour le moment existentiel.
  • 5:30 - 5:34
    Conduire en étant noir
    est une expérience propre en son genre.
  • 5:34 - 5:36
    Demandez à Marvin.
  • 5:36 - 5:39
    Ce n'est peut-être pas pour cela
    que tu chantes comme un ange,
  • 5:39 - 5:44
    mais cela a certainement à voir avec
    pourquoi le paradis s'incline à ta voix.
  • 5:44 - 5:47
    Le garçon au volant,
    le flic dans le rétroviseur,
  • 5:47 - 5:50
    c'est un bon pour voyager ou mourir.
  • 5:50 - 5:52
    Quand vous parlez à un garçon noir,
  • 5:52 - 5:55
    vous espérez qu'il soit de la faction
    de la fraction qui survit.
  • 5:55 - 5:58
    Vous l'accordez sur la fréquence
    de votre au revoir télépathique,
  • 5:58 - 6:02
    canalisez l'amour alimenté
    par le registre supérieur de Marvin
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    sous sa scutellaire.
  • 6:03 - 6:06
    La musique noire sous son meilleur jour
  • 6:06 - 6:07
    est un trou noir qui a explosé
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    pour répondre à l'appel
    de l'Amérique sous son pire jour.
  • 6:11 - 6:14
    Abattez-nous, la musique
    continue de vivre,
  • 6:14 - 6:17
    noire, comme du goudron, du tabac
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    ou du coton dans de l'eau boueuse.
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    Rentre à la maison,
    reviens à mes côtés, mon fils.
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    Comme un amour suprême,
    un Dieu qui est amour,
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    un amour qui prévaut,
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    des plumes pour l'élévation angélique
    du mort sans repos,
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    comme un générique
    pour un homme en détresse,
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    ou un garçon de 16 ans, libre de faire
    des erreurs et d'y survivre,
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    d'en grandir.
  • 6:39 - 6:44
    Sainte, sainte miséricorde,
    ayez pitié de moi,
  • 6:44 - 6:45
    miséricorde,
  • 6:45 - 6:47
    miséricorde.
  • 6:51 - 6:52
    Merci.
  • 6:52 - 6:59
    (Applaudissements)
Title:
« Vous avez le rite »
Speaker:
Marc Bamuthi Joseph
Description:

Dans une époustouflante interprétation de poésie parlée influencée par le jazz, le membre TED Marc Bamuthi Joseph partage la tendre et déchirante introspection d'un père sur la fierté et la terreur de voir son fils entrer dans l'âge adulte.

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English
Team:
closed TED
Project:
TEDTalks
Duration:
07:14
eric vautier approved French subtitles for "You Have the Rite"
eric vautier edited French subtitles for "You Have the Rite"
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Claire Ghyselen accepted French subtitles for "You Have the Rite"
Claire Ghyselen edited French subtitles for "You Have the Rite"
Claire Ghyselen edited French subtitles for "You Have the Rite"
Morgane Quilfen edited French subtitles for "You Have the Rite"
Morgane Quilfen edited French subtitles for "You Have the Rite"
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