David Biello : J'ai
l'honneur et le privilège
de vous présenter Dr. Georges Benjamin,
directeur exécutif de l'Association
Américaine de la Santé Publique,
qui a une longue et éminente carrière,
en tant que professionnel
médical et de la santé publique.
Veuillez accueillir chaleureusement
le Dr. Georges Benjamin.
GB : Bonjour, David, comment allez-vous ?
DB : Je vais bien, et vous Dr. Benjamin ?
GB : Je suis là. (Rit)
DB : On tient bon.
Très bien.
GB : On tient bon.
DB : Nous savons que le thème du moment,
c'est le déconfinement.
On vient d'entendre une manière de faire,
mais évidemment,
beaucoup de pays ont déjà déconfiné
sous une forme ou une autre,
et je crois, qu'à partir d’aujourd’hui,
tous les 50 États ici aux États-Unis ont
déconfiné sous une forme ou une autre.
Comment faire cela intelligemment,
et sans danger ?
GB : Oui, il faut vraiment déconfiner
en toute sécurité et avec prudence,
et cela signifie que nous ne devons pas
oublier les mesures de santé publique
qui ont vraiment fait baisser
le nombre de malades au départ.
Et ça veut dire
se couvrir le nez et la bouche
quand on tousse ou éternue,
porter un masque, se laver les mains
ou s'éloigner physiquement des autres
dans la mesure du possible.
Il faut penser à tout ce qu'on fait,
vous savez, avant d'aller
au travail le matin,
et pendant qu'on est au travail.
Il convient aussi d'être aussi prudent
que beaucoup l'ont été
ces deux derniers mois,
pendant les trois prochains mois,
parce que ce n'est pas fini.
DB : D'accord.
Il risque d'y avoir une deuxième vague
comme l'a dit Uri [Alon].
On dirait que c'est un peu à nous tous
d'assumer la santé publique,
comme un second travail.
Vous êtes d'accord ?
GB : Vous savez, j'ai beaucoup dit
que maintenant qu'on sait tous
ce qu'est vraiment la santé publique,
tout le monde devrait admettre que
leur second métier est la santé publique,
qu'on ramasse les poubelles,
qu'on travaille dans une épicerie,
qu'on soit chauffeur de bus,
ou qu'on travaille dans
la santé publique comme moi,
médecin ou infirmier,
tout le monde doit intégrer
la santé publique
dans ses actions de tous les jours.
DB : À votre avis -
Si on est tous professionnels
de la santé publique,
à quelle « nouvelle normalité »
doit-on s'attendre, à votre avis,
avec le déconfinement ?
À quoi cela va-t-il ressembler,
ou qu'espérez-vous en tout cas, en tant
que professionnel de la santé publique ?
GB : Si j'avais une baguette magique,
j'encouragerais clairement
les gens à s'occuper plus
des problèmes de santé publique.
À se laver les mains
et penser à ce qu'ils font pour rester
en sécurité quand ils sortent en public.
Vous savez, il n'y a pas si longtemps,
on ne mettait pas de ceinture
quand on montait en voiture.
Aujourd'hui, on le fait
sans même y accorder une seconde.
Beaucoup de gens ne fument pas,
parce qu'on sait que
c'est mauvais pour la santé.
On regarde à droite et à gauche
avant de traverser la rue.
Beaucoup, vous voyez,
bricolent des choses chez eux
pour ne pas trébucher.
Donc, avec le temps qui passe
à côtoyer cette épidémie,
j'espère que les gens feront
beaucoup plus attention
aux choses qui peuvent
provoquer des infections.
Donc, bien nettoyer, bien désinfecter.
Plus important, ne pas aller travailler
quand on est malade.
J'espère que les employeurs vont autoriser
le congé maladie payé pour tous,
afin que les gens restent chez eux.
Oui, ce sont des coûts supplémentaires,
mais je peux vous dire qu'on a appris
que le coût de l'inaction
représente des milliards
et des milliards de dollars.
Le congé maladie rémunéré
n'est pas très cher à côté.
DB : Oui, je pense qu'on est jaloux,
ici aux États-Unis,
de tous les pays qui ont peut-être
un système de santé plus complet que nous.
Êtes-vous d'accord si on dit
que les masques symbolisent
cette mentalité d'adopter « la santé
publique » comme second métier ?
GB : Vous savez, c'est amusant.
Nos collègues en Asie ont des masques -
porter un masque est dans leur culture -
depuis des années.
Et ça nous a toujours un peu fait rire.
Quand je suis allé là-bas,
je rigolais toujours un peu
en voyant des gens porter un masque.
Et bien sûr, quand tout a commencé,
on conseillait les masques
seulement pour les gens infectés
ou bien sûr, le personnel de santé,
qui étaient dans un environnement
à plus haut risque.
Mais je pense que porter un masque
va faire partie de notre culture.
On a déjà compris que ça ne fera pas
partie de notre culture estivale,
même si pour le moment, ce serait mieux.
Mais je crois vraiment qu'on va voir
de plus en plus de gens avec un masque
dans toutes sortes de situations.
Et je pense que ça fait sens.
DB : Oui, porter un masque montre
que nous faisons attention aux autres.
Et qu'on a cette mentalité
de santé publique.
Au sujet de l'Asie,
qui a pris les bonnes décisions ?
Dans le monde entier, ça fait
longtemps que vous agissez
et que vous communiquez avec vos pairs,
qui a agi de manière appropriée
et que peut-on apprendre
de ces exemples ?
GB : Oui, la Corée du Sud est un modèle
à plusieurs égards.
Et vous savez, la Chine finalement,
s'est plutôt bien débrouillée.
Mais le secret de tous ces pays
qui ont eu moins de morbidité
et de mortalité que nous,
c'est qu'ils ont fait des test
en masse et très tôt,
ils ont retracé les contacts,
ils ont isolé et mis en quarantaine,
ce qui, en passant, est la b.a.ba
des pratiques de santé publique.
Ils l'ont fait très tôt et en masse,
et d'ailleurs, même s'ils déconfinent
leur pays
et qu'ils commencent à voir
des pics épisodiques,
ils retournent à ces pratiques
de santé publique de base
de tests, d'isolement,
de recherche de contacts
et de transparence envers le public
quand ils le peuvent,
car c'est important que le public
comprenne combien de cas sont identifiés,
où se propage la maladie,
pour que le public respecte les règles.
DB : Donc faire des tests,
tracer et isoler.
Ce n'est pas sorcier.
pour utiliser un vieux cliché.
Pourquoi certains pays ont-ils eu tant
de mal à les mettre en pratique ?
Qu'est-ce qui nous retient,
est-ce les dossiers médicaux numériques,
des machins sophistiqués,
ou peut-être juste de l'arrogance,
due aux succès de la santé publique
ces 100 dernières années ?
GB : Vous savez, on est vraiment
une société à pilules.
On pense qu'il y a une pilule pour tout.
Si on ne peut pas vous donner une pilule,
on peut vous opérer et tout arranger.
Vous savez, la prévention
fonctionne est efficace.
Mais on n'a pas du tout investi
suffisamment dans la prévention.
On a pas investi assez
dans un système de santé publique
solide et résistant.
Aujourd'hui en Amérique,
il est facile de savoir
ce qui sort des étagères
dans une épicerie,
Amazon sait tout
ce qu'il faut savoir sur nous,
mais notre médecin
n'a pas les mêmes outils.
À trois heures du matin,
c'est toujours très difficile
d'avoir son électrocardiogramme,
ou son dossier médical,
ou sa liste d'allergies
si on ne sait pas dir
à son médecin ce qu'on a.
Et on a juste pas assez investi
dans des systèmes robustes.
Ce qui est intéressant
avec cette épidémie,
c'est qu'elle a créé un environnement
qui nous rend dépendants
de la télémédecine,
qui existe depuis plusieurs années,
mais qui ne nous attirait pas tellement.
Mais maintenant,ça va sans doute
devenir ordinaire.
DB : Mais on dirait aussi -
Donc, bien sûr,
ces pays au système de santé
incroyablement robuste,
comme Taïwan, se sont bien débrouillés,
mais on dirait que même les pays
qu'on considère
comme ayant un système de santé
moins robuste comme le Ghana,
ont eux aussi de bons résultats.
Quelle est, pourrait-on dire,
la recette secrète
de ce type de pays ?
GB : Oui, l'exposition
de certains pays reste précoce
et on espère qu'aucune vague
ne les frappera plus tard,
ce qui reste une possibilité,
mais en fin de compte,
je pense, que si on adopte des pratiques
de santé publique bonnes et sensées,
tous les pays qui ont de bons résultats
les ont appliquées.
Bon, nous avons un grand pays,
un pays complexe.
Et en effet, on n'a pas fait
correctement les tests au départ.
Mais il ne faut pas répéter les erreurs
des trois derniers mois,
car il nous reste encore
plusieurs mois à tenir.
Maintenant qu'on connaît nos erreurs,
je nous encourage à réussir
la prochaine fois.
DB : Ça paraît sensé.
GB : Et la prochaine fois, c'est demain.
DB : En effet.
Ça a déjà commencé.
Enfin, j'ai l'impression,
en utilisant une métaphore,
que certains de ces pays
avaient déjà des sortes
d'anticorps dans leur système,
à cause de leur expérience
avec Ebola ou le premier SARS.
Est-ce que c'est la clé,
une première exposition
à ce genre de crise sanitaire ?
GB : Et bien,
ce sont des virus très différents.
Et même s'il y a déjà des preuves
qu'avec MERS et SARS 1
on pourrait avoir une forme d'immunité,
il y a des premières études
qui examinent cela,
ce n'est pas la solution.
La recette secrète ici, ce sont des bonnes
pratiques de santé publique robustes.
Voilà la recette secrète.
Il ne faut pas chercher
quoi que ce soit de mystique,
ni attendre qu'on nous sauve
avec une pilule spéciale.
Il faut des pratiques de santé publique
efficaces et solides,
parce que, en passant,
cette crise est grave
mais ce ne sera pas la dernière.
Et il faut se préparer pour
la prochaine grosse crise.
On pense déjà que c'était grave
mais imaginez si Ebola
se transmettait par les airs,
ou le MERS.
Prenez n'importe quel film.
Même si cette pandémie est brutale,
on a quand-même réussi à en éviter
le pire cette fois-ci.
DB : On ne plaisante pas avec
le syndrome respiratoire du Moyen-Orient,
et estimons nous heureux
qu'il ne se propage pas plus facilement,
comme le SARS-CoV.
Cependant, est-ce que -
Toutes ces maladies sont zoonotiques,
ce qui veut dire qu'elles nous
sont transmises par les animaux.
On sait que c'est dans la nature
de l'humanité d'envahir l'environnement
toujours davantage,
qu'on parle du changement climatique,
de la déforestation, le choix est vaste.
Est-ce que c'est le nouveau normal ?
Faut-il s'attendre à des pandémies
de temps à autre ?
GB : C'est vrai qu'il y en a
régulièrement,
ce n'est pas comme si
c'était la première fois.
Il y en a eu plusieurs.
Il y a cent ans, la grippe de 1918.
Le SARS fut une infection notable,
même si SARS 1 ne fut pas aussi
grave que celle-ci.
Il y a eu la grippe aviaire aussi,
un vrai défi,
et la grippe porcine.
On a eu Zika.
Donc, on a traversé plusieurs épidémies
de nouvelles maladies.
Ces maladies émergentes
sont nombreuses,
et à plusieurs égards,
on a eu la chance
d'avoir réussi à les identifier tôt
et à les maîtriser.
Mais on vit dans un environnement
où on peut fabriquer, ne l'oublions pas,
ce genres de choses.
Cette épidémie-ci, autant qu'on puisse
en juger, n'a pas été créée par l'homme.
Elle ne vient probablement pas
d'une fuite dans un laboratoire.
Mais on sait que,
à l'époque où j'étais à l'école,
pour développer un virus,
il fallait être vraiment bon.
Ce n'est plus le cas aujourd'hui.
Et on doit se protéger à la fois
des infections naturelles
et de celles créées par l'homme.
DB : En plus, certains facteurs
sont multiplicateurs des risques,
comme le changement climatique,
qui aggrave les pandémies comme celle-ci.
GB : Je voyais le changement climatique
comme la plus grande menace à notre survie
avant cette pandémie.
Mais c'est du même niveau.
Mais laissez-moi vous dire,
le grand défi qui nous attend,
c'est qu'on fait face à une pandémie
qu'on n'a pas encore maîtrisée
alors qu'on entre dans
la saison des ouragans.
or le réchauffement climatique
amplifie leur violence.
Donc vous voyez, on va passer
un été intéressant.
DB : Et voilà Chris, qui a, je crois,
une question du public.
Chris Anderson : Beaucoup de questions,
en fait.
Les gens sont très intéressés par
vos propos, Georges.
Allons-y, voilà la première de Jim Young :
« Comment gère-t-on ceux et celles
qui ne prennent pas ça au sérieux ? »
GB : Vous savez, il faut juste continuer
à répéter la vérité aux gens.
Une des spécificités de cette maladie,
c'est qu'elle n'épargne personne.
elle ne se soucie pas
des partis politiques,
elle ne se soucie pas de la géographie,
et beaucoup de gens, surtout
dans les communautés rurales,
qui ne voyaient pas la maladie
parce qu'elle ne les touchait pas,
n'y croyaient pas.
Et maintenant, la maladie fait des ravages
dans beaucoup de ces communautés.
Et il faut juste -
vous voyez, on ne peut pas dire :
« Je vous avais prévenus. »
Il faut dire, « Écoutez, maintenant
que vous comprenez,
rejoignez-nous et aidez-nous
à résoudre ces problèmes. »
Mais la COVID va être là pour un moment
et si elle devient endémique,
c'est-à-dire qu'elle infecte constamment
un petit nombre de personnes,
tout le monde va passer par là.
CA : Merci.
En voici une de Robert Perkowitz.
« Il semblerait qu'on ait ignoré
et sous-financé la santé publique,
et que nous n'étions
pas prêts pour ce virus. »
Voyons si la question va arriver,
je pense que oui, par magie.
« Quelles devraient être nos priorités
pour nous préparer à la prochaine
crise de santé publique ? »
GB : Et bien, il faut s'assurer
qu'on a un financement,
qu'on discute des ressources,
des formations, des équipes.
Et d'ailleurs, la prochaine
crise de santé publique
ne sera pas dans 10 ans,
ou dans 20 ans.
C'est la potentielle coexistence
de la grippe, dont on est sûr
qu'elle arrivera en automne,
parce qu'elle revient tous les ans,
avec soit une COVID qui continue
ou un pic de COVID.
Or leur processus pathologique
sont pratiquement semblables.
Il faudra donc différencier
la COVID de la grippe.
On a un vaccin contre la grippe,
mais pas encore de vaccin contre la COVID.
On espère en trouver un d'ici un an.
Mais ça reste à voir.
DB : Faites-vous vacciner
contre la grippe.
CA : Voilà.
Et bien en fait, David Collins
a posé exactement cette question.
« Quelle est la probabilité d'un vaccin
avant la prochaine vague ? »
GB : Le vaccin qu'on a développé
le plus vite est celui de la rougeole
et il a fallu quatre ans.
Certes, beaucoup de choses
ont changé, pas vrai ?
On est parti d'un vaccin pour SARS-1.
Il y a déjà eu des tests sur les animaux,
et les premiers essais sur l'homme.
Comme vous les savez, on a annoncé
que le vaccin est efficace sur
les singes, sur des singes rhésus,
et on a au moins la preuve
qu'il est efficace et sans danger
pour un très petit nombre de personnes.
Quand je dis très petit nombre,
je parle d'une poignée de gens.
Maintenant, il faut passer
aux essais des phases deux et trois.
Donc oui, ça se compte sur les deux mains,
oui, c'est très peu de gens.
Ça nous indique que soit
ces gens ont beaucoup de chance,
soit le vaccin est efficace.
Et on en sera sûr que quand on l'aura
inoculé à des milliers de gens.
CA : Voilà une importante
question d'un de nos TED Fellow.
« Comment sensibilise-t-on les gens
à la santé publique ?
Surtout quand certains
ne voient pas leur responsabilité
envers le public ? »
GB : Vous savez, je rappelle aux gens
que quand la santé publique
fait son travail,
il ne se passe rien.
Bien sûr, quand il n'y a rien,
on ne reçoit aucune félicitation.
Donc la raison pour laquelle
personne dans ce pays
n'a pas à se lever chaque matin
pour faire bouillir de l'eau,
c'est grâce à la santé publique.
La raison pour laquelle,
si vous avez un accident de voiture,
une collision avec un autre conducteur,
et que vous portez une ceinture
que des airbags vous protègent
et que vous ne mourrez pas
dans cette collision,
c'est grâce à la santé publique.
On peut respirer l'air sans danger,
on peut manger sans danger
grâce à la santé publique.
Vos enfants ne portent pas
des vêtements qui prennent feu
parce qu'on a du tissu ignifugé.
Et c'est obligatoire.
On ne trébuche pas en
descendant les escaliers
parce qu'on construit les escaliers
pour que personne ne tombe
en montant ou en descendant.
Ça aussi, c'est une intervention
de santé publique.
La construction,
les médicaments, toutes ces choses,
les vaccins, tout ça relève
de la santé publique,
c'est pour ça qu'elle est là,
et vous pouvez penser
que ce n'est pas important,
mais on ne pourrait pas vivre sans elle.
CA : Peut-être qu'un jour on concevra
un système de sécurité sociale en Amérique
qui encouragera
les actions de santé publique.
Ce serait vraiment bien.
David, je continue à vous transmettre
ces questions, si ça vous va,
parce qu'il y en a beaucoup.
Et voilà une de Jacqueline Ashby.
Une question importante
pour tous les parents.
« Que recommandez-vous concernant
le retour des enfants à l'école ? »
GB : Oui, ce sujet est délicat pour moi,
j'ai trois petits-enfants.
La bonne nouvelle est qu'ils sont
plus à l'aise avec la technologie que moi
et pour l'instant, ils ont
des cours à distance.
Je pense que c'est un défi
de renvoyer les enfants à l'école.
Il va falloir qu'on sache vraiment
si les enfants sont contagieux
et comment ils combattent le virus
quand ils sont infectés.
Là, en ce moment, il semblerait que,
à part un très petit nombre d'enfants
qui contractent une maladie très rare,
ils tolèrent très bien le virus.
Mais la vraie question, c'est
combien de germes ces enfants
vont-ils vous ramener,
et à Papi et Mami.
Donc c'est ça qui est important.
Et vous savez, faire comprendre
à un enfant de 8 ans
qu'il ne faut pas interagir avec ses amis,
c'est très dur.
D'ailleurs, dire à un ado de 17 ans
qu'il ne faut pas interagir avec ses amis,
c'est très dur.
Il faut qu'on éduque ces
enfants correctement,
et qu'on trouve comment
étaler leur emploi du temps.
L'idée d'Uri concernant les salariés
pourrait être un concept
intéressant pour les écoles,
parce que l'idée est d'essayer de diminuer
le nombre d'enfants dans les classes.
D'ailleurs, avec des classes plus petites,
l'éducation est meilleure.
Mais il nous faut aussi
assez de professeurs.
Donc c'est ça qui détermine la limite.
CA : Très bien, dernière question pour
l'instant de Stephen Petranek.
Masques. Des conseils sur les masques -
J'éteins ça, c'est bon.
On dirait qu les conseils
sur les masques ont changé.
« Faut-il que les Américains
qui vivent en ville
et y travaillent portent des masques
pour aider aussi à réduire
la pollution de l'air
à laquelle ils font face
tous les jours ? »
GB : Ça peut aider, bien sûr.
Mais voilà ce que je préférerais
qu'on arrête de faire :
brûler les carburants fossiles.
Et toutes ces atrocités
qui détruisent notre climat.
Vous savez, tout le monde parle
de cette incroyable réduction
des émissions de CO₂
parce qu'on ne conduit pas notre voiture.
Je dois vous dire,
c'est la preuve que le réchauffement
climatique est créé par l'homme.
Tous ces climato-sceptiques
qui ne croient pas que
c'est l'homme qui l' a créé,
et on vient d'avoir une
démonstration mondiale
des actions qui créent
le réchauffement climatique.
Et il faut arrêter ça
et passer à une économie verte.
DB : Bien dit !
CA : Merci pour ces questions,
j'en poserai quelques autres à la fin.
Merci d'avoir répondu.
DB : Donc on alerte au sujet des masques.
Mais il y a autre chose
qui est devenu clair,
c'est que la COVID-19 n'est pas la grande
égalisation espérée par certains.
Ce virus est pire pour certaines
communautés que d'autres,
avec des bilans beaucoup plus mauvais.
Pourquoi ?
GB : On parle surtout des communautés
afro-américaines et latino
dont l'impact du virus est disproportionné
quand elles sont infectées.
Et c'est d'abord à cause
de leur exposition.
Ces populations ont des métiers
de contact avec le public.
Vous savez, chauffeurs de bus,
commis d'épicerie,
emploi dans des établissements
de soin longue durée,
maisons de santé,
usines de conditionnement
de viande, élevage de poulets.
C'est pourquoi ils sont -
plus exposés à la maladie.
Vulnérabilité.
Maladies chroniques.
On sait que les Afro-Américains
en particulier
ont beaucoup plus de diabètes,
maladies cardiaques,
maladies pulmonaires,
et à cause de ces maladies chroniques,
on a découvert très tôt que ce virus
était plus nocif pour ces populations
qui en souffrent.
Et c'est un gros problème.
C'est ça qui cause les différences
et c'est un vrai défi,
parce que
ce sont en grande partie ces gens-là
qu'on a désigné comme employés essentiels
et qui doivent aller travailler.
DB : C'est vrai.
Alors, pour vous, quelle
intervention de santé publique
faut-il pour protéger
ces travailleurs essentiels,
si vous avez des idées sur le sujet ?
GB : Oui absolument.
On a commencé par une stratégie de tests
fondée sur les symptômes.
Et maintenant qu'on en a assez,
il faut s'assurer non seulement que les
gens se font tester pour raison médicale,
parce qu'ils ont des symptômes,
mais aussi commencer à donner la priorité
à ceux qui sont au contact du public,
les travailleurs essentiels.
Donc, ceux qui travaillent
en centre de soins, dans les hôpitaux...
mais aussi les chauffeurs
de bus, les vigiles,
les commis d'épicerie.
Il faut les tester,
et assez régulièrement
pour les mettre en sécurité
avec leur famille,
et que tous aient confiance,
sans craindre d'être contaminé
et d'infecter les autres.
Les employés en
conditionnement de viande,
par exemple.
On a vu le drame
des usines de conditionnement
de viande,
parce qu'ils travaillent coude à coude.
Il y a d'autres choses à faire,
résoudre le problème de la distanciation
physique dans la chaîne de montage,
ça c'est important.
Je le répète, l'idée d'Uri est bonne,
notre nation doit l'envisager
et ces industries doivent y penser.
DB : Oui, il faut s'assurer
que ces gens
sont traités en travailleurs essentiels
et pas sacrifiés, il me semble.
Et bien sûr, ce n'est pas valable
que pour les États-Unis.
GB : Oui, absolument.
On ne remarque pas ces disparités
seulement aux États-Unis,
mais aussi dans d'autres pays.
Et elles sont liées en grande partie
à l'ethnie, à la classe sociale
et au type d'emploi occupé,
à l'activité.
Et franchement,
on aurait dû y penser
dès les premières données
qui montrent qu'en Chine,
les gens avec des maladies
chroniques sont plus à risque
et ont de moins bons résultats.
On aurait pu accélérer
nos actions immédiatement,
parce que c'est ce qui s'est passé
à chaque nouvelle maladie
arrivée dans notre pays.
DB : Donc on dirait qu'on en revient
à ce potentiel -
ce n'est pas un oxymore,
la santé publique concerne tout le monde,
et il faut adopter cette idée.
À votre avis,
à quoi ressemble une bonne
infrastructure de santé publique ?
A quoi ça ressemblerait ?
GB : Et bien, vous savez,
quand une nouvelle
menace sanitaire apparaît,
on se doit de pouvoir
l'identifier rapidement,
la contenir,
si on peut, l'atténuer bien sûr,
et l'éliminer si c'est possible,
et installer toutes
les mesures de protection
possibles.
Ça veut dire qu'il faut
une entité gouvernementale
assez nombreuse et bien formée,
comme la police,
les pompiers, les urgences.
Ça veut dire qu'elles doivent
être bien rémunérées,
et avoir des ressources suffisantes.
Vous savez, certains de nos
enquêteurs de cas contacts
utilisent encore un stylo et un carnet
et font des feuilles de calcul Excel.
Non, on a besoin du même genre
de technologie fiable
que, vous savez,
n'importe quel vendeur en ligne,
Amazon, etc.
On regarde encore des
données d'il y a deux ans
pour prendre des décisions.
On doit pouvoir prendre
des décisions immédiates.
D'ailleurs, à Taïwan,
vous en avez parlé plus tôt,
je me souviens avoir vu à Taïwan
les données de maladies infectieuses
arriver en temps réel,
grâce à leurs dossiers
médicaux électroniques.
Donc vous voyez, c'est possible,
la technologie existe déjà.
DB : Imaginez !
Oui, des infos sur
la santé en temps réel,
ça ferait une sacrée différence.
Vous pensez que la technologie
peut nous aider,
que ce soit la collaboration
Google-Apple ou autre chose ?
GB : Oui, elle peut nous aider,
mais elle ne peut pas nous remplacer.
On n'est pas du tout arrivé au point où
on peut laisser nos avatars électroniques
faire le travail pour nous.
Mais la technologie peut l'améliorer.
Elle peut nous permettre
de connaître la situation.
Elle peut nous donner
des infos en temps réel.
Elle nous permet d'envoyer des infos
d'un point A à un point B
pour faire analyser des données.
Elle nous permet
de reconsidérer les choses,
et de faire des modélisations.
Elle permet aux autres de vérifier
les chiffres immédiatement.
Et donc d'accélérer la recherche.
Mais il faut investir,
et aller plus loin,
parce que l'obsolescence est toujours
le côté obscur de la technologie.
DB : On dirait que Chris revient
avec de nouvelles questions.
CA : Oui, on arrive à la fin,
mais les questions continuent d'affluer.
En voilà une de Neelay Bhatt.
« Quel rôle jouent les parcs, les pistes
et les grands espaces de jeux
pour aider les objectifs de
santé publique, à votre avis ? »
GB : Vous savez, les espaces verts
sont absolument indispensables,
et la possibilité de sortir, de marcher
de faire de l'exercice,
avoir des trottoirs pour pouvoir
marcher dans la communauté,
faire du vélo, une ville verte
pour tous les âges,
c'est bon pour l'esprit
et c'est bon pour le corps.
Et je dis toujours aux gens
que c'est un bon endroit où aller
quand on est à bout de nerfs.
CA : En effet.
Voilà une question anonyme.
Quand c'est possible, donnez votre nom,
on est tous amis ici, en fin de compte.
Sans doute quelqu'un... Enfin.
Voyons, mais c'est une bonne question.
« Beaucoup ont des doutes concernant
les paroles des vrais experts.
Qu'est-ce qui est efficace pour aider
ceux qui ont de tels doutes
à être moins soupçonneux
et à avoir plus confiance ? »
GB: Dire la vérité.
Si vous faites une erreur, reconnaissez-la
et corrigez-la tout de suite.
Soyez cohérent.
Et ne dites rien de stupide.
Ça arrive beaucoup trop souvent.
Et tenez, quelque chose d'intéressant,
on en a déjà parlé avec les masques.
La sagesse traditionnelle veut
qu'on ne porte un masque
uniquement quand on est contagieux,
ou dans une situation de santé publique
où il y a un risque élevé
d'attraper la maladie.
Et ensuite, on a dit
que non, c'est bien que tout
le monde porte un masque.
Et c'est parce qu'on a appris,
et c'était plus cohérent.
Il y a beaucoup d'asymptomatiques.
Mais on a pas très bien
communiqué là-dessus.
On a juste dit, oh non non,
on change d'avis,
on peut tous en porter un,
après avoir dit de ne pas le faire.
Et on n'a pas pris assez le temps
d'expliquer aux gens pourquoi.
Donc a on perdu leur confiance.
Il faut qu'on fasse mieux que ça.
Et nos leaders
doivent faire attention à ce qu'ils disent
quand ils ont un mégaphone.
Et d'ailleurs, j'ai fait des erreurs,
j'ai dit des choses à la télévision
qui étaient fausses,
j'avais tort.
Et j'ai vraiment essayé de les corriger
aussi vite que possible.
On fait tous cela,
mais il faut être assez fort
et avoir une personnalité assez affirmée
pour admettre qu'on a tort
et corriger le tir.
Parce qu'en fin de compte,
une fois qu'on perd la confiance des gens,
on a tout perdu.
CA : Si je peux me permettre,
simplement la façon dont vous
communiquez maintenant,
je veux dire, pour moi,
c'est une communication
qui génère la confiance.
Je ne sais pas ce que c'est votre secret,
mais vous écouter est captivant.
Merci beaucoup pour cette conférence.
David, vous avez quelque chose à ajouter ?
GB : J'ai fait beaucoup d'erreurs.
DB : Oui, mais vraiment, c'était un plaisir
de vous avoir avec nous,
merci beaucoup.
Juste une dernière question.
Ça fait longtemps que vous travaillez,
qu'est-ce qui vous donne
de l'espoir pour l'avenir ?
GB : Vous savez,
une chose me donne de l'espoir
et c'est de voir les gens prendre soin
de leurs amis et de leur famille.
Les « anniversaire drive-in »,
par exemple.
J'ai vu ça aux infos aujourd'hui.
Les gens qui appellent leurs amis.
Des gens à qui je n'avais
pas parlé depuis des années
m'ont appelé juste pour dire,
« Ça fait longtemps qu'on
ne s'est pas parlé. Ça va ? »
Donc faites en plus.
Et la confiance qu'on a,
l'amour qu'on a montré, c'est
juste absolument fantastique,
et ça me donne de l'espoir.
DB : À la fin, l'humanité gagne.
GB : Oui.
DB : Et bien merci beaucoup, Dr Benjamin,
de nous avoir rejoints
et d'avoir partagé votre sagesse.
GB : C'était un plaisir.
CA : Oui merci.
GB : Prenez soin de vous
et de votre famille.
DB : Merci, vous aussi.