Fait en porcelaine | Matthieu Dutheil | TEDxLimoges

Après quelques années en tant que salarié, Matthieu Dutheil découvre comment la porcelaine, savoir-faire emblématique de sa ville d'origine, fait fantasmer le monde du pop-art et des art-toys. Il monte alors sa société K.Olin tribu en 2010. À travers des rencontres et des surprises, il connecte des mondes inattendus et réinvente autant la porcelaine qu'il donne une autre dimension aux œuvres qu'il met en scène.

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. Pour en savoir plus : http://ted.com/tedx

Je suis éditeur d'objets
d'art en porcelaine.

En gros, je fabrique, je conçois
et j'édite des pièces avec des artistes.

Pour donner un peu plus de matière
à ce que je vous dis,

je vous ai amené quelques pièces,
c'est beaucoup plus parlant.

En première pièce, je vous
ai amené un hippopotame

fait avec un artiste américain
qui s'appelle Frank Kozik,

donc, avec les traits
caractéristiques de l'artiste.

Du même artiste,
j'ai sorti une autre pièce avec lui,

qui est un buste de Ludwig,
version Orange mécanique.

Tout autre chose, j'ai amené
une autre pièce d'un autre style :

un crâne en porcelaine avec un artiste
français qui s'appelle NooN.

Et pour rester dans les crânes
mais un peu différent,

j'ai amené une pièce faite avec
un artiste espagnol, Emilio Garcia.

C'est un skull brain, un cerveau crâne.

Là, vous vous dites :
« Il fait de la sculpture, c'est cool »,

mais c'est un petit peu
plus compliqué que ça.

On va revenir cinq ans en arrière.

J'ai 28 ans,

et je me retrouve pour la première fois
chez mes beaux-parents.

Je me retrouve dans un musée

avec des pièces magnifiques
de porcelaine comme celle-ci.

Et à cette époque,
et toujours actuellement,

je suis un grand
collectionneur de Art Toys,

dont voici un exemple.

C'est une pièce avec Chanel.

À ce moment-là, je me dis :

« Pourquoi ne pas allier
la puissance de la porcelaine,

sa noblesse,

avec quelque chose de beaucoup plus
jeune, tendance, qu'est le Art Toys ? »

pour, au final, faire
des Art Toys en porcelaine,

comme vous avez devant moi actuellement.

Là, c'est le début de mon histoire.

À cette époque, je me disais

qu'aucun artiste n'allait
s'intéresser à la porcelaine,

et encore moins à un jeune
auto-entrepreneur limougeaud.

Donc, je crée mes formes.

À ce moment-là, je me dis :

« Il me faut un avis extérieur,
quelqu'un qui est dans le milieu. »

Je prends rendez-vous
avec le plus grand éditeur

et distributeur d'Art Toys en Europe,

qui est basé à Paris.

Donc, je monte dans le Téoz,
direction Paris.

J'amène mes créations.

J'arrive chez lui
et je lui présente mon projet.

Je lui parle de la porcelaine.

Je lui parle de mes pièces.

Et d'un coup d'un seul,
il me dit : « Stop ! »

Il me dit : « Le projet, super.
La matière, exceptionnel.

Par contre, tes pièces, poubelle. »

Pas cool.

Au final, il me dit :

« Avec un projet comme le tien,
contacte directement les plus grands. »

Il me dit : « C'est obligé, la matière
va les attirer, tu les auras tous. »

Je reprends mes pièces, remonte
dans le Téoz, direction Limoges.

Et là, je me dis : « OK,
on va contacter les plus grands. »

J'en sélectionne un :

il s'appelle Ron English
dont voici une de ses toiles.

Lincoln Obama.

Pour information,

cette pièce vaut plusieurs
dizaines de milliers d'euros.

Je me mets devant
mon ordi, et je me dis :

« On va lui présenter le projet.

On va essayer d'être
le plus précis possible. »

Je rédige mon mail,
je lui parle de la porcelaine.

Je lui explique d'où je viens,
j'explique le projet global.

Je l'écris plusieurs fois,
je le corrige, le modifie...

Enfin bref ! j'essaie de faire
le meilleur mail possible.

Là, j'appuie sur la touche
Envoyer et je me dis :

« Là, c'est fait. Maintenant,
il n'y a plus qu'à attendre. »

Au final, je n'ai pas attendu
énormément de temps.

Au bout de 25 minutes, une réponse.

Et la réponse est plutôt courte.

C'est donc un OK.

Cet artiste de renommée mondiale
ne m'a pas parlé de contrat,

ne m'a pas parlé d'argent.

Il a juste été intéressé
par un projet et une matière.

Je vais vous montrer le résultat final
que l'on a eu avec lui :

le MC supersized,

un MacDo obèse.

Vous, vous voyez le résultat final.

Pour moi, cette pièce,
c'est plus qu'un résultat.

À partir de cette pièce,
je me suis dit que tout est possible,

dans le sens où si j'arrive
à avoir des gens comme lui,

tout est possible dans les rencontres.

Ça, c'était la première difficulté.

Mais j'en rencontre une deuxième,
qui, elle, est d'ordre technique.

Il faut savoir que la porcelaine est
un matériau très difficile à travailler.

Toutes les pièces devant moi
ont posé des problèmes techniques.

Cependant, celles que je vais vous montrer

sont caractéristiques à elles seules
de toute la complexité de cette matière.

Là, je vous présente
une tronçonneuse taille 1.

Ce que vous voyez,
c'est le résultat final.

Mais pour arriver à ce résultat,

il a fallu que je rencontre
une dizaine de modeleurs.

Un seul a voulu me suivre sur ce projet.

Il nous a fallu des mois de réalisation
et énormément de pièces défectueuses,

avant d'arriver à une pièce parfaite :

une porcelaine avec une vraie
lame de tronçonneuse.

Cette pièce, à elle seule,

montre que tout est possible
dans la technique.

Et là,

je vais vous présenter la future
pièce que je sors prochainement,

qui est une pièce
avec un artiste japonais,

qui se nomme Yoskay Yamamoto
et qui vit à Los Angeles,

pour vous dire que le projet continue
et j'espère encore pour longtemps.

Après avoir passé mes deux problèmes,

je ne m'impose plus aucune limite.

Je vois que tout est possible,
même de Limoges.

Au final, je vis grâce à un paradoxe :

la porcelaine de Limoges séduit
le monde entier, sauf Limoges.

Merci.

(Applaudissements)