-
Paix ! Bonheur ! Sourires !
-
Souriez ! Montrez vos dents !
-
On filme en gros plans !
-
Soyez beaux pour la caméra !
-
Souriez ! 1, 2, 3, 4 !
-
De la joie authentique,
pas du chiqué !
-
De la beauté naturelle !
On est dans la réalité !
-
Voilà, paix ! Paix ! Paix !
-
L’ACTE DE TUER
-
En 1965, le gouvernement indonésien
été renversé par la junte militaire.
-
Tout opposant à la dictature militaire
pouvait être accusé d’être communiste.
-
Membres d’un syndicat, fermiers sans terre,
-
intellectuels, personnes d’ethnie chinoise.
-
En moins d’un an et avec le soutien de
gouvernements occidentaux,
-
plus d’un million de communistes
furent exécutés.
-
L’armée se servit de gangsters et d’organisations
-
paramilitaires pour exécuter ces meurtres.
-
Depuis, ces hommes sont au pouvoir
-
et continuent de persécuter leurs opposants.
-
Quand nous avons rencontré les meurtrier,
ils se sont vantés de leurs actes.
-
Pour mieux comprendre, nous leur avons proposé
-
de recréer les scènes de ces meurtres.
-
Ce film retrace cette reconstitution
et ses conséquences...
-
Anwar Congo
Bourreau en 1965
-
Herman Koto
Gangster et leader paramilitaire
-
Ouvrez.
-
Je cherche une actrice
-
pour jouer une mère.
-
Des femmes âgées comme vous.
-
Vous voyez des stars à la télé ?
-
Vous devez rêver d’en être une.
-
- Non, je n'y tiens pas.
- Pourquoi pas ?
-
- Vous n’avez rien d’autre à faire
- Non, je suis occupée.
-
Ces femmes n’accepteront pas
de jouer des communistes.
-
Ça marchera si on les invite
d’abord dans votre maison.
-
Mais si on leur demande ici,
elles auront peur.
-
Les gens croiront qu’elles sont
vraiment communistes.
-
Je ne suis pas d’accord
Dans mon quartier, elles accepteraient.
-
Alors, allons plutôt là-bas.
Ici, c’est impossible.
-
Tout ce quartier était communiste.
-
Toi, comment tu t'appelles ?
-
Essaye.
-
N'aie pas peur !
-
On cherche des mères avec des enfants,
-
pour jouer des femmes communistes.
-
Vous essayez de nous empêcher
de brûler votre maison.
-
Finalement,
on la brûle quand même.
-
Alors tu pleures.
-
Pleure et prends ce gosse
dans tes bras, le moche, là.
-
"Maman, ils ont brûlé notre maison !"
-
Voilà, comme ça c’est bien.
-
C’est pas grave si tu touches ses seins.
T’es encore qu’un gosse.
-
Prêts ?
-
Tuez-les !
-
Non !
-
Détruisez leur maison !
Non, par pitié !
-
Brûlez-la !
-
Tuez !
-
Criez ! Pleurez !
-
Ne brûlez pas ma maison.
-
Continuez de pleurer !
-
C'est bon coupez !
-
Que ça passe au cinéma
-
ou seulement à la télé,
c’est sans importance.
-
- Mais on doit montrer…
- La véritable histoire.
-
C’est ce que nous sommes.
-
Comme ça, plus tard,
les gens se souviendront !
-
Pas besoin d’en faire un grand film
-
comme la Rank Organization,
Paramount Pictures ou MGM.
-
Nous-mêmes, à notre façon,
pas à pas.
-
On va raconter l’histoire
-
de ce qu’on a fait
pendant notre jeunesse.
-
Pardon…
-
Il y a des fantômes ici,
beaucoup de gens sont morts là.
-
Mais pas de mort naturelle.
-
Ils sont arrivés en bonne santé,
-
Arrivés ici, ils ont été battus
et ils sont morts.
-
On les traînait…
-
Jusque-là.
-
D’abord, on les battait
jusqu’à ce qu’ils crèvent,
-
mais il y avait trop de sang.
-
Il y avait tellement de sang, ici.
-
Quand on nettoyait,
l’odeur était insoutenable.
-
Pour éviter le sang,
j’avais inventé un système.
-
Je peux vous montrer ?
-
D’accord.
-
Vous voyez ce poteau ?
-
J’attachais le fil de fer au poteau.
-
Assieds-toi la.
-
Regarde par là-bas.
-
Ça doit être crédible.
-
Voilà comment on fait,
-
pour éviter qu’il y ait trop de sang.
-
J’ai essayé d’oublier tout ça
avec de la bonne musique.
-
En dansant,
-
en gardant la pêche.
-
Un peu d'alcool…
-
Un peu de marijuana…
-
Un peu de... comment on appelle ça ?
Ecstasy.
-
Une fois que j’étais soûl,
je planais, je me sentais bien.
-
Cha cha cha.
-
Voilà un homme heureux !
-
Gouverneur du Sumatra du Nord
Syamsul Arifin
-
C'est pourquoi,
toutes ces photos ?
-
Viens, ma belle.
-
T'as un petit ami ?
-
Non, monsieur.
-
Tu mesures combien ?
-
1 m 63.
-
Anwar Congo,
du groupe des paramilitaires.
-
Vous avez entendu parler de lui ?
Il travaillait au cinéma Medan.
-
Maintenant, je suis gouverneur.
S’il me menace, je le tue.
-
Anwar adorait danser.
-
Il y avait une boîte en ville,
-
il allait y danser tous les soirs.
-
Tout le monde avait peur de lui,
-
sauf moi.
-
Il s’occupait de moi
quand j’étais gosse.
-
J’allais au collège.
-
J’étais le seul
à ne pas avoir peur de lui.
-
Pour moi, c’était pas un gangster
-
Quand les gens entendaient son nom,
ils étaient terrifiés.
-
- Pourquoi ?
- C'était un des tueurs.
-
On l’aimait bien quand il était petit,
-
il était tout rond, comme une boule.
-
Maintenant, les enfants des communistes
commencent à parler,
-
en refaisant l’histoire.
-
Y en a un qui a écrit "Je suis fier
d’être l’enfant d’un Communiste".
-
Ça ne durera pas.
-
Les gens ne l’accepteront pas.
-
Le communisme ne sera jamais
toléré en Indonésie.
-
Il y a trop de gangsters
et c’est très bien comme ça.
-
Le mot gangster vient de l’anglais
"hommes libres".
-
Les bandits veulent être libres d’agir,
même quand ils ont tort.
-
Quand on sait s’y prendre avec eux,
-
il n’y a plus qu’à les commander.
-
On était des gangsters,
sans vrais boulots.
-
On aurait fait n’importe quoi
pour faire de l’argent
-
et s’acheter des beaux vêtements.
-
Ça, c’est le cinéma
-
où je travaillais.
-
Je me tenais là et je revendais
des places, en frimant.
-
Quand les films marchaient,
on revendait des tickets
-
Mais quand les communistes
ont voulu faire la loi,
-
ils ont demandé l’interdiction
des films américains.
-
Ils n’en voulaient pas.
-
Alors, nous les gangsters,
on gagnait moins.
-
Le public ne venait plus.
-
Les films de Hollywood
marchaient bien.
-
Sans ces films, les gangsters
faisaient moins d’argent
-
Chez nous, on dit
"Le repas a raté le ventre."
-
Quand on regardait des films joyeux,
comme ceux d’Elvis,
-
on quittait la salle avec le sourire,
en dansant sur la musique.
-
Nos mains, nos pieds,
-
suivaient le rythme.
-
On était dans l’esprit du film.
-
On sifflait les filles qui passaient.
-
C’était super.
On se foutait du regard des autres.
-
Ça, c’était le bureau des paramilitaires
où j’assassinais les gens.
-
Je voyais le gars, en train
d’être interrogés.
-
Je lui filais une cigarette,
en continuant à danser et à rire.
-
C’était comme si on tuait
-
dans l'allégresse !
-
Quand ma mère vivait encore,
-
parfois, je criais dans mon sommeil.
-
Elle accourait pour me réveiller.
-
"Avant de dormir,
lave-toi les pieds !"
-
"Dis tes prières,
ne dors pas tout de suite !"
-
Je sais que mes cauchemars
sont causés par ce que j’ai fait.
-
Tuer des gens qui voulaient pas mourir
-
Je les ai forcés à mourir.
-
À quoi rêves-tu, mon amour ?
-
En es-tu si incertaine ?
-
Regardez, la star !
-
T'es une star, maintenant !
-
Incroyable !
-
Ce type est une star !
-
Éditeur de journaux
Ibrahim Sinik
-
Joshua, filme les photos !
-
C’est le beau père du président,
Sarwo Edhie.
-
Je les présente un par un.
-
Lui, c’est le président.
-
- Et un autre président !
- Et un candidat à la présidentielle.
-
- Les trois sont candidats.
- Le chef des armées.
-
Encore un président…
-
Le président Suharto…
-
Ibrahim Sinik est célèbre
dans tout le pays,
-
pas seulement à Sumatra Nord.
-
Nous, les gangsters, on le protège.
-
Longue vie à lui !
-
Mais n'oublie pas
de partager ton fric !
-
Demande plutôt du fric à Joshua.
-
Après tout, il vient de Londres !
-
Vous interrogiez des communistes
à votre journal ?
-
Il cherchait toujours à avoir
de l’information.
-
Quand on l’avait obtenu,
-
il disait "Coupable !"
On les emmenait et on les tuait I
-
Vous pouvez me parler
d'Anwar Congo ?
-
Qui ?
-
Qu'est-ce que vous pensez
d'Anwar Congo ?
-
Y'avait pas que lui !
-
Y en avait des centaines comme lui.
-
Pourquoi parler d'une seule personne !
-
Il n’était qu’un parmi tant d’autres.
-
Pourquoi perdre mon temps
à parler de lui ?
-
Quand vous interrogiez des
communistes dans votre bureau,
-
quelles questions leur posiez-vous ?
-
Quelle que soit la question,
on changeait leur réponse,
-
pour les faire mal paraître.
-
En tant qu’éditeur de journal,
-
mon travail était de faire en sorte
que la population les déteste.
-
Et votre relation avec l'armée ?
-
- L’armée.
- Aucune relation formelle.
-
Une fois qu’on avait capturé
les jeunes communistes
-
et qu’on les avait bien tabassés,
-
on les livrait à l’armée,
mais ils n’en voulaient pas.
-
Ils nous disaient :
"Balancez-les dans le fleuve."
-
Vous avez un souvenir précis
de ce que l'armée disait ?
-
Ce n’est pas moi qui les emmenais.
J’avais des hommes pour ça.
-
Pourquoi j'aurais fait ce sale boulot ?
Pourquoi j'aurais tué des gens ?
-
J’avais pas à le faire.
Un signe de moi et ils étaient morts.
-
Les Jeunesses Pancasila sont
l’une des plus puissantes
-
organisations paramilitaires d’Indonésie.
-
Elles ont joué un rôle majeur
dans les exactions de 1965-1966.
-
Jeunesses Pancasila !
-
Chef des Jeunesses Pancasila
Yapto Soerjosoemarno
-
Comment ça va, Artwan ?
-
Anwar Congo en personne !
-
J’ai apporté des photos de nous,
de l’époque.
-
Super ! On va les mettre sur un CD.
-
Hé, on pourrait les passer
à notre congrès national.
-
Jeunesses Pancasila,
au service de la Nation.
-
Toutes voiles dehors,
-
nous allons de l’avant.
-
Les Jeunesses Pancasila comptent plus de
-
trois millions de membres en Indonésie.
-
- Pancasila !
- Pour toujours !
-
Tous les membres des
Jeunesses Pancasila sont des héros.
-
De l’extermination des communistes
-
au combat contre les néo-communistes
et l’extrême gauche,
-
et contre tous ceux qui veulent
détruire notre pays.
-
Ce n’est pas seulement la tâche
de l’armée et de la police.
-
Nous, Jeunesses Pancasila
avons le devoir de nous impliquer.
-
Devant ces menaces contre la Nation
nous devons agir.
-
On dit que Jeunesses Pancasila
est une organisation de gangsters
-
Si on est des gangsters,
-
je suis le plus grand des gangsters !
-
Eh merde !
-
Comment Jeunesses Pancasila
a-t-elle exterminé les communistes ?
-
On les a tous tués.
-
Voilà comment ça s’est passé
-
Je peux frapper ma balle ?
-
Quand il y a trop de démocratie,
c’est le chaos.
-
Démocratie de mes deux !
-
Tout allait mieux
sous la dictature militaire.
-
Meilleure économie.
Plus de sécurité.
-
Trop d'exercice après manger…
Je vais gerber.
-
Les gangsters sont libres.
-
Ils veulent profiter de la vie
avec style.
-
Relax et Rolex.
-
Sérieux, t’as un grain de beauté
sur la chatte.
-
C’est vrai en plus.
-
J’abats les quilles,
j’ai un massage.
-
Et n'échappe pas la boule !
-
- Regarde-moi.
- Je vais faire comme toi.
-
Super, non ?
-
Pour un "strike", tu me masses.
-
Pour un "spare", laisse tomber.
-
Il y a beaucoup de fantômes, ici.
-
Là, on les battait
-
à mort.
On les trainait…
-
Assieds-toi là.
-
Jamais j’aurais porté
un pantalon blanc.
-
Je portais jamais de blanc.
-
Que des couleurs sombres.
-
Je suis sapé comme
pour un pique-nique !
-
Pour faire ça,
je devrais d’abord boire.
-
- Je devrais avoir l’air violent.
- Brutal.
-
Pas comme ça.
-
Regarde, je rigole. C'est raté, non ?
-
C’est ma faute.
-
Al Pacino…
Un de mes préférés.
-
Dans les Westerns,
des stars comme John Wayne…
-
Tu vas être ravissant avec celui-là !
Parfait !
-
- Putain, qu'est ce que c'est ce truc ?
- Juste une décoration.
-
Ça s’accorde parfaitement
avec tes formes.
-
Parfait !
-
- Celui là pour le "Big Boss".
- Oui ! C'est parfait pour moi.
-
- Et celui-ci pour moi.
- Ça va ?
-
Il me va parfaitement !
-
Je prenais une table comme ça.
-
Je la mettais pile sur le cou.
-
- Le pied de la table ?
- Oui. Je la soulevais...
-
… et la plaçait sur la gorge.
-
- Ici ?
- Oui, la tête ici.
-
La table était sur le balcon.
-
Donc le type était bâillonné.
-
On s’asseyait dessus.
-
- En regardant...
- La rue ?
-
En regardant la rue
et le cinéma.
-
On s’amusait. Comme ça.
-
On va s’asseoir sur la table.
Hé, ta braguette.
-
En chantant… En battant la mesure…
-
Hello, hello Bandung.
-
Ville des jours heureux !
-
Hello, hello Bandung !
-
Ville des souvenirs joyeux !
-
Il y a si longtemps
que je t’avais vue.
-
L’ennemi t’a incendiée.
-
L’ennemi t’a, incendiée.
-
Nous te reconquerrons !
-
Oh ! Il est mort !
-
Debout ! Il est mort !
-
On retire le corps.
-
On va me prendre pour un fou !
-
- Maintenant ?
- Oui.
-
Détendez-vous, respirez par le nez.
-
Les dents toujours nickel.
-
Il y avait plein
de communistes chinois.
-
J’avais un gros carnet
avec tous leurs noms.
-
J'allais les voir et je leur disais :
"Combien tu me payes ?"
-
Ils me disaient :
"Pitié, Monsieur ! Je suis vieux"
-
On les extorquait
On les tuait pas.
-
Mais s’ils payaient pas,
on les tuait.
-
Ils peuvent pas tout avoir, non plus.
-
La bourse
-
ou la vie.
-
Chef paramilitaire local
Safit Pardede
-
Ils sont coriaces, ces Chinois.
Parfois, ils m’insupportent.
-
Voilà…
Vous parlez bien des chinois.
-
Quand j’ai besoin d’argent,
rien ne vaut un vieil ami.
-
Avec les autres,
quand il y a pas le compte, je refuse.
-
Salut Lung. Allez, serre-moi la main.
Ça fait un bail.
-
- J'ai besoin d'argent.
- Pourquoi moi ?
-
Je te demande gentiment.
-
Aux autres, je demande même pas.
Je frappe.
-
Un uppercut dans le plexus.
-
C est de bon cœur ?
Alors merci beaucoup.
-
Qui est le suivant ?
-
Notre organisation prévoit un grand
rallye. On a besoin d’argent.
-
Plus que d’habitude.
-
Il nous faut un gros montant.
-
Pas la somme habituelle.
-
C'est quoi ces merdes ?
-
Tu donnes plus ou c’est non.
-
- S'il vous plaît…
- J'accepte jamais si peu.
-
Voilà.
-
C’est pas assez, je te dis.
-
Qu'est-ce qui t'arrive, Cik ?
-
T’es comme notre papa, Cik.
-
Alors, crache l’oseille.
C’est pour la bonne cause.
-
Compte les biffetons,
mets-les dans l’enveloppe.
-
Vice-président de l’Indonésie
Jusuf Kalla
-
L’esprit des Jeunesses Pancasila,
-
que la population accuse
de gangstérisme…
-
Les gangsters sont des gens
qui travaillent hors du système,
-
pas pour le gouvernement.
-
Le mot gangster vient de
"homme libre".
-
Ce pays a besoin "d'hommes libres !"
-
Si tout le monde travaillait
pour le gouvernement,
-
nous serions une nation de bureaucrates.
Ce serait l’inertie.
-
Nous avons besoin de gangsters
pour que les choses avancent.
-
Des hommes du secteur privé,
libres et efficaces.
-
Il nous faut des hommes
-
prêts à prendre des risques
dans les affaires.
-
Faites travailler vos muscles !
-
Les muscles ne servent pas
à tabasser les gens.
-
Même si parfois, il faut bien
les tabasser un peu !
-
- Allez, Pancasila !
- Pour toujours.
-
- Pancasila !
- Liberté !
-
Nous profitons de l’attente du passage
de ce tram pour vous rappeler
-
que le code de la route vous protège,
vous et votre famille.
-
Nous vous informons également
que, selon la loi…
-
Je déclare que les jours prochains
-
seront ceux de l'action !
-
Le gouvernement avait produit ce film
-
pour qu’on déteste les communistes.
-
À partir de l’école élémentaire
-
tous les enfants devaient le voir.
-
Chaque année, on les emmenait au cinéma
pour voir ce film.
-
Je m’en souviens,
je travaillais au cinéma.
-
Les enfants étaient répartis
en deux groupes.
-
Les plus jeunes au premier rang.
-
Certains enfants étaient
traumatisé par le film.
-
Mais au fond de moi, j’étais fier
-
parce que je tuais les communistes,
qui avaient l’air si féroce
-
dans le film…
-
Moi j’ai fait bien pire
que ce qu’il y a dans le film.
-
Papa !
-
Papa !
-
Adi Zulkadry
Assistant Bourreau en 1965
-
- Adi ! Comment va la famille ?
- Très bien, merci.
-
Bon vol ?
-
- Comment tu vas, Anwar ?
- Ça va.
-
- La ville a bien changé.
- Tu trouves ?
-
J’ai essayé de t’appeler
plein de fois.
-
Jamais de réponse.
-
Pas mal, hein ?
-
On voit le fil de fer ?
-
Non c'est super !
-
Voilà, Adi. C’est ici.
-
- Notre bureau ?
- C'est là qu'on tuait.
-
On en a tué un paquet, ici.
-
J’appelais ça le "bureau sanglant".
-
Le Medan Post.
C’est le bureau d’Ibrahim Sinik.
-
Voilà, la rivière Deli.
-
Tout le monde sait
que la Deli est hantée.
-
On jetait les corps
par-dessus le pont.
-
On les traînait par les pieds…
-
Et on les balançait...
Un, deux... et trois !
-
C'était beau.
Comme des parachutes. Boum !
-
J'imagine que vous avez chacun
tue des centaines de personnes…
-
Je voudrais connaître votre avis
sur le film de propagande.
-
Pour moi, grâce à ce film,
je me sens pas coupable.
-
Je le regarde
et ça me rassure.
-
Ah bon ? Pas moi, je crois
que c'est un tissu de mensonges.
-
Même les tortues grimpent
aux arbres abattus.
-
Facile de dénigrer les communistes,
maintenant qu’on les a décimés.
-
Ce film a été fait pour ça.
-
Des femmes communistes
qui dansent nues…
-
Bien sûr, c’est un mensonge.
-
Tuer, faut faire ça vite ! Tu jettes
les cadavres et tu rentres chez toi !
-
C’est vrai
quand on tuait, on faisait ça presto.
-
Aussi vite que possible.
-
On voulait pas attirer l’attention.
-
On devrait pas parler de ça, Adi.
-
On devrait pas dire du mal
de ce film devant des étrangers.
-
On devrait parler de notre film.
-
C’est lui qui a posé la question.
-
- Tu te souviens de Soaduon ?
- Bien sûr, il est où ?
-
Là-bas, Soaduon Siregar.
-
Aujourd’hui, il se la ramène,
mais dans le temps, c’était un minable.
-
Je me souviens de lui.
-
- Adi, je te présente Soduon Siregar
- Je me rappelle de toi.
-
C’est un des journalistes
d’Ibrahim Sinik.
-
Comme on dit :
-
"En Arabie, le chameaux
ne visitent jamais la Mecque."
-
Avoir un patron riche,
ça l’a pas rendu riche.
-
C’est comme moi.
Assieds toi.
-
Les communistes étaient
moins cruels que nous.
-
On était plus cruels.
-
La cruauté, c’est différent
du sadisme.
-
- Non, les deux sont synonymes…
- Non.
-
Le sadisme, c’est autre chose.
-
- Tu joues sur les mots !
- Pas du tout !
-
Tu joues sur les mots.
-
Interrogatoire communiste : prise 2.
-
On donne la terre aux fermiers.
-
Des fertilisants, des semences,
des outils agricoles.
-
Dans le but de propager
le communisme, c'est ça ?
-
Précisément, on veut montrer que
les communistes sont le meilleur parti.
-
Pourquoi recrutez-vous des gens
dans un parti-hors-la-loi ?
-
À l’époque, c’était légal.
-
- Vraiment ?
- Avant 1965 ? Bien sûr !
-
- Il a filé !
- Non, on I'a.
-
Tiens-le
-
Il s’est cogné la tête.
-
Parfois je me dis, si mon père
avait été communiste et assassiné,
-
je serais en colère. Normal, non ?
-
Par exemple, si t’avais tué mon père,
je t’en voudrais à mort.
-
Pourquoi t'as tué mon père ?
-
Après, tu m’interdis d’aller à l’école.
Tu m’empêches de travailler.
-
Tu refuses même que je me marie.
Ça doit changer.
-
Il n’y a eu aucune excuse officielle.
-
Pourquoi c'est si dur de s'excuser ?
-
Ce serait au gouvernement
de s’excuser, pas à nous.
-
Comme un remède
qui atténue la douleur.
-
- Le pardon.
- Ils nous maudissent pas,
-
parce que
s’ils le faisaient ouvertement,
-
on les arrêterait, alors
ils nous maudissent en murmurant.
-
Tu vois, Adi, finalement,
-
si je dors mal,
c’est peut-être que
-
quand j’étranglais les gens avec un fil,
je les regardais mourir.
-
Avec les autres méthodes,
tu regardais aussi.
-
C’est ça qui provoque mes cauchemars.
-
Tu te sens hanté
parce que ton esprit est faible.
-
Les gens qu’on a tués ont perdu.
-
Même quand ils avaient un corps,
ils avaient perdu.
-
Maintenant ils n’ont plus qu’une âme.
-
Ils sont encore plus faibles.
Comment peuvent ils te hanter ?
-
Mais si tu culpabilises,
tes défenses s’écroulent.
-
T'as déjà vu un neurologue ?
-
Si je voyais un neurologue,
ça voudrait dire que je suis fou.
-
Non ! Les psys,
c'est pas que pour les fous.
-
Ils ne traitent pas que la folie.
C’est des experts en nerfs.
-
Même moi, j’en ai vu un,
pour un petit AVC.
-
Tes cauchemars,
c’est un problème nerveux.
-
Vas en voir un,
ça coûte rien d’essayer.
-
Quand tu vois un psy,
tu parles, il parle,
-
et après, il te donne des vitamines
pour les nerfs.
-
C'est lequel qui est infirme ?
-
- Lequel ?
- Le blessé.
-
Celui-là.
-
- Pauvre petit canard.
- Lâche-le, tu lui fais mal.
-
Il est faible,
tu lui as cassé la patte.
-
Arrête. C'est un bébé !
-
- Dis-lui "Pardon, petit canard."
- Pardon, petit canard.
-
C'est bien
Dis-lui : "c'était un accident"
-
"J’ai eu peur, alors je t’ai frappé"
-
- Allez.
- Pardon canard.
-
Dis lui : "C'était un accident."
Plus fort.
-
- Pardon, canard.
- Caresse-le un peu.
-
Tu te souvienne la campagne :
"Écrasez les chinois", en 1966 ?
-
Tu m’avais donné la liste
des communistes chinois.
-
Le long de la rue Surdiman,
-
j'ai poignardé tous les Chinois
que je croisais !
-
Je ne me souviens plus combien,
mais c’était par douzaines.
-
J’en croisais un,
je le poignardais.
-
Jusqu’à la rue Asia, où j’ai connu
le papa de ma fiancée.
-
Tu te souviens
qu'elle était Chinoise ?
-
"Écrasez les Chinois", c'est devenu :
"Écrasez le beau-père !"
-
Lui aussi, je l'ai poignardé
Parce qu'il était Chinois !
-
Il est tombé dans un fossé.
-
Je l’ai frappé avec une brique.
Il a coulé.
-
Tuer, c’est le pire crime
qu’on puisse commettre.
-
Le truc, c’est de
trouver une façon
-
de ne pas ressentir de culpabilité.
-
Il faut trouver la bonne excuse.
-
Par exemple,
si on me demande de tuer quelqu’un
-
et que c’est bien rémunéré,
-
alors bien sûr j’exécute.
-
En un sens, ça se justifie.
-
Il faut arriver à s’en convaincre
de faire les choses comme ça.
-
Après tout,
la moralité est relative.
-
Au début, j'étais terrifié.
C'était des gangsters de première !
-
Comme toi et Anwar…
-
Terrifiant !
En faire un film, ça me choque !
-
- Ça fait mal ?
- Non.
-
Caméra.
-
Tu ferais mieux de m’écouter
-
ou tu vas entendre ma faucille !
-
Ma faucille est rouillée !
-
Et ton œil va goûter cette rouille !
-
Et les applaudissements ?
Allez, applaudissez !
-
Vous voulez une histoire vraie ?
J'en ai une bonne.
-
Raconte.
Tout doit être vrai dans ce film.
-
Il y avait ce commerçant.
-
Le seul Chinois du quartier.
-
En fait, c’était mon beau-père.
-
Voisin d'Anwar : Suryono
C'était mon beau-père...
-
Mais même en tant que beau-père,
-
On vivait ensemble
depuis que j’étais bébé.
-
À 3 heures du matin,
on frappe à la porte.
-
Ils appellent mon père ! Ma mère lui dit :
"C'est dangereux ! Ne sors pas !"
-
Il y est allé quand même.
-
On l'a entendu crier : "Au secours !"
Puis plus rien.
-
Ils l’ont emmené.
On n’a pas dormi de la nuit.
-
- T'avais quel âge ?
- 11 ou 12 ans.
-
Je m’en souviens très bien.
-
C’est impossible à oublier.
-
On a retrouvé son corps
sous un fût de pétrole.
-
Le fût était sectionné en deux
-
et le cadavre était dessous.
Comme ça.
-
Sa tête et ses pieds
étaient recouverts de sacs.
-
Mais un pied dépassait.
-
Ce matin-là, personne
n’est venu nous aider.
-
On l’a enterré somme une chèvre,
sur le bord de la route.
-
Moi et mon grand-père,
on a transporté le corps
-
et creusé sa tombe. Personne
ne nous a aidé. J’étais qu’un enfant.
-
Après, toutes les familles communistes
on été forcées de s’exiler.
-
On nous a entassés dans un bidonville,
à l’orée de la jungle.
-
C’est pour ça, en fait,
que je suis jamais allé à l’école.
-
J’ai dû apprendre par moi-mème
à lire et à écrire.
-
Pourquoi je vous le cacherais ?
-
On doit apprendre
à se connaître, non ?
-
Je jure que je ne critique pas
ce que vous faites.
-
C’est juste du contenu pour le film.
Je vous promets, c’est pas une critique.
-
Écoute, tout est déjà planifié.
-
On peut pas tout raconter non plus.
Le film finira jamais !
-
Ton histoire est trop compliquée.
Ça demanderait des jours à tourner.
-
- Peut-être qu’on peut l’intégrer.
- Ça motiverait les acteurs.
-
- On devrait lui donner une cigarette.
- Ouais.
-
Donnez-lui de l’eau et une cigarette.
Il a peur.
-
Nous croyons que cet homme
est communiste.
-
Après qu’on les condamnait, y’avait
diverses réactions. Certains priaient.
-
- Allez, prie.
- "Dieu, aide-moi !"
-
D’autres gémissaient.
-
Dirige-le
-
Gémis. Regarde autour de toi,
terrifié.
-
Comment tu lui annonces qu'il
va mourir ? Durement ou doucement ?
-
Normalement.
-
- Froidement ?
- Oui.
-
J’essaie de le leur faire accepter
l’idée de la mort.
-
Anwar, montre-nous
comment on torture.
-
"Tu veux que j'me serve de ça ?"
-
- Je dois lui faire peur ?
- Oui.
-
"Tu veux que j'me serve de ça ?"
-
Supplie-le de ne pas le faire.
-
Maintenant, bande-lui les yeux.
Bâillonne-le aussi.
-
Pas le nez,
faut qu’il puisse respirer.
-
C’est pas grave s’il meurt pour vrai.
-
Pas trop serré.
Ça va, on va le tuer pour de bon.
-
On avait toujours du fil sous la main
C’était notre outil principal.
-
On le passe autour du cou,
sans qu’il voie ce qui se passe.
-
Tout à coup,
il se sent étranglé.
-
Josh me demande tout le temps :
"Tu bossais dans le même bureau,
-
comment t'as pu ne pas voir ?"
-
Je t’affirme que je n’ai jamais rien vu.
-
Maintenant que je vois
votre reconstitution,
-
je réalise à quel point
vous étiez des rusés.
-
Même moi, le journaliste
aux "oreilles d’éléphant",
-
les sens bien aiguisés,
je n'ai jamais rien vu !
-
Je suis étonné. Parce qu’on a
jamais caché ce qu’on faisait.
-
Si lu ne savais rien,
je serais choqué.
-
Sérieux, je savais pas.
-
On était dans le même bureau.
-
- Et ça se passait au grand jour.
- Jamais rien vu.
-
Vous étiez des rusés
et je montais rarement à votre bureau.
-
- Ton éditeur dirigeait la torture.
- Non !
-
- Il le dit lui-même !
- C'est un mensonge !
-
Lui et les autres chefs
décidaient qui on allait tuer.
-
Je dis pas que t'es menteur,
mais en toute logique…
-
- Continue, Adi.
- Je le traite pas de menteur, Joshua.
-
Mais cet homme, un journaliste
qui se distancie des faits…
-
Des actes qu’on commettait
au grand jour,
-
comment il pouvait ne pas savoir ?
Même les voisins savaient !
-
Ils ont été des centaines à mourir.
C’était un secret de polichinelle.
-
- Bois !
- Prends de l'eau.
-
- Bois !
- C'est pas du poison !
-
C’est pas du poison.
-
Bois.
Ça va te rafraîchir.
-
Donne-lui une cigarette.
-
Laisse le fumer.
-
C’est du sadisme, Adi.
-
Laisse-le fumer.
Après, interroge-le.
-
Calme-toi. Relax.
-
Balance sa cigarette.
-
Ligote-lui les mains dans le dos.
-
Questionne-le de nouveau
sur ses activités.
-
Ayez pitié de moi !
-
S’il vous plaît, monsieur.
-
Est-ce qu'on devrait te tuer ?
-
Attendez. Vous pouvez transmettre
un message à ma famille ?
-
Bien sûr.
-
Je peux leur parler
une dernière fois ?
-
C’est bon, tirez.
-
Baisse un peu la tête.
-
Emballez-le.
-
Emportez-le.
-
Écoutez, si on arrive à faire le film,
-
ça dissipera toute les rumeurs
sur la cruauté des communistes.
-
- C'est nous les plus cruels !
- On incarne là cruauté.
-
Si le film est un succès.
Il faut comprendre
-
chacun des gestes qu’on pose.
-
C’est pas une question de peur.
Ça s’est passé il y a 40 ans.
-
Il y a prescription.
-
C'est pas une question de peur
mais d'image. La société dira :
-
"On s’en doutait, ils ont menti
sur la cruauté des communistes."
-
C’est pas un problème pour nous,
c’est un problème pour I’histoire.
-
Toute l'histoire sera inversée.
Pas à 180 degrés, à 360 degrés !
-
À condition de réussir
cette scène-là.
-
Mais pourquoi cacher notre histoire
si c'est la vérité ?
-
Non, l’enjeu, c’est que
-
tout ce qu’Anwar et moi
avons toujours raconté est faux
-
Les communistes n’étaient pas cruels.
-
- Mais c'est la vérité !
- J'approuve complètement.
-
Tout ce qui est vrai ne doit pas
nécessairement être rendu public.
-
Je crois que même Dieu
garde des secrets.
-
Je suis conscient
que nous avons été cruels.
-
C’est tout ce que j’ai à dire.
-
Maintenant, c’est à vous de voir.
-
Sans vouloir vous mettre mal à l’aise,
je m’interroge.
-
En insinuant qu’il s’agit d’une guerre,
vous n’êtes pas hanté comme Anwar.
-
La convention de Genève définit pourtant
vos actes comme des crimes de guerre.
-
Je ne suis pas entièrement d’accord
avec ces lois internationales.
-
Quand Bush était au pouvoir,
Guantanamo se justifiait.
-
Saddam Hussein possédait
des armes de destruction massive.
-
Sous Bush, ça allait
mais plus maintenant.
-
La Convention de Genève, c’est
peut-être la moralité d’aujourd’hui,
-
mais demain, on aura la Convention
de Jakarta. Genève, terminé !
-
Ce sont les gagnants qui définissent
les crimes de guerre.
-
Moi, je suis un gagneur.
Je fais mes propres définitions.
-
Je ne me soumets pas aux
règles internationales.
-
L’important, c’est que toute vérité
n’est pas nécessairement valable.
-
Certaines vérités ne sont pas bonnes.
Comme le fait de rouvrir cette affaire.
-
Même si ce que vous trouvez est vrai,
ce n’est pas bien.
-
Mais pour les familles des millions
de victimes,
-
si la vérité sort au grand jour,
c’est bien.
-
D’accord, mais parlons
du meurtre originel, Caïn et Abel.
-
Pourquoi se focaliser
sur les communistes ?
-
Les Américains ont tué les indiens.
-
Qui les a punis pour ça ?
Punissez-les, eux !
-
Pour moi, rouvrir ce dossier,
c’est de incitation à se battre.
-
Je suis prêt ! Si le monde veut
la guerre perpétuelle, je suis prêt.
-
Si vous voulez qu'on se batte,
je suis prêt !
-
Et si on vous assignait devant la
Cour des droits de l'homme à La Haye ?
-
- Maintenant ?
- Oui.
-
J’irais. Je suis pas coupable,
mais j’irais.
-
C'est que je serais célèbre !
Je suis prêt !
-
Je vous en prie, faites-moi assigner
à La Haye.
-
Ça va être chaud.
-
Très chaud.
-
Et sans se presser, hein ?
-
J'adore ! Du bonheur pour le yeux.
-
Pour un mec comme moi,
c’est bon pour la santé.
-
Pourquoi les gens
regardent James Bond ?
-
Pour voir de l’action.
-
Pourquoi ils regardent des films sur les
les Nazis ? Pour le pouvoir et le sadisme !
-
On fait ça très bien, nous.
-
On peut être encore plus sadique.
-
Pires que dans les films de Nazis.
-
Bien sûr que je peux.
-
On ne voit jamais de films
où les gens sont décapités.
-
Sauf en fiction,
mais c’est autre chose.
-
Moi, je l’ai fait pour de vrai.
-
Ce qui est clair, c’est qu’aucun film
n’a jamais utilisé notre méthode.
-
On peut faire un carton au box-office.
-
L’humour, c’est un must.
-
- L'histoire d'amour ?
- On l'a !
-
Parce que si le public reste tendu
tout le long.
-
Avec rien pour se divertir,
ça ne marchera jamais !
-
Tu sens bon, Herman !
-
Par chance que je l'ai apporté.
Imagine-comme tu sentirais, sinon !
-
Mais faudra me la rendre.
C’est pas un cadeau.
-
J’ai toujours mis de l’eau de Cologne.
-
C'est seulement pour que t'en mettes
Pas pour la garder !
-
- Alors tu me la rends, entendu ?
- J'te la rendrai.
-
Une fois j’ai porté un parfum
-
qui s’appelle Christian Dior, Herman.
-
Les gens qui me croisaient
-
se retournaient sur mon passage.
-
"Ce type sent super bon !"
qu'ils disaient.
-
Comme moi maintenant ?
-
Toi t’es laid,
alors si l’un de nous sent bon,
-
on croira que c'est moi,
sûrement pas toi !
-
Hé, c'est quoi cette rivière, Herman ?
-
Je vois toutes les veines.
-
Dans mes paupieres.
-
Je vois chaque veine.
-
J'ai un couteau au lieu du revolver !
-
Quand j’étais petit, j’imitais
les stars américaines.
-
Je les regardais tellement
-
que je m’y croyais.
-
Je regardais
des films, de gangsters…
-
Des films violents…
Je voyais toutes ces façons de tuer.
-
Et je les imitais.
-
Surtout quand les gangsters
tuaient avec un fil de fer.
-
C’est ma méthode pour capturer
et tuer les communistes.
-
Bien sûr,
On n’est pas au même endroit.
-
Maintenant, je suis dans la jungle
-
à jouer aux cowboys.
-
Baisse la tête, s’il te plaît.
-
Baisse tes mains
comme un bon garçon…
-
T’es un traître.
-
Elle est super
ma chemise rouge, non ?
-
- J'aime pas la mienne.
- La jaune ?
-
- C’est moche, le jaune.
- Ça dépend qui le porte.
-
Qu'est ce que tu veux dire ?
-
Certaines couleurs
vont à certaines personnes.
-
N'importe quoi !
Comment tu sais que le rouge te va ?
-
C'est nous qui te regardons !
-
Je sais ce qui me va bien
parce que je suis artiste.
-
- Donc je suis pas un artiste ?
- Eh non.
-
T'es le seul artiste ?
-
Admirez le paysages, Madame.
Attention…
-
- 1,2,3...
- Ah !
-
- Un autre.1,2,3...
- Ah !
-
J’ai rejoint le Parti des Patrons
et Ouvriers Indonésiens.
-
On m’a demandé de me présenter
au parlement.
-
Ça m’a surpris.
-
"Pourquoi moi ?"
Ils ont dit : "tu peux y arriver ! "
-
Alors je me suis dit,
"Pourquoi pas ?"
-
En fait, je suis le candidat idéal,
tout le monde me connaît.
-
Vive le parti "Patrons et Ouvriers !"
Je m'appelle Herman.
-
Je me battrai pour les droits
des ouvriers.
-
Votez pour moi le jour des élections !
-
Si je suis élu, je siégerai
à la Commission de la construction.
-
J’obtiendrai de l’argent
de tout le monde.
-
Par exemple, si un immeuble
est trop court de 10 centimètres,
-
je peux exiger sa démolition !
-
On me suppliera "Ne nous dénoncez pas.
Voici votre argent."
-
Et même si l’immeuble est en règle,
-
si je les menace, ils paieront.
-
Et pas des petites sommes.
Dans un pâté de dix immeubles,
-
chacun rapporte 10 000 dollars.
Faites le compte.
-
Ça fait déjà 100 000 dollars.
-
Et ça c'est qu'un seul quartier !
-
En fait le parlement devrait être
l’endroit le plus noble de la société.
-
Mais quand on
ce qui s'y passe…
-
Ce ne sont que des gangsters
en cravate.
-
À quel type d'activités illégales
s'adonne Jeunesses Pancasila ?
-
Le jeu.
-
Membre du parlement de Sumatra du Nord
Marzuki
-
Les casinos et les boîtes de nuit.
-
Les supermarchés.
-
Ce n’est pas illégal.
On assure seulement leur sécurité.
-
- Et les activités illégales ?
- Les casinos.
-
- Quoi d'autre ?
- La contrebande.
-
Pèche illicite, coupe de bois, jeu.
-
S’ils ne paient pas,
on les fait chanter.
-
Ces entrepreneurs me craignent.
-
S’ils ne payent pas,
-
mes sbires vont les retrouver.
-
Et parce que je suis proche
des milieux du pouvoir.
-
L’armée, la police, le gouverneur.
-
Le gouverneur a besoin
des Jeunesses Pancasila
-
pour le maintien de l’ordre.
-
S’il y avait seulement la police,
il n’y aurait pas de sécurité.
-
Qu'est-ce qui a besoin
d'être sécurisé ?
-
Les gangsters peuvent maintenir l’ordre
comme provoquer la révolte.
-
En exterminant les communistes,
on a montré de quoi on était capables.
-
Ceux qui sont au pouvoir ont compris.
-
Si on ne s'occupe pas de ces gangsters,
c'est dangereux !
-
Bienvenue à notre candidat,
Marzuki !
-
Pancasila !
-
Je suis prêt !
-
Qu'est-ce que je dois dire déjà ?
-
Ma première phrase, c'est quoi ?
"Je suis Herman ”.
-
Je suis Herman !
Debout, ça sera mieux.
-
Mesdames et messieurs. Ensuite ?
J'arrive pas à m'en rappeler.
-
"Je suis Herman,
du parti Patrons et Ouvriers."
-
- Y a des T-shirts gratuits ?
- Non. Voici ma carte, madame.
-
Des T-shirts ! Des cadeaux !
-
Vous en faites pas,
on reviendra avec des cadeaux.
-
Priez pour qu’il remporte l’élection.
-
À ceux qui réclament des cadeaux,
-
dites qu’ils en auront,
si vous l’emportez.
-
Dites-leur qu’on filme, aujourd’hui.
-
Tenez, madame.
Pensez à voter pour moi.
-
- Une carte, c'est tout ?
- Et les cadeaux ?
-
- Ça viendra plus tard.
- Si vous êtes élu ?
-
- Attends, coco, tu te crois où ?
- Oui, mais...
-
Certains partis distribuent
des pots-de-vin.
-
En fait, ils le font tous.
-
Quand vous voyez des milliers
de gens aux rallyes,
-
ils sont tous payés pour être là.
-
Pour eux, c’est comme un boulot.
-
Pour eux, c’est comme un boulot.
-
Pas payés, ils ne viennent pas.
-
- Ils se demandent tous entre eux.
- "T'as touché combien ?"
-
Les chefs, pareil.
Ils touchent juste un peu plus.
-
Aujourd’hui plus aucun candidat
ne croit aux idée qu’il défend.
-
On est tous devenus
des stars de feuilleton télé.
-
Nos âmes ressemblent a
un feuilleton télé.
-
Ils sourient tous, là,
mais au fond, ils ont la haine.
-
Ils se disent :
"Qu'ils aillent se faire foutre !"
-
Herman a toujours été
dans les Jeunesses Pancasila.
-
Mais il a pris la grosse tête.
Il veut devenir quelqu'un…
-
Même les candidats riches
ne trouvent pas d'électeurs…
-
Herman n’a que ses belles paroles.
Jamais il ne pourra gagner.
-
Herman n’a pas été élu au parlement.
-
Febby, souviens-toi toujours de Dieu.
-
Et prie pour ton papa.
-
Quand je serai mort,
tu devras continuer ta route.
-
Alors sois courageuse…
-
Tous tes désirs…
-
Tu dois être courageuse,
-
pour faire face aux épreuves
à la réalité…
-
C’est un beau film de famille.
Plein d humour.
-
Une belle histoire,
des paysages merveilleux.
-
Ça montre vraiment
ce qui est spécial dans notre pays…
-
même si c'est un film…
-
sur là mort.
-
Les enfants de communistes
pourront-ils apprécier ce film ?
-
- Je pense…
- Bien sûr.
-
Bien sûr, mais…
-
S’ils savent de quoi ça parle,
-
ils ne voudront pas le voir.
-
Mais s’ils ne savent pas,
ils voudront le voir.
-
Dans mes rêves,
ils ont une voix menaçante.
-
Comme si les fantômes me haïssaient.
-
C'est peut-être les communistes
qu'on a tués en 1965 ?
-
J’imagine pas tant en détail.
-
- Ils ont un rire terrifiant.
- Essaie de rire.
-
Le cauchemar d’Anwar, prise 2.
-
Moteur.
-
Action !
-
Je croyais t'avoir tué !
-
- J'ai pas dit le bon truc ?
- Lève-toi, tout simplement,
-
et dis : "Pourquoi t'es toujours vivant ?"
C'est pourtant pas compliqué.
-
Je... Je croyais t'avoir tué !
-
Je me souviens. J'ai dit :
"Descends de la voiture."
-
Il a demandé :
"Où m'emmenez-vous ?”
-
Puis, il a refusé
de continuer à marcher.
-
Alors je lui ai foutu
des coups de pied dans l’estomac.
-
J’ai vu Roshiman
m’apporter une machette.
-
Spontanément, j’ai marché vers lui
et je lui ai tranché la tête.
-
Mon copain ne voulait pas regarder.
-
Ils ont couru vers la voiture
-
et j'ai entendu ce son…
-
Son corps était tombé.
-
Et sur sa tête,
les yeux étaient encore…
-
Au retour, je me suis demandé pourquoi
je ne lui avais pas fermé les yeux.
-
Ça m'obsédait. Pourquoi
ne lui ai-je pas fermé les yeux ?
-
C'est la source
de tous mes cauchemars…
-
Ces yeux que je n’ai pas fermés
ne cessent plus de me regarder.
-
C’est ce qui me perturbe toujours.
-
- Ça me ressemble ?
- Celui-là, oui.
-
- De profil ?
- C'est tout à fait toi.
-
De profil,
c’est ton portrait craché.
-
Tranche-lui la gorge !
-
Décapite-le !
-
Bois son sang !
-
Pose la tête par terre.
-
Pose-la !
-
Maintenant ris !
Éclate de rire !
-
Je vais poser avec toi.
-
C est un honneur !
-
Vous l'avez eue ? Elle est bonne ?
-
- Merci.
- Merci à vous, monsieur.
-
Une si belle fille, c’est plutôt moi
qui devrais vous remercier.
-
Dommage qu’elle se teigne en blonde,
elle a l’air d’une pute.
-
- Raconte-lui, dans la voiture.
- Il s'est passé quoi ?
-
Il y avait cette fille…
-
Elle a sucé six mecs.
-
Pas une goutte de sperme par terre.
-
- Six mecs ?
- Elle a tout avalé.
-
Quand le dernier dernier a éjaculé,
elle suçait toujours.
-
Comme si elle en redemandait.
-
Mon Dieu
faites que notre grande organisation
-
soit le pilier de cette nation.
-
Fais des Jeunesses Pancasila
un modèle pour tout le pays !
-
Homme d’affaire et chef paramilitaire
Haji Anif
-
Tu veux savoir le prix de cette terre ?
200 millions de dollars.
-
Je l’ai donné aux oiseaux,
-
pour qu’ils soient heureux.
Comme moi, je suis heureux.
-
Tout le monde craint
les paramilitaires.
-
Quand un homme d’affaire convoite
une terre habitée par des gens,
-
s’il doit payer plein pot,
ça fait cher.
-
Nous, on peut l’aider à résoudre
son problème.
-
Comme les gens nous craignent,
quand on arrive,
-
ils nous disent "Prenez la terre,
donnez-nous ce que vous voulez."
-
Ça c’est spécial.
Edition limitée.
-
C’est très rare,
alors je l’ai acheté.
-
C’est très cher.
On en trouve très peu d’exemplaires.
-
C’est une rose.
-
Très, très limitée.
-
Un éléphant.
Très, très limité.
-
Seulement des séries limitées.
-
Extrêmement limitées.
-
J’achète ces souvenirs
dans tous les pays que je visite.
-
Hongrie.
2 250 dollars.
-
On est contre
les manifestations politiques.
-
Par exemple quand le président vient
et les gens manifestent contre lui,
-
on n’accepte pas ça.
-
Alors on les disperse, de force.
-
Tu dois être furieuse,
et triste à la fois.
-
Regarde ça !
-
Tu dois être en colère, triste.
Sadique.
-
Regarde, ton sang.
-
Regarde ce que j'ai trouvé
dans tes entrailles, ton foie !
-
II est pourri !
-
Regarde ça
-
Regarde, ton sexe !
Je te le fourre dans la bouche.
-
Samedi soit, j’ai été au cinéma.
-
Ho ! Je vais pas tortiller du cul,
non plus !
-
J’ai vu un film
tout seul avec ma chérie.
-
Comme c’était complet,
-
On a acheté les places
aux gangsters qui en revendaient.
-
C’était délicieux.
-
Rien que nous deux.
-
Comme un roi et une reine
dans un palais.
-
Je suis allé acheter à boire
-
mais j’avais pas d’argent.
-
Comme c'est embêtant.
Que dois je faire ?
-
Imagine si le film
finissait sur cette scène…
-
Les gens penseraient
que j’ai un mauvais karma.
-
Mais si c’est au début,
-
alors, tout les trucs sadiques
que je fais ensuite
-
seraient justifiés
par le sadisme de cette scène.
-
Totalement justifiés !
-
Mais Anwar,
tu es mort dans cette scène,
-
puisque je t’ai décapité.
-
Alors si elle est au début,
-
il faudrait couper la fête
à quelqu’un d’autre, pour la tienne.
-
Non, parce que cette scène…
-
- Mais cette scène est hors du temps.
- Ouais.
-
Le type qui appelle à la prière,
il était communiste.
-
Lui ?
-
Celui qui appelle à la prière ?
Oui.
-
Il a eu la chance de ne pas tomber
entre mes mains. Sinon, il serait mort.
-
Même maquillé on dirait
qu'il arrive d'Éthiopie !
-
- De Tanzanie. Comme ldi Amin.
- Idi Amin Dada.
-
Caméra 3, sur Citra !
Gros plan sur Citra pour ouverture.
-
Tout le monde est prêt ?
Lancez le générique !
-
Télévision Nationale Indonésienne
"Dialogue spécial"
-
Bienvenue sur le plateau
de "Dialogue spécial".
-
Nos invités aujourd’hui
sont des gangsters de cinéma,
-
qui tournent un film
-
commémorant la répression
des communistes.
-
Commençons avec vous, Ibrahim Sinik.
-
D’après le beau père, du président,
le général Sarwo Edhie,
-
2.5 millions de communistes
ont été massacrés.
-
Eh bien, Sarwo Edhie a eu cette idée :
-
Si on exterminait les communistes ?
-
J’étais à la tête de tous
les groupes anti-communistes
-
mais je recrutais mes hommes
chez les Jeunesses Pancasilas.
-
On applaudit bien fort les Jeunesses
Pancasilas pour leur vision du futur !
-
Les Jeunesses Pancasila
Ils étaient au cœur de l'extermination !
-
Voici maintenant
la star du film, Anwar Congo.
-
On applaudit Anwar Congo.
-
Quel est votre acteur de cinéma
préféré ?
-
Celui qui me ressemble plus…
-
C'était un acteur noir, fameux…
-
Sidney Poitier.
-
Sidney Poitier !
-
À vous de décider si Anwar
ressemble à Sidney Poitier !
-
De face, non,
mais de profil, oui !
-
À l’époque, les gangsters de cinéma
étaient très réputés.
-
Quelle est l'origine du mot "gangster" ?
-
En fait, gangster veut dire
"homme libre".
-
C’est pour ça que le thème du film
-
est une chanson intitulée "Born Free".
-
Donc vous emmeniez les communistes
directement dans votre bureau ?
-
Oui, et après les avoir interrogés,
-
on décida
qu’ils ne méritaient plus de vivre.
-
On devait les exécuter.
-
Et vos méthodes d'exécution
s'inspiraient de films de gangsters ?
-
Parfois, oui.
-
C'est comme…
-
Incroyable !
Il s'est inspiré du cinéma !
-
Chaque genre a ses codes.
Dans les films de mafia,
-
on étrangle un mec dans sa voiture
et puis on jette le corps
-
Nous aussi, on a fait ça.
-
Voyez qu’Anwar et ses amis
ont développe
-
une méthode unique et efficace
pour exterminer les communistes.
-
Moins cruelle et moins sadique,
sans violence excessive.
-
En fait, vous les avez oblitérés.
-
- Combien de gens il a tué ?
- Environ 1000.
-
Comment il arrive à dormir ?
Ça ne le hante pas ?
-
- Beaucoup sont devenus fous.
- Tu m’étonnes.
-
- Ils se sont surtout enrichis.
- Ouais.
-
Enrichis par le vol.
-
Mais tuer tous ces gens
les a aussi rendus fous.
-
Quel message faites-vous passer
aux jeunes dans ce film ?
-
Ils doivent se rappeler
de leur histoire.
-
Ne jamais oublier.
-
Dieu doit être contre les communistes.
-
C'est vrai, Dieu hait les communistes !
-
C'est pourquoi il a permis
que ce film soit si beau !
-
Et pour ce qui est de la réconciliation,
il n'y en a pas !
-
Parce que ce qui s’est passé
est historique.
-
C'est le sens de l'histoire.
Donc pas de réconciliation !
-
Pourquoi les enfants des victimes
n'ont-ils jamais songé à se venger ?
-
Ce n'est pas qu'ils ne veulent pas.
C'est qu'ils ne peuvent pas !
-
Parce qu'on les exterminerait tous !
-
Al Pacino.
-
C’est ton portrait craché.
-
Membre du parlement
Rahmat Shah
-
J’ai acheté ça aux enchères,
à Christie’s.
-
Michael Schumacher, Michael Jordan,
Michael Jackson… Tous les Michael.
-
Regarde, la chaussure
de David Beckham.
-
Je les ai fait empailler…
-
J’en ai des tas comme ça.
-
J'ai tiré celui là ! Un rhinocéros noir.
Ils sont en voie d'extinction...
-
T'imagines si le cerf était une femme
et le léopard un homme ?
-
- Là c’est moi, Anwar Congo.
- Oh, c’est toi i
-
Regarde, je roule un joint.
-
Tu fumes de l’herbe.
-
Là, en Thaïlande
pour un tournoi de bowling…
-
On a perdu… Le bowling…
-
C’est moi. Chemise à motif,
pantalons camouflage.
-
Ta vu ? Des chaussures à plateforme.
-
Trop classe, non ?
-
Pour la scène de Kampung Kolam…
C'est un massacre, alors…
-
Pour les massacres, normalement,
je mets des jeans.
-
Pour les massacres,
faut des pantalons épais. Comme ça…
-
- Et un motif à carreaux ?
- Ça pourrait aller, mais alors petits.
-
Ne la nourris pas maintenant.
On fera ça au tournage.
-
Ne vous arrêtez pas.
-
Anwar, pourquoi tu fais les cent pas ?
-
C’est seule foi qu’un ministre
se déplace pour l’un de nos tournages.
-
Il vient spécialement
pour vous motiver et vous soutenir.
-
Soyez-en fiers !
-
Vous serez tous dans le film !
-
Voici les paramilitaires
de Sumatra Nord !
-
Le monde entier va voir ça.
Londres, au Royaume-Uni.
-
Oubliez Jakarta.
Jakarta, c'est rien !
-
Ministre adjoint de la Jeunesse et des Sports
Sakhyan Asmara
-
Super ! Tes assassins sont tous là.
-
- Salut Herman. Ça va ?
- Bien.
-
C’est un vrai combattant.
Il a maigri.
-
Improvisez pour exprimer votre fureur.
-
Hurlez : "Écrasez les communistes !"
-
- Écrasez les communistes !
- Exterminez-les !
-
C’est bon, on essaie.
-
Attaque de Kampung Kolam, prise 1 !
-
Aucun communiste ne doit s'échapper !
-
À mort les communistes !
-
Massacrez-les !
-
Prêts à l'attaque ?
-
Maintenant, Anwar va mener
I’attaque contre les communistes.
-
Mort aux communistes !
-
Ne faites pas pas prisonniers !
-
Massacrez-les tous !
-
Brûlez leurs maisons !
-
Mort aux communistes !
Taillez-les en pièces !
-
Exterminez-les à la racine !
-
Coupez-leur la tête !
Brûlez-les ! Tuez-les tous !
-
À mort !
-
- Tuez les tous !
- Chante, Herman. "En avant, sans peur".
-
En avant, sans peur !
Défendons ce qui est juste !
-
En unisson !
Nous vaincrons !
-
Coupez ! Coupez ! Coupez !
-
Joshua et l’équipe, je m’adresse à vous,
-
comme dirigeant des Jeunesses Pancasila.
-
Ce que nous venons de voir
n’est pas représentatif
-
de notre organisation.
-
On ne doit pas avoir l’air de bêtes
assoiffées de sang.
-
C’est mauvais pour notre image.
-
Faut exterminer les communiste,
-
les éradiquer totalement,
-
mais avec moins de cruauté.
-
Ce qu’on a filmé là,
c’est très pénible pour moi.
-
Surtout de voir mon image,
au milieu de ce carnage.
-
Tu comprends, Joshua ?
-
Une histoire vécue.
C'est ce qu'on veut tous, non ?
-
Évidemment.
-
Tu vois,
la scène qu’on vient de filmer.
-
Garde-là ! Elle doit de servir à montrer
à quel point on peut être féroces !
-
En fait, on peut l'être encore plus !
-
Interprète ça comme une simulation
de notre fureur,
-
lorsqu’on menace notre pays.
-
C’était fabuleux d’être ici.
Bonne chance à tous.
-
Je vous laisse.
-
- Pancasila !
- Pour toujours !
-
Si elles sont jolies, je les viole toutes.
-
Surtout à l’époque
où on dictait notre loi.
-
La nique !
-
Toutes celles que je rencontre,
je leur défonce le cul !
-
T'es une femme communiste ?
-
Tu caches quoi là-dessous ?
-
Voilà, c'est le principe !
-
Quand t’en trouves une de 14 ans.
-
Le délice !
-
Je lui dis : "Tu vas vivre l'enfer,
mais pour moi, ça va être le paradis !"
-
Il faut nous résister.
-
Personne n'aime être torturé,
on est d'accord ?
-
Si vous avez un moyen de sauver
votre peau, faites-le.
-
Et si vous pouvez vous enfuir,
courez !
-
On fait comme ça…
-
Fais le tour…
-
Faut que ça fasse le tour du cou.
Attention tout le monde !
-
Quand vous jouez,
pensez aux caméras.
-
Allez, mesdames.
On pense positif !
-
Si vous pensez positif,
-
votre jeu sera sensationnel
et la scène sera réussie.
-
Positif. Pensez positif !
-
Emmenez-le.
-
Tuez-le.
-
Coupez !
-
Bakti ! De l'eau !
-
Laissez-la se reposer.
-
Febby, t’as bien joué,
mais là, faut arrêter de pleurer.
-
Tu me fais honte ! Les vraies actrices
pleurent uniquement durant la scène.
-
Mon seul regret, franchement,
-
je ne pensais jamais
que ça serait si horrible…
-
Mes amis me disaient
d’être plus sadique,
-
mais quand j'ai vu les femmes
et les enfants…
-
Imaginez l’avenir de ces enfants.
-
Ils ont été torturés.
-
Maintenant on brûle leurs maisons.
-
C'est quoi leur avenir ?
-
Ils vont nous maudire pour toujours.
-
C'était très, très…
-
Quand tu penses au 'karma',
-
qu'est-ce que ça évoque pour toi ?
De quoi as-tu peur ?
-
Le 'karma' est comme
une loi de la nature.
-
Je pourrais me retrouver handicapé…
-
Comme une punition de Dieu, je dirais.
-
Toute cette obscurité…
-
C’est comme vivre
à l’extrémité du monde.
-
Autour de nous,
il n’y a que l’obscurité.
-
C’est terrifiant.
-
On leur enfonçait du bois dans le cul
jusqu’à qu’ils en crèvent.
-
On leur brisait la nuque avec du bois,
puis on les pendait.
-
On les a étranglés avec un fil de fer.
On leur a tranché la tête.
-
On leur a roulé dessus
avec des voitures.
-
C’était permis de le faire.
-
La preuve, on a assassiné des gens,
sans jamais être punis.
-
Ceux qui sont déjà mort,
on ne peut rien faire.
-
Il faut l’accepter.
-
Peut être je me justifie simplement
mais j’ai réussi.
-
Je ne me suis jamais senti coupable
dépressif, ni eu de cauchemars.
-
Ne remue pas la tête.
On dit : "Oui, monsieur !"
-
C'est bien d'être communiste, hein ?
Tu baises les femmes des autres...
-
Vraiment marrant !
Tu voles leurs biens aussi.
-
- Surtout les chefs.
- Alors tuons-le.
-
- Tu veux une clope, Pang ?
- Non.
-
Tiens, un cigare néocolonialiste.
-
Prends une taffe.
-
Mets-toi le dans le nez
si tu veux pas fumer.
-
- Regarde-le !
- Regarde-moi.
-
Regarde-le dans les yeux !
-
Tu es jaloux.
-
Tu es jaloux de ma cravate, pas vrai ?
-
On veut pas être pauvres. Même si
on n’est que des gangsters de cinéma,
-
on veut se sentir comme ceux
qu’on voit dans les films.
-
Espèce de salaud !
-
T es jamais content !
-
Fils de pute.
-
Fais ce que je te dis.
-
Fais une pause.
-
- Tu m'offres ton enfant ?
- Non.
-
- Ne m’insulte pas.
- Ta fille est laide et n’a qu’un œil.
-
Ta femme, ça irait, mais ta fille,
elle n’a qu’un œil.
-
Espèce de minable !
-
- Tu me dégoûtes.
- Je vous en prie, monsieur.
-
Regarde le plafond.
-
Tu m’as insulté.
-
- Tu veux que je te frappe ?
- S'il vous plaît, non.
-
Donne-la-moi.
-
S’il vous plaît,
ne lui faites pas de mal.
-
- Je ne veux que la tenir.
- Ne faites pas de mal à mon enfant.
-
- Assieds-toi !
- Ne faites pas de mal à mon enfant.
-
Donne la moi !
-
- Lâche-la, sinon... !
- Oui, monsieur.
-
Tu essayais de m'acheter
avec cette enfant ?
-
Tu t'imagines
qu'elle est assez bonne pour moi ?
-
- C'est une insulte !
- Ma fille.
-
Regarde-la, maintenant !
-
Non !
-
Assieds-toi !
-
Assieds-toi !
-
Tu m’as insulté.
-
Regarde !
-
Regarde, l’œil qui lui reste.
-
Ses jolies fossettes…
-
Ses jambes... Tu te souviens
quand elle courait vers toi ?
-
Les deux.
-
Voilà ce qui arrive à ceux qui essaient
de nous acheter avec leurs enfants.
-
Tu vois ?
C'est toi le sans-cœur.
-
C’est toi le barbare.
-
Le vrai barbare.
-
Je ne ressens rien,
je ne vois rien venir…
-
mais le tourment
se fait toujours plus grand.
-
Tu fais comme on dit !
-
Écoute !
-
Écoute bien les questions qu'on te pose !
-
Réponds ! Plus vite !
-
Jalaludin Yusuf.
-
Alors c'est toi le chef ?
-
Tu vas voir comme je vais t'arranger !
-
Parle !
-
Note. Il a dit "Oui".
-
Parle ! Parle !
-
Réponds,
ou je te casse les jambes !
-
Dépêche-toi
ou je te casse les jambes !
-
Dana, pose-lui la question.
-
Ailleurs qu'à Titi Kuning,
où exercez-vous vos activités ?
-
Hamparan Perak.
-
Tu nous fais perdre notre temps !
-
Tiens-toi droit !
-
Lève ta main ou je la coupe !
-
Regarde-moi ça ! De l'or !
-
Retire ta montre !
-
Pose-la sur la table.
T'as quoi d'autre ?
-
Une bague ?
-
Non.
-
Une chaîne en or ?
-
Calme-toi et écoute !
-
Allez. Parle
-
Donnez-lui un mouchoir.
Ça lui coule dans les yeux.
-
- Voilà, voilà. Ne pleure plus.
- Ça m’a coulé dans les yeux.
-
Tant mieux. Ça fait plus réaliste !
-
Alors comme ça, on veut interdire
les films américains en Indonésie ?
-
Ça rime à quoi, au juste ?
-
Ta gueule !
-
- T'essaies de faire quoi ?
- S'il vous plaît, monsieur.
-
Arrête avec ce ton amical !
On n'est pas tes amis !
-
Réponds aux questions !
-
Parle !
-
- Pitié, non
- Je le fais pas, mais parle !
-
Parle !
-
Coupez.
-
Tes mains ont tant fait…
-
À ton cou, j’accroche cette médaille.
-
Un instant, j'ai cru que j'étais mort…
-
Respire.
-
- Prends pas ça tellement au sérieux.
- C’est pas ça.
-
N’y pense plus.
-
Bon, on reprend.
-
- Ça va ?
- Non. J'y arrive plus.
-
Apporte de l’eau.
-
Bois.
-
Naître libre,
libre comme le souffle du vent.
-
Libre comme l’herbe qui verdoie.
Naître libre de poursuivre son cœur.
-
Vivre libre,
la beauté qui t’entoure.
-
Le monde qui toujours l’éblouit
Quand tu regardes une étoile.
-
Rester libre.
Nul mur te sépare.
-
Libre comme le rugissement de la vague,
ce n’est pas la peine de se cacher.
-
Pour m’avoir exécuté
et envoyé au ciel,
-
merci mille fois, pour tout.
-
C’est magnifique Joshua.
Vraiment très bon.
-
Jamais je n’aurai pu imaginer
participer à un projet aussi grandiose.
-
Ce qui me rend le plus fier,
-
ce sont ces chutes d’eau qui expriment
la profondeur des sentiments.
-
Tu sais, cette scène où on m’étrangle
avec le fil de fer.
-
- Tu l'as, ici ?
- Celle où on t'étrangle ?
-
Tu peux la mettre, s'il te plaît ?
-
Yan ?
-
Je veux qu’il voie ça.
-
- Yan ?
- Il est déjà au lit.
-
Yan, viens voir la scène où grand-papa
se fait torturer.
-
Ami, viens voir grand papa
battu et ensanglanté.
-
Mais c’est bien trop violent.
-
Regardez ça.
Grand-papa se fait tabasser.
-
Monte le son.
-
C'est trop violent, Anwar.
T'es sérieux ?
-
Mais si, ça va aller
T'as pas peur, Yan ?
-
C’est qu’un film. Regarde bien.
-
Grand-papa a l'air si triste, non ?
-
Ça fait trop peur.
-
C'est triste, non ?
C'est grand-papa.
-
Grand-papa se fait frapper
par un gros mec.
-
Il m’explose la tête.
-
Les gens que j’ai torturés,
-
tu crois qu'ils ressentent
ce que je ressens maintenant ?
-
Je me sens comme
ceux que j’ai torturés,
-
parce que ma dignité
a été annihilée.
-
C’est à ce moment précis
que la peur s’installe.
-
Soudainement, la terreur s’empare
de mon corps.
-
En fait, ceux que tu as torturés
ont ressenti bien pire,
-
parce que toi, tu sais que c’est un film.
Eux savaient qu’ils allaient mourir.
-
Mais je le ressens. Josh.
Au plus profond de moi.
-
J'ai pêché, non ?
-
D’avoir fait subir ça
à tant de gens, Josh.
-
Tout est en train de remonter,
c'est ça ?
-
J’espère vraiment que non.
Je veux pas, Josh.
-
C’est ici qu’on a torturé et exécuté
tout ceux qu’on capturait.
-
C’est mal, je sais,
-
mais je devais le faire.
-
Pourquoi je devais les tuer ?
-
Ma conscience me le dictait.
-
Ça…
-
c’est l’un des plus simples moyens
d’enlever une vie humaine.
-
Et ça,
-
on s'en servait pour emporter…
-
les corps des victimes
-
Sans ces sacs,
-
les gens se seraient
peut-être doutés.
wck409
The English "translation" was distracting because it was absurd.