Hermann Hesse est l'auteur
du Loup des steppes.
J'ai appris ça en tant que lecteur
amateur de classiques lettres.
Les classiques m'ont bien servi.
M'encourageant, me mettant au défi
de définir ma pensée, ma vision,
et davantage encore : être
selon mes vœux, ma décision :
libéré.
Trois petites syllabes
pour nourrir mes rêves,
leur donner des ailes pour l'éternité.
Libéré du monde des cadenas
et des clés pour quoi que ce soit.
Libéré de l'identité de l'objet,
de toutes vos idées sur mon identité
car je ne suis plus visible, en fait.
Ce genre de liberté.
Libéré, hors gravité.
Mais je me réveille du rêve le plus cruel
qui se moque de tout
ce que j'ai imaginé réel.
Car le sens
refuse les carcans,
se rebelle contre les broches, les pages
et l'encre qui tache et enchaîne ;
les menottes du sens.
Mais je m'égare.
Retrouvons Hermann Hesse.
Un loup des steppes
est un loup dans les steppes.
un vagabond misanthrope
famélique et réservé,
dans un océan d'herbes hautes.
Il est aussi la création d'une création,
un aspect de la personnalité
de Harry Haller,
le héros de l'autobiographie non avouée
de Hermann Hesse.
Je vous présente mon « Loup d'Harry ».
Je vous convie dans mes contemplations
à observer le dérangé, l'étrange,
le changement qui jamais ne satisfait,
qui toujours attise le feu,
quand rien n'a de nom,
telle l'ombre de la culpabilité.
Ou comme le son de pas qui s'éloignent.
Comme les raisons
qui m'empêchent d'expliquer
pourquoi ça ne veut pas marcher.
Pourquoi je ne trouve pas les mots
pour que ça ne fasse plus mal
même si je me suis toujours senti marginal
et isolé de la société,
des mensonges, des regards acérés
tels des couteaux dans le dos.
Cette humanité, l'inhumanité,
juge, jury, potence.
Je rêve seulement de liberté,
d'affranchissement de la race humaine
et des cauchemars que nous poursuivons
tout en les nommant songes.
Quel que soit le prix payé,
quelqu'un d'autre paie plus cher.
Ceux qui paient le plus
sont appelés indigents.
Nos enfants sont de meilleure facture.
Mais ils usent du mensonge
pour du jetable.
Suspendus comme des carottes,
ils glissent entre leurs mains.
Sur nos lèvres, une seule prière :
encore.
Encore, je vous en prie, encore.
Autant que le plastique sur nos rivages.
Nul ne sait où le passé s'est désagrégé.
Vendu par le gouvernement,
privés de nos maisons perdues,
transformé joyeusement
dans nos émissions préférées.
Quand rien n'est jamais de trop,
mais que l'ordinaire
est toujours trop peu.
C'est un poison que je touche,
que je respire, que je vois,
chaque pensée morbide
que mon esprit conçoit
jusqu'à me persuader :
il n'y a rien de valeur dans nos sociétés.
J'entends l'écho de tous ces cris
s'évanouir dans le silence
quand je trouve le carcan
où j'ai coincé mon esprit,
le cercueil de mon empathie,
alors que tout ce que je veux,
c'est l'espace entre qui
je suis, et qui j'étais.
L'enfant d'une prison,
et l'homme qui sera libéré.
Pardonnez-moi si parfois,
je montre les dents
maintenant que vous pouvez
imaginer ce que signifie
rechercher trois syllabes
qui ne semblent exister
que dans les livres et les rêves.
Merci.
(Applaudissements)