Voici votre cerveau au sujet de Dieu.
(Rires)
En tant qu'étudiant diplômé
de l'Université de l'Utah,
mon équipe et moi avons eu l'opportunité
d'étudier les cerveaux de Mormons,
pendant qu'ils priaient,
lisaient les Écritures
et regardaient des vidéos des
enseignements de leurs chefs religieux.
A Salt Lake City,
on ne manque pas de mormons.
(Rires)
Nous avons recruté via le Deseret News,
le journal de l'Église mormone,
et invité des membres pieux
de la communauté religieuse
à participer à des tests psychométriques
et d'imagerie par résonance
magnétique fonctionnelle,
ou IRMf.
L'IRMf est un outil
scientifique fantastique.
Il nous permet de mesurer d'infimes
fluctuations dans l'afflux de sang oxygéné
qui correspondent
à des changements d'activité neuronale.
Pendant que nos participants
étaient dans le scanner,
ils avaient un bouton sur leur torse
pour qu'ils puissent le presser
et nous informer en temps réel
quand ils ressentaient l'esprit.
C'est un phénomène culturel
qui est un événement
épistémologique central
important pour les prétentions
de vérité du mormonisme.
Nous avons vu que,
pour l'ensemble des tâches,
les trois zones du cerveau
qui ont systématiquement montré
une activité élevée
étaient les régions frontales
de l'attention,
le cortex préfrontal interne
et le noyau accumbens -
une zone du cerveau
bénéficiant d'un apport important
en dopamine, la molécule de la récompense.
Bien loin de n’être qu'une science
des tâches de couleur high-tech,
la trinité des régions neuronales définit
ce que l'on peut raisonnablement nommer
le système neuro-spirituel du mormonisme.
Les implications sont profondes,
pour la culture comme pour le cerveau.
L'une des premières questions
qui me vient à l'esprit est :
« Est-ce que ce système
neuro-spirituel du mormonisme
correspond aux cerveaux d'individus
pieux d'autres traditions spirituelles
quand ils vivent des expériences
religieuses intenses et extatiques ? »
Beaucoup des traditions
spirituelles de notre monde
signalent un profond sentiment
d'unicité avec une source transcendante,
souvent accompagné d'un
comportement charitable exacerbé.
Se pourrait-il que
ces variations culturelles
soient toutes soutenues
par un réseau cérébral commun ?
Pour la première fois de l'histoire
de la philosophie contemplative
et des sciences de l'esprit,
nous pouvons répondre à ces questions
en mesurant l'activité cérébrale
avec plus de précision temporelle
et spatiale que précédemment,
y compris au cours du passé récent
des neurosciences.
C'est une période excitante
pour être chercheur cérébral.
Parlons du mot « Dieu » un instant.
C'est un simple mot
de quatre lettres en français,
et pourtant ce mot est si puissant
linguistiquement et psychologiquement
qu'il est utilisé pour invoquer
la bravoure militaire,
pour promouvoir
un sentiment de nationalisme,
et même justifier la guerre
et autres atrocités.
L'omission hypothétique de ce mot
par un président des États-Unis,
le seul fait de ne pas dire
« Dieu bénisse l'Amérique »,
causerait certainement la chute
de sa cote de popularité.
Peu importent vos croyances métaphysiques,
le fait est que le destin
des vies et des nations
est partiellement défini par ce seul mot :
« Dieu ».
Pour penser à Dieu, que ce soit
de façon positive ou négative,
vous devez raisonner de façon abstraite.
Les principes mêmes qui sont
contenus intrinsèquement
dans n'importe quelle définition
imaginable du mot « Dieu »
incluent des éléments mystiques
et d'inconnaissance.
Ces types mêmes de principes abstraits
sont précisément ce qui nous
amène au cortex préfrontal du cerveau.
Je dois parfois revenir en arrière
et me rappeler
qu'à l'intérieur des os de notre tête,
nous avons un morceau de viande électrique
(Rires)
qui génère des idées abstraites
sur la nature divine.
Le noyau accumbens est situé
un peu plus bas dans le cerveau,
dans une région appelée le sous-cortex.
Le sous-cortex est plus ancien
que le cortex pré-frontal
en termes de temps d'évolution
requis pour son développement.
Le noyau accumbens
est le centre du plaisir du cerveau.
Il renforce positivement
les environnements et comportements
qui sont gratifiants
et bénéfiques pour vous.
Je souris quand je me rappelle
comment, dans le Nouveau Testament,
quand Jésus décrit
les récompenses célestes,
nous mettons en lumière l'incarnation
de ces anciennes métaphores.
Quand on a demandé aux participants
de notre étude de penser à un sauveur,
d’être avec leurs familles
pour l'éternité,
pour résumer, lorsqu'ils pensaient
à leurs récompenses célestes
telles qu'ils les imaginaient,
leur cerveau et leur corps
réagissaient physiquement.
Un hymne classique du mouvement
religieux de Joseph Smith
décrit l'esprit de Dieu
comme un feu qui brûle.
Si vous n'avez jamais ressenti cela,
c'est en fait
une merveilleuse lueur chaude.
Elle vous fait désirer
faire le bien et être bon.
C'est peut-être l'émotion
que le psychologue Jonathan Hite
désigne comme élévation.
Les régions de l'attention
agissent probablement de concert
avec le noyau accumbens
de façon à amplifier le contenu
extraordinaire de l'expérience religieuse.
Nous continuerons à mener des recherches
approfondies dans ce domaine
pour mieux comprendre la dynamique
de ce système neuronal
lorsqu'il interagit avec
la psychologie religieuse.
En plus des aspects biologiques qui
soutiennent l'expérience religieuse,
nous étions aussi curieux
de voir comment le comportement social
est influencé par le cerveau sur Dieu.
Une possibilité que nous avons considérée
est que nos participants
montreraient peut-être une partialité
envers l'autorité de l'endogroupe
s'ils devaient comparer
les enseignements
de leurs propres leaders religieux
avec les enseignements
d'autres traditions spirituelles.
On a créé un exercice
de citations spirituelles
dans lequel on montrait
une citation spirituelle aux participants
et à côté,
une photo de l'auteur de la citation.
On leur a ensuite demandé de noter
la signification de celle-ci
et à quel point ils ressentaient l'esprit
en réponse à cet enseignement.
Ces enseignements provenaient
soit d'une figure d'autorité religieuse
de l'endogroupe,
qui dans le cas de notre étude
incluaient deux apôtres mormons,
Diederich Dorf et Jeffrey Holland,
et le président de l'Église mormone
au moment de l'étude,
Thomas Monson.
Les figures de l'exogroupe
comprenaient le pape François,
Desmond Tutu et Billy Graham,
trois leaders chrétiens, non-mormons.
Comme il s'agissait d'une expérience,
nous avons corsé les choses.
En réalité, aucun des enseignements
ne provenaient des sources désignées.
(Rires)
Nous avons utilisé des citations
des ouvrages de C.S. Lewis.
(Rires) (Acclamations)
On le considère parfois comme
un 13ème apôtre dans le mormonisme.
On a mélangé les enseignements
à l'échelle de l'étude.
Nous avons demandé aux participants
de les classer par pertinence,
par leur degré de ressenti de l'esprit,
et ce que l'on a constaté était si beau
du point de vue de la science cognitive.
Les mormons croyants classaient
les enseignements de leurs leaders
comme étant plus pertinents
et évocateurs spirituellement
que ceux des figures d’autorité
de l'exogroupe
même si en réalité, ils provenaient
tous de la même source.
Pour explorer davantage
comment le comportement social
est influencé par le cerveau sur Dieu,
les participants ont effectué
cette tâche deux fois :
une première fois au début de l'étude
et une deuxième fois, à la suite
d'une période de 30 minutes de prière,
d'étude des Écritures
et de dévotion religieuse.
C'est maintenant à vous, le public,
de participer.
Il est intéressant de voir
ce que les gens pensent être les effets
de l'esprit sur le jugement social.
L'option numéro un est
qu’après une période de 30 minutes
de prière et d'étude des Écritures,
nos participants sont devenus moins
favorables aux figures de l'exogroupe.
L'option deux est qu'ils sont devenus
plus favorables et généreux.
Et l'option trois est que nous n'avons vu
aucun changement dans leur comportement.
Je veux que vous soyez tous courageux.
(Rires)
Qui pense que nous avons observé
l'option numéro un ?
D'accord.
Qui pense que nous avons observé
l'option deux : plus favorables ?
Qui pense que nous avons observé
l'option trois : pas de changement
de comportement ?
Ou bien l'option quatre :
vous êtes trop nerveux pour faire une
assomption sur la religion en public?
(Rires)
Ce que nous avons observé après ces 30
minutes de pratique religieuse personnelle
est que les participants sont devenus
plus favorables à l'exogroupe,
classant leurs enseignements
comme plus éloquents
et indiquant ressentir l'esprit
plus fortement
qu'ils ne l'avaient ressenti
au début de l'étude.
Il existe plusieurs mécanismes possibles
qui pourraient expliquer
les comportements observés.
Il est fort possible, par exemple,
que les principes de la théorie
de l'attachement en psychologie
interviennent dans ce biais d'autorité.
Il pourrait aussi y avoir des éléments
de conditionnement classiques à l'œuvre.
Biologiquement parlant,
quand la dopamine est
libérée dans le cerveau,
elle peut conduire à une hausse
de l'ouverture sociale.
Comme c'est souvent le cas en science,
la vue d'ensemble demande
une cartographie complète
avec plusieurs niveaux d'explications.
La religion, dans mon esprit,
montre beaucoup de
similitudes avec le sexe.
La majorité des adultes le pratique,
ils disent qu'il apporte un sens
et du plaisir dans leur vie,
et en dépit des fervents militants
de l'abstinence,
les gens feront l'amour.
(Rires)
Peu importe combien de personnes
disent : « Ne soyez pas sexuels »,
les humains seront sexuels.
Peu importe combien de personnes
disent : « Ne soyez pas pieux »,
les humains seront religieux.
Ce sont des comportements qui viennent
de besoins évolutifs profonds.
Je ne suis pas un partisan de la science
qui focalise sa ligne de pensée
sur l'éradication
du comportement religieux,
mais plutôt, comme pour
les rapports protégés,
sur une pratique basée sur des faits qui
permettent de bien aborder la religion.
(Acclamations) (Applaudissements)
Imaginez un partenariat renouvelé entre
le séminaire et l'éducation académique
pour exprimer une théologie
sûre et intelligente.
Cela pourrait faire beaucoup de bien
dans un monde qui en a besoin.
Nous vivons un âge excitant de
découvertes toujours plus fréquentes.
Cela signifie que naissent toujours
plus d'idées radicalement perturbatrices.
Un travail interdisciplinaire et
convergent augmente rapidement le rythme
de notre compréhension de soi.
L'espoir que j'aimerais vous transmettre
est qu'en entrant dans une nouvelle ère
d'études religieuses qui incorporent
le meilleur de nos méthodes scientifiques,
nous pourrions gagner la possibilité
d'éclairer nos cultures respectives
et d'affiner nos traditions religieuses
d'une façon qui les rende plus louables
de la nature divine
qu'elles sont censées représenter.
Voici votre cerveau au sujet de Dieu.
Avez-vous des questions ?
(Applaudissements)
Merci.