Entrer dans l'expérience humaine,
c'est entrer dans un grand oubli.
Le voile de l'esprit conditionné masque la
vérité de qui nous sommes vraiment,
nous projetant dans un monde de séparation,
de limites et de doute.
Alors, qui êtes-vous vraiment ? N'êtes-vous
qu'un esprit conceptuel vivant dans un corps,
cheminant dans la vie, essayant de trouver
le bonheur et d'éviter la souffrance ?
Ou êtes-vous quelque chose de tout à fait différent,
de beaucoup plus profond, quelque chose d'éternel.
Quelque chose qui ne peut être exprimée
par des mots, mais qui, une fois réalisée,
vous apporte paix et plénitude. Nous allons
observer ce qui se trouve au-delà du voile
de l'esprit conceptuel, des pensées et des
sensations, pour découvrir la vérité
de qui nous sommes vraiment.
Qu'est-ce que l'esprit ?
Tout au long de l'histoire, cette question a été
posée à d'innombrables reprises. Depuis les
toutes premières recherches spirituelles
et scientifiques, l'esprit humain a été
conceptualisé et compris de diverses
manières dans différentes cultures.
Les humains ont utilisé la philosophie et des
théories psychologiques et scientifiques ainsi
que des méthodes d'investigation directe pour
pénétrer les secrets de l'esprit et découvrir
qui nous sommes au-delà de l'esprit et du
corps. D'ordinaire, nous voyons l'esprit comme
siégeant à l'intérieur de la tête, comme le
cerveau, et nous l'associons à la pensée
et à la cognition, mais l'esprit est bien plus
profond que cela. L'esprit est en fait dualité.
On l'appelle aussi Maya ou illusion.
Il est également connu sous le nom d'ego.
En latin, le mot ego signifie simplement "je".
Lorsque le sens du "je" est limité à quelque
chose, c'est Maya, l'illusion, mais lorsqu'il
est illimité, lorsqu'il s'éveille en tant que
conscience d'elle-même, au sein de laquelle tous
les phénomènes apparaissent et disparaissent,
alors il n'y a plus d'identification à un
"je" séparé.
Le véritable sens du mot "je" est présence
infinie, conscience infinie.
C'est le seul "je" ou le seul Soi qui existe.
Cependant, chez la plupart d'entre nous,
le sens du Soi est tellement enchevêtré
avec le contenu de l'expérience,
les pensées, les images et les émotions
que nous ne nous percevons plus
tel que nous sommes vraiment depuis
l'origine. Notre connaissance de Soi est altérée
et mêlée au contenu de l'expérience. Et ce
mélange du vrai et unique Soi de la
conscience infinie avec le contenu de
l'expérience est à l'origine de ce
moi illusoire que l'on appelle
communément l'ego ou le
moi séparé. L'ego est une idée très
persistante, très forte, très solide,
qui nous fait croire que nous sommes une
personne, une entité à l'intérieur d'un corps.
Parfois nous pensons n'être qu'un corps-esprit.
L'ego est un aspect de l'esprit qui se forme
à un jeune âge et c'est cet aspect qui nous
donne le sentiment d'être un moi individuel.
L'ego est littéralement une entité inventée,
il n'est pas réel et c'est ce que
nous identifions comme le corps. C'est la partie
de l'esprit qui pense qu'elle est séparée.
L'ego est le sens personnel du moi,
mais ce n'est pas le vrai moi.
Il s'agit d'une construction imaginaire.
Ce n'est pas ce que je suis vraiment.
Ce que je suis véritablement, c'est cette
présence plus profonde qui est toujours là.
L'esprit dualiste est constitué de deux aspects
fondamentaux, l'observateur ou témoin et
l'observé. Il y a le phénomène du monde
fait de sensations,
de perceptions et de préférences personnelles,
puis il y a ce sentiment qu'il y a un "je"
qui en est séparé, qui en est le témoin. S'éveiller,
c'est se réveiller de cette dualité, de cette
scission entre l'observateur et l'observé,
entre le sujet et l'objet, afin de réaliser
la conscience primordiale toujours
présente.
Lorsque vous observez de jeunes enfants,
vous réalisez qu'ils n'ont pas d'ego et qu'ils
vivent dans un état de participation totale
avec la vie, un état d'émerveillement,
parce qu'ils ne sont pas séparés du monde.
Lorsque nous naissons, nous sommes dépendants de
nos parents et n'avons pas encore de pensées
conceptuelles. Durant notre développement, nous
développons des concepts ainsi que la conscience
de soi, c'est-à-dire la capacité de réfléchir
pour devenir indépendants.
C'est ce processus de réflexion qui crée
notre identité interne.
La formation de l'ego commence peu après la
naissance. Nous développons une identité
personnelle que nous appelons "je" ou "moi".
Le stade du miroir est cette étape du
développement humain où l'enfant se
reconnaît dans un miroir, généralement
entre 6 et 18 mois. Ce n'est qu'une étape
de la formation de l'ego
par le biais du processus d'identification.
L'enfant ne développe pas son ego en voyant
son reflet dans un miroir, mais cela participe à un
processus de socialisation, de conditionnement,
car les personnes qui l'entourent commencent à le
traiter comme une personne, comme un "moi" distinct.
Nous développons un sentiment de "moi" à travers
les sensations qui se manifestent dans le corps,
à travers nos perceptions et notre conceptualisation
des choses. L'esprit divise et distingue
chaque chose des autres, puis nous développons
des préférences à l'égard de ces choses.
Il y a des choses que nous aimons et d'autres
que nous n'aimons pas. Ce "je" devient notre
identité individuelle, distincte et unique, au fur
et à mesure que nous avançons dans la vie.
C'est l'histoire de qui nous croyons être.
Notre conscience commence à croire
à cette identité dès notre plus jeune âge.
Enfants, cette conviction grandit avec nous
jusqu'à ce que nous soyons convaincus
d'être une personne. Lorsque les personnes
passent de l'adolescence à l'âge adulte,
ils développent un sentiment de séparation,
le sentiment d'être un "je" qui vit dans la tête.
Ils deviennent donc des egos séparés qui
vivent dans un état de manque,
un état d'incomplétude, et dont la vie
est dominée par le désir
d'accumuler des choses pour compenser
cette incomplétude.
C'est le mental qui est à l'origine de tous
les problèmes. Le mental est un pouvoir
qui est à l'origine de toute l'illusion
de la séparation,
l'illusion ou cette conviction d'être
une personne vivant dans un monde.
Nous pouvons vérifier que chaque
fois que nous éprouvons
une souffrance psychologique, nous pouvons
toujours voir qu'elle origine de cette croyance
d'être une personne, une entité séparée.
Il n'y a pas d'exception.
Je ne parle pas ici de douleur physique, mais
la souffrance psychologique n'est absolument
pas nécessaire, elle repose sur la croyance
d'être ce corps-esprit séparé
ou apparemment séparé. Parce que nous
sommes comme des fragments qui ont été
séparés du tout, comme des pièces d'un
puzzle qui se sont déconnectées et
éloignées les unes des autres. Il y a donc
un sentiment de "quelque chose qui manque",
"quelque chose qui ne va pas". Le mental
semble être un obstacle insurmontable.
Comment aller au-delà du mental ?
Ce mental semble ne pas avoir de fin.
Tenter de vaincre le mental en utilisant
celui-ci crée une lutte sans fin.
C'est comme si l'on essayait de s'élever
en tirant sur ses propres bottes.
La structure de l'ego peut se sentir dévastée,
perdue et confuse, avec le sentiment que la vie
n'a pas de sens, et tandis que le mental
lutte, nous faisons l'expérience de ce que
saint Jean de la Croix appelait la Nuit
obscure de l'âme. C'est une étape nécessaire
du processus de désillusion. Ce n'est
qu'en abandonnant la recherche et
la fausse identification avec le chercheur que
nous entrons en union directe avec la vie.
J'étais dans une bonne période de ma vie. J'avais en
quelque sorte abandonné ma recherche spirituelle.
non pas parce que je l'avais abandonné en tant
que tel, mais parce qu'il n'y avait rien d'autre
à chercher. Je ne cherchais pas l'illumination.
Je ne cherchais pas l'éveil.
Je cherchais la paix et le bonheur et j'ai
découvert que l'abandon à ce qui est était la
seule voie possible et que la vie était mon
enseignant. Après de nombreuses années de
recherche, tout s'est effondré. La structure
du moi que je connaissais s'est effondrée.
J'étais assise dans mon salon et, sur une
période de quelques semaines,
une grande désolation intérieure s'est emparée
de moi. Je ne m'attendais pas à cette vaste
désolation intérieure, à ce sentiment
d'abandon existentiel, comme si la vie
elle-même m'avait abandonnée. Et j'ai
remarqué que le mental voulait fuir
cette désolation intérieure. Je me suis
alors posé cette question
"Quel est le sens de la souffrance ?
Quelle est la nature de la souffrance ?
Comment la souffrance peut-elle cesser ? Ou peut-être
que cela ne s'arrête jamais". Et de ces questions,
ce qui est apparu, c'est cette volonté de ne
pas bouger de là où j'étais, de ne pas fuir
ce sentiment de désolation et de m'y abandonner,
même si cela signifiait la fin de moi-même.
Je ne savais pas ce que signifiait la fin de moi,
mais c'est apparu comme une forme de connaissance
qui n'était pas encore consciente, et à ce moment-là,
de manière totalement inattendue, toute la structure
du moi s'est éteinte. C'est comme si toute l'identité
du moi était morte et, étonnamment
il y a eu une fusion avec la vie elle-même qui
a mis fin à la séparation entre moi et la vie.
À partir de là, j'ai su que moi et la vie ne faisons
qu'un, il n'y a pas de séparation
tout est dans le mouvement de l'esprit.
Et à partir de là, toute la structure de
Amoda qui avait été construite sur une identité
de victime, et pas seulement une victime
des circonstances, mais une victime de mes
sentiments, de mes émotions, de mes
pensées, qui essayait constamment de les
changer, de changer les pensées pour
changer les sentiments, de les rendre meilleurs,
de les rendre plus positifs, de les rendre plus
élevés... tout cela a pris fin. Et sans la victime,
c'était comme si je naissais à nouveau.
Je suis donc morte et j'ai pu renaître grâce à cela.
C'est comme si tous les voiles de perception
construits sur l'identité d'Amoda en tant que
moi, avec son histoire, ses pensées,
ses croyances, ses expériences, s'étaient
défaits. J'étais totalement nue
à partir de ce moment-là et cela
n'a jamais changé depuis.
Dans le bouddhisme, la première Noble Vérité
est que la souffrance existe. Il existe une
insatisfaction inhérente à l'esprit
conditionné. Dukkha, ou l'insatisfaction
chronique de l'esprit, englobe non seulement
la douleur physique et émotionnelle,
mais aussi des formes plus subtiles d'insatisfaction
telles que l'impermanence inhérente
à toutes choses et l'incapacité à trouver une
satisfaction durable dans les activités mondaines.
Le vrai bonheur et l'épanouissement ne se trouvent
pas dans des poursuites matérielles extérieures,
Même lorsque les choses se passent comme
nous le voulons. Même lorsque nous faisons
les bonnes choses, que nous agissons bien,
que nous avons des relations et une carrière
réussies, il y a souvent ce sentiment
sous-jacent que quelque chose ne va pas.
Quelque chose nous échappe, quelque
chose que nous ne percevons pas
bien, et plus nous y regardons de
près, plus cela devient clair, évident.
Ce que je dis souvent, c'est que la première
étape du processus d'éveil consiste à reconnaître
que nous souffrons. Nous pourrions résumer cela
en disant qu'il s'agit d'une impression que notre vie
ne va pas bien, ou que c'est nous qui
n'allons pas bien dans cette vie.
C'est inconfortable, et c'est une grâce que ce
soit inconfortable parce que cela nous conduit à
cette investigation qui peut nous amener à des
découvertes que nous n'aurions jamais pu imaginer.
Pourquoi les gens souffrent-ils ? Lorsque nous parlons
de douleur physique, nous devons comprendre que
nous ressentons ce type de douleur car
il s'agit d'un mécanisme de protection
dont nous avons hérité génétiquement.
Si nous n'éprouvions jamais de douleur,
nous nous cognerions constamment aux objets,
nous pourrions boire de l'acide sulfurique
et notre corps ne survivrait pas longtemps. La
douleur psychologique est différente. Elle nous
indique que nous faisons une erreur. La douleur
psychologique n'est donc pas un problème,
c'est le début de la solution. La douleur
psychologique nous donne une leçon
sur une autre erreur que nous faisons, à savoir
croire que nous sommes un être humain distinct.
C'est une erreur, une erreur fondamentale.
C'est le péché originel,
le péché originel qui nous exclut du
Royaume, du jardin d'Eden.
Le sens originel du mot péché signifie
"manquer la cible".
La conscience égoïque est un état pathologique
de l'esprit par lequel nous manquons
constamment notre but. C'est le sens de la
"Chute". Nous sommes focalisés sur les fruits
de l'arbre de la connaissance du bien et du
mal, focalisés sur les pensées.
L'esprit dualiste est constitué des phénomènes
qui forment le monde perçu des formes ;
il est fait de sensations, de perceptions,
de préférences égoïques et de ce sentiment
qu'il y a un "moi" qui est séparé, témoin.
C'est cette pensée "je" qui est à l'origine de
l'identification à l'ego.
Quelle que soit l'expérience que je vis,
c'est moi qui la vis. Si je suis triste, anxieux
ou seul, c'est moi qui en fais l'expérience.
Si je parle avec vous,
c'est moi qui parle. Si je vois le monde,
c'est moi qui le vois.
Toute notre expérience tourne donc autour
de ce "je". "Je" est le personnage central
de toutes nos expériences, de sorte que
l'enquête essentielle, la condition préalable
à l'éveil, consiste à explorer et à
reconnaître la nature du "Je"
ou du Soi que nous sommes réellement.
Dans le Sutra du cœur, l'un des enseignements
les plus vénérés du bouddhisme, il est dit que
pour nous libérer, nous devons réaliser que
l'ensemble du mécanisme de l'esprit dualiste
est vide d'un soi. Lorsque la pensée "je"
disparaît, la dualité elle-même s'effondre.
La forme est réalisée comme étant exactement
le vide, et le vide exactement la forme.
Dans l'état de samadhi, le vide danse comme
une plénitude, l'immobilité est inhérente au
mouvement, le silence inhérent au son.
La vie est vécue directement,
sans passer par le filtre du mental. Lorsque
nous ne courons plus après les fruits
de l'arbre de la connaissance du bien et du mal,
lorsque nous n'interagissons plus avec le monde
comme avant, c'est la libération,
la fin de la souffrance.
Tant que nous croyons avoir notre propre esprit,
notre propre ignorance ou notre propre ego,
c'est que nous voyons les choses d'un point
de vue séparé, et c'est correct,
au début, c'est comme ça que nous voyons les
choses. Mais ce n'est pas ainsi que les choses
sont en réalité. En réalité, il n'y a que la vie.
C'est tout. Seulement la vie pure en action.
La souffrance est donc cette résistance
à la vie, cette résistance à notre oui,
à notre non, à tout ce qui apparaît,
parce que nous nous sentons séparés. Et
l'éveil est la guérison de cette séparation,
de cette idée d'être séparé.
Nous pouvons commencer à comprendre la
résistance égoïque au sein de l'esprit en observant
comment l'énergie se déplace dans l'univers.
Et une façon de comprendre cela consiste à
observer ce que l'on appelle une figure de
Lichtenberg. Une figure de Lichtenberg
est un motif qui apparaît lorsqu'une
décharge électrique à haute tension traverse
des matériaux. La décharge électrique crée
un motif de canaux ramifiés
qui ressemblent à des arbres. Ici, l'électricité
pénètre dans du bois. Dans cet autre exemple,
la figure de Lichtenberg est créée en bombardant
des billions d'électrons dans un bloc d'acrylique
à l'aide d'un accélérateur de particules de 5 millions
de volts. Toute matière physique, dans ce cas
le bloc d'acrylique, représente une résistance
ou un ralentissement pour l'énergie.
Dans un orage, la résistance de l'air affecte la
formation du canal conducteur
et le flux de courant. Lorsque nous observons
les structures arborescentes créées par
l'énergie, nous voyons le chemin que l'énergie
a emprunté à travers la matière.
On retrouve ces structures en forme d'arbres ou
de branches à tous les niveaux
et à toutes les échelles de la nature, du microcosme
au macrocosme. La structure même de l'univers
est un jeu de formes, un jeu de résistances ;
un esprit géant qui joue à cache-cache
avec lui-même. Les samskaras, ou schémas
inconscients, sont créés lorsque la
charge d'une expérience est élevée. Les énergies
se rassemblent et la pensée "je" apparaît.
La résistance apparaît. S'il n'y a aucune
résistance, l'énergie circule librement et
la vie coule. Mais lorsqu'il y a résistance,
lorsque le "je" apparaît,
l'énergie se ramifie et crée de nouvelles
voies dans l'inconscient.
Ces schémas fonctionnent de manière autonome,
se cachant et se développant dans l'ombre
jusqu'à ce qu'ils soient à nouveau révélés et
intégrés consciemment dans le tout.
Le tout premier souvenir que j'ai, c'est
d'avoir très peur, sans raison,
et d'avoir l'impression que quelque
chose allait mal tourner à tout moment,
et ce sentiment a persisté toute ma vie
et s'est intensifié dans la vingtaine.
J'ai sombré dans une profonde dépression,
même après avoir eu quatre enfants.
Pendant trois ou quatre années, j'étais
intensément à la recherche
de quelque chose, mais je ne savais pas quoi.
Je n'avais jamais entendu parler d'éveil,
je ne savais pas ce que c'était. Et avec le temps,
il est devenu clair que ce que je cherchais
ne se trouvait pas dans ma vie extérieure.
J'avais une bonne vie familiale et professionnelle
à l'époque, tout ce que l'on peut désirer. Malgré
tout je me sentais toujours vide à l'intérieur.
Finalement, durant la guérison de ma
dépression, j'ai découvert la méditation.
Je m'y suis plongé et y ai trouvé une certaine
paix, un profond sentiment de satisfaction,
et pour la première fois de toute ma vie, ce
sentiment de crainte ou de peur a disparu,
momentanément, pour la première fois de
ma vie. J'ai donc commencé à essayer de
comprendre ce qui s'était passé, les raisons
de ce changement. Et pourquoi le sentiment
de peur était revenu. J'ai commencé à faire des
recherches sur les différentes voies spirituelles.
Je suis tombée sur les notions d'éveil, d'illumination,
et j'ai commencé à essayer de comprendre
ce que c'était. Finalement, 15 à 20 ans plus tard,
j'ai compris que cela arrive lorsque
nous cessons de croire à nos pensées.
Les pensées peuvent toujours exister,
mais la peur vient du fait que je crois en
mes pensées, que je crois que je ne suis
qu'une personne ou quelqu'un qui mène sa
vie, et je me suis rendu compte que j'étais
bien plus que cela. Je suis infinie et, sur une période
de cinq ans, cela a commencé à se stabiliser,
faute d'un meilleur mot. J'ai dû examiner
tout ce qui faisait obstacle,
comme le sentiment de ne pas être un
assez bon parent, ce sentiment
d'inadéquation au fond de moi.
J'ai dû vraiment regarder cela,
enquêter sur cela et contempler cela. Et
finalement, la paix est devenue stable,
sans effort, et même la joie et l'amour,
parfois même la félicité. Un sentiment profond
que tout va bien, que je me sens chez
moi, en sécurité, que je peux m'aimer,
que je m'apprécie, ce qui n'était pas
possible pour moi auparavant.
De nombreuses personnes ont un aperçu
de l'éveil, mais semblent ensuite le perdre.
Il y a ce jeu du "je l'ai, puis je le perds",
ou "je suis éveillé, puis
le mental revient". Cela se produit lorsque
l'éveil n'est pas pleinement reconnu
pour ce qu'il est. Souvent, le samadhi
provoque un état agréable : énergie, félicité,
changement dans la conscience ou la perception
de l'esprit, sentiment d'aisance ou de liberté.
Et l'on confond naturellement cet état
phénoménal avec la vérité
de ce que l'on est. Souvent, après avoir entrevu
l'éveil, on commence à rechercher des états
ou des expériences au lieu de reconnaître
la conscience qui est déjà présente
et de réaliser qu'elle est la source du véritable
épanouissement. La vérité de qui vous êtes
n'est pas un état ou une expérience temporaire.
Les phénomènes vont et viennent, mais cela
qui demeure, la conscience primordiale, EST
toujours. Si vous continuez à rechercher des états
ou des expériences, le chercheur deviendra
de plus en plus fort et vous vous
éloignerez de plus en plus de la vérité.
Le chercheur manque toujours sa cible
en poursuivant ce qui est impermanent, comme
un toxicomane qui poursuit des hauts temporaires,
et tout comme le toxicomane, le faux chercheur
arrivera toujours à un point de crise
ou à un point d'échec.
La vie est un festival de comportements
addictifs et quand je dis cela, je ne pense pas
seulement à l'addiction aux drogues comme
l'alcool et la nicotine. Tout ce qui est mis de
l'avant dans la société tend à créer des
modèles de comportement addictifs ; l'addiction
à la télé-réalité, l'addiction à la vie des
célébrités, l'addiction à l'achat de la prochaine paire
de chaussures, et pourquoi cela ? La raison en
est que nous cherchons désespérément
un moyen d'échapper au mode de vie dénué
de sens et contre nature qui est le nôtre.
Mais comme nous ne savons pas comment y échapper,
nous essayons de compenser en nous engageant
dans la toxicomanie. Or, comprendre la réalité
a cette qualité particulière de rendre
la vie plus naturelle, de mieux l'aligner sur
le rythme, le flux
et les orientations de la nature. Lorsque
cela se produit, la dépendance n'a plus lieu
d'être et nous vivons des vies plus
épanouissantes, plus saines
et meilleures dans l'ensemble, sans perspectives
biaisées comme la notion selon laquelle votre vie
vous concerne et ma vie me concerne, ce qui est l'une
des choses les plus artificielles que l'on puisse imaginer.
C'est comme si la fleur d'un pommier pensait que
sa vie se résumait à elle et qu'elle devait
survivre éternellement. Si la fleur avait son mot
à dire, il n'y aurait plus de pommes
ni de pommiers.
Une fois que nous comprenons la vérité, nous
passons naturellement d'une vie centrée sur l'ego
ou d'une vie qui alimente constamment les
schémas de désir et d'aversion,
à une vie plus naturelle, plus dans le flux.
À un moment donné, notre conception de la vie peut
mener à une crise et il se peut que cela nous amène
à entreprendre une démarche spirituelle
ou psychologique.
Puis vient un moment où nous sommes prêts à
voir au-delà de cette illusion d'être
séparés et disons qu'une recherche spirituelle
consciente commence. Car la recherche spirituelle
peut commencer avant que nous soyons conscients
que nous cherchons spirituellement.
Lorsque cette recherche est consciente, nous pouvons voir
le déroulement de notre vie non plus comme une chose
contre laquelle il nous faut lutter, mais plutôt
comme une invitation à nous éveiller,
et nous commençons alors à nous ouvrir plus
à la vie.
La souffrance est également l'un des meilleurs
outils pour susciter l'éveil de la conscience.
Nous ne nous posons pas de questions profondes
sur notre vie tant que nous ne souffrons pas.
Nous nous contentons de suivre la routine quotidienne
d'une manière très épicurienne, légère et superficielle,
et nous ne nous arrêtons jamais pour réfléchir
à ce qui se passe. Qui suis-je ?
Qu'est-ce qui se passe ? Non.
Quel est le but de tout cela ?
Quel est le sens de tout cela ? Nous ne nous
posons ces questions que lorsque nous souffrons.
La souffrance est donc un outil formidable. Elle
est très propice à la compréhension.
Souvent, nous l'aggravons inutilement. Nous
inventons des souffrances inutiles et superflues.
J'appelle cela de la méta-souffrance, et la
méta-souffrance vient de cette petite voix
dans votre tête qui dit que vous souffrez et
que vous ne devriez pas souffrir. Cela double
la souffrance. En effet, non seulement la
souffrance naturelle qui fait partie de notre
vie et que nous ne pouvons pas éviter persiste,
mais en plus, nous avons la méta-souffrance d'être
en guerre avec la nature, d'être en guerre avec
la souffrance originale. Le but n'est pas
de se débarrasser d'un processus naturel
propice à l'éveil, un outil clé
de la nature, le but est de ne pas l'exacerber
inutilement en lui faisant la guerre.
Lorsque nous cessons de résister à la
souffrance, celle-ci se transforme
en quelque chose de bénéfique. Dans
les cercles spirituels, on entend souvent
l'expression "aimer ce qui est". Il est possible d'aimer
la douleur, quelle qu'elle soit, en apprenant à
renoncer aux préférences égoïques et en
comprenant que ce qui se présente est simplement
un phénomène intense qui nous fait entrer
plus profondément en contact avec la vie.
En restant équanime avec ce qui est, nous
commençons à purifier les schémas
de résistance au sein de la structure de l'ego.
Cela nous amène au paradoxe de l'abandon.
Le paradoxe de l'abandon consiste à réaliser
que tout ce à quoi vous résistez persiste.
La résistance donne en fait du pouvoir à l'ego.
L'ego n'est rien d'autre que la
résistance elle-même. Parfois, sur le chemin,
nous avons l'idée que nous ne devrions pas
éprouver telle ou telle émotion. Nous pouvons
avoir l'impression de régresser si nous ressentons
de la haine ou de la colère. L'expérience de toute
la gamme des émotions humaines est nécessaire.
Le paradoxe est que lorsque nous acceptons pleinement
chaque émotion, en abandonnant la résistance
qu'elle suscite, l'émotion, qui est pleine de
croyances, de jugements et
de préférences, se transmute en pur ressenti,
en pure acuité,
au-delà du mental qui évalue.
Une célèbre histoire du zen illustre ce point.
Un jour, un étudiant
demande à Tenzin, un maître zen reconnu pour
sa sagesse et sa tranquillité : "Maître, lorsque votre
femme est décédée, avez-vous ressenti de la tristesse ?"
Tenzin répond : "Bien sûr que j'ai ressenti de la tristesse,
comment pourrais-je ne pas en avoir ressenti ?" L'étudiant,
perplexe, demande alors : "Mais je pensais que vous étiez
un maître zen. Ne devriez-vous pas être au-delà de
telles émotions ?" Tenzin sourit doucement et
répond : "Ah, tu ne comprends pas. Lorsque j'ai
ressenti de la tristesse, je me suis autorisé à la
ressentir pleinement et à l'éprouver profondément.
Ce faisant, j'ai honoré la vérité de
ce moment. Alors, comme les nuages qui passent
dans le ciel, la tristesse est venue puis est repartie.
Mais le ciel, l'immensité de mon être,
est resté inchangé.
Mon éveil a vraiment commencé pendant mes
études supérieures, lorsqu'une série d'expériences
personnelles m'ont fortement ébranlée. J'ai
commencé à m'interroger sur le but de la vie, de ma
vie en particulier, et sur son sens. J'ai commencé à
me demander à quoi servait
tout ce que je faisais. J'étais alors dans un état de
conscience sans être identifiée à
quoi que ce soit en particulier. C'était très libérateur.
J'ai vécu un grand sentiment
de libération, comme si quelque chose qui avait été
soumis à une forte pression se relâchait enfin, et j'ai ressenti
un profond état de relaxation et d'exaltation, et tout ce
dont je me souviens, c'est que j'étais tout simplement.
C'est tout ce que je voulais, simplement être. Rien de
particulier. C'est ce que j'ai appelé le grand changement
dans ma vie. Cela m'a vraiment changée, j'ai envie
de dire "de l'intérieur", mais la façon
dont je voyais les choses et la façon dont je les
vivais, la façon dont je voyais les gens, dont j'interagissais
avec eux, et ce retournement, c'est que tout ce
que je vivais,
peu importe ce que je faisais ou disais, c'était simplement
la conscience qui était en train de s'exprimer.
La conscience de mon être en train de s'exprimer,
donc à ce moment-là et à n'importe quel autre moment,
quoi que je dise ou fasse, tout ce qui se passait,
c'était la conscience,
et cela est resté. Mais cela a continué à révéler sa
nature. C'était comme si je pouvais
voir les pensées défiler, et quelle que soit l'action
requise dans le contexte,
je la faisais surgir et le corps l'exécutait.
Ce n'était plus comme avant. Avant je pensais
à quelque chose, par exemple
"Je pense que je dois faire ceci", puis ensuite
le "je", cette personne, exécutait l'action.
Non, ce qui s'est passé alors, ce qui a commencé à se
passer, c'est que j'étais simplement en train d'être.
J'étais consciente et les actions se manifestaient, le
corps était l'outil et je l'observais
en temps réel. Le corps ne fait que mettre en œuvre
toute action qui se manifeste dans la conscience
et je suis alors à la fois participante et un observatrice.
Je pense que c'est ce qu'il y a de mieux.
La conscience est sans choix. Le véritable Soi
est au-delà du choix. En entendant cela,
on pourrait se dire : "D'accord, je vais tout abandonner.
Je ne choisirai rien dorénavant.
Je vais m'asseoir dans une grotte. Et beaucoup de gens
l'ont fait.
Mais le problème, c'est que cela demeure un choix. Je
choisis simplement de supprimer mes
choix et mes désirs. C'est l'esprit conditionné
qui choisit de ne pas choisir.
Le choix et le non-choix se situent tous deux
au niveau du mental conditionné.
Mais qui ou quoi est conscient de ce mental ?
Après l'éveil, vous constatez que le moi
conditionné peut toujours choisir
son thé préféré. Il continuera à suivre le régime alimentaire
qui convient le mieux à son corps. Ce n'est pas
qu'il n'y ait plus aucun choix. De nombreux choix se
produisent encore,
en permanence. Mais la différence, c'est que le
sentiment du "je" n'est pas mêlé
à tout cela. La pensée "je" a disparu.
"Je" ne choisis plus et ne supprime plus
les choix.
Se réveiller revient donc à démolir les murs
invisibles de l'ego, cette armure,
et à reconnaître notre unité avec tout cela.
Et le résultat est sublime car nous
découvrons alors que nous ne souffrons pas de colère,
de douleur, de tristesse, nous souffrons
de notre refus de la vie, et nous pouvons apprendre
à être si ouverts que nous sommes
constamment un avec la vie telle qu'elle est.
Nous préférons nous sentir bien plutôt que de souffrir.
C'est tout à fait normal. L'être humain,
l'espèce ordinaire Homo sapiens,
préfère se sentir bien
que se sentir mal. Et je pense que
lorsque nous découvrons
qu'on se sent bien d'être dans la conscience,
quelque chose s'enregistre dans notre cerveau
"Oh, j'aime ça. C'est possible."
Et cela se renforce.
L'éveil peut se faire progressivement, par étapes,
ou se produire soudainement, par un
retournement radical et nous savons soudain qui nous
sommes, comme si nous nous étions réveillés d'un rêve.
Comme si nous avions dormi toute notre vie
dans notre personnage de rêve. Pour rester éveillé,
une purification continue de la structure du moi
est nécessaire.
Même si nous nous éveillons complètement,
il est important d'être vigilant, de ne pas croire
en la prochaine pensée, de rester équanime avec
ce qui est lorsque des pensées inconscientes
remontent à la surface. Sinon, les schémas inconscients
de l'esprit peuvent obscurcir la vérité.
L'inconscient doit devenir transparent.
Si nous ne faisons pas face à ce qui se trouve
dans l'inconscient, nous tomberons dans
ce que l'on appelle le contournement spirituel.
Le contournement spirituel fait référence à
cette tendance chez certaines personnes à insister
sur le fait qu'elles sont déjà éveillées afin d'éviter de
faire face à des émotions difficiles, à des problèmes
psychologiques non résolus ou à des défis de
la vie quotidienne. Le mental égoïque peut s'approprier
un aperçu de l'éveil et empêcher la personne
de vivre à partir de ce lieu de vérité.
J'étais assise sur mon lit et je pensais
à la mammographie que j'allais passer
le lendemain. C.était toujours pour moi une
expérience extrêmement anxiogène
que je passais une fois par an, et j'en avais
assez d'avoir si peur. J'en avais assez d'avoir peur
de mourir, j'étais assise sur le lit et j'ai eu
cette pensée soudaine :
pourrais-je passer cet examen demain
sans avoir à paniquer ? C'était une pensée,
juste une pensée, mais soudain, j'ai senti que
j'étais capable
de le faire. Et je ne savais pas vraiment pourquoi.
Je ne savais pas ce qui venait
de changer chez moi, mais quelque chose venait
clairement de changer. J'étais stupéfaite et j'ai soudain
su que je ne vivrai pas cette terrible anxiété que
j'avais ressentie
toutes les années précédentes. Et ce n'est pas parce
que je m'attendais à des résultats positifs de la
mammographie. Cela ne signifiait pas que
je n'avais pas de cancer du sein.
C'était vraiment bizarre pour moi.
Je me suis levée et je suis allée voir mon
conjoint qui était occupé devant son ordinateur.
Je suis restée dans l'embrasure de la porte
et il a finalement levé les yeux, s'est rendu compte
que j'étais là et m'a dit : "Quoi ?".
Et j'ai dit que quelque chose venait de se passer et
dans les jours qui ont suivi,
peu à peu, j'ai commencé à réaliser que ce n'était pas
seulement la peur qui semblait ne plus m'habiter.
Je me sentais en paix, complètement débarrassée
de mon stress habituel.
Mon esprit était tranquille. Ma vie extérieure était
la même, mais il a fallu de nombreux mois
avant que je comprenne que c'était l'éveil
qui s'était produit.
Ce fut une longue période. Tout ce que je savais,
c'est que je ne souffrais plus comme avant.
Mon esprit était calme et c'est comme ça depuis.
Il ne peut y avoir de souvenir de l'éveil lui-même.
Il n'y a que des souvenirs d'expériences
et de phénomènes. Chaque fois qu'il y a un souvenir,
il y a toujours une trace de résistance dans
l'esprit. Cette trace de résistance est
la répétition originelle,
le début de la pensée "je". L'éveil lui-même ne
laisse pas de trace
dans l'esprit. Ce n'est pas une expérience.
La conscience primordiale s'éveille à elle-même
dans le moment présent, sans passer par la mémoire
et le filtre de l'esprit. Si nous poursuivons
un état, une expérience, et que nous essayons
d'y vivre, alors nous la manquons.
Si cela va et vient, si cela n'est pas présent à l'instant,
alors ce n'est pas notre vraie nature.
Prenons un moment pour nous enquérir directement
de notre véritable nature. Directement signifie
sans passer par le mental. Vous ne pouvez pas
reconnaître ce qui est au-delà du mental au moyen
du mental. Déplacez votre attention vers l'intérieur et
prenez conscience du moment présent. Prenez conscience
de la conscience elle-même. Remarquez les pensées,
les sensations et les émotions qui surgissent dans
cet espace, mais reconnaissez aussi l'espace dans
lequel elles surgissent.
Des phénomènes peuvent surgir de l'inconscient.
Pensées, souvenirs,
sentiments, émotions, énergies ; il s'agit d'un processus
naturel de nettoyage qui se déroule
lorsque nous explorons. Soyez simplement ouvert à tout
ce qui peut surgir lors de cette exploration.
Permettez-vous de demeurer
dans l'état naturel de l'esprit,
libre des limitations de l'élaboration conceptuelle.
Mon propre éveil s'est manifesté lors de deux
mouvements fondamentalement distincts.
J'ai vécu le premier changement à partir
d'un lieu de souffrance, de profonde
souffrance, et je savais que cela était
en lien avec les pensées.
Cela était en lien avec la façon dont je pensais,
dont je percevais le monde,
dont je me percevais moi-même. Cela m'a
conduit à une exploration directe
de la nature de la pensée elle-même. Et
surtout de la nature du penseur,
la nature de celui qui est apparemment
lié par ses pensées.
Grâce à cette recherche directe, le sentiment
d'être un penseur s'est dissous et,
avec cette dissolution du sentiment d'être
un penseur, toutes les formes de pensée
ont perdu leur sens pour moi. Ce que je n'avais pas réalisé,
c'est que lorsque cela se produit, on se retrouve avec une sorte
d'expérience consciente pure ou non liée. Pour moi,
c'était une expérience extrêmement paisible,
qui me soulageait énormément de mes souffrances.
Ce fut la première partie de mon éveil.
Je n'avais pas idée, même à partir de cet éveil, de la
clarté qui s'est révélée à moi, de la paix
qui s'est révélée, que cela pouvait aller encore plus
loin. Que cela pouvait aller beaucoup plus loin.
Ainsi, en l'espace de quelques jours, l'aperçu
initial, l'expérience initiale très profonde, très
libératrice et surprenante s'est ouverte
sur quelque chose qui allait au-delà
de la dimension humaine, au-delà des limites
de ce que je me considérais être
sous quelque aspect que ce soit, et de ce que je considérais
le monde être, sous quelque aspect que ce soit.
Tout cela s'est volatilisé. Ce qui est resté, ce qui reste,
est extrêmement difficile à formuler en
mots, mais grâce au livre,
grâce à des interactions directes avec des
personnes intéressées par cette question,
cela peut être révélé et cela peut être révélé
à cette personne si elle est prête
et intéressée à explorer elle-même ce sujet.
Personne ne peut vous dire ce qu'est l'esprit,
ce qu'est la matrice, ce que vous êtes.
Pour connaître l'incommensurable, l'ineffable,
l'esprit doit être extraordinairement calme
et immobile, sans aucun mouvement.
Dans ce calme et ce silence
profonds, il est possible de découvrir
quelque chose
d'intemporel, d'éternel et d'inimaginable.
Disons, pour faire une métaphore, que l'éveil
se produit lorsque votre tête,
la tête de l'ego, a été coupée par la vie.
Vous avez vu clairement que vous n'êtes pas
votre corps-esprit. Vous n'êtes pas une entité
à l'intérieur du corps-esprit. Votre tête a été
coupée par la vie,
mais elle continue à dévaler la colline, et en
dévalant la colline,
elle emporte avec elle de vieux schémas, d'anciens
projets, d'anciens points de vue, qui
ne sont plus nourris par votre attention. Vous vous
reposez solidement dans la position du témoin
vous voyez ces vieux schémas se déployer,
vous n'y êtes pas impliqué,
mais ils se produisent toujours.
La tête dévale donc la colline,
mais à un moment donné, elle s'arrête.
Il n'y a plus de mouvement de vieux karmas
qui entrent en action. Il n'y a plus de schémas
émergents que vous devez observer
et dissoudre. Ils ont disparu. Et c'est ça Moksha,
c'est ça la libération. Ce que j'ai vu,
c'est une ouverture progressive à la vision de la vie,
non pas comme une personne dans un corps, mais
comme un témoin paisible et silencieux de la vie,
dans lequel il y avait des moments où
il n'y avait que des actions, mais où il n'y avait
aucun auteur de ces actions.
Un chien aboyait, c'était juste un aboiement dans
le silence, ou quelqu'un marchait,
ou mon corps marchait, et c'était juste la marche.
Ce n'était pas quelqu'un qui marchait.
Et cela s'est accompagné de la mise en
sourdine du dialogue intérieur
qui accompagnait parfois ma vie.
Ces moments d'abandon
du sentiment d'être une personne sont
devenus de plus en plus fréquents.
Et tandis que cela se manifestait,
tout ce que je pensais être,
ou tout ce en quoi je m'étais engagée dans ma
vie, a commencé à avoir un sens différent.
Au lieu de voir la vie comme étant contre moi
ou difficile pour moi, ou d'essayer de prier
pour un changement, j'ai commencé à être
capable de voir que tout cela visait
quelque chose de plus élevé, d'ouvrir davantage
mon cœur. Pour être plus disponible à la vie.
J'ai commencé à voir que ce que j'appelais
des accidents, des erreurs ou des choses
que je n'aimais pas n'étaient pas mauvaises
et n'étaient pas contre moi.
Ils me montraient en fait une réalité plus profonde
avec laquelle je n'étais pas en contact.
C'est ainsi que toutes les prières sont devenues davantage
des Amen. Que Ta volonté soit faite. Toutes les demandes
ressemblaient davantage à : aide-moi à voir à quel
endroit je refuse encore la vie ou
quelque chose. À quel endroit je souffre encore
parce que je dis non au déploiement
de la vie elle-même. Il y a donc eu une
ouverture. Et plus cette ouverture à la vie
se manifestait, plus ces moments où j'étais
un témoin conscient se manifestaient.
L'éveil n'est que le début de cette ouverture.
Et d'une certaine manière, elle n'a pas de fin.
C'est une ouverture sans fin. Et plus cela se
produit, plus ce que nous considérons encore
comme difficile, comme une contraction, comme une
peur, nous voyons qu'en réalité il s'agit d'un tremplin vers
un amour plus élevé. Une dimension d'amour, de paix,
de compassion, et nous en faisons tous partie.
Même ceux dont nous pensons qu'ils en sont
exclus. Nous sommes tous inclus dedans.
Nous pouvons savoir que la conscience existe.
Cela, nous pouvons le savoir avec certitude.
Pour tout le reste, nous pouvons faire des suppositions
éclairées. Peut-être de très bonnes suppositions,
mais des suppositions quand même. La conscience
est la seule donnée préthéorique
de la nature. Tout le reste est constitué
d'abstractions théoriques qui naissent
au sein de la conscience. La conscience est le
seul axiome de la nature. Son existence est la seule
chose absolument certaine dans la nature. Et je
peux vous assurer que, sur la base du raisonnement
et des preuves empiriques issues des
fondements de la physique et des
neurosciences de la conscience, il est devenu
extraordinairement improbable que
la conscience ne soit pas fondamentale.
Considérer la conscience comme secondaire
ou épiphénoménale conduit à toutes sortes de
problèmes insolubles. Il existe donc d'excellentes
raisons rationnelles et empiriques de
considérer la conscience comme l'un des
éléments fondamentaux de la nature, si ce n'est
le seul. La physique est fondamentalement une science
de la perception. Elle tente de rendre compte
des modèles et des régularités du
monde que nous percevons. Elle ne cherche
pas à transcender la perception.
Même lorsque les physiciens utilisent des instruments tels
que des télescopes, des microscopes, des oscilloscopes
ou tout autre instrument, les résultats de
ces instruments doivent toujours
être perçus. Ainsi, tout ce qui concerne la
physique est filtré par le paradigme
de la perception. La physique est une science
de la perception. Elle ne tente donc
pas de voir au-delà du physique ou de
la matière, car le physique et la matière ne sont que d'autres
mots pour désigner le monde que nous percevons,
le contenu de la perception. La vie est
l'instrument de sa propre compréhension.
Pour comprendre la vie, il ne faut pas se déconnecter
de la vie. Vous ne vous déconnectez pas de ce que
vous essayez de comprendre. Ce que vous faites,
c'est prêter attention à ce qui se passe,
essayer de saisir les nuances, vous demander :
"De quoi s'agit-il ? Pourquoi cela se produit-il ?
Qu'est-ce que cela signifie ?" La vie dans le
monde est un livre à lire et à déchiffrer.
Mais nous pouvons être tellement pris par un
besoin compréhensible de moins souffrir
que nous oublions de lire le livre.
Nous oublions d'être attentifs.
Alors que le livre est la clé de son propre
déchiffrement. Si vous déchiffrez le livre
de la vie, vous souffrirez automatiquement moins,
mais vous ne pouvez pas le déchiffrer si vous
n'avez pas les yeux sur le ballon,
si vous n'êtes pas attentif.
La vie est l'outil de sa propre compréhension.
Toutes les grandes traditions religieuses
et spirituelles ont été fondées sur cette
compréhension. À savoir qu'il existe
une réalité infinie et indivisible qui
brille en chacun de nous, comme l'expérience
"Je suis", et qui nous apparaît comme le monde.
En d'autres termes, il existe un océan d'Être,
pour ainsi dire, qui sous-tend chacun et
chaque chose et dont chacun et
chaque chose tire son existence.
Dans lequel chacun vit et dans
lequel il s'évanouit et disparaît.
Et c'est vraiment le principe
fondateur de toutes les grandes
traditions religieuses, cette
reconnaissance de l'unité de l'Être.
Le premier principe hermétique est:
"Le tout est esprit, l'univers est mental."
Où que nous regardions, il y a l'esprit unique.
Comme l'a dit Rumi, "Où que je regarde, il y a
le visage de Dieu". Que nous regardions dans
le microcosme ou dans le macrocosme de l'espace,
nous trouvons l'esprit unique. Voici une image
de neurones humains et une image simulée
de la distribution de la matière
noire dans l'univers.
Le Millenium run est une simulation
réalisée par l'Institut Max Planck à l'aide
de superordinateurs pour créer une représentation
de la distribution et de l'évolution de la
matière noire dans l'univers. La matière noire
forme un vaste réseau cosmique de filaments
et de nœuds interconnectés qui est visuellement
presque identique aux neurones et aux
voies neurologiques que l'on trouve dans le cerveau
humain. Le même schéma est omniprésent
dans la nature. Nous pouvons l'appeler l'esprit
unique, Dieu ou simplement "tout ce qui est".
Et ce que l'on appelle Dieu n'est pas
un être extérieur et antérieur
au monde. Dieu est l'être qui brille en
chacun de nous en tant que connaissance
"Je suis" et qui nous apparaît comme le
monde. De ce point de vue, nous pourrions dire,
en langage religieux, que le monde est
l'apparence de la parole de Dieu, le Logos,
et que nous sommes des localisations de
l'esprit de Dieu à l'intérieur de l'esprit de Dieu.
Alors, comment un champ universel de
subjectivité, une conscience universelle,
peuvent-ils apparaître comme étant multiples ?
Parce que je ne peux pas lire vos pensées
et que vous ne pouvez probablement pas lire
les miennes. Je ne sais pas ce qui se passe dans la
galaxie d'Andromède, ni même en Chine.
Nous n'avons pas une expérience complète
de l'ensemble de la nature, alors comment cet
esprit unique qu'est la nature peut-il avoir ces limites
et sembler être multiple ? Je pense que nous
connaissons un processus naturel
qui fait exactement cela. En psychiatrie, on l'appelle
la dissociation. Il s'agit d'un processus
dans lequel un esprit se fragmente apparemment
en de multiples centres de conscience
disjoints. Nous disposons de preuves empiriques
incontestées de ce phénomène chez des personnes,
grâce à la neuro-imagerie, et je pense que nous sommes
sur le point de commencer à disposer d'un compte rendu
conceptuel explicite de la dissociation basé sur
la théorie de l'information intégrée, qui est
la principale théorie de la neuroscience de
la conscience. Lorsqu'une frontière dissociative
se forme, vous ne pouvez voir ce qui se trouve de
l'autre côté de cette frontière que par la perception.
Et ce que vous percevez alors, c'est la
matière, la physicalité. En d'autres termes,
la matière, la physicalité, est une apparence
consciente d'un processus conscient
de l'autre côté de la frontière dissociative.
Que nous décrivions ces processus en termes
de théories modernes ou en utilisant
des modèles anciens tels que les cinq skandhas,
ce qui importe c'est que nous rendions conscients
ces processus qui sont généralement inconscients.
Lorsqu'ils sont rendus conscients,
la résistance au sein de la structure du moi peut
être abandonnée. Le fonctionnement inconscient
du "je" peut être abandonné. La perception que
nous sommes un corps physique, la perception
des sensations sur le corps, la conceptualisation
des objets et des choses,
l'identification avec les préférences envers ces
choses, et le sentiment qu'il y a un
témoin qui observe tout cela, tous ces processus
mentaux doivent être réalisés comme étant vides
de soi. En d'autres termes, nous nous désidentifions
du phénomène tout en lui permettant
d'être exactement comme il est. Il ne s'agit pas de se
détourner de la vie. Bien au contraire, il s'agit
d'un approfondissement de l'intimité avec la vie.
Au fil des ans, ma compréhension du fait que la
conscience est fondamentale et précède la physicalité
a fondamentalement changé mon expérience
de la vie dans le monde et
ce que cela signifie d'être un être humain vivant
dans le monde. Pour moi, cela s'est fait lentement.
Au début, il s'agissait d'une simple compréhension
conceptuelle dans ma tête, puis elle
s'est intégrée dans le corps et a commencé
à moduler mes émotions, mes sentiments,
et cela change tout. Cela change ce que vous
considérez comme une vie bien vécue,
cela change ce que vous considérez comme des
objectifs dignes d'être poursuivis, cela change
votre perception de vous-même, cela change
votre relation avec les autres créatures vivantes,
oui, cela change tout. Les objectifs personnels
en termes de statut, de pouvoir, d'argent
ont disparu. La prise de conscience que
ma vie n'est pas du tout, n'a jamais été
et ne sera jamais centrée sur moi, mais qu'elle est centrée
sur la nature, et que je ne suis qu'une manifestation locale
de la nature, cette compréhension conduit
à un profond relâchement de l'anxiété
liée à la nécessité d'atteindre certains
objectifs personnels ou à la déception
qui survient lorsque l'on n'atteint
pas ces objectifs.
Tout cela a disparu. Je vis maintenant ma vie
comme une forme de service à la nature.
Je suis ouvert à tout ce que la nature
veut faire à travers moi et
bien que cela pourrait paraître être une obligation
de service, comme de l'esclavage, ce n'est pas
ce que je ressens. J'ai l'impression de ne plus
avoir la responsabilité oppressante et écrasante
de me rendre personnellement heureux.
C'est l'idée la plus oppressante.
que l'esprit humain puisse avoir, à savoir que
votre vie ne concerne que vous et que
vous avez donc la responsabilité d'être heureux,
de sorte que lorsque vous échouez, c'est votre échec
et vous commencez à le regretter.
Non, cette idée a disparu. Cela a disparu.
C'est l'une des choses qui a changé dans ma vie.
Une compréhension plus profonde de la réalité
favorise directement l'empathie, le respect
mutuel et les objectifs non égoïstes.
Elle est propice à l'adoption de
comportements moins addictifs.
Il ne fait donc aucun doute que si la
conscience de l'humanité était plus profonde
et plus étendue, la vie
serait certainement meilleure.
La solution aux problèmes du monde consiste
à reconnaître la véritable source des problèmes,
à savoir l'ego qui ne fonctionne que
pour son propre intérêt. Peu importe
ce que l'ego entreprend : la politique,
la religion, l'économie ou l'éducation. Tant qu'il
fonctionnera sur la base du principe erroné
de l'existence d'un "moi" distinct, nous continuerons
à perpétuer la souffrance et la séparation.
La seule solution pour l'humanité
est de s'éveiller.
Dans le bouddhisme, lorsqu'il n'y a plus de
sentiment de soi en tant que chose séparée et,
en même temps, qu'il n'y a rien d'autre que le Soi,
c'est le nirvana, la cessation de l'activité centrée sur soi,
la cessation de l'illusion, la cessation du rêve
et l'éveil du personnage dans le rêve de la vie.
La Bible dit que la Parole s'est faite chair
et a fait sa demeure parmi nous.
La Parole est souvent traduite par Logos,
un mot ancien à la signification profonde.
Le logos est associé à l'éternité,
à la Vérité et à la révélation directe.
On pourrait dire que c'est par le Logos,
la conscience du Christ
ou la nature de Bouddha que la pensée
de Dieu se fait connaître.