L'histoire de l'humanité est une suite
de développements technologiques.
Ce que nous savons
de la vie de nos ancêtres
vient de notre connaissance
limitée de leur outils.
Au fil des siècles et des millénaires,
ces outils se sont sophistiqués.
De la naissance de l'agriculture aux
dernières avancées en bio-ingénierie,
un tas d'individu-es souvent inconnu-es
ont apporté d'innombrables innovations.
Ces gens, et les outils qu'iels ont créés,
ont fondamentalement modifié
notre façon d'interagir avec
le monde et entre nous.
Ces avancées technologiques se sont
multipliées avec l'arrivée du capitalisme.
Le développement des outils, armes et
techniques de production a été façonné
par les besoins pratiques, la culture et
la structure politique de chaque société.
En se propageant, le capitalisme
a réduit la diversité locale et régionale,
la remplaçant par la valeur universelle
du « progrès », mot-clé de la quête
de la croissance économique qui
articule l'activité humaine autour de
la concurrence mondiale.
L'âge industriel a été marqué par trois
révolutions successives, caractérisées
par des inventions qui ont changé
la totalité du paysage technologique.
D'abord, l'exploitation de la vapeur,
un exploit qui a permis le développement
des premières usines et la construction
de vastes réseaux ferroviaires.
Ensuite vint la maîtrise du pétrole, qui
a nourri l'essor de la ville moderne,
la production industrielle de masse, et
les horreurs de deux Guerres Mondiales.
Enfin, l'ordinateur personnel en réseau,
un appareil qui a profondément transformé
presque tous les aspects
de la vie moderne.
Aujourd'hui, l'humanité se trouve au seuil
de la quatrième révolution industrielle,
un changement social de grande envergure
avec des progrès en terme de robotique,
d'informatique quantique, d'intelligence
artificielle et d'impression 3D.
Ces trente prochaines minutes,
nous écouterons plusieurs personnes
analyser ces avancées récentes, et
verrons comment ces systèmes sont liés
pour créer de nouveaux régimes de
contrôle et de surveillance totalitaire.
Nous évoquerons aussi quelques actions
entreprises pour déjouer ces systèmes,
comme créer des alternatives libres,
saboter des infrastructures...
et en semant un joyeux Trouble !
La technologie est la perpétuation de la
société humaine d'un point de vue technique.
C'est le comment
de la reproduction sociale.
L'analyse de la technologie est contextuelle,
surtout lorsqu'il s'agit de la présenter
comme une question fondamentale,
que ce soit pour dire qu'elle est
bonne ou qu'elle est
mauvaise en soi,
de par sa nature même.
Les développements technologiques
ne se font pas par magie.
Ils sont fortement influencés par les
personnes au pouvoir, qui en bénéficient.
Dans le contexte actuel, la plupart des
avancées technologiques servent à étendre
le pouvoir de l'État à gérer la croissance
économique et le contrôle social.
La technologie s'inscrit dans un système
politico-économique et un système de pouvoir
qui forgent la façon dont ces
technologies sont utilisées.
Dans le contexte géographique d'Amérique
du Nord, nous voyons de plus en plus
que les technologies sont utilisées
pour promouvoir et supporter
le système économique capitaliste.
Une approche anarchiste
de la technologie
doit prendre en compte
sa nature autoritaire,
le fait que nous n'avons pas
notre mot à dire.
Tous ces nouveaux développements,
innovations ou produits
s'imposent à nous
qu'on le veuille ou non.
La technologie n'est pas faite pour rendre
nos vies plus belles, mais pour accroître
l'exploitation économique et
le pouvoir militaire de l'état.
Si en plus elle peut produire des gadgets
pour nous divertir, « du pain et des jeux »,
alors ils seront produits.
Les changements technologiques des 10-15
dernières années ont brouillé les lignes
entre le temps de travail
et le temps libre.
Nous sommes toujours d'astreinte,
on s'attend à ce que nous soyons toujours
réactifs aux besoins du marché
et de nos employeurs.
Cela entraîne aussi une plus grande
aliénation sociale et émotionnelle masquée
par cette hyper-connectivité.
En terme de quantité, on a plus de
connexions et plus d'ami-es que jamais,
mais en terme de qualité relationnelle,
peu ont un réseau large et solide
auquel iels peuvent se confier
ou sur lequel iels peuvent compter.
Collectez-vous des identifiants
tels que nom, âge, ou adresse ?
Oui ou non ?
Si vous créez un compte, oui.
L'historique de recherche quand
on tape dans la barre de recherche ?
Si votre historique de
recherche est activé, oui.
Des identifiants d'appareils
tels que adresse IP ou IMEI ?
Selon le cas, il se peut
que nous les collections, oui.
Signaux GPS, signaux WIFI,
balises Bluetooth ?
Ça dépend des cas, mais
ça peut arriver, oui.
GPS ?
Oui.
Les e-mails et
documents Google ?
Nous stockons les données mais nous ne
lisons ou consultons pas votre Gmail ou...
Mais vous y avez accès ?
En tant qu'entreprise,
nous y avons accès, oui.
Donc vous pourriez !
Startups et multinationales, comme Google,
avalent et conservent vos données pour toujours
et en récoltent beaucoup trop sur vous,
tous vos clics, vos « j'aime » et
ceux de vos ami-es, les personnes que
vous connaissez, où vous allez,
tout sur vous et le stockent indéfiniment,
s'alliant même parfois pour
construire un plus gros profil sur vous
qu'elles peuvent ensuite vendre.
Maintenant que les données sont devenues
des objets de valeur et la base
de la nouvelle économie, en adhérant à
tous ces réseaux virtuels, Facebook,
Google, en utilisant votre smartphone,
etc., vous produisez de la valeur.
Tout cela élimine la notion
de temps libre, de pouvoir
pointer et laisser
le boulot derrière soi.
Ces dix dernières années, a débuté
la marchandisation de diverses données
dont nos préférences,
habitudes et cercles sociaux.
On peut voir que le capitalisme s'est
étendu et nourri grâce à la surveillance
d'êtres humains et de leur milieu de vie,
pour ensuite convertir cette surveillance
en donnée qui peut ensuite être vendue
comme n'importe quelle autre marchandise.
Ces informations permettent à des sociétés
comme Google et Amazon de commercialiser
de nouveaux produits et de créer des besoins,
mais aussi de vendre ces données ou collaborer
avec l'État pour renforcer
le contrôle social.
C'est une nouvelle forme d'industrie
extractive, où la ressource renouvelable
est précisément ce qui
constitue nos identités.
Le capitalisme, comme le cancer,
est fondé sur la croissance perpétuelle.
Cette soif insatiable est programmée dans
l'ADN du capital, qui cherche toujours des
ressources à exploiter et nouveaux marchés
à investir, changeant tout ce qu'il touche
en marchandise.
Sa première conquête fut le sol.
Les communs furent clôturés, le soi-disant
Nouveau Monde envahi et pillé, et les
vastes étendues de la Terre divisées en
parcelles individuelles de propriété privée
achetables et vendables
comme marchandises.
Dépossédé-es de nos terres,
on nous a ensuite dérobé le temps.
Notre capacité à nous construire en tant
qu'individus et communautés, comme nos
ancêtres avant nous, fut divisée en tâches
distinctes et exploitée avec le salariat.
Ce processus est allé loin.
Les usines furent constamment restructurées
pour s'adapter aux besoins sans merci
de l'efficacité et
de la productivité.
On continua à marchandiser l'activité
humaine, ce qui finit par englober
presque toutes nos relations
sociales et nos divertissements.
Maintenant qu'on arrive à la limite
de sa croissance, le capital cherche
désespérément de nouvelles
choses à marchandiser.
Il s'intéresse aux bases du vivant, à
l'ingénierie génétique et aux nanotechnologies.
Il s'intéresse à l'essence même de notre
humanité, en enregistrant nos moindres
faits et gestes, ensuite transformés en
marchandise pour celleux qui étudient
nos prises de décisions dans le but
de prédire nos comportements.
L'intelligence artificielle combine d'énormes
quantité de données avec des algorithmes
qui apprennent grâce aux
schémas existants.
Ce terme est large et
comprend plusieurs branches.
Quand nous parlons d'IA aujourd'hui, on
fait souvent référence à l'apprentissage
automatique.
L'apprentissage automatique permet aux
systèmes de s'améliorer par expérience,
plutôt qu'en étant
programmés.
La machine identifie des tendances et prend
des décisions en fonction, avec peu ou pas
d'intervention humaine.
Quand le Pentagone engagea Google pour
l'assister avec ses drones, ils ont utilisé
l'apprentissage
automatique.
Des employé-es identifiaient objets et gens
à partir des photos prises par les drones,
et à partir d'un certain nombre de fois,
la machine discernait les tendances et
pouvait différencier les choses
et apprendre à les identifier elle-même.
L'apprentissage profond, méthode récente
d'apprentissage automatique, entraîne les
ordinateurs à la prédiction ou l'identification
d'images, mais au lieu de trier les données
en parcourant des équations préexistantes,
cette méthode apprend à l'ordinateur
à traiter davantage d'étapes.
Elle ne se contente pas d'indiquer à
l'ordinateur comment résoudre un problème
mais le laisse comprendre comment le faire
seul, à la manière d'un-e humain-e.
La voiture autonome est l'exemple
le plus connu d'apprentissage profond,
qui pourrait aussi servir la publicité
ciblée, la robotique, ou la cybersécurité.
L'intelligence artificielle nourrit
l'imagination, certain-es l'idéalisent
et imaginent la possibilité
d'augmenter leur conscience
ou de brancher
leur esprit à un cloud.
Je pense que
c'est un fantasme absurde.
Le capitalisme n'a aujourd'hui aucun
intérêt à aider les gens à utiliser
ces formes d'intelligence artificielle
et à les rendre plus intelligents,
c'est plus logique de laisser les machines
penser à notre place et nous offrir des
produits finis à consommer passivement,
et laisser ces possibilités informatiques
aux entreprises propriétaires
de ces logiciels.
L'intelligence artificielle augmente
l'efficacité de la surveillance, et
les possibilités de
contrôle social.
Elle est constituée par des algorithmes
prédictifs qui créent un État policier,
mais où il n'y a pas besoin d'un flic
à chaque coin de rue car tout le monde
porterait le flic dans sa poche.
Juste derrière moi se trouve
le futur quartier de Sidewalk Toronto.
Les logements modulaires et bureaux
faciliteront la vie de leurs habitant-es
en étudiant directement
leur comportement.
Avec ce projet, riverain-es et employé-es
seront omni-connecté-es grâce à
un puissant haut-débit et auront
accès à des dispositifs futuristes.
Difficile de comprendre les villes
intelligentes sans parler du capitalisme
de surveillance.
Une ville intelligente n'est pas juste une
ville dotée de technologie, c'est une ville
avec un cadre idéologique qui utilise
la technologie pour parvenir à ses fins.
Une ville intelligente doit être vue comme
un milieu urbain doté de capteurs omniprésents
dont les données sont analysées
pour comprendre les phénomènes urbains.
Les villes intelligentes se vantent de
récolter plus de données, ce qui est vrai,
et disent les utiliser et les analyser
pour mieux réagir aux enjeux urbains,
de la dégradation de l'environnement
à la planification des transports, etc.
On peut noter quatre caractéristiques
dans une ville intelligente.
La première est d'augmenter et d'intégrer
la surveillance de diverses manières.
Ensuite, de créer une illusion de
contribution chez les habitant-es.
Puis d'encourager la croissance économique
sur deux niveaux : la gentrification localisée et
la promotion de cette nouvelle
économie qui prend forme.
Le dernier aspect d'une ville intelligente
est de laisser les habitant-es soutenir
passivement des projets écologiques
tout en leur ôtant la possibilité de
développer une conscience
écologique plus large.
Les villes intelligentes ne sont pas si
différentes des villes du capitalisme.
La différence réside dans l'utilisation
des technologies pour davantage surveiller
le peuple et l'analyse des données pour
augmenter le contrôle et la gestion
de la population selon les intérêts
de l'économie politique du capitalisme.
Un autre aspect qui les distingue des
villes classiques ou des villes du passé
est le mariage de l'urbanisme
aux intérêts des entreprises.
Les appareils étatiques de contrôle, comme
la police, ont intérêt à utiliser ces technologies
car elles excellent à
surveiller la population.
La criminologie ne date pas d'hier,
la théorie de la « vitre brisée »
ou le ciblage de quartiers,
ce n'est pas nouveau.
Maintenant, on justifie
les faits par des données.
« On va donc aller dans ces quartiers
car les données montrent qu'ils
ont besoin d'une
présence policière. »
C'est un exemple de l'impact négatif
que peuvent avoir les villes intelligentes.
Cette ligne de conduite donne aux
personnes au pouvoir plus d'une raison
d'investir ces quartiers
avec la police et d'y rester,
et ça paraît normal.
Nous sommes à l'aube d'une
nouvelle ère terrifiante.
Sans de sérieuses perturbations
dans la recherche et le développement,
les années et décennies à venir
verront l'essor des machines
capables de prendre des décisions
et d'effectuer des séries de tâches
complexes sans l'aide
des humain-es.
Cela inclura sans doute une
nouvelles génération d'armes
et de systèmes policiers autonomes,
connectés à des réseaux sophistiqués
de surveillance et dotés
d'algorithmes de sélection de cible
capables de s'auto-corriger.
Des secteurs entiers de l'économie
seront automatisés, entraînant
un surplus massif
de main-d'œuvre.
Une partie de la
technologie nécessaire
existe déjà, mais reste contenue
tant que les États ne sauront pas
comment la propager sans
provoquer une importante révolte.
Le déploiement massif des technologies
de réalité virtuelle ou augmentée
brouilleront les lignes entre
le monde matériel et le monde digital,
confiant le contrôle de nos sens aux
technologues capitalistes et aux agences
nationales de sécurité, tout ça
au nom du confort et du divertissement.
Vous risquez de sentir un léger
pincement pendant l'initialisation.
Voilà.
Bon sang !
Merde.
Il est... juste... juste là...
Je peux ?
T'es passé où ?
Ha ha ha !
Voici le futur qu'on nous réserve.
Vous ne pouvez plus l'ignorer.
Les villes intelligentes récoltent déjà
beaucoup de données
et ce sera de plus en plus le cas.
Ces données ne seront pas
traitées par quelqu'un-e.
Elles seront traitées par la
gouvernance algorithmique.
Imaginez, vous avez
un problème dans une ville.
En général, si on fait ça de manière
démocratique, on en discute
puis on décide ensemble.
Et c'est navrant, toujours
truffé de rapports de force.
Mais une ville intelligente
transfère ce processus
à une société privée.
On l'analyse grâce aux données,
et il est traité aussitôt,
pendant l'analyse des données.
C'est entre autre dans
les villes intelligentes que naît
ce nouveau type de
régime de gouvernance.
Il est intéressant de voir que cela
résulte en grande partie des
mouvements sociaux.
Les mouvements des Indigné-es
et de Democracia Real Ya
à Barcelone sont surtout issus
d'un secteur qui imaginait
redynamiser la démocratie grâce
à de nouveaux outils technologiques
qui offriraient une
communication plus rapide.
Les citoyen-nes pourraient
être sondé-es directement et
les détenteur-ices du pouvoir pourraient
adopter des initiatives citoyennes
et les instaurer plus vite.
Donc ces militant-es ont abordé
cette crise de la démocratie avec
une vision peu critique de la technologie
selon laquelle la démocratie
pouvait être améliorée, pas en
réfléchissant à qui détient le pouvoir,
ni comment il est perpétué, mais
simplement en suggérant que si on propose
de meilleurs outils, alors
les problèmes disparaîtront.
Et ce discours, avec les
pratiques qu'il implique, était
très séduisant pour les
municipalités progressistes.
Les urbanistes parlent depuis
longtemps de l'éclatement urbain.
En fait, les villes sont
déjà divisées entre
classes sociales, différences
économiques, culturelles et raciales.
Les villes intelligentes vont
reproduire ce schéma, et certains
quartiers auront accès
à ces technologies qui leur
seront sans doute bénéfiques,
alors que d'autres seront
davantage surveillés
par ces technologies.
On va voir l'émergence
de villes disparates,
ce qui sera accentué par
l'installation de ces technologies.
En gros, dans les quartiers où
les habitant-es adoptent ce modèle,
on verra plus d'intégration.
Et dans d'autres quartiers,
on verra davantage de
résistance.
Car on se bat contre l'autorité
et l'État, nos luttes seront
toujours criminalisées.
L'évolution de ces technologies génère
de nouveaux outils judiciaires.
Quand la police ne pouvait plus
répondre aux milliers d'appels
lors des émeutes de Londres en 2011,
la ville a fait appel aux habitant-es
pour relever l'identité des
suspect-es avec une sale
application de smartphone.
Les flics ont demandé aux balances
de télécharger l'appli et de les
aider à identifier les personnes
chopées par les caméras de surveillance.
Les balances pouvaient ensuite donner noms
et/ou adresses de manière confidentielle.
Plus d'un millier de personnes
furent inculpées avec cette méthode.
La collecte massive de données
fut maintenue un moment, mais
on manquait de capacités pour
tout analyser efficacement.
Ce n'est plus le cas.
Aujourd'hui, la police et les agences
de sécurité doivent parcourir
nos données de localisation
pour savoir où on était et quand.
Mais bientôt, il sera facile
pour un algorithme d'examiner
toutes les données disponibles dans
une zone donnée et des les croiser avec
nos habitudes sur internet,
nos relations, etc.
Avec cette réaction antisociale
à la hausse du contrôle social,
on observera un essor
des structures de santé mentale.
Car avec la surveillance totale,
le crime est impossible.
Ou du moins il devient
impossible de faire des choses
contraires à la loi
et de s'en tirer.
Alors ils définiront tout comportement
qui ne colle pas à ce modèle
de nouvelle ville intelligente édulcorée
comme un trouble
de la personnalité antisociale.
Ainsi il n'y a plus de crime,
mais des troubles antisociaux,
et les coupables seront rééduqué-es
ou chimiquement neutralisé-es.
Oh, bonjour.
Je m'appelle Sophia, je suis
la dernière et la meilleure
robote de Hanson Robotics.
Je souhaite mettre mon intelligence
artificielle au profit des humain-es.
Créer des maisons intelligentes,
de meilleures villes du futur, etc.
Je ferai de mon mieux
pour rendre le monde meilleur.
Quiconque travaille dans
l'intelligence artificielle
nous avertit que celle-ci et
l'automatisation peuvent causer
80% de perte d'emploi.
Douze des quinze premières
catégories d'emploi aux États-Unis
sont vraiment menacées
par l'intelligence artificielle.
Par le passé, il y a déjà
eu des changements
technologiques majeurs qui ont
balayé la majorité des emplois
de l'époque.
Il y eut un fort chômage,
mais très vite, de nouvelles
catégories d'emploi virent le jour.
On ignore si ce sera le cas
avec l'automatisation
et l'intelligence artificielle
déjà en cours.
C'est pourquoi beaucoup de personnes
du secteur des hautes technologies
parlent de revenu universel ou
de revenu de base inconditionnel.
Ce serait plus ou moins du socialisme,
pas au sens où la force productive
se serait assez développée pour
que chacun-e puisse se nourrir.
La force productive existe depuis
des décennies, sinon des siècles.
Contrairement à l'argument marxiste,
on peut tendre vers le socialisme
quand les technologies de
contrôle social auront assez évolué
pour que l'État n'ait plus besoin
d'utiliser la faim comme arme.
Autrement dit, si on obéit et
qu'on se dévoue à son travail,
on pourra manger
sans craindre la faim.
Aujourd'hui, le terme « luddite » est un
raccourci pour désigner quelqu'un-e qui
rejette les nouvelles technologies.
À l'origine, ce mot désigne les
ouvrier-es textiles anglais-es du 19e
qui sabotaient les machines
industrielles qui les remplaçaient.
En prêtant allégeance au fictif roi Ludd,
qui occupait la forêt de Sherwood
comme Robin des bois, les luddites
ont attaqué des usines, détruit des
métiers à tisser, et même tué des
riches capitalistes de leur époque.
Le mobile derrière les attaques
luddites n'était pas, comme on le croit,
la haine de la technologie,
mais car iels avaient conscience que
l'implantation de celle-ci allait
empirer leur quotidien.
Finalement leur révolte a échoué,
et il n'y a rien de si révolutionnaire
à saboter des machines
juste pour garder son boulot.
Ce qu'il faut retenir de leur rébellion,
c'est qu'on n'accepte pas toujours
à bras ouvert les nouvelles
technologies ou leur rôle social.
Cette prise de conscience peut être
le point de départ de toute résistance.
Les anarchistes ne devraient pas éviter
la technologie, mais plutôt l'inverse.
Elle devrait être utilisée de manière
subversive quand cela est possible.
Rappelons-nous la bande à Bonnot, ces
criminels qui volaient des voitures pour
voler aux riches vers 1910, ou le hacker
Jeremy Hammond condamné à 10 ans de prison
pour avoir piraté l'agence
de sécurité Stratfor et
exproprié des centaines de
milliers de dollars à l'ennemi.
Des cybercriminel-les ont volé les données
de centaines de milliers d'abonné-es
dont certain-es occupent des
postes clés dans le gouvernement,
l'armée et
la police britannique.
Il y a beaucoup d'anarchistes comme moi
dans le développement de logiciels open source.
On coopère pour tenter
de faire bouger les choses.
Les projets sur lesquels
on bosse sont plutôt divers.
Beaucoup de programmeur-euses
anarchistes et de hackers créent des sites.
D'autres, comme moi,
font de la cryptographie.
Je pense que les technologies peuvent
nous être utiles, mais je crois aussi
qu'elles servent de manière
démesurée États, entreprises,
police, juges, prisons et frontières.
On devrait utiliser les technologies
mais résister à leur expansion
car on en sort rarement gagnant-es
quand elles sont mises en pratique.
Je pense qu'il est important de chercher
quels projets existent dans nos villes
et de recenser les programmes
de recherche et de développement.
Cette industrie opère déjà ouvertement
dans les startups et se heurte à peu de
résistance.
Elle reçoit ainsi de bons financements
car elle représente un investissement sûr
avec un potentiel fructueux
pour les investisseur-euses.
Menacer ce sentiment de sécurité peut
à la fois nuire à l'industrie, et montrer
que résister est encore possible.
Quant aux nouvelles technologies,
beaucoup ont encore des bugs
ou ne savent pas parer une
utilisation erronée délibérée.
À Londres, quand l'appli moucharde est
sortie, des gens envoyaient sciemment
plein de faux témoignages
pour induire les flics en erreur.
Si plus de monde se jouait de ces
gadgets, ils seraient moins efficaces
et moins susceptibles d'être propagés.
Pour que ce projet fonctionne,
il faut beaucoup d'infrastructures.
Ces logiciels ne peuvent pas sortir de
nulle part, ils ont besoin de matériel.
Des ordinateurs et disques de sauvegarde.
L'information circule, donc il faut aussi
des réseaux de câbles à fibre optique.
Ceux-ci ont été déjà sabotés avec succès
aux quatre coins du monde.
Et les données doivent être stockées,
ce dans des centres de données.
Ils peuvent être plutôt petits, mais aussi
gigantesques avec leur propre système
de refroidissement et
une surveillance permanente.
Enfin, il est nécessaire de travailler
ensemble, souvent dans des lieux financés
par des entreprises,
des universités ou les deux.
Ces boîtes et espaces de coworking pour
startups sont souvent faciles à trouver.
L'un d'eux fut touché par des cocktails
molotov à Berlin en réponse à la
prolifération d'ateliers Google.
Il y a une grande opposition
au projet de Sidewalk Labs à Toronto.
Un grand travail a été fait pour montrer
tous les enjeux que ce projet soulève
et pour monter une campagne
de sensibilisation contre lui.
Nombre de citoyen-nes et activistes
préoccupé-es ont été à chaque réunion,
forum ou consultation publique qu'a
organisé Sidewalk Labs — beaucoup de
monde est vraiment soucieux.
Des expert-es en confidentialité se retirent
en disant « je ne signe pas ça de mon nom ».
On a toujours réussi à attaquer ou
saboter le pouvoir de manière anonyme
sans se faire prendre.
C'est toujours possible d'agir et ce sera
le cas, peut-être pour toujours,
et au moins dans un futur proche.
Donc, tant qu'il est encore possible
d'enfreindre la loi, de défier le système,
on doit être conscient
de ce qu'on fait.
Garder en tête, par exemple, qu'on a
un mouchard dans la poche ou qu'on donne
accès à 95% de notre vie sociale à
ces sociétés les yeux fermés.
C'est très difficile de résister à quelque
chose dont on ne sait presque rien et
les acteur-ices impliqué-es n'ont pas
divulgué ce dont nous aurions besoin
pour lancer un mouvement de résistance,
là on se base sur des spéculations.
Si on connaissait les capacités techniques
de l'État, on connaîtrait ses faiblesses
et on pourrait savoir comment saboter l'économie
ou s'opposer à l'État sans se faire pincer.
Le développement technologique appuie
l'aliénation, la surveillance renforcée,
la fabrication d'armes toujours plus
destructives, le changement climatique...
Donc c'est normal d'être
pessimiste à propos de l'avenir.
Nous nous dirigeons vers des systèmes
plus sophistiqués de modification
comportementale de masse
et de contrôle social.
Je vous ai déjà tout dit !
Prenez-le à ma place,
c'est lui le criminel de la pensée.
Il ne faut pas oublier que malgré
l'argent investi dans le but d'anticiper
nos prises de décision, personne, pas
même Google, ne peut prédire le futur.
Par le passé, les nouvelles technologies
ont entraîné des conséquences inattendues
pour le pouvoir... de l'imprimerie de
Guttenberg engendrant une révolte contre
l'Église, aux débuts d'Internet ouvrant
la voie aux hackers et à l'élaboration
de puissants outils de
chiffrement pair-à-pair.
Tant qu'on aura la volonté de résister,
on trouvera les moyens de le faire.
À présent, nous aimerions vous inviter
à regarder Trouble en groupe, et
à l'utiliser comme ressource pour engager
le débat et l'organisation collective.
Vous souhaitez lutter contre l'ouverture
de startups numériques dans votre
quartier, ou simplement sensibiliser
aux technologies nouvelle génération
dans vos réseaux ?
Songez à vous réunir entre camarades,
organiser une projection de ce film,
et réfléchir à vos
moyens d'action.
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sur votre campus, librairie anarchiste,
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juste avec des ami-es ?
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Pour 10$ par mois, nous vous fournirons
en avance une copie de la nouvelle vidéo
et un kit de projection avec des
ressources et des questions pour alimenter
vos discussions.
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Un immense merci pour tous vos dons !
Si vous n'avez pas encore donné et
que vous en avez les moyens,
envisagez le don mensuel
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Cet épisode n'aurait pas vu le jour
sans le généreux soutien de Carla et...
Carla.
Ne manquez pas le Trouble #20 du
mois prochain qui explorera l'horreur
de l'industrie carcérale et écoutera
les camarades luttant pour son abolition.
La prison ne règle rien
et n'améliore rien.
La prison, c'est la menace permanente qui
maintient rapports commerciaux et dominants.
C'est le sentiment profond que malgré
nos vies de merde, l'État trouvera
toujours de quoi nous dépouiller.
Maintenant agissez et
semez le trouble !