J'ai demandé à Doc Shearis et Isaac Wilder de venir
s'asseoir avec Eben pour continuer cette discussion.
Eben Moglen. Merci.
Merci, c'est un plaisir d'être ici,
et de voir tant d'amis.
Je suis très reconnaissant à David pour
l'invitation. C'est un privilège d'être ici.
Je vais parler d'un sujet
presque aussi geek
que nos sujets habituels:
la politique économique.
Je vais essayer d'en parler d'une manière
moins ennuyeuse que ce l'est d'habitude,
mais vous me pardonnerez, j'en suis sûr,
de commencer si loin de OpenSSL.
Nous y reviendrons
au fur et à mesure.
Toutes les économies
développées du monde
abordent aujourd'hui une même crise,
et sous un angle très déprimant.
Elles se voient obligées
d'imposer l'austérité,
ensablées qu'elles sont dans les
profondeurs de l'endettement privé —
l'acharnement des détenteurs
de capitaux à parier l'argent des autres
ayant mené au désastre,
ces dernières années.
L'austérité est une issue politiquement
néfaste pour tous ces gouvernements,
dont certains, déjà, sont pris
dans une spirale infernale
de réduction des subventions publiques,
notamment dans le social ou pour les jeunes,
qui a pour effet contraire indésirable
de freiner la croissance économique.
Au lieu d'annuler ces mauvaises dettes
pour reprendre la croissance,
on assiste à un drame dans lequel
la troisième économie du monde,
l'Union Européenne, craint un
effondrement de sa monnaie
ce qui causerait la perte d'une génération,
et des répercussions mondiales désastreuses.
Les décideurs politiques...
J'en vois peu ici... Ils ont bien sûr
mieux à faire que de nous écouter !
Les décideurs politiques, donc,
font face à un problème insurmontable :
Comment obtenir de la croissance
et de l'innovation sous l'austérité ?
Ils ne connaissent pas
la réponse à cette question,
et cela devient si urgent que leur
contrôle politique s'en trouve miné :
Dans les sociétés développées,
habituellement plus réfléchies,
les partis marginaux attirent
de plus en plus de suffrages,
menaçant ainsi la stabilité et, par là,
la capacité des décideurs économiques
à résoudre, ou tenter de résoudre,
le problème de l'innovation sous l'austérité.
Ce n'est pas une bonne nouvelle. Ce n'est bon pour personne.
Nous ne pouvons nous réjouir de cet état de
fait, qui résulte largement de l'incompétence
de gens prétendant mériter tout cet argent
au nom de leur suprème intelligence !
C'est aussi la conséquence d'une lâcheté des
politiciens qui leur ont trop lâché la bride.
Ce n'est pas que tout cela nous enchante,
mais reconnaissons l'opportunité :
Peu de gens dans le monde savent comment
obtenir de l'innovation sous l'austérité,
et nous sommes ces gens.
Nous avons innové sous l'austérité
durant toute la génération écoulée,
et non seulement nos innovations
sont plutôt bonnes,
mais ce sont celles dont les gens riches
et malins se sont attribué le crédit.
L'essentiel de la croissance,
tandis que ces fous furieux prenaient
l'argent des autres pour le jouer au casino,
provint des innovations
que nous leur avons fournies.
Nous en regrettons nous aussi
l'issue désastreuse,
car ce sont vos enfants et mes étudiants
qui auront à souffrir du chômage.
Toutes ces vies seront
abîmées pour de bon
par ce qui se passe aujourd'hui :
les jeunes qui démarrent
souffriront de baisses de salaire
tout au long de leur carrière,
et leurs enfants auront
un moins bon départ qu'eux.
On ne peut s'en réjouir.
Mais nous avons une opportunité
politique très réelle,
car nous avons la réponse
à la question la plus importante,
celle qui fait courir tous les
décideurs politiques de notre temps !
Nous avons quelque chose
de très important à dire,
et je voudrais amorcer une discussion
sur la manière de le formuler.
Je viens donc vous proproser
une ébauche de notre argumentaire
( je dis le notre car je nous vois ici réunis... )
notre argumentaire, donc, sur les moyens
de sortir le monde de ce bourbier.
On n'obtient pas d'innovation
sous l'austérité
en collectant des tas d'argent
pour financer des intermédiaires.
L'économie du 21e siècle
est caractérisée par un processus
appelé désintermédiation
— excusez le jargon,
impitoyable et sans répit.
La télévision est en train de mourir.
Je ne vous apprends rien.
Et plus personne n'essayera jamais
de créer une encyclopédie commerciale.
Le système foireux d'Amazon, qui nous vend
des livres pour les reprendre ensuite,
transforme l'édition en éliminant
le pouvoir de sélection des éditeurs,
tout comme M. Jobs a presque détruit toute
l'industrie musicale en prétendant la sauver.
...une tâche que son fantôme a déjà repris
à l'encontre des éditeurs de magasines.
La désintermédiation, cette migration du
pouvoir du centre vers les extrémités du net,
est un fait crucial en économie
politique au 21e siècle.
Elle se démontre à chaque instant.
Sa description formelle vaudra
à quelqu'un le prix Nobel d'économie.
Seules deux catégories d'intermédiaires s'en
sont bien sortis ces dix dernières années :
les assurances santé aux États-Unis, grâce
à une politique pathologique — et la finance.
En capitalisant sur cette pathologie,
les assureurs pourraient bien réussir à rester
ces intermédiaires onéreux et peu fiables
pour encore un certain temps,
mais la finance a scié sa branche, et
commence à se dégonfler pour de bon.
En conséquence, les décideurs politiques,
observant cette inéluctable désintermédiation
à travers tout le système économique,
commencent à en inspirer leurs
politiques industrielles nationales.
Nous devons leur affirmer que
l'innovation suit le même principe :
La dernière grande innovation technologique
est cette toile mondiale appelée le Web,
une invention vieille de moins 8000 jours,
qui transforme déjà la société humaine
à une vitesse sans précédent
depuis l'apparition de l'écriture.
Et ça ne fait que commencer...
Cette innovation alimente
la désintermédiation,
en permettant toutes sortes de
contacts humains sans intermédiaires :
sans acheteurs, vendeurs,
agents ni contrôleurs.
Elle crée aussi un espace dans lequel
se livre une guerre pour le pouvoir
et le contrôle social.
— mais j'y reviendrai plus tard.
Je voudrais d'abord attirer
l'attention sur ce fait capital :
Le Web lui-même est le fruit
d'un travail désintermédiarisé.
Ce que Tim a initié au CERN n'était pas
le Web que l'on connaît aujourd'hui.
Le Web d'aujourd'hui est dû aux
innovations d'une multitude d'individus
collaborant sans intermédiaires.
Je me rappelle ce que j'avais écrit sur
le futur des pages personnelles en 1995,
et je vois plus ou moins ça arriver.
J'avais vu ces premières pages comme
les jeunes pousses d'une vaste prairie...
qui resplendit aujourd'hui.
Et bien sûr, comme avec toute innovation,
il y eut des conséquences inattendues.
Le navigateur rendit le Web
très facile à lire.
Mais tout en concevant
les navigateurs, Apache,
et moultes sophistications par dessus,
nous avons oublié de rendre
le Web facile à écrire.
C'est une petite frappe en pull à capuche
qui a rendu le Web facile à écrire,
en créant une faille dans la civilisation
pour s'y placer en intermédiaire.
Cette attaque sur la société,
source de maints maux actuels,
est le genre d'innovation intermédiaire
dont on devrait se méfier :
On avait tout rendu possible,
y compris malheureusement PHP,
et des innovateurs de niveau intermédiaire
en ont fait l'abomination qu'est Facebook.
Comme on peut déjà le voir en Bourse,
une telle forme d'innovation
n'apporte aucun bénéfice social.
Elle va enrichir
quelques personnes :
le gouvernement d'Abu Dhabi,
un gangster russe
déjà milliardaire,
un gars impatient d'échapper aux impôts
pour ne plus financer les écoles publiques...
Une petite bande de malapris,
reliques du siècle passé.
Mais la morale de l'histoire,
c'est que si on avait eu un peu plus
d'innovation sans intermédiaires,
si on avait rendu facile d'opérer
son propre serveur Web à domicile ;
si on avait tout de suite expliqué aux
gens l'importance des journaux serveurs
et pourquoi ne jamais laisser
personne les tenir pour eux,
nous serions dans une situation
très différente aujourd'hui.
Le prochain Facebook
ne devrait jamais exister.
Ce genre d'innovation intermédiaire
comble les besoin des financiers
et non ceux des gens.
Ce qui ne veut pas dire que les réseaux
sociaux ne devraient pas exister,
mais ils ne devraient pas être centrés
autours d'un intermédiaire intéressé.
Chacun ici le sait, mais comment
l'expliquer au reste du monde ?
Et je pense en particulier
aux décideurs politiques :
Comment le leur expliquer ?
Divisons la discussion
en deux points :
1. Que savons-nous sur la manière d'obtenir
de l'innovation sous l'austérité ?
2. Qu'est-ce qui empêche les
gouvernements de nous entendre ?
Je viens donc vous présenter mon ébauche d'un
plaidoyer pour l'innovation sous l'austérité.
Il s'intitule :
"Nous avons créé le Cloud".
Vous voyez ce que ça veut dire :
l'évolution actuelle des
technologies de l'information
est l'application à grande échelle
de nos travaux de la fin du 20e siècle.
Nous avions imaginé de se partager librement
les systèmes et logiciels que nous développions,
et nous l'avons fait en canalisant
la curiosité des jeunes !
C'était ça le moteur,
et non des capitaux à risque !
Nous y travaillions depuis 15 ans,
et nos bricoles tournaient déjà partout,
quand les capitaux boursiers et
corporatifs nous ont approchés.
Ils ne vinrent pas à nous parce
que l'innovation devait se faire,
mais parce qu'elle avait déjà eu lieu,
et qu'ils en convoitaient les bénéfices.
Ce fut un tournant tout-à-fait positif,
et je n'ai rien à y redire.
Mais l'histoire que nous avons vécue
et que d'autres pourront étudier
montre comment l'innovation
s'est produite sous l'austérité :
prétendre que c'est arrivé
grâce à la curiosité des jeunes
est historiquement correct.
Mais ce n'est pas sufisant.
Ce qu'on a besoin de rappeler, c'est
que leur curiosité a pu être éveillée
car chaque ordinateur et appareil
autours d'eux pouvait être trafiqué,
si bien qu'ils pouvaient s'amuser
à bricoler les outils du quotidien.
Cela a rendu l'innovation possible là
où elle peut se produire sans entrave :
à la base de la pyramide économique.
Ceci se passe aujourd'hui dans le monde,
comme aux USA dans les années 80 :
Des centaines de milliers de jeunes
bidouillant leur ordinateur,
piratant des serveurs,
bricolant le matériel quotidien
en poursuivant leurs lubies,
fussent-elles d'ordre technique, social,
carriériste, ou simplement ludique :
« J'ai envie d'essayer ça,
ce serait cool ! »
C'est ça la source première
de l'innovation
qui a nourri toute la croissance
écnomique ces dix dernières années !
Des milliers de millards de dollars
en commerce électronique...
Les plus vieux d'entre
nous se souviennent
de l'acharnement du gouvernement
américain à interdire le chiffrement,
empêchant ainsi l'ouverture d'un marché
mondial d'une valeur de 3800 milliards
de dollars en commerce électronique.
Nous étions taxés de partisans du terrorisme
et de la pédophilie, au début des années 90,
et pourtant, tout l'argent
qu'ils ont gagné depuis,
en dons pour leurs campagnes,
en dividendes et j'en passe,
c'est grâce à la mondialisation
du commerce rendue possible
par les innovations pour lesquelles
ils voulaient nous mettre en prison !
Ceci devrait démontrer à la nouvelle
génération de décideurs politiques
à quel point leur adhérence aux idées
reçues risque de nous enfoncer davantage
dans cette spirale infernale
qu'ils redoutent tant.
Et cela doit nous encourager à souligner
encore que le chemin de l'innovation,
c'est de laisser s'épanouir
la créativité des jeunes
dans un cadre leur permettant de bricoler
notre monde, et de partager leurs résultats.
Quand Richard Stallman a rédigé l'appel
pour une encyclopédie universelle
(lui, Jimmy Wales et moi-même
étions bien plus jeunes alors),
l'idée parassait fantaisiste.
Elle a pourtant changé la vie de toute
personne sachant lire dans le monde.
Et ce n'est qu'un début.
La révolution initiée
par Creative Commons,
par le Logiciel Libre,
par la Culture Libre,
qui transparaît dans le Web,
dans Wikipedia, et
dans les systèmes d'exploitation libres
qui font maintenant tout tourner,
jusqu'aux produits tentaculaires et
cadenassés d'Apple, que je vois même ici,
toute cette innovation vient du simple fait
d'avoir laissé les gamins s'amuser librement
— chose que l'on essaye à toute force
d'empêcher complètement aujourd'hui :
De plus en plus, les appareils
de notre quotidien
sont conçus pour empêcher
tout bidouillage.
Chaque enfant a dans sa poche un
labo d'informatique désormais fermé...
Quand, vers 2006, nous avons
tenté d'inclure à la license GPL
une clause visant à
empêcher ce verrouillage,
certains ont cru que notre but était
de faciliter le piratage de films...
Richard Stallman et moi-même
n'avions de cesse de répéter :
Nous sommes informaticiens,
pas cinéphiles !
Nous combattons pour le droit de gens
à bricoler ce qui leur appartient !
Parce que si vous les
empêchez de faire ça,
vous détruirez le moteur d'innovation
dont toute le monde profite !
Ceci reste vrai,
et c'est encore plus important
aujourd'hui,
du fait que très peu
nous croyaient alors :
Parce que trop peu prirent la peine
de défendre ce point de vue,
on se retrouve aujourd'hui avec
un Microsoft qui veut interdire
les navigateurs tiers sur
leurs appareils ARM/WindowsRT,
un fantôme de Steve Jobs
qui essaie par tous les moyens
d'empêcher une suite libre
d'exister pour iOS,
et des opérateurs réseau qui tentent,
à terme, de lier chaque jeune humain
à un réseau propriétaire
au travers de terminaux verrouillés,
qu'il ne peut ni étudier,
ni bricoler, ni comprendre,
et desquels il
ne peut ni apprendre,
ni rien faire qu'envoyer des textos
qui coûtent un million de fois trop cher.
Et la plupart de la soi-disant innovation
dans notre secteur consiste maintenant
à faciliter la vie des opérateurs... ce qui
n'améliore en rien celle des utilisateurs.
L'innovation en télécommunications
a mondialement cessé.
Elle ne reprendra pas,
tant que sera entravée
la seule forme d'innovation
compatible avec l'austérité.
Tout ceci a également une
conséquence indirecte majeure :
Puisque l'innovation, sous
l'austérité, est avant tout due
à ce que les jeunes appliquent leur
curiosité à l'amélioration du quotidien,
le niveau d'instruction général,
par conséquent, augmente.
La désintermédiation commence à
arriver dans l'enseignement supérieur...
On a actuellement deux modèles :
Coursera, une dérive
mercantile de Stanford,
utilisant des logiciels fermés et des
ressources éducatives propriétaires,
représente la google-isation
de l'enseignement supérieur ;
MITx, devenu edX par une
alliance avec Harvard,
est la réponse du monde libre :
des programmes d'enseignement
supérieur similaires mais évolutifs,
fournis au moyen de logiciels libres,
et basés sur des ressources libres.
L'enjeu de cette concurrence est énorme !
Il nous faut à toute force nourrir les
solutions reposant sur une matière libre,
que chacun peut utiliser,
modifier et redistribuer à souhait,
et appuyer toute politique
allant dans ce sens.
Toute société espérant
reprendre l'innovation,
et par là raviver sa croissance
en ces temps d'austérité,
a besoin de plus d'éducation,
plus accessible et moins chère,
qui formera les jeunes à mieux
contribuer au monde qui les entoure.
Notre méthode d'éducation, sociale et
éprouvée, est indispensables à cela !
Nous sommes convaincus que le Logiciel Libre
est le modèle éducatif le plus abouti au monde.
Il permet à quiconque sur la planète
de tirer le meilleur d'un ordinateur,
par la lecture libre, l'expérimentation
et le partage de ses résultats.
Cela seul fait de l'informatique
une science digne de ce nom :
des expérimentations à foison,
contribuant au savoir humain.
Et ce principe peut s'étendre aux
autres domaines de la culture :
Des pionniers comme Jimmy Wales et
Larry Lessig en ont posé les bases.
Reste à faire comprendre aux
gouvernants comment continuer.
La Commission Européenne a publié
un rapport il y a 18 mois,
disant qu'ils pouvaient numériser 1/6e
du contenu de toutes les bibliothèques
pour le coût de 100km de route.
Donc, pour 600km de route,
dans une économie qui en
construit des milliers par an,
chaque livre en bibliothèque pourrait
être disponnible à l'humanité entière...
Il faut le faire !
[ — Et les droits d'auteur ? ]
Rappelez-vous que la plupart de ces
livres sont dans le domaine public,
avant de crier
aux droits d'auteurs !
Et que la majorité du savoir
humain n'est pas récente,
avant de crier
aux droits d'auteurs !
Tout savoir antérieur à notre naissance
devrait être universellement accessible.
Sans ça, l'innovation indispensable
à la reprise ne pourra s'épanouir.
C'est un pré-requis sociétal !
Le droit d'auteur
n'est pas une fatalité.
Il n'est qu'une commodité.
Nous n'avons pas à commettre de
suicide culturel ni intellectuel
pour maintenir un système qui,
dans la plupart des disciplines,
ne s'applique qu'à une
minorité du savoir humain:
Personne ne détient
les droits sur Platon !
Donc, si on se demande quelle forme
donner à l'éducation au 21e siècle,
et comment distribuer la connaissance
à travers le monde...
A votre avis,
de tous les Einstein ayant jamais vécu,
combien ont pu apprendre la physique ?
Une poignée seulement.
Et combien de Shakespeares sont
morts sans avoir appris à écrire ?
Presque tous.
Des 3 milliards d'enfants actuels,
combien d'Einsteins
voulez-vous encore gaspiller ?
L'universalisation de l'accès au savoir
est notre plus grand atout
pour dynamiser l'innovation,
le progrès et le bien-être
de tous les Etres Humains !
Défendons ceci sans nous laisser
intimider par le droit d'auteur !
Résumons maintenant
les conditions
dont nous savons qu'elles favorisent
l'innovation sous l'austérité :
Améliorons l'accès à tout
ce qui permet d'apprendre,
adaptons la technologie pour permettre
aux scientifiques de moins de 20 ans
de mener des expériences et
d'en partager les résultats.
Continuons sur la lancée de
ces 25 ans de partage fructueux
qui donnèrent lieu à l'univers
de l'information actuel,
et nous atteindront des
taux records d'innovation,
malgré cette baisse massive des
investissements due à l'austérité.
Nous permettrions également aux jeunes
de prendre davantage en main leur destin
économique et professionnel,
une condition indispensable à la stabilité
politique et sociale de demain :
ne nous berçons pas d'illusions
sur nos chances de développement
quand le chômage
touchera 50% des jeunes.
Leur faire construire des voitures
à la chaîne n'est plus une solution,
tout le monde le voit bien.
Les gouvernements, dépassés,
semblent baisser les bras.
Cela explique pourquoi, sous les régimes
à représentativité proportionelle,
les jeunes se désintéressent tant
des grands partis politiques :
quand les Pirates prennent 8,3% des voix
dans le Schleswig-Holstein,
c'est dû aux jeunes, qui voient clairement
que les décisions politiques habituelles
ne vont pas dans le sens de leur
bien-être économique à venir.
Nous devons écouter, démocratiquement,
ces jeunes gens du monde entier
qui revendiquent les libertés numériques,
et la fin de la surveillance et du contrôle,
comme nécessaires à leur bonheur,
à leur capacité à créer et à vivre.
La désintermédiation signifie un contact plus
direct avec plus de fournisseurs de services,
dans tous les secteurs.
C'est-à-dire: moins d'emplois hiérarchisés
et davantage d'indépendants.
Les jeunes du monde entier, qu'il
s'agisse de mes étudiants en droit,
d'informaticiens fraîchement diplômés,
ou d'artistes, de musiciens,
de photographes,
ont besoin de plus
de liberté en ligne,
et de plus d'outils pour créer
leurs propres plateformes de services.
C'était un défi hors de portée
de leurs ainés en 1955,
mais nous sommes une
nouvelle génération,
et les circonstances, et
les règles ont changé.
Ils savent que les règles ont changé.
Les Indignés et tous les
citoyens du monde le savent.
Ce sont leurs gouvernements
qui ne le savent pas encore.
Ce qui nous amène à la
question de la vie privée...
ou plutôt, de
l'autonomie personelle.
Comme j'essaie de l'enseigner
à mes étudiants,
l'expression vie privée peut revétir
trois significations bien distinctes :
1. Vie privée signifie
parfois secret :
C'est quand le contenu d'un message
est secret pour toute tierce personne.
2. Vie privée signifie
parfois anonymat :
C'est quand l'origine et/ou la destination
d'un message sont cachées.
3. Et enfin, le troisième
aspect est l'autonomie :
C'est la chance de vivre sans que
vos décisions soient influencées
par l'accès des autres
à vos communications privées.
Pourquoi les villes furent-elles toujours
des moteurs de croissance économique ?
Ce n'est pas parce que
les banquiers y vivent :
les banquiers y vivent car elles sont
des moteurs de croissance économique.
Et ce qui en fait des moteurs
de croissance depuis l'Antiquité,
c'est que les jeunes s'y rendent,
pour s'inventer de nouveaux
styles de vie,
se soustrayant à la surveillance du village
et au contrôle social de la ferme.
“Comment allez-vous les garder à la ferme,
une fois qu'ils auront vu Paris ?”
était une question pertinente, tant
alors en France qu'aux USA aujourd'hui.
La ville a toujours été
le lieu d'accès à l'anonymat
et à la capacité de tenter
une vie différente et autonome.
Or, nous en fermons
les portes aujourd'hui !
J'eus une discussion houleuse, en 1995,
sur la clé de chiffrement publique...
à deux contre deux :
D'un côté était Jamie Gorelick,
alors secrétaire d'état à la Justice,
et Stewart Baker,
toujours dans le privé
quand il ne mène pas ses politiques sociales
désastreuses pour le gouvernement...
En face, Danny Weitzner, aujourd'hui
à la Maison Blanche, et moi-même.
Nous avions débattu
tout l'après-midi
sur l'opportunité de confier
nos clés au gouvernement,
sur la fiabilité de Clipper,
et autres sujets complètement
obsolètes aujourd'hui.
Quand enfin nous quittâmes
Harvard pour aller dîner,
sur le chemin,
Jamie Gorelick me dit :
« Eben, rien qu'avec ce que tu
nous a raconté cet après-midi,
j'ai de quoi faire mettre
ton téléphone sur écoute ! »
En 1995, c'était une blague.
Une blague de mauvais goût de la part
d'un fonctionnaire de la Justice, certes,
mais une blague néanmoins.
Et nous avons bien ri, car chacun savait
qu'ils ne pouvaient pas le faire.
Après que nous ayons dîné,
quand la table fut débarassée, le
porto bu et les cacahuètes éparpillées,
Stewart Baker me regarda et dit :
« Ok, on va se détendre un peu...
On ne va pas poursuivre ton client,
M. Zimmerman.
On a réussi à lutter
contre le chiffrement
pendant des décennies, mais
on va devoir arrêter maintenant.
On va laisser la chose se faire. »
Et puis il regarda autour de lui,
et ajouta :
« Mais qui ici se soucie de
son anonymat, après tout ? »
Et je fus pris d'un frisson.
Et je pensai : « Ok, Stewart,
je vois où ça va...
Tu vas accepter le chiffrement
car les banquiers en ont besoin,
mais tu vas consacrer ta vie à priver
à jamais les gens de leur anonymat,
et je vais consacrer la
mienne à t'en empêcher. »
Jusqu'ici, mon ami Baker s'en est
mieux sorti que je ne l'espérais,
et mon bilan est pire
que je le craignais.
Et pas seulement à cause
du gangster à capuche...
L'éradication du droit
à la solitude est proche.
L'éradication du droit
à la pensée autonome,
à vivre chez vous comme
vous l'entendez, est proche.
Quelqu'un ici vient juste
de démontrer que,
sur un site d'achat donné, il voit des prix
différents selon le navigateur qu'il utilise.
Car l'un de ces navigateurs renvoie à
son historique de navigation.
Les prix, les offres, les produits,
les bonnes affaires qu'on vous propose
sont maintenant basés sur la fouille
complète de vos données.
Les USA viennent d'allonger la durée
légale de conservation des données
récoltées sur des gens pas plus
suspects que vous ou moi...
‒ Vous êtes au courant,
n'est-ce pas ?
Un mercredi pluvieux, bien après
la fermeture des bureaux,
Le Renseignement Intérieur et le
Ministère de la Justice ont annoncé
des modifications “mineures”
sur les lois Ashcroft,
dont un selon lequel toutes les
données personnelles identifiables
retenues au centre national
anti-terrorisme,
— et qui concernent des gens
pourtant suspectés de rien ! —
seront retenues, non plus
pour un maximum de 180 jours,
mais pour un maximum de 5 ans
— ce qui équivaut à une éternité !
En fait, le communiqué dit « 5 ans »
parce qu'ils n'arrivaient pas
à rendre un 8 italique dans la
police... alors ils ont arrondi !
Un haut fonctionnaire avec qui
j'en discutais un jour m'a dit :
« Oui, tu vois, on a réalisé qu'il nous
fallait un sociogramme complet du pays
pour pouvoir recouper les
informations à travers le temps... »
J'ai répondu: « Attendez, parlons un peu
des implications constitutionnelles...
Vous prétendez transformer une société
qu'on a toujours connue,
et qu'on se plait encore
à qualifier de libre,
en une société dans
laquelle le gouvernement
tient une liste des relations
entretenues par chaque citoyen.
Donc si vous voulez nous faire
aller d'une société libre
vers une société basée sur
le fichage de chaque citoyen...
Quelle serait la procédure
constitutionnelle pour ça ?
Est-ce qu'on devrait avoir,
par exemple, une loi ? »
Il a rigolé.
Car évidemment,
ils n'avaient pas besoin de loi.
Ils se sont contentés d'un
communiqué, publié la nuit.
Et on vit là-dedans maintenant.
Alors, la question de savoir quelle
innovation on peut encore espérer
sous un despotisme total
est intéressante.
Les américains de droite,
même les plus modérés,
on clamé tout au long
du 20e siècle
que le totalitarisme était nuisible
au marché et à l'innovation...
Nous allons bientôt voir
s'ils avaient raison !
Le réseau, sous sa forme actuelle,
est la plateforme idéale
pour un contrôle social
extraordinairement sophistiqué.
Assez rapidement,
et sans remords visible,
les deux plus grands gouvernements
du monde, ceux des USA et de la Chine,
ont adopté des
solutions similaires :
un sociogramme complet leur
permettant de surveiller tout le monde,
et une fouille numérique totale
et systématique de chaque citoyen,
sont les nouveaux fondements de
leurs politiques de maintien de l'ordre.
Leurs théories sur le maintien de l'ordre
et de la stabilité diffèrent peut-être encore,
mais leur technologie
en la matière est identique !
Et c'est à nous, qui comprenons ce
qui se passe, de l'exprimer haut et fort !
Pourtant, nos libertés fondamentales
sont loin d'être seules en jeu.
Parler d'elles seules devrait
suffire, mais ne suffira pas.
Il nous faut affirmer que le coût
à payer incluerait tout autant
la vitalité même et
l'éclat de notre culture,
ses inventions et son discours novateur:
ces débats solides, vifs, ouverts et osés,
comme ceux du New York Times
contre Sullivan, par exemple...
Et cette liberté de bricoler, d'inventer,
d'être différent ou non-conformiste
— ce pourquoi les gens ont toujours
été chercher l'anonymat des villes
comme une occasion de se découvrir et
de mettre à l'épreuve leur talent.
C'est, avant tout, de cette vigueur-là
que viendra la croissance au 21e siècle !
Bien sûr, nous avons aussi besoin
de l'anonymat pour d'autres raisons...
Appelons sans fausse modestie
notre cause :
« La Sauvegarde
de l'Intégrité de l'Ame Humaine ».
Mais ce n'est pas le
souci du gouvernement.
C'est précisément notre vision d'une
société civile dans toute sa splendeur
qui laisse le gouvernement indifférent.
Notre engagement politique
se fonde avant tout sur l'idée
qu'un individu se construit à son
propre rythme, et de sa propre manière.
Et si la sauvegarde de l'âme humaine
n'est que notre affaire,
le gouvernement doit quant à lui s'occuper
du bien-être matériel de ses citoyens,
et prendre soin, à long terme,
de la société qu'il administre.
Nous devons délors convaincre nos
gouvernements qu'il n'y a pas de conflit
entre des droits aussi fondamentaux que
ceux à l'indépendance et à la discrétion,
et une politique économique d'innovation
garantie, même sous l'austérité.
Elles nécessitent la même chose :
Nous avons besoin
de logiciel Libre,
de matériel libre
bricolable à souhait,
et d'un moyen de communication
universel et libre,
reliant tout le monde,
sans autorisations ni entraves.
Nous devons rendre l'éducation
accessible à la Terre entière,
sans considérations de
solvabilité financière !
Nous devons permettre
à chaque jeune d'accéder
à une vie intellectuelle
et économique autonome.
La technologie nécessaire,
nous l'avons.
J'ai consacré du temps, et beaucoup
d'entre vous en ont consacré davantage,
à développer des serveurs économiques
de la taille d'une boite d'allumettes,
qui, avec les bons logiciels,
peupleront le réseau de robots
protégeant notre vie privée
au lieu de ces robots qui la violent,
que nous trimballons tous en poche.
Il nous faut instaurer immédiatement
la Première Loi de la Robotique
ou nous sommes cuits.
Une telle innovation citoyenne
est à notre portée.
Contribuons à perpétrer l'ère de
l'ordinateur à tout faire,
bricolable à souhait et par chacun,
en en utilisant, en en distribuant,
en nous les rendant indispensables.
Utilisons notre force de consommateurs
et de passionnés pour déprécier
les réseaux fermés et
les appareils verrouillés ...!
Mais sans ligne politique claire,
nous resterons une minorité
— allez, disons 8.3% —
ce qui ne suffira pas
à nous sortir du bourbier dans lequel
les banquiers nous ont conduits.
L'Innovation sous l'austérité !
sera notre cri de guerre...
Il n'exprime pas tant notre souci
que celui de la majorité :
il sera notre porte d'entrée en politique
ces cinq prochaines années,
et notre dernière chance d'accomplir
au sein des gouvernements
ce que nous n'avons pas réussi à
faire au nom de nos simples libertés.
Celles-ci ont été piétinées, tant par nos
amis au pouvoir que par leurs adversaires !
Nous nous sommes faits
arnaquer sur nos droits,
et tout le monde s'est fait
piquer ses économies.
Aucun candidat aux prochaines
élections ne fera campagne
sur le rétablissement
des Droits de l'Homme !
Mais ils parleront tous
d'austérité et de croissance,
et nous devons mettre
notre message à leur portée.
La présente ébauche
est certes insuffisante,
mais c'est un point de départ.
Et sans point de départ,
nous perdrons.
Et la défaite sera longue,
et la nuit sera très noire.
Merci à vous.
C'est très aimable à vous.
Et maintenant, discutons-en.
Hum, on devrait commencer,
oui.
Pas encore… ha, c'est branché.
[Doc Shearls] J'aimerais commencer en disant, car j'espère parler pour beaucoup de monde ici,
que ce n'était pas juste un des meilleurs discours que j'ai jamais écouté,
c'est l'un des plus importants.
Et ce ne serait pas inutile qu'on en tienne compte,
on réagit dessus.
J'ai ressenti… en fait Elliot qui était assis à côté a dit avoir ressenti
que c'était un discours comme « I have a dream », et je pense que c'est ce que c'est.
Mais je pense qu'Eben a terminé avec le cauchemar.
Et si le discours ne vous a pas touché, vos carottes sont cuietes.
Et je pense que nos carottes sont cuites depuis un moment.
Je ne sais pas pour vous, mais on agît d'après les conditions en vigueur, quelles qu'elles soient.
Et elles se sont dégradées au fil du temps, et de certaines manières que je ne comprend pas complètement,
et nos vies sont très remples, donc on s'occupe de ce qu'on a à faire.
Donc, ce que je veux faire,
c'est de tester ce public avec la campagne « Libérons tout »,
qu'Eben a exposé pour nous, maintenant.
Donc, je ne vois pas le truc juste comme une séance de questions/réponses, mais plutôt avec chacun qui
contribue à la structure qu'Eben nous a détaillé, et à laquelle on a participé pendant longtemps.
J'aime la façon dont il nous a inclu dedans. C'est…
Il y a de la sélection naturelle ici.
C'est un groupe sélectionné.
David a fait un travail formidable en réunissant toutes ces bonnes personnes ensemble.
Le nom de cet évènement commence avec le mot liberté,
et je pense que cela doit être notre dernier mot aussi.
Donc, et je n'ai rien de plus à ajouter à ce fabuleux discours.
[Isaac Wilder] Eben, je voudrais te poser une question.
Est-ce qu'il y a une tension entre la liberté, et la commodité ?
Et je me demande comment tu vois cette tension évoluer ?
Je crois que tu nous a incité à nous concentrer sur l'innovation, mais je me demande si…
et je pense que c'est attrayant pour ce public, peut-être les décideurs politiques,
mais pour l'utilisateur de base, la commodité est importante.
[Eben Moglen] Oui c'est vrai, ce qui n'est pas la seule relation entre la technologie et la société,
mais aussi entre beaucoup d'autres choses également.
Le théoricien sur la constitution Bruce Ackerman a écrit une histoire en plusieurs volumes
de la Consitution américaine d'après l'hypothèse de base que la plupart du temps,
les gens ne veulent pas s'engager dans des grosses réflexions sur la politique et la société
Cela arrive seulement rarement, et les pères fondateurs de la république américaine, Bruce disait,
ont essayé dans la structure des fédéralistes de tirer profit de ces moments particuliers,
quand les gens ont envie de faire attention.
Mais là encore, et je me concentre dessus parce que la démographie est si importante,
le sentiment que la commodité est plus importante que les autres valeurs,
est toujours plus vrai pour les adultes que pour les enfants.
Je voyage tout autour du monde, je parle à des gouvernements de plein de choses
qui ont trait à la technologie et à la société du 21e siècle,
et j'entends des gens, des présidents aux ministres, aux comités de planification locale,
toutes sortes d'histoires sur les problèmes sociaux terribles auxquelles leur culture et les communautés
font face. Et je me retouve souvent à dire « Oui, ok, c'est un problème vraiment vraiment horrible,
c'est extraordinairement difficile, et on a besoin de beaucoup d'énergie pour le gérer.
Vous avez besoin de la force sociale la plus forte pour gérer ce problème,
la force sociale la plus forte qui existe, qui est diponible, partout, c'est la curiosité des enfants.
vous avez besoin de la capturer. »
Nous avons actuellement deux leçons. La chose que vous appelez une tension, n'est-ce pas ?
C'est une tension en effet.
Parce-que c'est vrai que les adultes dans leur vie trépidante se trouvent prêts à faire n'importe quoi
qui fonctionne, et si vous leur tendez une boîte avec un bouton dessus pour tout faire péter,
ils le pousseront, qu'il leur en coûte ou non, ou qu'il les connecte à une grosse
attaque de l'homme du milieu sur leur vies sociales ou pas,
ou que leurs amis leurs volent leurs weekends pour le passer à leurs employeurs,
ils font très peu attention.
C'est maintenant.
Mais vous donnez quelque chose à un enfant de huit ans, et ce n'est plus comme ça.
Il a plein de temps.
Vous donner quelque chose comme ça à un enfant de 12 ans, et il prêt à le démonter.
Il ne pense pas à la commodité, il pense à apprendre.
Il fait de la science.
Il bidouille.
Et j'ai vu dans plus d'endroits du monde que je peux penser à citer
la force de ces enfants, qui s'amusent avec des ordinateurs et qui font des choses oncroyables.
Vous le verriez partout où vous iriez.
Donc je pense que la tension est là.
Je crois que l'utilisabilité est un problème crucial quand on bâtit des outils pour la vie privée et la liberté.
FreedomBox, la pile de logiciels que l'on a besoin de faire pour tous ces petits objets dans le monde,
vous savez cela mieux que moi, c'est en partie sur la fonction, mais c'est surtout sur l'intégration et l'utilisabilité.
Nous avons fait tout le travail dur. Mon portable, votre portable, ils sont plutôt protégés.
Le problème, c''est comment faire ce travail pour les vrais gens avec des vraies vies trépidantes tous les jours.
Donc la tension est là, mais la réponse est là aussi.
Nous devons donner du pouvoir aux enfants.
Et une partie de ce qui ne va pas avec la technologie, c'est la mesure dans laquelle ils ne deviennent
pas des inventeurs, mais des consommateurs. Si ce processus se termine, nous sommes vraiment foutus.
[Doc Shearls] Ayons un échange avec les deux côtés ici. Toi d'abord.
[Michael Nelson] Michael Nelson de l'université Georgetown.
J'ai au moins 15 questions diférentes que j'aimerais poser,
en commençant par le chiffrement comme j'étais [Eben Moglen] Je me rappelle…
[Michael Nelson] le meilleur ami de Stuart Baker, de la Maison Blanche. [Eben Moglen] Oui, oui
Cela rend les choses très difficiles pour moi, Mike, je suis vraiment, ce n'est plus vrai. Ce n'est plus vrai, n'est-ce pas ?
[Rires]
[Michael Nelson] J'aimerais t'inciter à faire campagne pour le Congrès,
de préférence en déménageant à Palm Springs pour candidater contre Mary Bono Mack, [rires]
[Eben Moglen] Je ne pense pas qu'ils m'apprécieraient à Palm Springs,
Mais ce que j'espère que tu feras après ce discours,
qui je suis d'accord, ressemble à « I have a dream », c'est de se confronter à tes critiques.
Je veux dire, ce discours est super, la vidéo sur Youtube serait vue par des milliers de personnes,
en majorité par des amis et des supporters.
Je pense que tu as besoin de te confronter à tes critiques.
Je veux dire, quelque chose comme les papiers fédéralistes où on a deux gros enjeux
débattus par deux camps, et on a les points de vue… des deux camps.
Mais je voudrais poser une petite question spécifique.
Car je pense que la première partie de ton discours sur les ordinateurs à usage général
et l'informatique centrée sur l'utilisateur sont les endroits où on doit commencer.
Et je voudrais avoir ton accord, et l'accord de tous, sur pourquoi Nicolas Negreponte
dans la campagne « Un ordinateur par enfant » se basait sur les mêmes principes… donner du pouvoir
aux enfants, bâtir de l'open source, créer des choses depuis zéro, pourquoi cela n'est pas arrivé ?
Même si des dizaines de millions ont été déboursés et que beaucoup de personnes l'ont acheté.
Qu'est-ce que c'était… qu'est-ce qui a fait défaut là ? Et comment pouvons-nous éviter ce problème cette fois ?
Et bien, Nick est mon meilleur ami des fois aussi,
ce qui fait que c'est un peu plus dur de répondre à la question.
Le matériel est difficile, n'est-ce pas. Et le logiciel est facile.
C'est pourquoi la FreedomBox n'est pas une Box, c'est juste du logiciel,
car on peut le faire mieux, plus rapide, moins cher, et on n'a pas besoin de débourser pour chaque problème.
Deux choses sont arrivées en résultat de « Un ordinateur par enfant ».
L'industrie informatique dans le monde a réalisé qu'il y avait une chose meilleure
que construire des portables avec une grosse marge, et ils ont commencé à les faire.
Donc Nick a prouvé mon point de vue, de ce côté sans problème, pas d'échec là.
Il a fait une expérience avec très peu d'argent, ce que le capitalisme dans les plus grandes
multinationales n'allait pas faire, car ils sont trop allergiques au risque pour essayer.
Donc d'une manière, ça a marché. C'est juste que ça a marché en générant plus de produits pour les consommateurs.
Le second point, c'est que Nick a essayé de faire quelque chose vraiment vraiment important
avec le réseau de type Mesh, et c'était comme nous l'a dit un de nos autres amis prooche du projet :
« c'était une magnifique expérience ratée ».
Cela n'a pas fonctionné.
Ça a très bien marché en théorie, mais mal à Montevideo, et encore moins bien au Pérou,
et après un moment tout le monde est revenu à :
« Hé bien, ayons un serveur dans la classe et utilisons du wifi ».
Et c'est la partie de ce dont j'essayais de parler de cette manière très générale, n'est-ce pas ?
Nous avons besoin du Mesh. Nous avons besoin d'une façon
de faire des communications qui ne soit pas basée sur des architectures centrées.
Est-ce que le FCC va faire ça pour nous ? Non.
Vous voulez que je me confronte à mes critiques ? On eu ça pendant des décennies, n'est-ce pas ?
Donc maintenant nous sommes dans une situation où s'il y a un homme dans cette pièce, Duane Hendrix,
il y a un homme dans cette pièce qui pourrait nous aider à trouver ce qu'on va faire de cela.
Nous devons avoir du réseau qu'on peut fabriquer et qui marche vraiment.
Nick était un visionnaire, et il a essayé.
Et si ça avait été prêt maintenant, nous vivrions dans un monde différent maintenant.
Mais ce ne le fut pas.
Je pense que les erreurs techniques sont honorables et remarquables.
Je pense qu'il a mené une grande expérience innovante et réussi au-delà de ses rêves les plus fous,
mais les autres personnes tirent les marrons du feu et s'en vont avec, comme d'habitude,
et ce dont on avait vraiment vraiment besoin, les technologies de communication
qui privent de leur pouvoir les opérateurs de réseaux centralisés,
nous n'étions pas prêt pour ça.
Maintenant nous avons plus de réseaux fermés que de réseaux ouverts,
plus de personnes qui utilisent des formes fermées d'ersatz d'Internet,
qu'Internet lui-même,
et nous avons perdu gros dans l'opération.
Maintenant c'est plus dur de faire avec.
Je n'ai…
J'ai le sentiment comme pour d'autres choses dans la vie,
que j'ai été guidé par mon ami Larry Lessig,
me déclarer candidat pour le Congrès, ce n'est ce que je vais faire.
[Rires]
Est-ce que vous avez une autre suggestion pour la manière d'engager mes critiques Mike ?
J'aimerais en adopter une, mais ce n'est pas celle-là que je vais prendre.
[Michael Nelson] Mais les essais fédéralistes étaient une proposition sérieuse. [Eben Moglen] OK
[Michael Nelson] Cela veut dire quelque chose toutes les semaines, avec des critiques qui pointent vos défauts,
et vous pourriez pointer les leurs. [Eben Moglen] OK. Allons-y. Trouvons ceux qui veulent bien jouer le jeu.
[Doc Shearls] Il nous reste 27 minutes. Essayons d'être bref, ce n'est pas beaucoup de temps.
[Kery Nelson] Ma question serait