[Trevor Paglen : Pouvoir&Perspective]
[Editions Griffin,
Studio d’impression photo]
[Paglen] On peut les mettre ici.
[Homme] Ok.
[Paglen] Oui, cette image
est un peu dramatique.
On a appelé la NSA :
“On va voler en hélicoptère au dessus
du QG, prendre des photos.”
C’est parfaitement légal.
Ils ont dit :
“On ne veut pas.”
On a dit :
“On ne veut pas la permission.
On dit que l’on va le faire,
ne nous tirer pas dessus.”
La NSA a envoyé une bande de gars,
sept je crois,
en les postants à différents points
de l’aéroport pour voir les vols.
Et je pense qu’ils téléphonaient au siège,
en allumant et éteignant des feux.
La femme de l’hélicoptère avait cuit
quelques brownies,
et tournait autour du petit aéroport,
comme un jeu, trouver les gars
et leurs donner des brownies.
Si habituellement on ne voit
pas de photos de la NSA,
c’est parce que c’est entouré d’arbres.
[Siège de la NSA, image
du domaine public].
Il n’y a que quelques photos,
et celles que tout le monde utilisent.
[Homme] Je la prends.
[PAGLEN] Ok.
D’habitude je n’aime pas trop les
perspectives en œils d’oiseau ou Dieu.
Cette perspective implique
une sorte de maîtrise,
qui te permet peut-être de voir ceci,
que c’est transparent et compréhensible,
et c’est ce type de chose insignifiante
qui est au sol, en dessous de nous.
[Mike Vorrasi, Retoucheur senior]
[Paglen] Waou. [Rires]
[Vorrasi] C’est juste moi essayant de...
[Paglen] Qu’est-ce que tu as là ?
[Vorrasi] Le tunnel rouge était très clair
alors je l’ai un peu mélangé avec du bleu.
Et le bleu.
Le bleu était un peu trop profond,
alors je l’ai désempli
pour mettre plus de luminosité.
[Paglen] Après c’est ton profil ?
[Vorrasi] Oui.
[Paglen] C’est ton profil ou...
[Vorrasi] C’est mis avec ton profil.
[Paglen] On se croirait
au centre commercial.
Cela ressemble à un endroit normal.
Je me bats avec ça, car d’un côté,
il y a une étendue tentaculaire de la NSA
dans notre vie quotidienne,
dont la perspective est peut-être
Ce que j’aime dans la perspective
de ce cas précis
c’est qu’elle vous met dans la situation
où l’on regarde le bâtiment,
et dans une certaine mesure, imaginer
que ce sont des institutions civiques,
et vous, membres du public,
devriez être apte à exercer
le même type pouvoir sur l’institution
symboliquement, en regardant
cette photographie de cette perspective.
[Paglen] C’est bien, on aura moins de
variations sur celle-ci la prochaine fois,
et voyons, retournons sur cette image...
[ Vorrasi ] Ah, oui.
[Homme] Tu veux mettre ça ici ?
[Paglen] C’est aussi grand que ça
l’est pour moi.
Je n’en ai pas fait beaucoup
de cette taille.
J’enregistrai directement vers le soleil
avec une caméra 4x5.
L’idée vient d’une peinture de Turner,
“L’ange devant le soleil”.
Ces drones sont appelées faucheurs, donc
ça c’est “Le faucheur devant le soleil”.
[Paglen] C’est le genre de chose
que l’on recherche...
Un avantage d’user de film traditionnel
dans ce type de situation
c’est de faire des choses originales
comme surexposer la photographie,
ou viser le soleil,
et avoir encore de la marge,
et quelque chose avec lequel jouer.
Comme je me demande, du genre,
s’il y a un rond rouge par là,
où si ce sont mes yeux
qui font des choses.
Vous me comprenez ?
[Vorrasi] Oui.
[Paglen] Oui, c’est super bizarre !
On a fait pleins de choses avec
deux empreintes côte à côte
pour dire “Oh celle de droite,
elle est mieux, etc...”
et puis on les remet comme avant,
pour dire,
“Oh, celle sur la droite !”
[Rires]
[Vorrasi] Non, définitivement,
comme de mettre des magnets blancs
en opposition au noirs,
donc je suis pour baisser
quelques variables,
se concentrer sur ce qui change,
et comment les traiter.
[Paglen] Dans le ciel, il y a
traditionnellement une promesse,
d’ouverture ou liberté.
Mais le ciel c’est détourné contre nous.
Le drone n’est qu’un point de ponctuation.
[Vorrasi] Le drone parait bien.
[Paglen] Oui.