[N'oubliez pas la tyrannie de ce mur...]
[ni l'amour de la liberté qui l'a abattu]
[Graffiti inscrit sur le Mur]
Au petit matin du 31 août 1961,
des maçons de l'Allemagne de l'Est
flanqués de soldats et de la police
ont commencé à éventrer les rues
et à ériger des barrières dans tout Berlin
et ses alentours.
Cette nuit a marqué le début
d'une des lignes de séparation
les plus infâmes de l'histoire,
le Mur de Berlin.
La construction du mur
s'est poursuivie pendant dix ans.
Il passait à travers les quartiers
séparait des familles,
et divisait non seulement l'Allemagne,
mais aussi le monde.
Pour comprendre comment
on en est arrivé là,
il faut remonter à la deuxième
guerre mondiale.
L'Amérique, la Grande-Bretagne
et la France
ont uni leurs forces avec l'Union
soviétique contre l'Axe.
Après avoir vaincu les Nazis,
chaque nation victorieuse
a occupé une partie du pays.
La division devait être temporaire
mais les anciens alliés divergeaient
dans leurs visions
de l'Europe d'après-guerre.
Les puissances occidentales
prônaient une économie libérale
tandis que l'Union soviétique
cherchait à s'entourer
de nations communistes obéissantes
dont une Allemagne affaiblie.
Alors que leurs relations
se détérioraient,
la République Fédérale Allemande
s'est formée à l'Ouest,
alors que les Soviétiques établissaient
la République Démocratique
Allemande à l'Est.
Les pays soviétiques restreignirent
le commerce et les échanges avec l'Ouest,
et une frontière virtuellement
infranchissable se forma.
On l'appelait le Rideau de Fer.
Dans l'ancienne capitale allemande,
Berlin, les choses étaient compliquées.
Bien que la ville se trouvait complètement
sur le territoire de la RDA,
l'accord d'après-guerre donna aux alliés
une administration conjointe.
Ainsi, l'Amérique, la Grande-Bretagne,
et la France
créèrent une enclave démocratique
dans les quartiers Ouest de Berlin.
Tandis qu'on interdisait aux Allemands
de l'Est de quitter le pays,
à Berlin, il suffisait de marcher,
ou de prendre un métro, un tram ou un bus,
vers la moitié Ouest,
puis de se rendre
en Allemagne de l'Ouest ou plus loin.
Cette frontière ouverte posait
un problème aux dirigeants est-allemands.
Ils se posaient en représentants
de la résistance communiste à Hitler
et présentaient l'Allemagne de l'Ouest
comme une continuation du régime Nazi.
Tandis que les États-Unis et leurs alliés
finançaient la reconstruction
de l'Allemagne de l'Ouest,
l'Union soviétique
se servait des ressources de l'Est
comme réparation de guerre,
rendant son économie planifiée
encore moins compétitive.
La vie dans l'Allemagne de l'Est
se passait
sous l'œil vigilant de la Stasi,
la police sécrète dont les écoutes et les
informateurs contrôlaient les citoyens
à la recherche
du moindre soupçon de déloyauté.
Alors que la santé et l'éducation
étaient gratuites à l'Est,
l'Ouest se vantait de salaires plus hauts
de biens de consommation
plus nombreux,
et d'une liberté personnelle meilleure.
En 1961, environ 3,5 millions d'habitants,
presque 20% de la population de l'Est,
étaient partis, y compris
de nombreux jeunes professionnels.
Pour éviter d'autres départs,
l'Est a décidé de fermer la frontière,
et c'est là qu'arrive le Mur de Berlin.
S'étendant sur 43 kilomètres
à travers Berlin,
et sur encore 112 km
à travers l'Allemagne de l'Est,
la barrière initiale était constituée
de barbelés et de grillage.
Des Berlinois s'échappèrent
en sautant par dessus
ou en passant par des fenêtres,
mais quand le mur s'agrandit,
cela devint plus difficile.
En 1965, 106 kilomètres de barricades
de béton hautes de 3,6 m ont été ajoutées
surmontées par un tube lisse
pour empêcher les escalades.
Dans les années suivantes, la barrière
fut renforcée par des herses,
des chiens de garde,
et même des mines,
302 tours de guet et 20 bunkers.
Une clôture à l'arrière limitait une zone
de 100 m appelée bande de la mort
Là, tous les bâtiments furent démolis
et la terre couverte de la sable
pour fournir une ligne de mire claire
aux centaines de gardes
avec l'ordre de tirer sur quiconque
tentant de la traverser.
Cependant, presque 5 000 personnes
au total réussirent à fuir l'Est
entre 1961 et 1989.
Certains étaient diplomates ou sportifs
qui firent défection à l'étranger,
mais d'autres étaient des citoyens
normaux qui creusaient des tunnels,
traversaient des canaux à la nage,
s'envolaient en montgolfière,
ou même défonçaient des murs
avec des chars de combat volés.
Mais le risque était grand.
Plus de 138 personnes sont mortes
en essayant de fuir,
certaines au vu et au su de l'Ouest
incapable de les aider.
Le mur stabilisa l'économie de la RDA
en empêchant le départ de sa main d’œuvre
mais il ternit sa réputation,
en devenant un symbole mondial
de la répression communiste.
Dans le cadre de la réconciliation
avec l'Est,
le Traité fondamental de 1972
reconnaissait pragmatiquement
l'Allemagne de l'Est
alors que l'Ouest gardait l'espoir
d'une éventuelle réunification.
Bien que le régime de l'Est autorisa
peu à peu les visites familiales,
il essayait de décourager les gens
d'exercer ces droits
avec un processus bureaucratique difficile
et des frais élevés.
Néanmoins, il était toujours
submergé de demandes.
À la fin des années 1980,
la libéralisation d'autres
régimes du bloc de l'Est
provoqua des manifestations de masse
pour la liberté de circulation
et la démocratie.
Dans l'après-midi du 9 Novembre 1989,
l'Est tenta de désamorcer la tension
en facilitant l'obtention de permis.
Mais l'annonce amena
des milliers de Berlinois de l'Est
aux postes-frontières
obligeant les gardes surpris à ouvrir
les portes immédiatement.
Des foules joyeuses se déversèrent
dans Berlin Ouest
alors que des gens des deux cotés
dansaient au sommet du mur.
D'autres commencèrent à le démolir
avec tous les outils qu'ils trouvaient.
Bien que les gardes au début
tentèrent de maintenir l'ordre,
il fut vite évident
que c'était la fin des années de division.
Après quatre décennies, l'Allemagne fut
officiellement réunifiée en octobre 1990.
Puis, peu après, ce fut la chute
de l'Union Soviétique .
Aujourd'hui quelques pans de mur
subsistent comme un rappel
que toute barrière qu'on érige
pour entraver la liberté,
peut aussi bien être démolie.