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TedxCasablanca 2011 - Amina Slaoui - Épouser les frontières

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    Je voyage avec mon mari
    et on faisait des voyages tous les ans
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    des voyages lointains
    dans des contrées lointaines,
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    et en allant au Costa Rica,
    on s'est arrêté à Paris ,
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    et là encore, on était boulevard Raspail
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    et on traverse le boulevard,
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    et il y avait une énorme manifestation
    de l'association des paralysés de France.
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    Et c'était des milliers
    de personnes handicapées dans la rue.
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    Et je me rappelle, on traverse le boulevard,
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    on se trouve au milieu de toutes ces personnes
    en fauteuil, en cannes, en béquilles,
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    accompagnées, des mal voyants,
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    enfin il y avait vraiment... c'était impressionnant
    comme manifestation,
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    et là encore je dis à Brahim : « Ouah,
    tu te rends compte ? Ils sont tous handicapés,
  • 0:43 - 0:47
    Mais ça doit être affreux.
    C'est terrible de vivre comme ça. »
  • 0:47 - 0:50
    15 jours après, enfin quelques jours après,
    on se retrouve au Costa Rica.
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    Et on décide de louer des bicyclettes
    le matin pour aller faire une ballade.
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    On était à 8 heures
    de San José, la capitale.
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    On loue les bicyclettes
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    et je me rappelle que la femme
    n'avait pas voulu nous les louer.
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    Et on avait insisté, insisté.
    Et moi je faisais beaucoup de photos à l'époque,
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    j'avais mis mes appareils devant
    et j'étais un petit peu déséquilibrée.
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    Donc on prend la route, on va à la plage,
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    il faisait super beau
    et je traverse un premier petit pont.
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    Bon j'étais pas très à l'aise
    parce que ma bicyclette était un peu grande,
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    mais bon, je me dis,
    c'est pas grave ; j'avais un peu peur.
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    Je traverse le premier pont
    et arrive un deuxième pont
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    et là je sais pas ce qui se passe,
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    mon volant, enfin mon guidon, tourne
    et je me vois aller dans le précipice
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    et je me dis ça va être terrible.
  • 1:32 - 1:34
    Et effectivement, je suis tombée.
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    C'était pas très haut sauf qu'en bas,
    il y avait une énorme pierre
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    et que je l'ai reçue en plein dans le dos
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    et que j'ai été paralysée instantanément.
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    Et ça c'est une impression qu'on ne peut pas
    connaître avant de l'avoir vécue
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    parce que personne ne peut s'imaginer
    être paralysé un jour et privé de ses membres,
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    pas simplement de sa motricité
    mais aussi de sa sensibilité.
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    Et me voilà donc allongée sous un soleil brûlant
    le temps que Brahim mon mari arrive
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    parce qu'il m'avait vu tomber,
    mais lui il riait
  • 2:03 - 2:05
    en se disant, « elle sait même pas conduire
    une bicyclette, elle tombe. »
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    mais pour lui c'était vraiment,
    je me relevais et on repartait.
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    Et il arrive et je lui dis : « Je suis paralysée ».
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    Et là c'est étonnant parce que
    je savais que c'était grave,
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    et en même temps j'ai été prise
    d'un calme absolument incroyable.
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    J'étais d'un calme extraordinaire
    alors que lui, le pauvre, a dû gérer
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    tout le stress de trouver un camion
    qui m'a emmené d'abord
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    dans un petit village à côté,
    c'était à 4 heures de route.
  • 2:35 - 2:37
    Et je me rappelle c'était un pick-up.
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    J'avais fait tout le voyage comme ça
    parce que je n'arrivais plus à respirer,
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    j'avais un pneumo-thorax.
  • 2:40 - 2:44
    Et moi, dans ma tête il fallait que je tienne,
    il fallait que je tienne, il fallait que j'arrive à l'hôpital.
  • 2:44 - 2:47
    Pas un moment j'ai pensé
    que j'allais mourir.
  • 2:47 - 2:50
    Et ça c'est une première frontière
    que j'ai traversée
  • 2:50 - 2:52
    parce qu'on a tous
    très peur de la mort,
  • 2:52 - 2:58
    mais pas une minute pendant les 8 heures
    qu'on duré mon transfert
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    de ce bout de terre perdue au Costa Rica
    jusqu'à l'hôpital à San José,
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    dans des conditions absolument
    épiques de sauvetage
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    parce qu'il a fallu appeler un petit avion
    qui finalement n'a pas pu atterrir,
  • 3:10 - 3:12
    en rappeler un deuxième qui a dû atterrir
    dans un champ de bananes...
  • 3:12 - 3:14
    enfin je vous passe les détails,
    c'était vraiment ...
  • 3:14 - 3:17
    Je suis arrivée à l'hôpital,
    j'étais avec 5 de tension.
  • 3:17 - 3:19
    Et pas une minute,
    je me suis dit je vais mourir.
  • 3:19 - 3:22
    C'était : « Il faut que je tienne,
    il faut que je tienne, il faut que je tienne. »
  • 3:22 - 3:26
    (Applaudissements)
  • 3:26 - 3:31
    Je vous raconte tout ça parce que la première peur
    qu'on a c'est la peur de la mort,
  • 3:31 - 3:35
    et je vous rassure tout de suite,
    enfin peut-être que des gens l'ont déjà vécu ici,
  • 3:35 - 3:40
    mais finalement
    quand on est face à cette possibilité,
  • 3:40 - 3:44
    il y a ce calme intérieur qui vient et qui fait
    qu'on trouve des ressources absolument incroyables.
  • 3:45 - 3:46
    Absolument incroyables.
  • 3:46 - 3:49
    Donc s'en est suivi une période
    de ré-éducation assez longue.
  • 3:49 - 3:52
    D'abord aux Etats-Unis et ensuite en France.
  • 3:52 - 3:57
    Et là encore j'ai traversé d'autres frontières
    qui sont les frontières de la douleur,
  • 3:57 - 4:00
    parce que quand on est handicapé,
    ce n'est pas simplement le fait d'être sur un fauteuil,
  • 4:00 - 4:02
    c'est tout ce qu'on ne voit pas.
  • 4:02 - 4:05
    C'est toutes les douleurs neurologiques
    que moi, je me rappelle que j'avais les douleurs
  • 4:05 - 4:07
    un jour oui, un jour non.
  • 4:07 - 4:11
    Donc y avait des jours sans où
    je pouvais fonctionner plus ou moins bien.
  • 4:11 - 4:15
    Et il y avait des jours où le matin la douleur,
    elle commençait par les petits doigts de pied
  • 4:15 - 4:20
    et à la fin de la journée c'était tout le corps
    qui était perclus de souffrances.
  • 4:20 - 4:23
    Et à tel point que
    j'allais voir les médecins en disant :
  • 4:23 - 4:26
    « Mais écoutez , il faut me libérer de cette douleur
    parce que je vais devenir folle ! »
  • 4:26 - 4:28
    et eux me donnaient des antidépresseurs.
  • 4:28 - 4:30
    Bon, quand j'ai appris que c'était
    des antidépresseurs, j'ai jeté tout ça,
  • 4:30 - 4:32
    en me disant : « Écoutez, je vais faire avec,
  • 4:32 - 4:35
    et je vais domestiquer cette douleur
    pour pouvoir continuer à vivre,
  • 4:35 - 4:38
    parce que sinon, je ne veux pas
    qu'elle ait une emprise sur moi. »
  • 4:38 - 4:41
    Et c'est ce que j'ai fait.
    J'ai commencé à m'occuper,
  • 4:41 - 4:43
    donc à faire la rééducation etc.,
  • 4:43 - 4:47
    et c'est long parce que j'avais 32 ans,
    j'étais en pleine force de l'âge,
  • 4:47 - 4:54
    tout me souriait, super situation, mariée
    avec un homme que j'adore, deux enfants, ...
  • 4:54 - 5:00
    Enfin la totale ... Et puis d'un coup, on se retrouve
    à ne plus savoir très bien ce qu'on est.
  • 5:00 - 5:03
    Est-ce qu'on est encore une femme ?
    Est-ce qu'on est encore séduisante ?
  • 5:03 - 5:07
    Quelle va être la vie après ?
    Est-ce que le mari va pas se tirer ?
  • 5:07 - 5:09
    Enfin tout le genre de questions
    qu'on peut se poser
  • 5:09 - 5:11
    quand on se retrouve handicapée
    du jour au lendemain
  • 5:11 - 5:13
    en se disant :
    « Mais quel va être l'avenir ? »
  • 5:13 - 5:16
    Et là encore, très grand calme.
  • 5:16 - 5:18
    C'est absolument incroyable parce que
    les gens me demandent souvent :
  • 5:18 - 5:19
    « Mais comment tu as fait ? »
  • 5:19 - 5:22
    Je leur dis : « Mais c'est quelque chose
    qui est au-delà de moi-même ».
  • 5:22 - 5:26
    C'est une force, je pense qu'on a
    tous en nous des capacités
  • 5:26 - 5:28
    et des ressources
    absolument insoupçonnées
  • 5:28 - 5:34
    et qui font que face à des situations difficiles,
    on arrive à réagir
  • 5:34 - 5:36
    et à prendre les bonnes décisions.
  • 5:36 - 5:40
    Moi je me suis dit, puisque je suis là
    et que j'ai deux enfants quand même en bas âge,
  • 5:40 - 5:45
    je vais oublier ma famille, je vais
    me concentrer sur ce que je suis en train de faire,
  • 5:45 - 5:47
    et je me suis fait ma vie en France.
  • 5:47 - 5:52
    Donc je me suis fait ma vie dans les centres
    de rééducation avec mes amis, mes sorties,
  • 5:53 - 5:58
    les joies, les peines, les douleurs,
    les pleurs, les rires...
  • 5:58 - 6:01
    et ça a été 6 mois où, finalement,
  • 6:01 - 6:07
    comme j'étais vraiment dans l'instant,
    où j'essayais de regagner ma ...
  • 6:07 - 6:10
    j'essayais de recouvrir
    un peu de ma mobilité,
  • 6:10 - 6:12
    je me disais : « Je vais faire
    tout ce qui est en mon pouvoir
  • 6:12 - 6:15
    pour pouvoir remarcher
    et si je remarche c'est bien,
  • 6:15 - 6:18
    ben si je remarche pas,
    il faudra que je fasse avec. »
  • 6:18 - 6:21
    Et donc les six mois sont passés,
    et je rentre au Maroc .
  • 6:21 - 6:26
    Et là, ça m'a quand même pris
    un an pour faire le tour.
  • 6:26 - 6:28
    Le tour, quand je dis le tour,
    c'est parce qu'à un moment,
  • 6:28 - 6:29
    il faut faire un deuil quand même.
  • 6:29 - 6:32
    Parce qu'on se rend compte
    que la motricité ne revient pas,
  • 6:32 - 6:34
    la sensibilité ne revient pas non plus,
  • 6:34 - 6:39
    et il faut faire le deuil, il faut faire le deuil
    de ne pas pouvoir marcher,
  • 6:39 - 6:43
    il faut faire le deuil de pas pouvoir faire
    certaines choses qu'on faisait avant, etc.
  • 6:43 - 6:47
    Et ça m'a pris un an
    pour refaire les choses.
  • 6:47 - 6:48
    A chaque fois, c'était difficile
    la première fois.
  • 6:48 - 6:52
    La première fois d'aller au cinéma,
    la première fois d'aller au restaurant,
  • 6:52 - 6:53
    la première fois d'aller nager,
  • 6:53 - 6:56
    la première fois de rencontrer des gens
    qu'on avait toujours vu debout
  • 6:56 - 7:00
    et se retrouver au niveau
    de la ceinture des gens.
  • 7:00 - 7:05
    Et tout ça c'était vraiment me dire, « OK,
    toutes les premières fois vont être difficiles
  • 7:05 - 7:06
    et après ça va aller mieux. »
  • 7:06 - 7:08
    Et surtout, surtout,
    le regard des autres.
  • 7:08 - 7:12
    Et je me disais : « Moi, le regard des autres,
    je m'en fous.
  • 7:12 - 7:14
    Je veux pas qu'on me voit
    comme une personne handicapée
  • 7:14 - 7:17
    parce que finalement
    les gens vont me regarder,
  • 7:17 - 7:19
    mais je ne veux pas être portée
    par le regard des autres.
  • 7:19 - 7:23
    C'est moi qui va faire en sorte
    que mes faiblesses deviennent une force,
  • 7:23 - 7:26
    et c'est moi qui vais faire en sorte
    que les gens ne voient plus mon handicap.
  • 7:26 - 7:30
    Parce qu'il y avait une chose
    qui m'avait absolument marquée,
  • 7:30 - 7:32
    c'était le premier jour
    où j'étais arrivé à la gare,
  • 7:32 - 7:35
    j'étais avec une jeune fille
    dans la chambre qui avait 18 ans
  • 7:35 - 7:37
    et qui était paraplégique
    et qui me disait :
  • 7:37 - 7:38
    « Moi je supporte pas d'aller
    sur les Champs-Elysées,
  • 7:38 - 7:40
    avec mon copain en fauteuil,
    tout le monde nous regarde ».
  • 7:40 - 7:43
    Et moi, ça a fait un déclic
    dans ma tête et je me suis dit :
  • 7:43 - 7:46
    « Moi je serai jamais comme ça, je suis fière de moi,
    je suis fière de ce que je suis.
  • 7:46 - 7:51
    et ben si les autres sont dérangés par mon handicap,
    c'est leur problème, c'est pas le mien. »
  • 7:51 - 7:58
    (Applaudisssements)
  • 7:58 - 8:01
    Et ça, c'est des petites victoires,
    c'est victoire après victoire.
  • 8:01 - 8:04
    Et il faut dire aussi que j'ai été extrêmement
    soutenue non seulement par ma famille,
  • 8:04 - 8:08
    c'est-à-dire par mon mari, mes parents,
    mes beaux-parents, mes enfants, etc.,
  • 8:08 - 8:11
    mais il y a eu une vague de solidarité
    absolument exceptionnelle
  • 8:11 - 8:14
    qui a fait que pendant
    que j'étais en rééducation,
  • 8:14 - 8:17
    je recevais des faxs
    et tous les jours on se retrouvait en famille,
  • 8:17 - 8:21
    et on lisait tous ces fax
    et c'était des vagues d'énergie qui venaient,
  • 8:21 - 8:24
    qui faisaient que finalement
    les frontières n'existaient plus.
  • 8:24 - 8:27
    Je parle des frontières terrestres, mais je parle
    même des frontières intérieures.
  • 8:27 - 8:30
    Parce qu'il arrive un moment où y a ...
  • 8:30 - 8:33
    Quand le calme se fait et qu'on accepte
    la situation comme elle est,
  • 8:33 - 8:36
    parce qu'elle est ce qu'elle est,
    et que ça ne sert à rien de résister,
  • 8:36 - 8:43
    et résister c'est souffrir ; et bien ...
    quand on est ... j'ai perdu le fil de mes idées...
  • 8:44 - 8:51
    Ce que je voulais dire,
    c'est que un maître indien disait :
  • 8:51 - 8:55
    « La douleur est inévitable
    et la souffrance est facultative. »
  • 8:55 - 8:57
    Et je me disais ,
    finalement on a peur de quoi ?
  • 8:57 - 8:59
    On a peur de la douleur ? La douleur,
    elle est là et j'arrive à la surmonter.
  • 8:59 - 9:02
    On a peur de la paralysie ? La paralysie est là
    et j'arrive à la surmonter.
  • 9:02 - 9:07
    Et finalement on se rend compte que
    les frontières qui au départ étaient très étroites
  • 9:07 - 9:10
    finissent par s'éloigner, s'éloigner, s'éloigner, ...
  • 9:10 - 9:14
    Et l'important, c'est d'élargir ce qu'on appelle
    sa zone de confort.
  • 9:22 - 9:27
    Et ça, pour moi, ça a été une découverte
    absolument fondamentale.
  • 9:27 - 9:31
    Donc je rentre au Maroc, après 6 mois
    de rééducation en France.
  • 9:31 - 9:34
    Je retrouve ma famille, mes enfants,
  • 9:34 - 9:40
    et les choses ... rien n'arrive jamais par hasard,
    et quelqu'un me parle d'une association
  • 9:40 - 9:43
    qui venait de se créer, qui s'appelle
    l'Amicale Marocaine des Handicapés,
  • 9:43 - 9:46
    et me dit : « Écoute, faudrait peut-être
    que tu t'approches d'eux,
  • 9:46 - 9:48
    ils viennent d'organiser un téléthon. »
  • 9:48 - 9:51
    Sans télévision à l'époque, c'était en 93.
  • 9:51 - 9:54
    Et donc je suis allé les voir
    et je les ai trouvés super sympas.
  • 9:54 - 9:58
    On était 5 à l'époque, on était pas très nombreux
    et on a commencé
  • 9:58 - 10:05
    à essayer de travailler un peu pour changer
    la perception des gens sur le handicap.
  • 10:05 - 10:08
    Donc on a organisé des téléthons.
  • 10:08 - 10:10
    On a développé des services.
  • 10:10 - 10:14
    Je vais lancer en même temps le diaporama.
  • 10:19 - 10:23
    Donc on a développé des services
    pour les personnes handicapées,
  • 10:23 - 10:25
    puisque nous sommes
    une association de soutien,
  • 10:25 - 10:28
    on distribue des cannes, des béquilles,
    des fauteuils roulants,
  • 10:28 - 10:30
    ça c'est un grand point
    dans notre activité,
  • 10:30 - 10:35
    mais on aide aussi les personnes
    quand ils ont besoin d'une assistance juridique,
  • 10:35 - 10:39
    on les aide à accéder à l'emploi,
    on les aide pour la formation, pour l'éducation.
  • 10:39 - 10:42
    On fait beaucoup de sport aussi.
  • 10:42 - 10:47
    Et on est également une association
    de développement et de plaidoyer.
  • 10:47 - 10:50
    Parce que ce qui nous importe aujourd'hui,
    ce n'est pas simplement de changer
  • 10:50 - 10:54
    la perception que les gens ont sur le handicap,
    mais aussi de changer les lois.
  • 10:54 - 10:58
    On se rend compte que si on n'a pas
    des lois qui sont appliquées,
  • 10:58 - 11:01
    et bien on aura beau faire
    tous les efforts que l'on veut,
  • 11:01 - 11:02
    on ne pourra pas avancer.
  • 11:02 - 11:11
    Donc on a beaucoup concentré nos efforts sur
    le domaine du plaidoyer ces 10 dernières années,
  • 11:11 - 11:15
    en espérant que les choses vont avancer
    dans le sens que l'on veut.
  • 11:15 - 11:17
    Mais on s'est rendu compte aussi
    que le premier pas c'était d'abord
  • 11:17 - 11:21
    de permettre aux gens de se rééduquer.
  • 11:21 - 11:25
    Et c'est là qu'on a décidé, grâce au téléthon
    que nous avons organisé,
  • 11:25 - 11:28
    de construire le premier centre
    de rééducation au Maroc.
  • 11:28 - 11:31
    Et si vous permettez je vais vous envoyer
    une petite vidéo de deux minutes
  • 11:31 - 11:34
    qui va vous permettre de voir
    tout ce qu'on a fait avec ce centre.
  • 11:42 - 11:44
    (Vidéo en anglais)
  • 11:44 - 11:46
    Here are Youssef, Salma, Antja and Khadija.
    Voici Youssef, Salma, Antja et Khadija.
  • 11:46 - 11:49
    They are Moroccan, often from underpivileged
    backgrounds.
    Ils sont marocains, souvent de milieu défavorisé.
  • 11:49 - 11:51
    And they're disabled.
    Et ils sont handicapés.
  • 11:51 - 11:52
    A very entreprising woman
    Une femme très dynamique
  • 11:52 - 11:53
    put a smile back onto their faces.
    leur a rendu le sourire
  • 11:53 - 11:56
    And she's disabled as well.
    Elle aussi est handicapée.
  • 11:56 - 11:57
    It all began in 1992,
    Tout a commencé en 1992
  • 11:57 - 12:01
    when Amina Slaoui lost the use of her legs.
    quand Amina Slaoui a perdu l'usage de ses jambes
  • 12:01 - 12:02
    But instead of giving up,
    mais au lieu de se décourager,
  • 12:02 - 12:04
    she turned her disability into a positive force
    elle a fait de son handicap une force positive
  • 12:04 - 12:06
    and joined
    the Moroccan Association for the Disabled.
    et a rejoint l'Amicale des Marocains Handicapés.
  • 12:06 - 12:08
    AS : « Quand je me suis engagée,
    je me suis engagée corps et âme.
  • 12:08 - 12:11
    J'ai même pas réfléchi.
    Parce que c'était un besoin.
  • 12:11 - 12:18
    C'était vital pour moi.
    Je voulais pas rester enfermée dans mon handicap.
  • 12:18 - 12:20
    Je voulais pas être un poids
  • 12:20 - 12:22
    pour mon mari, mes enfants,
    ma famille, pour la société.
  • 12:22 - 12:28
    C'est quelque chose que je n'ai même pas réfléchi.
    On s'est retrouvé, on a fait clan
  • 12:28 - 12:32
    pour faire évoluer les choses
    et pour montrer qu'une personne handicapée,
  • 12:32 - 12:34
    ben c'est une personne comme les autres
  • 12:34 - 12:37
    qui vit avec ses problèmes, ses soucis,
    ses joies, ses bonheurs,
  • 12:37 - 12:39
    et qui ne demande qu'une chose,
    c'est d'être intégrée. »
  • 12:39 - 12:41
    Narrateur : To give the disabled a chance
    to live a normal life.
    Donner aux handicapés une chance
    d'avoir une vie normale
  • 12:41 - 12:45
    That's the aim of the association for
    the rehabilitation center here in Casablanca.
    C'est le but du centre de rééducation ici à Casablanca
  • 12:45 - 12:50
    AS : « C'est un hôpital.
    Donc vient au centre toute personne
  • 12:50 - 12:53
    qui est handicapée, que ce soit
    de manière temporaire ou permanente.
  • 12:53 - 12:55
    Ça peut être tout type de handicap,
    mais c'est les handicaps physiques.
  • 12:56 - 12:59
    La personne arrive ici
    avec un projet de vie.
  • 12:59 - 13:01
    Il faut qu'elle reconstruise sa vie.
  • 13:01 - 13:02
    Nous, on l'accompagne jusqu'au bout.
  • 13:02 - 13:05
    Jusqu'à la réintégration au domicile.
  • 13:05 - 13:09
    Et si possible après, à travers l'AMH,
    pour trouver un travail.
  • 13:09 - 13:12
    Narrateur : A friendly, modern comfortable center
    Un centre moderne et confortable
  • 13:12 - 13:15
    often in striking contrast with
    the patient's everyday life.
    qui contraste souvent avec
    la vie quotidienne des patients.
  • 13:15 - 13:18
    Amina was raised in a priviledged environment,
    Amina a grandi dans un milieu favorisé,
  • 13:18 - 13:20
    yet she's fully aware that especially in Morocco,
    mais elle a parfaitement consciente qu'au Maroc
  • 13:20 - 13:23
    a disability can mean hardship for the entire family.
    un handicap peut être une épreuve
    pour toute la famille.
  • 13:23 - 13:25
    AS : On a besoin de beaucoup de choses
    quand on est handicapé.
  • 13:25 - 13:27
    On a besoin de fauteuil.
    On a besoin de cannes.
  • 13:27 - 13:30
    On a besoin de rééducation.
    On a besoin d'aide technique,
  • 13:30 - 13:32
    genre, des orthèses ou des prothèses.
  • 13:32 - 13:35
    Et c'est un matériel malheureusement
    qui coûte très, très cher.
  • 13:35 - 13:37
    Narrateur : Amina and the Moroccan Association
    for the disabled
    Amina et l'Amicale des Marocains Handicapés
  • 13:37 - 13:39
    still have many hurdles to get over:
    ont encore beaucoup d'obstacles à surmonter :
  • 13:39 - 13:41
    accessibility to public places,
    l'accessibilité dans les lieux publics,
  • 13:41 - 13:43
    integration in schools and the workplace.
    l'intégration dans les écoles et
    les lieux de travail.
  • 13:43 - 13:44
    There's a lot to be done,
    Il y a beaucoup à faire,
  • 13:44 - 13:48
    but there's no shortage of enthusiasm
    mais ce n'est pas l'enthousiasme qui manque
  • 13:48 - 13:49
    in the association to get them done.
    dans l'association pour le réaliser.
  • 13:49 - 13:52
    AS : Je crois que notre force à nous,
    c'est de vivre le moment présent
  • 13:52 - 13:55
    parce que quand il vous arrive
    une claque comme ça,
  • 13:55 - 13:57
    je vous assure que tout change.
  • 13:57 - 13:59
    Cet accident et tout ce que
    ça m'a apporté par la suite,
  • 13:59 - 14:03
    ça m'a tellement développée intérieurement
  • 14:03 - 14:06
    et ça a tellement changé aussi mon entourage,
  • 14:06 - 14:12
    je trouve, dans le bon sens
    que je n'ai aucun regret.
  • 14:18 - 14:23
    (Applaudissements)
  • 14:23 - 14:25
    Alors on est très fier de ce centre.
  • 14:25 - 14:27
    C'est un centre qui reçoit à peu près
    200 personnes par jour en ambulatoire.
  • 14:27 - 14:32
    On a 80 lits, on emploie 180 personnes.
    C'est une entreprise, en fait.
  • 14:32 - 14:35
    Et on est en train d'ouvrir
    un deuxième centre à Casablanca.
  • 14:35 - 14:36
    Et ça c'est vraiment la base,
  • 14:36 - 14:39
    c'est-à-dire de rééduquer la personne
    pour pouvoir se réinsérer.
  • 14:39 - 14:42
    Sans rééducation,
    il n'y a pas de réinsertion possible.
  • 14:42 - 14:48
    Et ce que je voudrais dire aussi,
    c'est que le handicap, c'est pas ce qui nous définit.
  • 14:48 - 14:54
    Les personnes handicapées fascinent,
    les personnes handicapées dérangent.
  • 14:54 - 14:57
    Et je me suis souvent posé
    la question : pourquoi ?
  • 14:57 - 15:00
    Et je crois que quelque part,
    c'est parce qu'on renvoie à l'autre
  • 15:00 - 15:02
    ses peurs ou ses faiblesses ou ses failles.
  • 15:02 - 15:08
    On n'a pas envie de ressembler
    à un semblable qui est un peu hors-norme.
  • 15:08 - 15:14
    Je crois qu'il y a un désir inavoué de la part
    des personnes « valides »
  • 15:14 - 15:20
    de créer quelque part une frontière entre
    les gens normaux et les gens qui sont hors-normes.
  • 15:20 - 15:22
    Et c'est cette frontière-là que nous,
  • 15:22 - 15:25
    en tout cas au niveau
    de l'Amicale des Marocains Handicapés,
  • 15:25 - 15:27
    on essaie de faire tomber.
  • 15:27 - 15:28
    Parce que ce n'est pas
    parce qu'on est en fauteuil,
  • 15:28 - 15:32
    moi je me considère comme
    une personne valide en fauteuil.
  • 15:32 - 15:35
    Je ne marche pas,
    mais je suis aussi active, si ce n'est plus,
  • 15:35 - 15:37
    que la plupart des gens
    que je connais autour de moi.
  • 15:37 - 15:41
    Et c'est cette perception
    qu'il est important de faire tomber.
  • 15:41 - 15:46
    Et je crois que le rôle de modèle
    est un rôle important
  • 15:46 - 15:48
    et c'est pour ça que au niveau de ...
  • 15:48 - 15:51
    Moi je parle de moi, mais derrière moi,
    on est une équipe,
  • 15:51 - 15:52
    on est soudés, on est complémentaires,
  • 15:52 - 15:56
    on est la même équipe
    depuis une vingtaine d'années
  • 15:56 - 15:59
    et c'est vraiment notre œuvre,
    c'est vraiment de dire aux gens
  • 15:59 - 16:02
    « Écoutez, ça peut arriver à tout le monde,
    ça n'arrive pas qu'aux autres malheureusement.
  • 16:02 - 16:04
    Ça peut arriver à tout le monde.
  • 16:04 - 16:06
    D'ailleurs j'en suis la preuve vivante
    ici devant vous,
  • 16:06 - 16:08
    et faites en sorte de faire tomber ces barriêres,
  • 16:08 - 16:10
    faites en sorte de faire tomber ces frontières. »
  • 16:10 - 16:15
    Et par rapport ... Bon le handicap,
    c'est pas toute ma vie non plus,
  • 16:15 - 16:18
    Et ce que j'ai trouvé intéressant,
    c'est de partager,
  • 16:18 - 16:23
    c'est que nous avons créé une autre association
    qui s'appelle « l'art de vivre »
  • 16:23 - 16:25
    et qui est une association qui permet ...
  • 16:25 - 16:28
    où on donne des cours, des stages,
  • 16:28 - 16:30
    qu'on appelle communément
    des stages de respiration,
  • 16:30 - 16:33
    pour permettre aux gens
    de gérer leur stress.
  • 16:33 - 16:37
    Donc ce sont des techniques de yoga, en fait,
    qui sont très vieilles,
  • 16:37 - 16:40
    très très anciennes et qui ont été adaptées
    au monde moderne
  • 16:40 - 16:45
    et grâce à ces stages,
    nous avons pu rentrer dans les prisons
  • 16:45 - 16:49
    ça c'est une expérience qui m'a fortement marquée
    parce qu'on s'est retrouvé
  • 16:49 - 16:55
    dans le centre des jeunes délinquants
    à Casablanca à donner des stages de respiration
  • 16:55 - 16:59
    et à faire faire du yoga à des jeunes
    qui sont enfermés pour de nombreuses années
  • 16:59 - 17:03
    et à qui on a permis d'élever un peu
    ce niveau de conscience.
  • 17:03 - 17:05
    Bon là il me reste une minute,
  • 17:05 - 17:09
    donc je vais conclure en disant que
    ce qu'il faut privilégier, c'est justement
  • 17:09 - 17:13
    de faire grandir cet espace intérieur
    que nous avons tous en nous,
  • 17:13 - 17:19
    qu'il faut pas attendre d'avoir un évènement dur
    ou de souffir pour pouvoir le développer
  • 17:19 - 17:23
    parce qu'on a la capacité
    de le faire même quand on est bien,
  • 17:23 - 17:26
    donc je vous encourage vraiment à le faire.
  • 17:26 - 17:30
    Et je terminerai par deux citations :
    « Tout ce qui ne tue pas renforce ».
  • 17:30 - 17:33
    Ça, c'est une citation de Nietzsche.
  • 17:33 - 17:34
    Et la deuxième, c'est :
  • 17:34 - 17:37
    « Pour soulever des montagnes il faut commencer
    par enlever les petites pierres ».
  • 17:37 - 17:40
    Et je vous remercie de votre attention.
  • 17:40 - 17:43
    (Applaudissements)
Title:
TedxCasablanca 2011 - Amina Slaoui - Épouser les frontières
Description:


Amina Slaoui redonne leur dignité et le sourire aux personnes handicapées au Maroc. Elle-même paralysée dans un accident au Costa Rica elle a fait de ce combat un engagement fort qu'elle nous raconte dans un talk plein d'émotions.

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
17:50

French subtitles

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