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Étienne Chouard : la dette et la fin de l’État-providence

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    - Ouais, donc... le souci, c'est qu'ils arrivent à nous donner vraiment le minimum
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    qui... qui nous permet de bien vivre et qui... qui nous empêche de nous révolter au final.
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    - Là, en ce moment, ils sont...
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    ...là, en ce moment, ils sont en train de se tromper, hein.
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    Ils en prennent trop, ça met les gens en colère, quand même, hein.
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    Là, ils exagèrent... ça doit être une erreur de dosage là, hein.
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    Mais bon, c'est vrai qu'on... on, on n'est toujours pas...
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    ...enfin, c'est... ça a pas suffi encore pour qu'on descende dans la rue
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    et qu'on devienne... méchant, quoi... exigeant.
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    C'est fou ce qu'on accepte, hein.
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    Mais bon, on était vraiment riches, repus... gras, repus, hein.
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    Donc, ben, on perd beaucoup mais on n'en est pas encore à...
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    Mais ça viendra, hein.
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    Parce que là, le système est complètement en faillite.
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    Et, ils veulent pas lâcher une once de leurs privilèges et de leurs richesses donc...
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    Nous, on va beaucoup perdre, les gens normaux, là...
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    Si on se laisse plumer gravement jusqu'au point où on n'arrive plus à manger,
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    on pourra plus se battre, hein ;
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    faut se battre pendant qu'on est encore...
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    ... pendant qu'on peut vivre encore ;
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    quand on sera en survie... comment on va faire pour résister, hein ?
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    Quand tu es en survie, tu es faible hein.
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    Il y a un problème de conscience.
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    - La question que j'aurais voulu aborder avec toi, c'est la question de la dette.
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    - Oui.
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    - Je te laisse... dire... ce que tu veux sans poser de question, c'est...
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    ...le mot-clé, c'est la dette.
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    - Mmmmhhh... Tu peux me passer le bouquin de Perkins, là ?
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    - Bien sûr.
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    - Y a... Y a un bouquin
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    qui donne le mode opératoire de ce qui est en train de nous arriver
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    qui est le... bouquin de Perkins qui s'appelle « Confessions d'un assassin financier ».
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    C'est un Américain qui travaillait pour... les services secrets américains
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    et... dont le boulot... et qui balance, qui raconte et...
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    ...dont le boulot était d'endetter les pays du tiers-monde,
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    l'endettement étant...
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    ... la tenaille qui permettait d'amener les pays du tiers-monde...
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    ...à reddition. C'est-à-dire que...
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    Une fois que le pays est endetté, on peut lui demander tout. Tout.
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    De privatiser tous ses services publics, de...
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    ... de tout vendre aux multinationales américaines...
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    ... de vendre à vil prix toutes les ressources naturelles,
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    toutes les matières premières... l'or, les diamants,
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    toutes les matières premières des... d'Afrique, d'Asie, de... des pays qui...
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    Et alors, le principe de l'assassin financier, c'est de...
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    ... de se débrouiller pour endetter l’État,
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    l’État qu'on veut dominer.
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    Et donc de les démarcher, comme un démarcheur avec des...
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    ... des outils ultramodernes,
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    mais bon... surtout une puissance de feu de... de persuasion...
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    ...avec beaucoup d'argent...
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    ...si on... la corruption des... des élites financières des pays, des élites politiques
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    des pays est une composante importante de la prise de décision...
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    ... parce que les... les présidents des différents pays visés
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    savent bien que quand ils décident... la construction d'une voie ferrée hors de prix
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    ou la construction d'un barrage d'un prix exorbitant,
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    ou... d'une centrale électrique avec les routes... avoisinantes...
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    ... absolument hors de prix pour un pays tellement pauvre.
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    Ils savent bien qu'ils ruinent leur pays, qu'ils l'endettent et que c'est grave ;
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    et souvent, il faut les corrompre en les payant et en payant leur famille,
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    donc Perkins explique ça, il explique comment on arrive à...
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    Quelquefois, il y a même pas besoin de les corrompre, hein :
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    simplement de les convaincre que c'est l'intérêt général et que...
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    ... ce sera facile, qu'on va les aider.
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    Et il me semble que...
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    Alors, bon, il explique aussi que...
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    ... qu'il y a plusieurs étapes, que la première étape, c'est de corrompre
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    pour obtenir l'endettement mais qu'il y a des... des États qui résistent,
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    il y a des chefs d’État qui ont le souci de l'intérêt général vrai
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    et qui refusent cet... cet endettement et ces... ces grands travaux excessifs...
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    ... et que, derrière, il y a ce qu'ils appellent les...
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    ... les hyènes ou les chacals, je sais plus,
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    qui... dont la mission est de tuer le... le récalcitrant,
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    puis de... de mettre quelqu'un d'autre qu'on va à nouveau essayer de convaincre et...
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    ... et ça marche, enfin hein, ils... ils tuent effectivement ceux qui résistent.
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    Donc ils ont des accidents d'avion... des accidents de voiture...
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    ... ils meurent d'une maladie...
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    ... ils sont empoisonnés, quoi, hein.
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    Donc y a... y a ça, ça fait partie du mode opératoire,
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    mais y a des gens qu'on n'arrive pas à tuer,
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    ceux qui résistent et qu'on n'arrive pas à tuer, comme les Saddam Hussein,
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    ou... Kadhafi,
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    parce que c'est des militaires donc ils sont... un peu paranos,
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    ils savent très bien se défendre, ils font goûter leurs plats...
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    ... ils changent tout le temps d'endroit, ils savent très bien, ils sont durs à tuer.
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    Eh bien, ceux-là, on leur fait la guerre : c'est la troisième étape.
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    Donc c'est... c'est ce qu'explique Perkins de façon très...
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    ...c'est très cynique, comme système, c'est un... un plan de domination...
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    ... un projet de domination avec un plan... très classique et très...
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    ... avec un vrai mode opératoire, très intéressant.
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    Et très intéressant pour comprendre ce qui nous arrive, à nous,
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    nous, pays riches, qui étions à l'abri mais... pas tant que ça
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    parce que ça fait longtemps que le plan a commencé.
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    Là, aujourd'hui, on est dans une situation où... on va prendre l'exemple de la France
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    mais... beaucoup de pays qui sont dans ce cas-là, hein.
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    Nous sommes dans une situation où nous devons... des milliers de...
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    ...des milliers de milliards...
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    ... d'euros... donc... des sommes folles.
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    Et où nous n'avons plus le moyen, nous n'avons plus le pouvoir de battre monnaie :
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    donc ces milliers de milliards, nous sommes obligés d'aller les emprunter
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    auprès des marchés financiers... privés qui fixent leurs conditions,
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    qui fixent leurs taux d'intérêt, qui fixent leurs conditions.
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    Nous sommes dans un... piège politique,
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    où nos États, c'est-à-dire nous, notre puissance publique s'est fait mettre en cage,
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    une cage financière par la monnaie, par la capacité de financement ou pas
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    des décisions politiques que prendrait l’État,
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    nous sommes en situation de piège. Alors...
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    ... comment... comment est fait le piège ? Et d'où... d'où vient-il ?
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    Il a une origine : ça tombe pas du ciel, c'est pas une fatalité.
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    C'est pas le hasard de... de mauvais corromp... de mauvais comportements...
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    de gens qui auraient fauté, qui se seraient trompés.
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    Non. Je pense pas que c'est ça, c'est pas une erreur.
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    C'est pas une erreur. Alors...
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    (parce que c'est le même mode opératoire que... pour les pays du tiers-monde).
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    Alors en France, comment ça s'est passé ? Ça s'est fait en deux temps...
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    ... deux temps importants qu'il faut comprendre.
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    Alors... il faudrait expliquer comment est créée la monnaie... c'est un peu long et...
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    ... je vais pas faire ça. Je vous renvoie à... aux mécanismes de création monétaire
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    par le crédit : c'est quand on fait crédit qu'on crée la monnaie,
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    au moment où on prête, au moment où on fait crédit, au moment où la banque prête,
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    elle crée la monnaie et au moment où on lui rembourse, la monnaie est détruite.
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    Mais c'est pareil pour la banque centrale et l’État :
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    quand l’État emprunte auprès de sa banque centrale,
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    la banque centrale lui crée de la monnaie
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    et quand l’État rembourse avec les impôts,
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    avec les revenus des investissements que l’État a fait,
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    au moment où on rembourse la banque centrale, la monnaie est détruite :
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    c'est le même mécanisme, pour le privé et pour le public.
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    Si vous voulez comprendre, il faut voir d'autres... d'autres explications.
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    Prenons... prenons ça comme acquis.
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    A partir du moment où on a compris que la création monétaire
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    se fait à l'occasion du crédit et que... depuis des siècles,
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    l’État partage le pouvoir de création monétaire avec les banques.
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    Depuis longtemps, les États ont abandonné une partie de la création monétaire
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    aux banques privées : ah ça, c'est déjà une première félonie ;
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    première trahison de l'intérêt général. Mais encore,
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    pendant des siècles, l’État avait gardé une partie de la création monétaire.
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    Il pouvait, pour ses besoins propres,
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    emprunter auprès de sa banque centrale qui lui créait l'argent
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    et quand il remboursait, on détruisait l'argent
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    sans intérêts, sans charges d'intérêt.
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    Il pouvait y avoir un intérêt mais comme l'intérêt rentrait dans les caisses
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    de la banque centrale, la banque centrale étant nous, ça... ça ne coutait rien.
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    Donc ça... Il pouvait y avoir un intérêt apparent
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    mais qui était pas un intérêt réel, qui était pas une charge.
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    Donc pendant longtemps, les États avaient...
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    ... partagé la création monétaire avec les banques privées.
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    Et puis, récemment...
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    1913 aux États-Unis, 1973...
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    ... en France, les États ont abandonné, ont accepté...
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    mais c'est des traîtres qui ont fait ça,
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    c'est des... représentants qui ne nous représentent pas,
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    des représentants qui ont... qui ont failli par rapport à l'intérêt général,
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    ce sont des gens qui devront passer en procès, un jour ou l'autre,
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    s'ils meurent pas avant...
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    Des gens... malfaisants pour l'intérêt général, ont abandonné complètement
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    la création monétaire étatique.
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    C'est-à-dire qu'ils ont interdit à l’État d'emprunter à sa banque centrale,
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    donc la banque centrale peut plus créer la monnaie directement pour l’État.
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    Et donc quand l’État a besoin d'argent, il faut pas qu'il emprunte à la banque centrale
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    sans intérêts, donc gratuitement,
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    il faut qu'il aille emprunter auprès des marchés financiers,
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    qui, eux-mêmes, empruntent auprès de la banque centrale.
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    Et donc, la différence entre les deux,
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    c'est... l'intérêt,
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    qui est payé aux banques privées et à ceux qui ont de l'argent,
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    les marchés financiers, les riches.
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    Alors, ce qu'il faut comprendre, c'est que cette décision-là,
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    donc la première partie du plan,
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    je la représente comme... - et je trouve que c'est parlant -
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    je la représente comme une... une partie de la tenaille, une pince
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    des deux pinces, une pince :
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    ça se fait à une date et après, il faut l'autre.
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    Donc en 1973, l’État...
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    ... des représentants félons
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    ont abandonné la création monétaire.
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    C'est-à-dire que l’État ne peut plus créer la monnaie :
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    il faut qu'il emprunte auprès des marchés financiers
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    quand il a besoin d'argent, c'est-à-dire quand il n'a pas assez de ses impôts.
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    Quand il n'a pas assez de ses ressources,
  • 11:06 - 11:09
    quand il a besoin de dépenser plus que ce qu'il ne gagne,
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    il peut pas créer la monnaie : il faut qu'il emprunte auprès des marchés financiers.
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    C'est une... c'est une... pince... de la tenaille.
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    Mais ça suffit pas... à nous étrangler... à étrangler l’État.
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    Parce que si l’État... est vertueux sur le plan de l'équilibre budgétaire,
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    si... s'il dépense autant qu'il gagne en impôts, pas plus,
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    il a pas besoin d'argent !
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    Il reçoit de l'argent en impôts et puis avec ses différents revenus
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    - parce que l’État a d'autres revenus que les impôts -
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    et cet argent-là, il le dépense en services publics, en fonctionnaires,
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    en... investissements publics mais pas... pas plus.
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    Il fait attention : il ne déséquilibre pas les budgets.
  • 11:50 - 11:53
    L’État... Cet État-là qui n'est pas endetté,
  • 11:53 - 11:56
    il se fout pas mal de... d'avoir perdu la création monétaire.
  • 11:56 - 11:59
    Il s'en fout... c'est pas grave.
  • 11:59 - 12:01
    Je... je m'en fous, j'ai pas de... j'ai pas besoin d'argent.
  • 12:01 - 12:04
    j'ai déjà l'argent qui m'est nécessaire, j'ai pas besoin d'emprunter donc
  • 12:04 - 12:06
    le fait que j'ai pas la création monétaire,
  • 12:06 - 12:09
    c'est pas grave, ça ne m'asphyxie pas.
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    Ce qu'il faut comprendre, c'est que le piège de la dette,
  • 12:13 - 12:17
    c'est la... il faut les deux pinces ;
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    il faut la deuxième, qui est l'endettement de l’État.
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    Or, en 1973, l’État, il devait rien ou presque rien, il devait très peu d'argent.
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    Et... ce qui s'est passé en 1973, c'est que...
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    ... tout s'est passé comme si - je sais pas si c'est volontaire...
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    J'ai du mal à croire que ce soit involontaire, mais peut-être que c'est involontaire,
  • 12:39 - 12:43
    peut-être que les parlementaires se sont fait tromper, c'est possible.
  • 12:45 - 12:48
    J'ai du mal à le croire, mais bon, peut-être.
  • 12:48 - 12:52
    Les... les parlementaires font comme s'ils étaient en mission depuis 1973.
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    Leur mission, c'est... :
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    « Bon là maintenant, ça a assez duré, la...
  • 12:57 - 12:59
    l’État-providence, les Trente Glorieuses,
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    les salariés qui se goinfrent avec des gros salaires, là,
  • 13:02 - 13:06
    la prospérité, ça suffit, on va rétablir le chômage,
  • 13:06 - 13:08
    on va rétablir le chômage,
  • 13:08 - 13:10
    on va rétablir... - donc tout ça, ça vient de la docilité des salariés -
  • 13:10 - 13:12
    on va changer le rapport...
  • 13:12 - 13:17
    ... on va changer la... le ratio de distribution de la valeur ajoutée...
  • 13:17 - 13:21
    ... entre les... les propriétaires du capital et ceux qui travaillent, donc on va... on va...
  • 13:21 - 13:23
    ... on va se... on va rétablir un peu
  • 13:24 - 13:26
    de l'Ancien Régime, quoi, on va sortir des Trente Glorieuses,
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    mais surtout on va se débarrasser de l'État-providence,
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    on va se débarrasser de l’État qui prend aux riches pour distribuer aux pauvres. »
  • 13:32 - 13:35
    C'est ça, l’État-providence.
  • 13:35 - 13:36
    L’État-providence, c'est l’État...
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    ... qui fait payer les impôts forts aux riches,
  • 13:39 - 13:43
    plus forts, proportionnels, plus forts, l'idée de l'impôt sur le revenu,
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    plus forts aux riches pour pouvoir aider les pauvres.
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    Mais ça, les riches ont décidé que ça avait assez duré : 73.
  • 13:49 - 13:52
    Je pense... enfin, tout se passe comme si...
  • 13:52 - 13:57
    Dans cette période-là... c'est l'époque Reagan-Thatcher ou un peu avant, hein.
  • 13:59 - 14:01
    C'est Nixon, 73, je crois.
  • 14:02 - 14:05
    Mais bon, cette époque... l'époque qu'il y a juste avant la...
  • 14:05 - 14:07
    ... la contre-révolution néolibérale, là...
  • 14:07 - 14:11
    Ils ont décidé que l’État-providence, ça avait assez duré, partout dans le monde, hein...
  • 14:11 - 14:14
    ... et que... il allait falloir endetter l’État.
  • 14:14 - 14:16
    Alors c'est la deuxième pince.
  • 14:17 - 14:21
    Ça s'est pas fait en un jour. L'abandon de la création monétaire, ça s'est fait en une loi,
  • 14:21 - 14:25
    discutée à Noël, pendant que les... les parlementaires étaient pas là, hein,
  • 14:25 - 14:27
    ils fêtaient Noël, et puis votée en janvier,
  • 14:27 - 14:29
    tout début janvier,
  • 14:29 - 14:31
    et on arrive pas à mettre la main sur les débats, curieusement,
  • 14:31 - 14:34
    on arrive pas à savoir quels sont les arguments qui ont été invoqués.
  • 14:34 - 14:37
    Mais vous voyez, ça c'est une décision unique, facile
  • 14:37 - 14:40
    et confirmée par l'article 104 de Maastricht
  • 14:40 - 14:42
    et devenu 123 de Lisbonne, donc là,
  • 14:42 - 14:45
    c'est plus... ce qu'une loi avait fait, une loi pouvait le défaire,
  • 14:45 - 14:48
    mais maintenant que c'est monté au niveau... européen, international,
  • 14:48 - 14:51
    vous pouvez voter à gauche, à droite, c'est... ça changera plus rien.
  • 14:51 - 14:55
    L'article 104 de Maastricht, l'article 123 de Lisbonne...
  • 14:56 - 15:01
    ... c'est la pince qui vous... qui nous... condamne à subir le...
  • 15:01 - 15:03
    ... la férule des marchés financiers.
  • 15:03 - 15:07
    Et on peut plus y chan... on peut plus rien y toucher, on peut plus y toucher sans sortir
  • 15:07 - 15:09
    de... du... de l'Union européenne, hein.
  • 15:09 - 15:11
    C'est pour ça qu'il faut en sortir absolument.
  • 15:11 - 15:16
    Donc... ça, c'était juste une décision, une loi ou... un article de traité.
  • 15:16 - 15:21
    Mais ce qui se passe avec l'autre partie de la pince, c'est l'endettement de l’État...
  • 15:21 - 15:23
    Un peu comme les assassins financiers vont faire des dépenses,
  • 15:23 - 15:27
    mais pour nous, comme on est riches, il... faut créer une dette plus importante.
  • 15:27 - 15:32
    Et donc, depuis 73... depuis 73,
  • 15:32 - 15:37
    les députés votent des bud... un budget primaire, c'est-à-dire hors dettes,
  • 15:37 - 15:38
    à peu près équilibré,
  • 15:38 - 15:42
    et un budget avec dettes, en comptant la dette, de plus en plus déséquilibré.
  • 15:42 - 15:46
    Ils acceptent les... Ils sont pas obligés d'accepter.
  • 15:46 - 15:51
    Depuis 1973, les parlementaires acceptent de voter des budgets en déséquilibre
  • 15:51 - 15:54
    qui font un besoin d'argent. Et l’État a de plus en plus besoin d'argent,
  • 15:54 - 15:57
    besoin d'argent, besoin d'argent... Chaque année de plus en plus, de plus en plus,
  • 15:57 - 16:01
    jusqu'à aujourd'hui, on en est à... 1500 milliards ?
  • 16:01 - 16:05
    De dettes, non nécessaires !
  • 16:05 - 16:08
    C'est... chaque année, ça a été voté, voté, voté, voté...
  • 16:08 - 16:13
    Et aujourd'hui, avec ce monstre de dettes qu'on a, mais qui tombe pas du ciel :
  • 16:13 - 16:18
    qui est le résultat de décisions, par nos parlementaires, chaque année,
  • 16:18 - 16:23
    de voter des budgets en déséquilibre, de droite comme de gauche.
  • 16:23 - 16:28
    De « droite », entre guillemets, de « gauche », entre guillemets : en fait, ils sont tous de droite !
  • 16:28 - 16:31
    Ils sont tous au service des riches, même les prétendus socialistes
  • 16:31 - 16:34
    qui sont des gens d'extrême droite.
  • 16:34 - 16:38
    D'extrême droite, je veux dire... Mussolini rêvait pas mieux ! Hitler non plus !
  • 16:38 - 16:40
    C'est des gens qui... je veux dire, ils étaient au service des riches,
  • 16:40 - 16:42
    qui les avaient fait élire, quoi, hein.
  • 16:42 - 16:47
    C'est les riches qui voulaient Hitler, hein, les industriels, les banquiers voulaient Hitler.
  • 16:47 - 16:52
    Ils voulaient Mussolini, qui allait les débarrasser des syndicats...
  • 16:52 - 16:57
    Donc, c'est... et les gens... nos « représentants » entre guillemets,
  • 16:57 - 17:02
    en votant ces budgets en déséquilibre, en fabriquant la dette de toutes pièces,
  • 17:02 - 17:03
    il a fallu trente ans !
  • 17:03 - 17:06
    Trente ans... mais, regardez : on y est.
  • 17:06 - 17:08
    Donc il a fallu, pour faire la tenaille de la dette, il a fallu
  • 17:08 - 17:13
    une décision, une loi qui nous prive de la... de ce qui nous permettrait de sortir...
  • 17:13 - 17:16
    Parce que si on récupère la création monétaire, en disant :
  • 17:16 - 17:19
    « Vous créez la monnaie nécessaire pour rembourser la dette », il n'y a plus de dette.
  • 17:19 - 17:23
    Bon, vous ne le ferez pas en une année parce que 1500 milliards c'est trop, mais...
  • 17:23 - 17:25
    ... mais... On pourrait en répudier une partie, d'ailleurs, mais bon,
  • 17:25 - 17:27
    même si on remboursait tout le monde, hein...
  • 17:28 - 17:30
    Si vous récupérez la création monétaire, vous...
  • 17:30 - 17:32
    Progressivement, vous pouvez rembourser la dette.
  • 17:32 - 17:34
    Mais si vous ne l'avez pas, vous pouvez que réemprunter
  • 17:34 - 17:37
    ou bien vous liquidez l’État.
  • 17:37 - 17:40
    Vous liquidez l’État-providence, c'est-à-dire vous liquidez, vous liquidez...
  • 17:40 - 17:44
    ... toutes les dépenses sociales, c'est-à-dire toutes les dépenses pour les pauvres.
  • 17:49 - 17:53
    Par ailleurs... le, le... la deuxième pince, là, celle...
  • 17:53 - 17:55
    ... celle où les parlementaires ont...
  • 17:55 - 17:58
    ... ont voté des budgets en déséquilibre, déséquilibre, déséquilibre.
  • 17:58 - 18:01
    Il faut comprendre que ce n'est pas en augmentant les dépenses.
  • 18:01 - 18:04
    Depuis trente ans, les dépenses publiques n'ont pas augmenté.
  • 18:04 - 18:08
    Depuis quarante ans, elles ont augmenté : les dix années 70 à 80,
  • 18:08 - 18:10
    les dépenses publiques ont augmenté.
  • 18:10 - 18:14
    Mais depuis 80, donc depuis... les socialos,
  • 18:15 - 18:17
    la dette augmente mais pas les dépenses publiques.
  • 18:18 - 18:21
    Mais... Alors, comment ça se fait que... Comment ça se fait qu'on...
  • 18:21 - 18:24
    ... fasse des budgets en déséquilibre si les dépenses n'augmentent pas ?
  • 18:24 - 18:26
    Bah c'est les recettes qui baissent !
  • 18:26 - 18:29
    Ah ouais... les recettes qui baissent, les recettes, c'est les impôts.
  • 18:29 - 18:32
    Ah, tous les impôts ont baissé ? Ah non, pas tous ! Non, pas tous les impôts.
  • 18:32 - 18:35
    Les impôts des riches, des très riches : eux, ils baissent.
  • 18:35 - 18:38
    On appelle ça d'un mot gentil qui est : « niche fiscale ».
  • 18:39 - 18:43
    C'est des trahisons pures et simples, c'est des trahisons et du vol purs et simples.
  • 18:43 - 18:45
    Mais on appelle ça « niches fiscales »,
  • 18:45 - 18:47
    ça fait partie du langage dont on parlait tout à l'heure.
  • 18:47 - 18:50
    En appelant ça « niches fiscales », on fait que c'est... ou on dit « paradis fiscal »
  • 18:50 - 18:53
    alors que c'est « enfer fiscal », pour nous.
  • 18:53 - 18:55
    Les « paradis fiscaux », on devrait appeler ça les « enfers fiscaux ».
  • 18:55 - 18:59
    C'est les paradis pour les crapules, mais c'est l'enfer pour les travailleurs.
  • 18:59 - 19:02
    Et donc, en fait, la... le...
  • 19:02 - 19:07
    ... cette dette qui a été créée par un déséquilibre du budget depuis trente ans...
  • 19:07 - 19:09
    ... quarante ans...
  • 19:09 - 19:11
    Mais depuis trente ans, c'est en baissant les impôts des riches,
  • 19:11 - 19:13
    c'est pas en augmentant les dépenses des [pour les] pauvres.
  • 19:13 - 19:16
    Et là, aujourd'hui, on nous dit, tous les jours à la radio,
  • 19:16 - 19:19
    que c'est parce que l’État est trop dépensier.
  • 19:19 - 19:21
    C'est pas vrai !
  • 19:21 - 19:24
    L’État, il est pas plus dépensier : il dépense autant depuis trente ans.
  • 19:24 - 19:27
    En proportion du PIB, c'est... grosso modo, c'est pareil.
  • 19:27 - 19:30
    On dépense pareil depuis trente ans !
  • 19:30 - 19:33
    Le... l'endettement, il vient pas de l'augmentation des dépenses...
  • 19:33 - 19:35
    ... pour les pauvres,
  • 19:35 - 19:39
    il vient de la diminution des recettes en baissant l'impôt des riches.
  • 19:39 - 19:42
    Si on voulait rétablir les équilibres et faire diminuer la dette, il faudrait...
  • 19:42 - 19:47
    - enfin ça paraît plus juste, plus naturel, ça vient plus naturellement à l'esprit -
  • 19:47 - 19:49
    de rétablir l'impôt des riches,
  • 19:49 - 19:51
    puisque c'est la cause.
  • 19:52 - 19:55
    Eh bien c'est pas ça du tout qu'ils s'apprêtent à faire ; leur règle d'or, là,
  • 19:55 - 19:58
    ça va... ça va servir de... de prétexte
  • 19:59 - 20:01
    pour diminuer les dépenses des [pour les] pauvres !
  • 20:01 - 20:03
    Après avoir baissé les impôts des riches, on va...
  • 20:03 - 20:05
    ... on va diminuer les dépenses des [pour les] pauvres.
  • 20:05 - 20:09
    Là, on prend... on est vraiment à la merci des élus des riches !
  • 20:09 - 20:13
    Et tous hein !... Le PS comme l'UMP. C'est... c'est la même merdasse.
  • 20:13 - 20:16
    C'est les mêmes traîtres !
  • 20:16 - 20:17
    Et je parle de faits, là, hein !
  • 20:17 - 20:20
    Le, le... Qui nous a endettés au dernier degré ? C'est les socialistes, hein,
  • 20:20 - 20:22
    autant que l'UMP, c'est pareil, hein !
  • 20:22 - 20:26
    Ils sont ni socialistes ni populaires. L'UMP, c'est populaire, soi-disant...
  • 20:26 - 20:29
    Mon œil ! Socialistes ? Mon œil !
  • 20:29 - 20:32
    Ils sont ni populaires ni socialistes : c'est tous des fachos.
  • 20:32 - 20:34
    Enfin, des fachos au sens...
  • 20:34 - 20:37
    ... au service des riches, des riches qui s'approprient l’État.
  • 20:38 - 20:41
    Donc voilà ce que j'ai à dire sur la dette, c'est...
  • 20:41 - 20:44
    Là encore, on se sortira du piège de la dette
  • 20:44 - 20:48
    qu'en récupérant la création monétaire et le contrôle de nos élus,
  • 20:48 - 20:51
    ou de nos représentants, ou en dirigeant nous-mêmes, avec une vraie démocratie,
  • 20:51 - 20:52
    en fait.
  • 20:52 - 20:55
    Ce dont on a besoin, c'est la démocratie.
  • 20:55 - 20:56
    Et...
  • 20:57 - 21:00
    C'est de décider nous-mêmes de nos affaires.
  • 21:00 - 21:03
    C'est humiliant d'accepter d'avoir un représentant !
  • 21:04 - 21:07
    C'est dégradant d'être ravalé au rang d'électeur.
  • 21:07 - 21:11
    C'est bien plus beau d'être citoyen, citoyen actif.
  • 21:12 - 21:14
    Électeur, c'est une insulte !
  • 21:15 - 21:17
    C'est une insulte.
  • 21:17 - 21:21
    Je suis juste bon à désigner mes maîtres ?
  • 21:22 - 21:28
    Je... je... Le concept d'élu me gêne, élu de Dieu, élu du peuple...
  • 21:28 - 21:30
    Ça craint !
  • 21:30 - 21:34
    Ça craint, voilà. Le concept d'élection, d'élus...
  • 21:34 - 21:38
    Je comprends qu'au Moyen Âge, pour sortir de la tyrannie, de l'Ancien Régime,
  • 21:38 - 21:44
    on... on ait cru que... ils y ont cru de bonne foi que en...
  • 21:44 - 21:47
    ... en choisissant nous-mêmes ceux qui allons [vont]...
  • 21:47 - 21:50
    ...voter nos impôts, ceux qui allions [allaient] décider de nos impôts,
  • 21:50 - 21:53
    en les choisissant, nous allions les... les maîtriser.
  • 21:53 - 21:57
    Bon, ben on pouvait y croire il y a 200 ans, il y a 300 ans mais...
  • 21:57 - 22:01
    ... après 200 ans d'échecs, ça va, on a compris que ça marche pas, quoi.
  • 22:01 - 22:06
    Ça marche pas. Les élus, ça met... c'est... les marionnettes des riches.
  • 22:07 - 22:10
    Donc il nous faut la vraie démocratie ! Il nous faut la démocratie.
  • 22:10 - 22:13
    Et qu'on arrête d'appeler « démocratie » le système... de l'élection !
  • 22:13 - 22:17
    Parce que l'élection, c'est pas la démocratie, c'est l'aristocratie... on choisit.
Title:
Étienne Chouard : la dette et la fin de l’État-providence
Description:

Pour voir l'intégralité de l'entretien : http://www.sylvaindurain.fr/chouard/

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Video Language:
French
L14B added a translation

French subtitles

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