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Mon ami Richard Feynman | Leonard Susskind | TEDxCaltech

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    Je ne distingue pas le public
    et je n'aime pas ça.
  • 0:11 - 0:13
    Combien parmi vous sont
    arrière-grands-parents ?
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    Sapristi, je ne vois rien.
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    Vous devez vous demander
    pourquoi je suis assis.
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    La réponse est
    que je suis arrière-grand-père.
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    Pas un grand-père arriéré, non,
    un arrière-grand-père.
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    (Rires)
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    Et tout le monde le sait,
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    les arrière-grands-pères font
    exactement ce dont ils ont envie.
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    Cela inclut de suivre le conseil
    de mon propre grand-père
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    qui était de bien manger avant de donner
    une conférence devant mille personnes
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    au sujet de Richard Feynman.
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    (Rires)
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    (Applaudissements)
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    Ceci est une opération rondement
    et finement menée
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    et je ne suis ni l'un ni l'autre.
  • 0:53 - 0:54
    Je n'utilise pas ces machins.
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    Quand on m'a invité, j'ai décidé
  • 0:56 - 1:00
    que je voulais vraiment parler
    de mon ami, Richard Feynman.
  • 1:00 - 1:04
    Je suis une des rares personnes qui
    a eu le privilège de bien le connaître
  • 1:04 - 1:05
    et d'apprécier sa présence.
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    Je vais donc vous esquisser
    le Richard Feynman que j'ai connu.
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    D'autres personnes pourraient
    certainement vous esquisser
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    le Feynman qu'ils ont connu
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    et ce serait un Feynman
    très différent du mien.
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    Richard Feynman était un homme
    très complexe.
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    C'était un homme avec plein de facettes.
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    Il fut d'abord et avant tout
    un très très grand scientifique.
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    C'était un acteur
    et on le regardait jouer.
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    J'ai eu la chance d'assister
    à ses conférences,
  • 1:32 - 1:33
    au balcon.
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    C'était fabuleux.
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    C'était un philosophe.
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    Il jouait de la batterie.
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    C'était un professeur dans l'âme.
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    Richard Feynman fut aussi
    un homme de spectacle.
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    Un acteur énorme.
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    Il était impertinent et irrévérencieux.
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    C'était un macho sans complexe,
    le macho de la mort qui tue.
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    Il adorait les batailles intellectuelles.
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    Son égo était gargantuesque.
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    Mais il avait aussi
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    de la place dans le fond de son cœur.
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    Ce que je veux dire par
    de la place dans son cœur, dans mon cas,
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    je ne prétends pas parler au nom d'autrui,
    dans mon cas donc,
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    il avait aussi de la place
    pour un autre gros égo.
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    Pas aussi énorme que le sien,
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    mais passablement énorme.
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    Je me sentais toujours bien
    avec Dick Feynman.
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    On s'amusait toujours quand il était là.
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    Il me faisait me sentir intelligent.
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    Comment quelqu'un comme lui
    arrive à faire ça ?
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    Lui savait comment.
  • 2:36 - 2:39
    Et il savait me faire sentir
    qu'il était intelligent.
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    Il me faisait sentir
    que nous étions intelligents
  • 2:41 - 2:44
    et qu'ensemble, nous pourrions
    résoudre n'importe quel problème.
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    Et en fait, nous avons parfois
    fait de la physique ensemble.
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    Nous n'avons jamais publié ensemble
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    mais on s'est super bien amusés.
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    Il adorait gagner,
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    gagner ces petits jeux machos auxquels
    ils nous arrivaient de nous adonner.
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    Il jouait à ça avec moi
    et avec tout le monde.
  • 3:02 - 3:04
    Il gagnait pratiquement toujours.
  • 3:04 - 3:07
    Mais s'il ne gagnait pas,
    quand il perdait,
  • 3:07 - 3:09
    il riait et semblait s'amuser autant
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    que s'il avait gagné.
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    Je me souviens qu'il m'a raconté
  • 3:13 - 3:16
    une plaisanterie
    que ses étudiants lui ont jouée.
  • 3:17 - 3:20
    C'était, si ma mémoire est bonne,
    pour son anniversaire.
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    Ils l'ont invité à déjeuner
  • 3:22 - 3:25
    dans une sandwicherie de Pasadena.
  • 3:25 - 3:26
    J'ignore si elle existe encore.
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    Ils faisaient des sandwichs people.
  • 3:29 - 3:32
    On pouvait commander un Marilyn Monroe
  • 3:32 - 3:34
    ou un sandwich Humphrey Bogart.
  • 3:35 - 3:37
    Les étudiants sont arrivés en avance
  • 3:37 - 3:40
    et fait en sorte de pouvoir
    commander des sandwiches Feynman.
  • 3:40 - 3:43
    C'est ce qu'ils ont fait,
    l'un après l'autre.
  • 3:43 - 3:45
    Feynman adorait cette histoire.
  • 3:45 - 3:48
    Il me l'a racontée en riant
    et il était super heureux.
  • 3:49 - 3:51
    Quand il eut terminé son histoire,
    je lui ai demandé :
  • 3:51 - 3:54
    « Dick, je me demande
    quelle est la différence
  • 3:54 - 3:57
    en un sandwich Feynman et un Susskind. »
  • 3:58 - 4:00
    Du tac au tac,
  • 4:00 - 4:03
    il m'a répondu : « Eh bien, ils seraient
    presque identiques.
  • 4:03 - 4:06
    La seule différence est que le Susskind
    serait un sandwich de tanche. »
  • 4:06 - 4:08
    Une tanche est un acteur médiocre.
  • 4:08 - 4:09
    (Rires)
  • 4:09 - 4:13
    Ce jour-là, j'étais en forme
  • 4:13 - 4:16
    et j'ai répondu :
    « Certes, mais avec moins de baratin. »
  • 4:16 - 4:18
    (Rires)
  • 4:18 - 4:19
    (Applaudissements)
  • 4:19 - 4:22
    La vérité est que
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    le sandwich Feynman est rempli de tanche
  • 4:26 - 4:29
    mais d'aucun baratin.
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    S'il y avait bien une chose
    que Feynman détestait,
  • 4:33 - 4:35
    c'était l'imposture intellectuelle,
  • 4:35 - 4:36
    le charlatanisme,
  • 4:36 - 4:39
    la sophistication simulée, le jargon.
  • 4:40 - 4:44
    Je me souviens dans les années 80,
  • 4:44 - 4:48
    Dick, Sidney Coleman et moi, nous nous
    sommes rencontrés à quelques occasions
  • 4:48 - 4:52
    à San Francisco, dans la résidence
    d'un type ultra riche.
  • 4:52 - 4:54
    À San Francisco pour le dîner, donc.
  • 4:54 - 4:56
    À la dernière occasion
    qu'il nous a invités,
  • 4:56 - 4:58
    il avait aussi invité
    quelques philosophes.
  • 4:58 - 5:01
    C'était des philosophes de l'esprit.
  • 5:01 - 5:04
    Ils étaient spécialisés
    dans la philosophie de la conscience.
  • 5:04 - 5:07
    Ils se gaussaient dans leurs jargons.
  • 5:07 - 5:09
    J'essaie de me souvenir de leur vocable...
  • 5:09 - 5:13
    « monisme », « dualisme »
    et des catégories ceci ou cela partout.
  • 5:13 - 5:17
    J'ignorais de quoi il s'agissait,
    Dick et Sydney aussi, d'ailleurs.
  • 5:17 - 5:20
    Même Sydney,
    pourtant mieux cultivé que nous.
  • 5:22 - 5:23
    Alors, de quoi avons-nous parlé ?
  • 5:23 - 5:26
    De quoi parler si on parle d'esprit ?
  • 5:26 - 5:29
    Du sujet évident :
  • 5:29 - 5:31
    une machine peut-elle devenir un esprit ?
  • 5:31 - 5:33
    Pourrait-on concevoir une machine
  • 5:33 - 5:36
    qui pense comme un être humain,
    qui est consciente ?
  • 5:36 - 5:40
    On a passé la soirée à parler de ça
    sans jamais résoudre la question.
  • 5:40 - 5:41
    Le problème de ces philosophes
  • 5:42 - 5:43
    est qu'ils faisaient de la philo
  • 5:44 - 5:46
    au lieu de faire de la science.
  • 5:46 - 5:49
    C'est une question
    scientifique après tout.
  • 5:49 - 5:52
    Et agir ainsi était très très dangereux
  • 5:52 - 5:53
    quand Dick Feynman était présent.
  • 5:53 - 5:55
    (Rires)
  • 5:56 - 5:59
    Feynman les a trucidés avec délectation.
  • 5:59 - 6:02
    Ce fut brutal mais drôle,
    oh, qu'est-ce que ce fut amusant.
  • 6:02 - 6:04
    Mais très brutal.
  • 6:04 - 6:06
    Il les a scalpés.
  • 6:07 - 6:10
    La chose étonnante,
    Feynman a dû partir un peu plus tôt
  • 6:10 - 6:13
    car il ne se sentait pas bien
    et donc il est parti plus tôt.
  • 6:13 - 6:16
    Et Sydney et moi sommes restés,
    avec les deux philosophes.
  • 6:16 - 6:19
    Mais la chose extraordinaire,
    c'est qu'ils étaient au nirvana.
  • 6:19 - 6:21
    Ils étaient fous de joie.
  • 6:21 - 6:24
    Ils avaient rencontré le grand homme.
  • 6:24 - 6:26
    Le grand homme leur avait donné une leçon.
  • 6:26 - 6:28
    Ils avaient pris un de ces pieds
  • 6:28 - 6:30
    alors qu'ils se faisaient écrabouiller.
  • 6:31 - 6:34
    Ce fut un moment particulier.
  • 6:34 - 6:37
    J'ai compris qu'il y a une chose
    extraordinaire chez lui,
  • 6:37 - 6:41
    même quand il agissait ainsi.
  • 6:44 - 6:47
    Certes, il n'aimait pas
    le charlatanisme intellectuel,
  • 6:50 - 6:52
    Dick, c'était mon ami,
    je l'appelais vraiment Dick,
  • 6:53 - 6:55
    Dick et moi avions une relation spéciale.
  • 6:55 - 6:58
    Je pense que notre relation
    était vraiment spéciale.
  • 6:58 - 7:01
    Nous nous adorions et nous apprécions
    le même genre de choses.
  • 7:01 - 7:04
    J'aime aussi beaucoup
    les jeux intellectuels de macho.
  • 7:05 - 7:07
    Parfois je gagnais et lui gagnait souvent.
  • 7:07 - 7:08
    Mais on aimait ça.
  • 7:08 - 7:11
    À un moment donné, Dick fut convaincu
  • 7:11 - 7:15
    que nous avions
    une personnalité similaire.
  • 7:16 - 7:17
    Je ne pense pas qu'il avait raison.
  • 7:17 - 7:19
    Je pense que notre seule similitude
  • 7:19 - 7:22
    est que nous aimions tous deux
    parler de nous-même.
  • 7:22 - 7:24
    Mais il était convaincu de ça.
  • 7:24 - 7:27
    Or c'était un homme terriblement curieux.
  • 7:28 - 7:31
    Et il voulait comprendre
    ce qu'il y avait et pourquoi
  • 7:31 - 7:34
    il y avait ce lien étonnant entre nous.
  • 7:35 - 7:36
    Un jour que nous marchions,
  • 7:36 - 7:38
    nous étions en France, aux Houches.
  • 7:38 - 7:42
    On est en 1976, dans la montagne,
    assez haut.
  • 7:42 - 7:46
    Et Feynman me dit : « Leonardo... »
  • 7:46 - 7:49
    Il m'appelait Leonardo
    car nous étions en Europe
  • 7:49 - 7:51
    et il pratiquait son français.
  • 7:51 - 7:53
    (Rires)
  • 7:53 - 7:56
    Donc, il m'a dit : « Leonardo,
  • 7:56 - 8:00
    étais-tu plus proche de ta mère
    ou de ton père quand tu étais enfant ? »
  • 8:00 - 8:03
    J'ai répondu que mon père était mon héros.
  • 8:04 - 8:07
    C'était un ouvrier.
  • 8:07 - 8:08
    Il avait fait l'école primaire.
  • 8:09 - 8:12
    C'était un génie en mécanique
    et il m'avait appris à bricoler.
  • 8:12 - 8:16
    Il m'avait appris un tas de choses
    sur la mécanique.
  • 8:16 - 8:18
    Il m'avait appris
    le théorème de Pythagore.
  • 8:18 - 8:20
    Il n'appelait pas ça l'hypoténuse
  • 8:20 - 8:22
    mais le raccourci.
  • 8:22 - 8:25
    Les yeux de Feynman se sont illuminés.
  • 8:25 - 8:27
    Il a réagi au quart de tour
  • 8:27 - 8:29
    en disant que lui aussi avait eu
  • 8:30 - 8:33
    la même relation avec son père
    que moi avec le mien.
  • 8:33 - 8:37
    Il avait même été convaincu à une époque
  • 8:37 - 8:41
    qu'une des conditions
    pour être un bon physicien
  • 8:41 - 8:44
    était d'avoir eu ce genre de relation
  • 8:44 - 8:45
    avec son père.
  • 8:45 - 8:48
    Je suis désolé du caractère sexiste
    de cette affirmation
  • 8:48 - 8:50
    mais c'est ainsi
    que l'histoire s'est écrite.
  • 8:50 - 8:54
    Il affirmait qu'il était absolument
    convaincu de cette nécessité,
  • 8:54 - 8:57
    une nécessité qui contribuait
    à la croissance d'un jeune scientifique.
  • 8:58 - 9:01
    Mais Dick étant Dick,
    il a voulu confirmer cela.
  • 9:01 - 9:03
    Il a donc décidé de faire une expérience.
  • 9:04 - 9:05
    (Rires)
  • 9:05 - 9:06
    Et c'est ce qu'il a fait.
  • 9:06 - 9:08
    Il a sorti cette bonne vieille
    méthode empirique
  • 9:08 - 9:11
    auprès de ses amis qu'il considérait
    comme bons scientifiques :
  • 9:11 - 9:13
    « Ton père ou ta mère ? »
  • 9:13 - 9:14
    Et tous sauf un -
  • 9:14 - 9:15
    c'était tous des hommes -
  • 9:16 - 9:17
    tous sauf un ont répondu :
  • 9:17 - 9:18
    « Ma mère. »
  • 9:18 - 9:22
    (Rires)
  • 9:22 - 9:25
    Cela a voué sa théorie
    à la poubelle de l'histoire.
  • 9:26 - 9:27
    (Rires)
  • 9:27 - 9:30
    Mais il était excité
    d'avoir enfin trouvé une personne
  • 9:30 - 9:33
    qui avait la même expérience avec son père
  • 9:33 - 9:35
    que lui avait eue avec le sien.
  • 9:35 - 9:39
    Pendant un certain temps, il est resté
    persuadé que cela expliquait notre amitié.
  • 9:39 - 9:41
    Je ne sais pas. C'est possible. Qui sait ?
  • 9:41 - 9:45
    J'aimerais à présent vous parler
    de Feynman le physicien.
  • 9:47 - 9:51
    Son style - en fait,
    style n'est pas le terme approprié.
  • 9:51 - 9:54
    Le style fait penser au nœud papillon
    qu'il aurait pu porter,
  • 9:54 - 9:55
    ou son costume.
  • 9:55 - 9:57
    C'est bien plus profond
  • 9:57 - 9:59
    mais je ne trouve pas d'autre terme.
  • 9:59 - 10:05
    Le style scientifique de Feynman était
    toujours de chercher pour un problème
  • 10:05 - 10:09
    la solution la plus simple
    et la plus élémentaire que possible.
  • 10:09 - 10:13
    Quand cela s'avérait impossible, il
    utilisait des choses plus sophistiquées.
  • 10:13 - 10:18
    Je n'ai aucun doute qu'une grande partie
    de sa joie et de son plaisir découlait
  • 10:18 - 10:21
    du fait qu'il montrait qu'il pouvait
    penser plus simplement que les autres.
  • 10:22 - 10:25
    Mais il était aussi profondément convaincu
  • 10:25 - 10:27
    que si on ne pouvait pas expliquer
    une chose simplement,
  • 10:27 - 10:29
    c'est qu'on ne la comprenait pas.
  • 10:30 - 10:33
    Dans les années 50,
    on essayait de comprendre
  • 10:33 - 10:35
    les mécanismes
    de la superfluidité de l'hélium.
  • 10:36 - 10:37
    Il y avait une théorie
  • 10:37 - 10:40
    développée par un physicien
    et mathématicien russe.
  • 10:40 - 10:41
    C'était une théorie compliquée.
  • 10:41 - 10:43
    Je vais vous la présenter
  • 10:43 - 10:45
    mais c'était horriblement compliqué,
  • 10:45 - 10:48
    bourré d'intégrales, de formules complexes
  • 10:48 - 10:50
    et de mathématiques, et tout et tout.
  • 10:50 - 10:54
    La théorie fonctionnait assez bien
    mais pas très bien.
  • 10:54 - 10:55
    Elle fonctionnait seulement
  • 10:55 - 10:58
    quand les atomes d'hélium
    étaient très très espacés entre eux.
  • 10:58 - 11:00
    C’était la condition.
  • 11:00 - 11:01
    Hélas,
  • 11:01 - 11:04
    les atomes d’hélium dans de l’hélium
    liquide sont l’un sur l’autre.
  • 11:04 - 11:07
    Feynman a décidé de se transformer
    en physicien amateur de l’hélium
  • 11:07 - 11:10
    pour trouver la clé.
  • 11:10 - 11:12
    Il avait une idée, une idée très claire.
  • 11:12 - 11:14
    Il allait essayer de comprendre
  • 11:14 - 11:19
    à quoi ressemblait la fonction d’onde
    quantique de ce nombre énorme d’atomes.
  • 11:19 - 11:20
    Il allait tenter de la visualiser,
  • 11:20 - 11:23
    guidé par un petit nombre
    de principes simples.
  • 11:23 - 11:26
    Ces quelques principes étaient
    simples, vraiment très simples.
  • 11:26 - 11:30
    Le premier est que quand les atomes
    d’hélium se touchent,
  • 11:30 - 11:31
    ils se repoussent.
  • 11:31 - 11:34
    Cela implique que la fonction
    de l’onde doit atteindre zéro.
  • 11:34 - 11:37
    Elle doit disparaître quand
    des atomes d’hélium se touchent.
  • 11:37 - 11:40
    L’autre fait est
    que dans l’état fondamental,
  • 11:40 - 11:43
    l’état de plus basse énergie
    dans les systèmes quantiques
  • 11:43 - 11:46
    la fonction de l’onde est très lisse.
  • 11:46 - 11:48
    Elle a le nombre minimum d’amplitudes.
  • 11:48 - 11:50
    Feynman s’est assis.
  • 11:50 - 11:52
    Je l’imagine avec rien de plus
  • 11:52 - 11:54
    qu’une feuille de papier et un crayon.
  • 11:54 - 11:57
    Il a essayé d’écrire - et il l’a écrite -
  • 11:57 - 11:59
    la fonction la plus simple
    à laquelle il pouvait penser
  • 11:59 - 12:01
    qui avait les conditions de limite
  • 12:01 - 12:04
    de disparition de la fonction d’onde
    quand les atomes se touchent
  • 12:04 - 12:06
    et avec peu d’amplitude.
  • 12:06 - 12:09
    Il a écrit une formule si simple
  • 12:09 - 12:12
    que je pense qu’un lycéen vraiment malin,
  • 12:12 - 12:13
    même sans connaissance du calcul,
  • 12:13 - 12:15
    aurait pu comprendre
    ce que Feynman a écrit.
  • 12:16 - 12:19
    Cette chose simple qu’il a développée
  • 12:19 - 12:22
    expliquait tout ce qui était connu
    à l’époque sur l’hélium liquide,
  • 12:23 - 12:24
    et un peu plus.
  • 12:24 - 12:27
    Je me suis toujours demandé
    si les spécialistes,
  • 12:27 - 12:30
    les vrais physiciens,
    professionnels de l’hélium,
  • 12:30 - 12:31
    ne se sentaient pas un peu gêné par ça.
  • 12:32 - 12:35
    Ils avaient à disposition
    des techniques super puissantes
  • 12:35 - 12:37
    mais ne lui arrivaient pas à la cheville.
  • 12:37 - 12:40
    Je vais vous dévoiler quelle est
    cette technique super puissante
  • 12:41 - 12:43
    car il s’agit en fait
    des diagrammes de Feynman.
  • 12:43 - 12:45
    (Rires)
  • 12:45 - 12:48
    Il a refait le même coup en 1968.
  • 12:48 - 12:53
    En 1968, dans mon université
    mais en mon absence,
  • 12:53 - 12:56
    on explorait la structure des protons.
  • 12:56 - 13:00
    Les protons sont évidemment constitués
    d’une série de petites particules
  • 13:00 - 13:02
    et on le savait déjà à l’époque.
  • 13:02 - 13:06
    Pour analyser cela, on utilisait
    les diagrammes de Feynman.
  • 13:06 - 13:08
    C’est à cela qu’ils servent :
  • 13:08 - 13:09
    comprendre les particules.
  • 13:10 - 13:13
    Les expériences en cours
    étaient très simples :
  • 13:13 - 13:14
    on prenait un proton
  • 13:14 - 13:17
    et on le percutait vivement
    avec un électron.
  • 13:17 - 13:19
    Les diagrammes de Feynman
    servaient exactement à ça.
  • 13:20 - 13:24
    Le seul problème,
    c’est qu’ils sont compliqués.
  • 13:24 - 13:25
    Ce sont des intégrales difficiles.
  • 13:25 - 13:29
    Si on pouvait toutes les utiliser,
    on obtenait une théorie très précise.
  • 13:29 - 13:31
    Mais leur complexité
    rendait cela impossible.
  • 13:32 - 13:33
    On essayait de les utiliser.
  • 13:33 - 13:37
    On pouvait réaliser un diagramme
    d’une boucle ; on est cool à ce stade.
  • 13:37 - 13:39
    Une boucle, une deuxième,
    éventuellement trois.
  • 13:39 - 13:42
    Mais au-delà de trois, oubliez.
  • 13:42 - 13:43
    Feynman leur a dit : « Oubliez tout ça.
  • 13:43 - 13:45
    Pensez au proton
  • 13:45 - 13:49
    comme à un assemblage,
    un essaim de petites particules. »
  • 13:49 - 13:51
    Il les a appelées : « des partons ».
  • 13:52 - 13:56
    Il leur a dit : « Pensez-y comme un essaim
    de partons qui voyagent très vite.
  • 13:57 - 13:59
    Car ils bougent très vite,
  • 14:00 - 14:04
    la relativité stipule que les mouvements
    internes sont très lents.
  • 14:05 - 14:06
    Quand un électron le percute,
  • 14:06 - 14:10
    c’est comme prendre
    une photo instantanée du proton.
  • 14:11 - 14:12
    Que voit-on ?
  • 14:12 - 14:16
    On voit une poignée
    de partons immobilisés.
  • 14:16 - 14:17
    Ils ne bougent pas,
  • 14:17 - 14:20
    et de ce fait, pendant l’expérience,
  • 14:20 - 14:23
    on n’a plus besoin de s’inquiéter
    de leurs mouvements.
  • 14:23 - 14:26
    On n’a plus besoin de s’inquiéter
    des forces entre eux.
  • 14:26 - 14:31
    On peut les penser comme une cohorte
    de partons immobiles. »
  • 14:31 - 14:35
    Ce fut un élément clé de l’analyse
    de ces expériences.
  • 14:35 - 14:37
    Extrêmement efficace.
  • 14:38 - 14:40
    Quelqu’un a dit que le mot
    « révolution » est péjoratif.
  • 14:40 - 14:44
    Sans doute est-ce le cas
    donc je ne parlerai pas de « révolution ».
  • 14:44 - 14:48
    Mais cela a fait évoluer en profondeur
    notre compréhension du proton
  • 14:48 - 14:50
    et des particules par la suite.
  • 14:50 - 14:53
    Je me proposais de vous raconter davantage
  • 14:53 - 14:54
    au sujet de mes liens avec Feynman,
  • 14:54 - 14:56
    comment il était,
  • 14:56 - 14:58
    mais je constate
    qu’il me reste 30 secondes.
  • 14:58 - 15:02
    Je conclurai donc avec ceci.
  • 15:02 - 15:05
    Je crains que Feynman n’ait pas aimé
    un événement comme celui-ci.
  • 15:05 - 15:09
    Il aurait sans doute affirmé
    ne pas en avoir besoin,
  • 15:10 - 15:11
    mais...
  • 15:11 - 15:12
    (Rires)
  • 15:12 - 15:13
    Comment lui rendre hommage ?
  • 15:13 - 15:16
    Comment pourrions-nous
    vraiment lui rendre hommage ?
  • 15:16 - 15:18
    Je pense que la réponse
  • 15:18 - 15:22
    est d’éviter le baratin
    autant que possible
  • 15:22 - 15:23
    dans nos sandwiches.
  • 15:24 - 15:25
    Merci.
  • 15:25 - 15:28
    (Applaudissements)
Title:
Mon ami Richard Feynman | Leonard Susskind | TEDxCaltech
Description:

Ça fait quoi d'être pote avec un génie ? Le physicien Leonard Susskind est sur la scène de TEDxCaltech. Il nous relate quelques histoires de son amitié avec le légendaire Richard Feynman et de leurs discussions sur des approches peu orthodoxes des problèmes sérieux et moins sérieux.

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. En savoir plus : http://ted.com/tedx

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Video Language:
English
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
15:42

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