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La force du conte kanak | Joane UKEIWE | TEDxNouméa

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    (Son de flûte)
  • 0:20 - 0:23
    (Clappements de main en rythme)
    Aé, aé, aé
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    L'histoire que je vais vous conter
  • 0:37 - 0:40
    s'est passée sur l'île de Negone, à Maré,
  • 0:41 - 0:43
    en Nouvelle-Calédonie,
    il y a bien longtemps.
  • 0:44 - 0:47
    Cette histoire,
    les vieux la racontaient aux enfants,
  • 0:48 - 0:51
    les soirs, dans les cases, près du feu.
  • 0:52 - 0:56
    Ils disaient qu'autrefois, il n'y avait
    pas d'hommes sur toute la Terre.
  • 0:56 - 0:59
    Il y avait de la verdure et des champs.
  • 1:00 - 1:03
    Et dans cette nature,
    existait le clan Sereï
  • 1:04 - 1:07
    qui veut dire « plante » en langue
    de negone, la langue de Maré.
  • 1:08 - 1:11
    Le clan est composé de quatre familles.
  • 1:11 - 1:12
    Les Namacos,
  • 1:12 - 1:13
    les Niaoulis,
  • 1:14 - 1:15
    les Wacocos
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    et les Yenus.
  • 1:18 - 1:20
    Les vieux racontaient
    qu'à chaque équinoxe,
  • 1:20 - 1:24
    le grand esprit de la forêt venait
    rendre visite à ces familles
  • 1:24 - 1:27
    et ainsi, admirait leurs plantations
    et leurs récoltes.
  • 1:28 - 1:31
    Et aujourd'hui, c'est le grand jour.
  • 1:33 - 1:36
    Les Namacos, ce sont les bananiers.
  • 1:37 - 1:39
    On les voit à perte de vue.
  • 1:39 - 1:42
    Ils sont rangés,
    alignés les uns derrière les autres.
  • 1:43 - 1:45
    Le feuillage est verdoyant.
  • 1:45 - 1:49
    Et la couleur des bananes
    plus éclatante que le jaune du soleil.
  • 1:50 - 1:52
    Les Namacos sont tous rassemblés.
  • 1:52 - 1:56
    Ils cueillent soigneusement
    et délicatement les bananes.
  • 1:56 - 2:00
    Et au moment où il faut ranger les fruits
    dans les paniers tressés,
  • 2:00 - 2:03
    ils se rendent compte que
    les paniers ne sont pas là.
  • 2:03 - 2:07
    Alors, un des membres des Namacos
    décide d'aller chez le Yenu.
  • 2:08 - 2:11
    C'est lui qui habituellement
    tresse les paniers.
  • 2:12 - 2:16
    Le Namaco arrive au pied du tronc
    et appelle : « Yenu, Yenu !
  • 2:17 - 2:18
    Cocotier ! »
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    Un ronflement se fait entendre.
  • 2:22 - 2:23
    « Yenu ! »
  • 2:23 - 2:27
    Le Yenu s'éveille tranquillement
    et s'écrie :
  • 2:27 - 2:30
    « Inu cidi thaet, je suis fatigué.
  • 2:33 - 2:36
    - Mais quand nous remettras-tu
    les paniers tressés de ton feuillage ?
  • 2:38 - 2:41
    - Wé, je ferai après,
    casse pas le feuillage. »
  • 2:42 - 2:46
    Ce qui veut dire :
    relax, ne te fais pas de bile.
  • 2:48 - 2:50
    Le Namaco repart et prévient sa famille
  • 2:50 - 2:54
    que le Yenu, le cocotier,
    n'a pas accompli sa tâche.
  • 2:54 - 2:57
    Un peu énervée,
    elle va devoir se débrouiller.
  • 2:59 - 3:01
    La famille des Niaoulis,
  • 3:01 - 3:04
    elle pousse sur
    une grande étendue de terre.
  • 3:05 - 3:07
    C'est un champ magnifique
  • 3:07 - 3:10
    avec des arbres plantés
    mesurant jusqu'à 20 mètres de hauteur.
  • 3:10 - 3:14
    Et (inspire),
    cette odeur qui parcourt la forêt,
  • 3:14 - 3:18
    c'est enivrant, saisissant
    et tellement doux à la fois.
  • 3:19 - 3:23
    Les Niaoulis cherchent aussi leurs paniers
    pour y mettre leurs feuilles.
  • 3:23 - 3:24
    Mais ils ne les trouvent pas.
  • 3:24 - 3:28
    Un des Niaoulis court jusqu'à chez le Yenu
    et lui demande ses paniers.
  • 3:30 - 3:34
    « Inu cidi thaet, je suis fatigué,
    laisse-moi dormir ! »
  • 3:36 - 3:40
    Les Niaoulis vont aussi devoir
    trouver une solution.
  • 3:42 - 3:45
    Les Wacocos, ce sont les ignames.
  • 3:46 - 3:48
    Ils poussent dans un grand champ,
  • 3:49 - 3:51
    clôturé par une immense barrière
    en bambou.
  • 3:54 - 3:56
    Des centaines d'ignames ont été récoltées.
  • 3:56 - 3:58
    Le sol est riche et frais.
  • 3:58 - 4:02
    Les Wacocos cherchent aussi
    leurs paniers pour ranger leurs ignames
  • 4:02 - 4:03
    mais ne les trouvent pas.
  • 4:03 - 4:05
    Alors, ils font de même.
  • 4:07 - 4:08
    Ils demandent au Yenu.
  • 4:09 - 4:12
    Le Yenu, eh bien lui, il est fâché
    d'être de nouveau dérangé.
  • 4:12 - 4:13
    Ça fait trois fois !
  • 4:13 - 4:15
    Alors, il crie : « Harow, takolu,
    ça suffit, va-t'en ! »
  • 4:17 - 4:20
    Le Wacoco insiste mais sans succès.
  • 4:21 - 4:22
    Sans aucun panier,
  • 4:23 - 4:24
    il repart dans son champ
  • 4:25 - 4:26
    et prévient sa famille.
  • 4:27 - 4:28
    Étonnée,
  • 4:28 - 4:31
    la famille laisse les ignames en tas,
  • 4:32 - 4:33
    à même le sol.
  • 4:35 - 4:39
    Soudain, quelque chose chatouille
    les racines du Yenu,
  • 4:40 - 4:41
    qui se réveille.
  • 4:42 - 4:45
    Ce sont les vagues,
    la marée est en train de monter.
  • 4:45 - 4:49
    Le Yenu se rend compte que le soleil va
    bientôt se coucher et il n'est pas prêt.
  • 4:49 - 4:51
    Et c'est l'arrivée du grand esprit
    de la nature.
  • 4:53 - 4:54
    Alors,
  • 4:55 - 4:56
    à toute vitesse,
  • 4:56 - 4:59
    il détache de sa tête
    les plus belles feuilles, ici et là,
  • 4:59 - 5:01
    à droite et à gauche,
  • 5:01 - 5:03
    et il tresse, il tresse dans le stress.
  • 5:03 - 5:07
    Mais il ne parvient pas à rendre
    le nombre de paniers souhaités.
  • 5:10 - 5:12
    Bientôt, au loin,
  • 5:13 - 5:17
    une lumière aveuglante descend
    au bas de la montagne,
  • 5:18 - 5:21
    devant le clan Sereï, silencieux.
  • 5:22 - 5:25
    C'est le grand esprit.
  • 5:33 - 5:35
    « Toi, le Namaco,
  • 5:35 - 5:36
    famille des bananiers,
  • 5:37 - 5:40
    pour avoir si bien travaillé la terre,
  • 5:40 - 5:43
    ton fruit sera doux et sucré.
  • 5:43 - 5:47
    Il sera l'un des préférés des hommes
    qui peupleront un jour cette Terre.
  • 5:48 - 5:50
    Ton fruit sera toujours accessible. »
  • 5:51 - 5:55
    Les Namacos se mettent à danser,
    danser, le cœur en joie.
  • 5:56 - 5:58
    « Toi, le Niaouli,
  • 5:58 - 6:00
    pour ta superbe forêt,
  • 6:00 - 6:03
    ton écorce te protègera des feux
  • 6:03 - 6:06
    et tes feuilles serviront
    à couvrir le toit des cases
  • 6:06 - 6:10
    et elles soigneront les douleurs
    et les maux des hommes. »
  • 6:11 - 6:13
    Les Niaoulis sont fiers et ravis.
  • 6:15 - 6:18
    « Toi, le Wacoco, famille des ignames,
  • 6:19 - 6:21
    pour tes excellentes récoltes,
  • 6:21 - 6:23
    je veux aussi te récompenser.
  • 6:23 - 6:25
    Tu seras sacré pour les hommes.
  • 6:25 - 6:28
    On te célébrera une fois par an.
  • 6:28 - 6:31
    Ce jour sera appelé la fête de l'igname. »
  • 6:32 - 6:34
    Les Wacocos sont si heureux et si honorés.
  • 6:39 - 6:42
    « Toi, le Yenu, le cocotier,
  • 6:43 - 6:45
    tu n'as pas accompli ta tâche.
  • 6:46 - 6:47
    Alors,
  • 6:48 - 6:50
    on te lancera des pierres sur la tête
  • 6:51 - 6:52
    pour faire tomber ton fruit
  • 6:52 - 6:55
    et tu subiras la lame tranchante
    des hommes.
  • 6:58 - 7:01
    Mais comme tu as essayé
    et que je suis clément,
  • 7:02 - 7:05
    tes feuilles serviront à conserver
    et à cuisiner la nourriture
  • 7:05 - 7:09
    et le tronc de ton arbre
    à recueillir l'eau de pluie. »
  • 7:12 - 7:16
    Ce jour-là, le clan Sereï a fêté dignement
    l'arrivée du grand esprit.
  • 7:17 - 7:19
    (Danse et chante)
  • 7:21 - 7:22
    Le Yenu,
  • 7:23 - 7:24
    un peu moins.
  • 7:28 - 7:31
    Ce conte a été écrit par
  • 7:31 - 7:33
    Valentine Pujapujane.
  • 7:34 - 7:37
    Il a beaucoup de sens pour moi.
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    Je suis mélanésienne,
  • 7:39 - 7:43
    kanak, originaire
    de l'île de Drehu, Lifou.
  • 7:44 - 7:48
    Ma famille appartient à un clan
    qui s'appelle : Apiagajoxu,
  • 7:48 - 7:51
    ce qui veut dire : petit enfant de chef.
  • 7:52 - 7:56
    Nous sommes comme un même corps,
    représentant chacun ses membres.
  • 7:56 - 8:01
    Et nous avons des fonctions qui sont
    rattachées à des tâches bien précises.
  • 8:02 - 8:04
    C'est ainsi pour tous les clans.
  • 8:05 - 8:08
    Lors de cérémonies
    coutumières et religieuses,
  • 8:08 - 8:11
    quand chaque membre fait sa part,
  • 8:11 - 8:13
    nous avons le sentiment
    du devoir accompli,
  • 8:13 - 8:15
    surtout quand le travail
    est bien effectué.
  • 8:16 - 8:19
    Car nous avons tous besoin
    les uns des autres.
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    Mais il nous est impossible
  • 8:21 - 8:23
    d'accomplir une tâche
    qui ne nous incombe pas,
  • 8:23 - 8:25
    ça ne fonctionnerait pas.
  • 8:25 - 8:27
    En tout cas, ça ne fonctionne pas ainsi.
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    Et un certain mal-être
    peut naître de cette situation,
  • 8:30 - 8:32
    de la frustration, voire de la colère.
  • 8:34 - 8:35
    Mais pour chaque kanak,
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    il y a un réel plaisir
    de tenir dignement sa place,
  • 8:40 - 8:42
    de parvenir ensemble au résultat attendu
  • 8:43 - 8:45
    et de garantir l'unité du clan
    et de la famille.
  • 8:47 - 8:52
    Chacun de nous a donc besoin
    d'identifier, de connaître
  • 8:52 - 8:54
    et d'occuper pleinement sa place.
  • 8:55 - 8:58
    C'est ainsi qu'il gagne
    la reconnaissance des autres,
  • 8:59 - 9:00
    de la famille.
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    Et c'est aussi notre manière
    de pratiquer la solidarité.
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    Et ...
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    ça marche !
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    Merci.
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    (Applaudissements)
Title:
La force du conte kanak | Joane UKEIWE | TEDxNouméa
Description:

« Le clan Sereï » conté dans cette vidéo est une version revisitée des écrits de Valentine Pujapujane, une écrivaine kanak en Nouvelle-Calédonie. Ici, il est question de partage, de transmission, mais aussi de prise de conscience et de redonner au conte une place de choix. Chez les Kanaks, ce conte marque l’importance de faire son devoir et d’occuper dignement sa place pour le bien de sa famille, de son clan et de son île.

#contekanak #placesetdevoirs #peuplesolidaire

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Joane UKEIWE est une conteuse accomplie qui se passionne pour la transmission de la culture kanak par le biais du conte. Jusqu’à il y a peu, c’est par l’oralité que se transmettait la mémoire. Les contes qu’elle partage puisent leurs sources dans les valeurs dont elle a hérité de ses pères et de ses ancêtres. Convaincue que le monde de l’imaginaire capte les esprits et les cœurs, cette femme veut révéler au grand public des histoires et des expériences de vie enrichissantes et émouvantes. Comme un devoir de mémoire qu’elle applique au quotidien dans son entourage pour les petits et les grands. À travers l’histoire du « Le clan Sereï », Joane nous entraîne sur le sentier de la vie.

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. En savoir plus: http: //ted. com/tedx

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
09:16

French subtitles

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