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Carl Safina : Victimes et responsables insoupçonnés de la marée noire

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    Voici l’océan tel que je l’ai connu.
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    Depuis que je suis allé
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    quelques fois dans le golfe du Mexique,
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    je crois que ça m’a un peu traumatisé.
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    Parce qu’à présent, chaque fois que je regarde l’océan,
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    peu importe où je me trouve,
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    et même si je sais que
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    la marée noire n’a pas atteint cet endroit,
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    je vois comme du pétrole sur l’eau.
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    Et je me rends compte que
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    cela m’obsède vraiment.
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    Aujourd’hui, je veux vous parler
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    de plusieurs sujets pour tenter
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    de remettre les choses en contexte;
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    je parlerai de la fuite de pétrole mais aussi
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    de sa signification et de pourquoi c'est arrivé.
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    D’abord quelques mots à mon sujet.
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    Je suis avant tout un type qui aime aller à la pêche.
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    J’y allais déjà, tout petit.
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    Et, de fil en aiguille,
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    je me suis retrouvé à étudier les oiseaux marins -
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    afin de rester près des habitats côtiers que j’aimais tant.
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    À présent, j’écris des livres
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    sur les changements que subit l’océan.
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    Des changements qui s’opèrent très rapidement, en ce moment.
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    Nous avons vu ce genre d’illustration plus tôt,
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    où l’on voit que nous vivons sur gros caillou
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    quelque peu mouillé
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    par endroits.
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    Comme une bille qu'on aurait trempée dans l'eau.
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    Et la même chose avec l’atmosphère :
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    si vous prenez toute l’atmosphère
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    et la roulez en boule,
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    vous obtenez la petite sphère de gaz qu’on voit à droite.
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    Voilà, notre vie repose sur
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    la plus fragile des bulles de savon que l’on puisse imaginer.
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    Une bulle de savon sacrée
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    et à la fois extrêmement sensible.
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    La combustion du pétrole, du charbon, du gaz,
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    de tous ces combustibles fossiles,
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    a beaucoup fait changer l’atmosphère.
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    Les niveaux de dioxyde de carbone n’ont fait que grimper.
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    Nous réchauffons le climat.
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    Ainsi, l’éruption de ce puits dans le golfe du Mexique
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    ne représente qu’une petite partie
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    d’un problème bien plus vaste qui vient
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    de la consommation d’énergie qu’impose notre civilisation.
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    En plus du réchauffement,
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    nous avons le problème des océans qui s’acidifient;
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    un phénomène déjà mesurable
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    et dont la faune commence à se ressentir.
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    En laboratoire, si vous plongez
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    une palourde dans de l’eau dont le pH
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    n’est pas de 8,1 --
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    le pH normal de l’eau de mer --
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    mais plutôt de 7,5,
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    la palourde se dissout en trois jours.
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    Lorsqu'une larve d'oursin est prélevée
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    d’un milieu à pH de 8,1
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    et immergée en pH de 7,7 --
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    ce qui n’est pas un énorme écart --
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    elle se déforme et meurt.
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    De même pour le naissain d’huître,
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    dont de grandes quantités se perdent
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    dans certains bancs d'huîtres commerciaux.
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    Ailleurs, les récifs coralliens croissent
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    plus lentement à cause de cette acidification.
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    C’est donc un réel problème.
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    A présent, allons faire un tour
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    dans le golfe du Mexique.
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    Une chose qui m’impressionne, chez les gens de cette région,
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    c’est qu’ils sont vraiment très “aquatiques”.
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    Ils savent comment gérer l’eau.
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    Ils peuvent affronter le passage d’un ouragan
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    et quand le niveau d’eau baisse, ils savent quoi faire.
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    Mais lorsqu'il s'agit d'autre chose que de l’eau,
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    et que leur habitat aquatique est perturbé,
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    ils n’ont pas beaucoup d’options.
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    En fait, ces collectivités entières
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    se retrouvent dans un cul-de-sac.
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    Car ces gens ne peuvent rien faire d’autre.
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    Ils ne peuvent pas se recycler
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    dans l’industrie hôtelière locale
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    car il n’y en a pas dans leur région.
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    Si vous allez dans le Golfe, regardez autour de vous
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    et vous verrez énormément de pétrole.
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    On en voit beaucoup dans l’océan.
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    On en voit beaucoup le long du littoral.
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    Sur les lieux mêmes de l’éruption,
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    vous n’en croiriez pas vos yeux.
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    C’est comme si vous aviez vidé le carter d’huile de votre voiture
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    et jeté ce contenu dans l’océan.
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    Et ce qui me semble le plus incroyable,
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    c’est qu'il n’y a personne en train
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    d’essayer de ramasser le pétrole
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    là où la nappe est la plus dense.
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    À certains endroits, là-bas, l'océan
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    offre un tableau vraiment apocalyptique.
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    En longeant le rivage,
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    on en voit partout.
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    C’est vraiment sale.
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    Sur les côtes où les nappes commencent à s’échouer,
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    dans la partie est du Golfe, en Alabama,
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    certains profitent encore de la plage
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    pendant que d’autres s’affairent à la nettoyer.
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    Et ils s’y prennent très curieusement pour nettoyer la plage :
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    on leur interdit de mettre plus de 4,5 kg de sable
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    dans un sac en plastique de 190 litres.
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    Et on leur fournit des milliers de sacs en plastique.
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    Je me demande ce qu'ils vont faire de tout cela.
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    Pendant ce temps, certains baigneurs vont encore à la plage.
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    Ils ne voient pas le petit panneau discret
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    où il est inscrit : "baignade interdite".
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    Leurs enfants ressortent de l’eau leurs vêtements
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    et sandales recouverts de goudron. C’est dégoûtant.
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    Aux endroits déjà souillés de pétrole depuis un moment,
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    c’est encore pire.
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    Il n’y a pratiquement plus personne, à part
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    de rares utilisateurs
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    qui s’obstinent.
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    Les gens là-bas sont vraiment traumatisés.
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    C’est une communauté de travailleurs.
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    Toute leur vie, ils se sont levés le matin
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    et quand le moteur démarrait, ils partaient en mer.
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    Ils pensaient pouvoir toujours compter sur
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    les ressources que leur prodiguait la Nature
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    dans l’écosystème du golfe du Mexique.
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    Ils voient maintenant tout leur monde s’écrouler.
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    Et ils affichent littéralement
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    leur bouleversement,
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    leur indignation,
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    leur colère
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    et leur détresse.
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    Tout cela est très visible.
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    Par contre, il y a bien des choses
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    qu’on ne peut pas voir, sous l’eau.
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    Que se passe-t-il au juste sous l’eau?
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    Certains disent qu’il y a
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    des traînées de pétrole.
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    D’autres affirment qu’il n’y a pas de traînée de pétrole.
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    Mr. Markey, membre du Congrès, a même demandé
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    s’il ne faudrait pas aller voir en sous-marin
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    si ces traînées de pétrole existent vraiment.
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    Comme je n’ai pas pu prendre de sous-marin --
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    en particulier depuis que j’ai été invité à venir ici --,
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    j’ai dû réaliser moi-même
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    une petite expérience
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    pour voir s’il y a du pétrole dans le golfe du Mexique.
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    Nous voyons ici le golfe du Mexique,
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    ses eaux étincelantes et poissonneuses.
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    Je répands un petit peu de pétrole
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    dans le golfe du Mexique,
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    et je découvre, ou plutôt je confirme cette hypothèse :
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    l’eau et l’huile ne se mélangent pas
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    à moins qu’on ajoute un dispersant.
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    À ce moment,
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    elles commencent à se mélanger.
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    Créez un peu de mouvement
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    avec du vent et des vagues,
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    et vous obtenez une saloperie.
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    Une grosse saloperie
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    impossible à nettoyer
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    car on ne peut ni la toucher, ni l’extraire
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    et, surtout -- c’est surtout cela qui compte, selon moi --,
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    on ne peut pas la voir.
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    Je crois qu’on cherche à dissimuler tout cela.
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    Bien sûr, vu l’ampleur de la catastrophe et des dégâts,
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    il est impossible de diffuser tous les éléments d'information.
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    Mais, comme beaucoup l’ont fait observer,
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    on s’efforce par tous les moyens d’étouffer l’affaire.
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    Je crois personnellement
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    que les dispersants ne sont
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    qu’un stratagème pour "cacher le cadavre",
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    puisque nous avons confié au meurtrier
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    le soin de nettoyer la scène du crime.
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    Toutefois, on n’a qu’à ouvrir les yeux.
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    On peut très bien voir les endroits où
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    le pétrole s’accumule à la surface.
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    Et lorsqu'on s'en prend à ces nappes,
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    c’est parce qu’on ne veut laisser aucune preuve, selon moi.
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    OK.
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    Il paraît que les bactéries mangent du pétrole?
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    Les tortues marines aussi.
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    Le pétrole qui se décompose
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    doit subir un long processus
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    avant d’être disponible pour les bactéries.
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    Les tortues en mangent. Ça se loge dans les branchies des poissons
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    qui doivent nager au beau milieu de cette horreur.
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    J’ai entendu une histoire dingue dans
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    le train aujourd’hui, en me rendant ici.
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    L’auteur Ted Williams m’a appelé
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    pour me poser quelques questions
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    sur ce que j’avais vu,
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    parce qu’il rédige un article pour le magazine Audubon.
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    Il est lui-même allé dans le golfe du Mexique récemment --
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    il y a environ une semaine --
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    et un homme, un guide de pêche, l’a emmené
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    en mer pour lui montrer ce qui se passe.
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    Pour la prochaine année, l’agenda du guide
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    n’affiche que des annulations.
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    Il n’a plus de réservation.
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    Les gens veulent récupérer leur dépôt, puis merci, bonsoir!
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    C’est comme ça pour des milliers de gens.
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    Mais il a dit a Ted
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    que la dernière fois qu’il était sorti en mer,
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    un grand dauphin s’est soudain
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    montré le nez à côté du bateau.
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    Et il crachait du pétrole
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    par son évent.
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    Le guide s’en est éloigné
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    parce que c’était
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    sa dernière sortie de pêche,
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    et puisque les dauphins effraient les poissons.
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    Alors il s’en est éloigné et,
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    en se retournant quelques minutes plus tard,
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    il a vu le dauphin de retour à côté du bateau.
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    Le guide a dit qu’en 30 ans de pêche,
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    il n’avait jamais vu un dauphin faire ça.
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    Et il a eu l’impression...
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    l’impression que ce dauphin
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    venait lui demander de l’aide. Désolé.
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    Lors du déversement de l’Exxon Valdez,
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    environ 30 pour cent des épaulards
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    sont morts au cours des mois qui ont suivi.
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    La population ne s'en est jamais remise.
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    Ici, les espèces touchées vont commencer
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    à se rétablir plus ou moins vite.
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    Pour certaines, ça prendra plus de temps
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    tandis que d’autres, je crois,
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    s’en remettront un peu plus rapidement.
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    Autre facteur important, dans le cas du golfe du Mexique,
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    c’est que beaucoup d'animaux
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    s’y retrouvent à certaines
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    périodes de l’année.
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    Le Golfe est donc un plan d’eau d’une grande importance --
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    plus important que n’importe quel volume d’eau
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    semblable situé au grand large de l’Atlantique.
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    Ces thons traversent l’Océan.
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    Ils empruntent le Gulf Stream et vont jusqu’en Europe.
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    Quand arrive la saison du frai, ils pénètrent dans le Golfe.
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    Voici deux thons qui ont été marqués.
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    On les retrouve dans des frayères situées
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    en plein dans la marée noire.
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    Les thons connaissent une saison de reproduction
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    pour le moins désastreuse cette année.
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    J’espère que les adultes évitent
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    le plus possible cette eau souillée.
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    Généralement, ils n’aiment pas l’eau
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    trop turbide, de toute façon.
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    Ces poissons sont vraiment des athlètes
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    de haut niveau.
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    Je ne sais pas quel effet cette pollution aura sur leurs branchies.
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    Est-ce que les adultes en seront affectés?
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    Peut-être que non; toutefois,
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    leurs oeufs et leurs larves, oui, certainement.
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    Regardez cette courbe qui va toujours en descendant.
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    C’est ce que nous faisons à cette espèce
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    depuis des décennies de surpêche.
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    Certes, la marée noire,
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    la fuite et les traînées de pétrole,
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    tout ça est un désastre;
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    mais je pense qu’il nous faut reconnaître
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    que nos activités perturbent fortement la vie océanique,
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    et ce, depuis très longtemps.
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    Ce n’est pas comme si, au départ, la situation
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    avait été acceptable.
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    Ces milieux subissaient déjà beaucoup de stress
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    et avaient bien des problèmes, dès le départ.
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    Prenons par exemple les oiseaux.
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    Beaucoup d’oiseaux viennent dans le golfe
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    du Mexique à certains moments de l’année,
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    mais ils repartent ensuite.
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    Leurs aires de distribution sont bien plus vastes.
  • 10:56 - 10:58
    Ainsi, la plupart
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    des oiseaux sur cette photo sont des migrateurs.
  • 11:01 - 11:03
    Ils étaient tous dans le Golfe au mois de mai
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    quand le pétrole a commencé à salir certains rivages.
  • 11:07 - 11:09
    En bas à gauche, on peut voir
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    le Tourne-pierre à collier et le Bécasseau sanderling.
  • 11:11 - 11:13
    Ces oiseaux nichent dans le Haut-Arctique
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    et ils hivernent dans le sud de l’Amérique du Sud.
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    Mais ils convergent tous vers le Golfe
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    avant de se disperser dans l'Arctique.
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    J'ai vu ici des oiseaux qui se reproduisent
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    au Groenland.
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    C’est donc un problème à l'échelle de l'hémisphère.
  • 11:28 - 11:30
    Il a des répercussions économiques
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    au moins nationales, à bien des égards,
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    mais ses effets biologiques sont hémisphériques.
  • 11:38 - 11:40
    Je pense qu’on a ici un exemple
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    de manque total de préparation
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    des plus ahurissants
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    auquel je puisse penser.
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    Même quand les Japonais ont bombardé Pearl Harbor,
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    on a au moins riposté!
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    Tandis que là, il semble
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    qu’on ne sache absolument pas quoi faire.
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    Rien n'avait été prévu.
  • 12:00 - 12:02
    Il faut bien le constater, à voir
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    ce qu’ils font –– soit essentiellement
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    mettre des barrières flottantes et des dispersants.
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    Ces barrières ne sont absolument pas faites pour l’eau libre.
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    Et ils n’essaient même pas de collecter
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    le pétrole là où la nappe est la plus dense.
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    ils travaillent près des côtes. Regardez ces deux bateaux.
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    Celui à droite s’appelle "Fishing Fool" (le pêcheur dupe).
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    À mon avis, c’est un nom génial, quand on songe
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    que ces bateaux vont faire tout ce qu’ils peuvent
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    pour réduire les dégâts en remorquant une barrière flottante,
  • 12:28 - 12:30
    alors que la nappe de pétrole s’étend sur
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    des centaines de milliers de mètres carrés
  • 12:32 - 12:34
    à la surface des eaux du Golfe.
  • 12:34 - 12:37
    À cause des dispersants, le pétrole passe dessous les barrières.
  • 12:37 - 12:39
    Celles-ci ne mesurent que
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    30 cm de diamètre.
  • 12:42 - 12:45
    C’est totalement insensé.
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    Voici les crevettiers qu’on emploie.
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    Ils sont des centaines de crevettiers à remorquer des barrières au lieu de filets.
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    On les voit ici à l’œuvre.
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    Il est facile de voir
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    que l’eau souillée se retrouve derrière la barrière flottante.
  • 12:57 - 13:00
    Ils ne font que la remuer.
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    C’est tout simplement ridicule.
  • 13:02 - 13:05
    Près des côtes où on a installé des barrières --
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    sur des centaines et des centaines de kilomètres --
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    juste à côté de ces rivages, donc,
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    se trouvent d’autres rivages qu’aucune barrière ne protège.
  • 13:12 - 13:14
    Ainsi, il y a de fortes chances que
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    l’eau souillée pénètre derrière les barrières.
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    La photo du bas montre une colonie d’oiseaux qu’on tente de protéger.
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    Tout le monde veut protéger
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    les colonies d’oiseaux là-bas.
  • 13:25 - 13:28
    Eh bien, en tant qu’ornithologue,
  • 13:28 - 13:31
    je peux vous dire que les oiseaux… volent, et que --
  • 13:31 - 13:33
    (rires)
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    pour les colonies d’oiseaux, les barrières flottantes
  • 13:38 - 13:41
    ne sont pas une solution; ça ne marche pas.
  • 13:41 - 13:44
    Ces oiseaux se nourrissent en plongeant dans l’eau.
  • 13:45 - 13:48
    En fait, je pense que
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    ce qu’ils devraient faire, tant qu’à faire quelque chose --
  • 13:51 - 13:54
    ils font tellement d'efforts pour protéger ces nids --
  • 13:54 - 13:57
    en réalité, s’ils détruisaient tous les nids,
  • 13:57 - 13:59
    certains oiseaux s’en iraient
  • 13:59 - 14:02
    et ce serait mieux pour eux cette année.
  • 14:02 - 14:05
    Pour ce qui est de les nettoyer,
  • 14:05 - 14:08
    je ne veux surtout pas critiquer
  • 14:08 - 14:10
    ces gens qui nettoient les oiseaux.
  • 14:10 - 14:12
    Il est vraiment important
  • 14:12 - 14:14
    d’exprimer notre compassion.
  • 14:14 - 14:16
    Je crois que la plus précieuse qualité que les gens possèdent
  • 14:16 - 14:18
    est la compassion.
  • 14:18 - 14:20
    C’est très important de capter ces images
  • 14:20 - 14:22
    et de les diffuser.
  • 14:22 - 14:25
    Mais dites-moi, où seront relâchés tous ces oiseaux?
  • 14:25 - 14:27
    C’est comme si on vous sauvait de votre maison en flammes,
  • 14:27 - 14:29
    qu’on vous soignait pour inhalation de fumée puis
  • 14:29 - 14:32
    qu’on vous retournait chez vous -- tant que la fuite n’est pas colmatée...
  • 14:33 - 14:35
    Je refuse de le voir
  • 14:35 - 14:38
    comme un accident ou quelque chose de cet ordre.
  • 14:38 - 14:41
    C’est plutôt la conséquence d’une grande négligence.
  • 14:41 - 14:46
    (Applaudissemnts)
  • 14:46 - 14:48
    Pas juste B.P.
  • 14:48 - 14:50
    Si BP a pu faire preuve
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    d’autant d’insouciance et de témérité,
  • 14:53 - 14:55
    c’est que rien de l’en empêchait.
  • 14:55 - 14:57
    Elle a pu agir ainsi à cause
  • 14:57 - 15:00
    de la surveillance totalement inefficace
  • 15:00 - 15:03
    exercée par ce gouvernement, qui est censé être
  • 15:03 - 15:06
    notre gouvernement et nous protéger.
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    Figurez-vous que
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    presque tous les navires commerciaux aux États-Unis portent cette inscription --
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    si vous laissez échapper quelques litres de pétrole,
  • 15:15 - 15:17
    vous pouvez avoir de sérieux problèmes.
  • 15:17 - 15:19
    Ainsi, il faut vraiment se demander
  • 15:19 - 15:22
    pour qui sont faites ces lois,
  • 15:22 - 15:25
    et qui échappe désormais aux lois.
  • 15:25 - 15:27
    À l’avenir, nous pourrions faire certaines choses.
  • 15:27 - 15:30
    Comme nous doter de certains équipements essentiels en cas de besoin.
  • 15:30 - 15:32
    Ce ne serait pas si difficile
  • 15:32 - 15:34
    de prévoir
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    qu’en réalisant 30 000 forages
  • 15:36 - 15:39
    au fond du golfe du Mexique pour y chercher du pétrole,
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    du pétrole pourrait éventuellement jaillir d’un de ces puits!
  • 15:41 - 15:44
    On aurait alors une idée de la conduite à adopter.
  • 15:44 - 15:47
    C'est sûrement une des choses qu’on devrait faire.
  • 15:47 - 15:49
    Mais je pense qu’il nous faut comprendre
  • 15:49 - 15:52
    la cause réelle de cette fameuse fuite.
  • 15:52 - 15:54
    Elle remonte au moment où on a commencé
  • 15:54 - 15:57
    à oublier que le gouvernement est là
  • 15:57 - 16:00
    parce que nous l’avons élu pour nous, pour protéger
  • 16:00 - 16:02
    les intérêts de la population.
  • 16:06 - 16:08
    Je pense que cette éruption incontrôlée,
  • 16:08 - 16:10
    le sauvetage des banques,
  • 16:10 - 16:13
    la crise hypothécaire et tout le reste
  • 16:13 - 16:16
    ne sont que les symptômes
  • 16:16 - 16:18
    d’un seul et même problème.
  • 16:18 - 16:20
    Il semble que nous croyions encore
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    à l’utilité de la police pour nous protéger
  • 16:23 - 16:26
    contre la malveillance de certains.
  • 16:26 - 16:28
    Et même si la police est parfois contrariante – avec ses
  • 16:28 - 16:30
    PV, contraventions et trucs de ce genre --
  • 16:30 - 16:33
    personne ne songerait à s’en débarasser.
  • 16:33 - 16:36
    Mais à l'heure actuelle, dans le reste du gouvernement,
  • 16:36 - 16:38
    et ce, depuis au moins 30 ans,
  • 16:38 - 16:41
    il règne une culture de la déréglementation
  • 16:41 - 16:43
    qu’encouragent précisément
  • 16:43 - 16:45
    les gens contre qui
  • 16:45 - 16:47
    nous avons besoin d'être protégés,
  • 16:47 - 16:50
    des gens qui achètent le gouvernement à notre insu.
  • 16:50 - 16:59
    (Applaudissements)
  • 17:00 - 17:03
    Ce problème existe depuis très longtemps déjà.
  • 17:03 - 17:06
    On se souvient d’irrégularités
  • 17:06 - 17:08
    commises par certaines sociétés lors de la fondation des É.-U.
  • 17:08 - 17:11
    Thomas Jefferson lui-même se plaignait
  • 17:11 - 17:14
    du fait que déjà,
  • 17:14 - 17:17
    elles défiaient les lois du pays.
  • 17:18 - 17:20
    Bien sûr, certains
  • 17:20 - 17:22
    se disent conservateurs;
  • 17:22 - 17:24
    mais s’ils voulaient vraiment
  • 17:24 - 17:26
    se montrer conservateurs et patriotes,
  • 17:26 - 17:28
    ils enverraient ces multinationales
  • 17:28 - 17:30
    au diable!
  • 17:30 - 17:33
    Là, ils agiraient en vrais conservateurs.
  • 17:34 - 17:36
    Ce que nous devons faire, essentiellement,
  • 17:36 - 17:38
    c’est nous réapproprier l’idée
  • 17:38 - 17:40
    que c’est notre gouvernement
  • 17:40 - 17:42
    et qu’il défend nos intérêts.
  • 17:42 - 17:44
    Et il faut retrouver un sentiment d’unité
  • 17:44 - 17:46
    et de cause commune dans notre pays,
  • 17:46 - 17:48
    choses qui se sont perdues.
  • 17:49 - 17:51
    Je trouve qu'il y a des signes encourageants.
  • 17:51 - 17:53
    On dirait que nous nous réveillons un peu.
  • 17:53 - 17:55
    La loi Glass-Steagall --
  • 17:55 - 17:57
    qu’on a adoptée justement pour nous éviter des difficultés
  • 17:57 - 17:59
    comme celles qui ont entraîné la récession,
  • 17:59 - 18:01
    l’effondrement des banques,
  • 18:01 - 18:03
    et la suite d’événements qui a nécessité leur sauvetage --
  • 18:03 - 18:05
    cette loi promulguée en 1933
  • 18:05 - 18:08
    a été systématiquement mise en pièces.
  • 18:08 - 18:10
    Beaucoup souhaiteraient aujourd’hui
  • 18:10 - 18:12
    rétablir certaines de ses dispositions.
  • 18:12 - 18:14
    Mais les lobbys frappent déjà à leurs portes
  • 18:14 - 18:16
    pour les convaincre d’assouplir
  • 18:16 - 18:19
    les lois dès qu’elles sont adoptées.
  • 18:19 - 18:21
    C’est donc un combat perpétuel.
  • 18:21 - 18:23
    Nous sommes à un tournant historique.
  • 18:23 - 18:25
    Soit nous allons faire
  • 18:25 - 18:27
    de la marée noire dans le Golfe
  • 18:27 - 18:29
    une catastrophe pure et simple,
  • 18:29 - 18:31
    soit nous en ferons l’occasion dont nous avons besoin,
  • 18:31 - 18:33
    comme beaucoup l'ont mentionné aujourd’hui.
  • 18:33 - 18:35
    La nécessité de saisir cette occasion
  • 18:35 - 18:37
    a clairement été un thème récurrent.
  • 18:37 - 18:39
    On également abordé ce qui suit, lorsqu’on
  • 18:39 - 18:41
    a parlé des techniques de forage sous-marin.
  • 18:41 - 18:44
    Les premiers puits offshore s'appellaient des baleines.
  • 18:44 - 18:47
    Les premiers instruments de forage étaient des harpons.
  • 18:47 - 18:50
    C’est l’époque où nous avons presque exterminé les baleines.
  • 18:50 - 18:52
    Sommes-nous coinçés dans cette situation?
  • 18:52 - 18:54
    Depuis l’âge des cavernes,
  • 18:54 - 18:56
    chaque fois que nous avons besoin d’énergie,
  • 18:56 - 18:59
    nous faisons brûler quelque chose; encore aujourd’hui,
  • 18:59 - 19:01
    nous faisons toujours brûler un combustible
  • 19:01 - 19:04
    quand nous voulons de l'énergie.
  • 19:04 - 19:06
    Les gens disent
  • 19:06 - 19:08
    qu’on ne peut pas se tourner vers l’énergie propre
  • 19:08 - 19:11
    parce que ça coûte trop cher.
  • 19:11 - 19:13
    Mais qui dit que c’est trop cher?
  • 19:13 - 19:15
    Ceux qui vendent des combustibles fossiles.
  • 19:15 - 19:18
    Ce discours au sujet de l’énergie nous est familier,
  • 19:18 - 19:20
    ces gens qui disent que l’économie
  • 19:20 - 19:22
    ne supportera pas un tel changement, comme
  • 19:22 - 19:25
    du temps où l’énergie la moins chère était l'esclavage.
  • 19:25 - 19:28
    L’énergie est toujours une question morale.
  • 19:28 - 19:30
    C’est encore une question d’éthique en ce moment.
  • 19:30 - 19:32
    Il s’agit de trancher entre le bien et le mal.
  • 19:32 - 19:34
    Merci beaucoup.
Title:
Carl Safina : Victimes et responsables insoupçonnés de la marée noire
Speaker:
Carl Safina
Description:

Si le déversement de pétrole dans le golfe du Mexique défie l'entendement, nous savons au moins que c'est un désastre. Carl Safina se livre à un examen implacable des faits. Il soutient que les effets de cette catastrophe se répercutent bien au-delà du Golfe et que bon nombre des solutions proposées ne font qu’aggraver la situation.

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Video Language:
English
Team:
closed TED
Project:
TEDTalks
Duration:
19:35
Ròisein Kelly added a translation

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