Je veux comprendre | Hazem Kaddour | TEDxCarthage

Cette présentation a été donnée lors d'un événement TEDx local utilisant le format des conférences TED mais organisé indépendamment. En savoir plus : http://ted.com/tedx

Bonjour !

C'est bizarre, c'est moins impressionnant
aujourd'hui avec tout le monde,

qu'hier en répétition,
où il n'y avait personne !

Je ne suis pas là pour apporter
des solutions, je ne pense pas en avoir.

Je pense que vous en avez plus que moi,
je suis plutôt là pour comprendre.

Et mon talk aujourd'hui,
c'est essayer de comprendre : pourquoi ?

Depuis tout jeune, j'ai toujours
essayé de comprendre.

Quand j'étais tout petit,

(Arabe) Un jour, mon père m'a dit :
« On va te faire circoncire. »

J'avais 4 ans.

(Ar.) Moi : Pourquoi je dois
me faire circoncire ?

Père : Tu dois te faire circoncire !

Moi : Pourquoi on va me le couper ?

(Rires)

Il m'a répondu...
(Applaudissements)

La réponse qu'il m'a donnée
m'a marqué à vie :

(Ar.) Pour qu'il soit très très long
quand tu seras grand.

(Rires)

Papa n'est pas là,
mais merci pour cette réponse.

Je vous rassure tous, ça va !

Enfin j'espère, on vérifiera après.

Pour ceux... pour celles
qui veulent, pardon !

Ce qu'il y avait d'intéressant,
c'est que je vivais en France.

(Ar.) Et les Français ne font
pas la circoncision.

J'avais beaucoup d'hommes français
autour de moi, donc pas circoncis.

Donc j'allais les regarder,
je me posais la question :

(Ar.) Mais comment ils font ?

Est-ce qu'ils le prennent
et ils l'attachent,

Enfin bon !

Il a fallu que je revienne
quelques mois plus tard,

(Ar.) pour faire la circoncision.

J'ai demandé à mon grand-père.

(Ar.) Grand-père : C'est pour des raisons
de religion et d'hygiène.

Tout ça pour dire que lorsqu'on a 4 ans,
on se pose vraiment beaucoup de questions,

des questions vraiment idiotes.

Ce qu'il y a d'intéressant,
c'est qu'un enfant de 4 ans

se pose 400 questions par jour, et pose
autour de lui 400 questions par jour.

C'est drôle, mais un adulte
doit en poser...

Combien de questions vous
vous posez par jour, 5,10 ?

(Ar.) À part « Bonjour, comment vas-tu ?
Comment va la famille ? »

Peut-être maximum 10.

Ce qui est drôle
par rapport à la tolérance,

c'est que les adultes tolèrent des enfants
qui posent 400 questions par jour,

aussi idiotes, aussi bêtes,
aussi naïves soient-elles,

alors qu'ils ne tolèrent pas un adulte
qui pose 3 questions par jour,

alors que questionner,
c'est avant tout comprendre,

essayer de comprendre ce qu'il se passe,
comment les choses se font.

Mon talk aujourd'hui, c'est essayer de
voir comment la diversité des réponses

peut apporter plus de richesses
que des solutions qui arrivent,

parce que depuis quelques mois,
tout le monde donne sa solution,

mais très peu de personnes
osent poser des questions.

Pour ça, je vais passer une petite vidéo
qui explique un peu

dans quelle résignation acquise
- j'ai appris le mot il y a 15 minutes

(Ar.) [Inaudible]

dans quelle résignation acquise nous a mis
le régime depuis 20 ou 30 ans aujourd'hui.

Donc une petite vidéo qui explique
un peu notre comportement.

Vidéo (en anglais) :
Pour dresser des puces,

il faut un bocal en verre,
avec un couvercle.

On place les puces dans le bocal,
qu'on referme.

On les y laisse sans les déranger
pendant 3 jours.

Puis, quand on ouvre le bocal,
les puces ne sauteront pas en dehors.

En fait, les puces ne sauteront jamais
plus au-delà du niveau du couvercle.

Leur comportement est maintenant fixé
pour le reste de leur vie.

Et, quand ces puces se reproduiront,

leur descendance suivra
automatiquement leur exemple.

(Applaudissements)

HK : Les publicitaires dans la salle
comme moi vont reconnaître le spot,

c'est un spot,
je n'ai pas pu mettre la pub.

Mais c'est étonnant comment,
une fois qu'on est sur une route,

qu'on nous donne cette route,

on a du mal à en sortir
et à essayer de comprendre

pourquoi déjà on est sur cette route.

(Ar.) Quand j'ai grandi,
j'ai eu mon bac,

un peu comme tout le monde ici,
je suis passé à la fac,

de l'enseignement français
à l'enseignement étatique.

Premier examen d'économie,
je pensais avoir fait un excellent examen,

(Ar.) Je m'attendais à avoir 18, j'étais
content, je frime devant les filles.

Arrivent les résultats,
finalement, j'ai eu 8.

Et là je veux comprendre

pourquoi j'ai eu 8 alors que
j'étais persuadé d'avoir 18.

Donc j'ai posé la question.

J'ai posé la question autour de moi,
à tous mes amis.

Voilà ce que j'ai fait, j'ai mis ça,
ça comme exemple, j'ai rempli

(Ar.) Qu'as-tu mis
comme réponse au cours ?

Quel cours ?

(Ar.) Le cours du prof,

une ou deux lignes,
(Ar.) Il faut mettre

exactement le cours du prof pour avoir
une bonne note, ce n'est pas compliqué.

Et c'est comme ça que j'ai passé
les 4 années qui restent à l'IHEC.

(Ar.) Je remplis ma feuille d'examen
avec des réponses du cours,

et je réussis tranquille,
sans trop me poser de questions.

La seule voie que j'avais un peu
pour me poser des questions,

c'était le journal de l'école,
une tribune,

et on s'amusait à poser des questions,

à remettre en cause
ce qu'il se passait à l'école.

Finalement, le copier-coller,
malheureusement, fonctionne.

On va voir que le copier-coller
ne fonctionne pas tout le temps.

Où une fois, une solution inédite peut
sauver des emplois, tout simplement.

C'est une histoire que je n'ai pas vécue,
j'aurais aimé la vivre et en être le héros

mais ce n'est pas moi.

Dans une usine de dentifrice, très connue,

ils ont eu un problème de rentabilité
dans les années 50,

ils devaient virer
une partie des employés ;

réponse évidente à un problème de
rentabilité, c'est de virer des employés.

Le PDG a eu du courage, il est monté sur
scène, un peu comme moi aujourd'hui,

et il est venu raconter à ses employés
pourquoi il devait les virer :

parce qu'il y avait
un problème de rentabilité.

Et quelqu'un a levé la main, a dit :

« Je veux comprendre

pourquoi il n'y a pas d'autre solution
que de virer les employés.

- Le marché arrive à saturation,
je ne peux pas augmenter les ventes,

il n'y a pas plus de marché potentiel.
- Et si je vous apporte une solution ? »

La solution qu'il a apportée,

c'est tout simplement
prendre le dentifrice,

le diamètre de 5 mm, le passer à 7 mm.

À chaque fois qu'une personne
va mettre du dentifrice,

automatiquement, elle va en mettre plus.

Donc elle va devoir acheter plus,
et l'usine va vendre plus.

Et la personne a fini directeur
de la production de cette usine,

et cette usine n'a renvoyé personne.

Tout ça parce que
la personne a voulu comprendre

et qu'elle s'est posé des questions.

Encore une fois, poser des questions,
quelque part,

ça apporte des solutions auxquelles
on ne penserait pas automatiquement.

Poser des questions,
et essayer de comprendre,

ça permet de s'enrichir d'innombrables
réponses qu'on peut avoir,

des réponses auxquelles
on n'aurait pas pensé,

parce qu'on est trop dans notre chemin.

Je vais vous raconter
une dernière histoire.

Poser des questions n'a peut-être
pas apporté grand-chose,

mais ça a touché la NASA,
et ça sort de Paulo Coelho.

Je ne sais pas si vous êtes au courant,
mais la largeur entre 2 rails d'un train,

c'est 143,5 cm exactement.

Pourquoi ce n'est pas 100 ou 150,
c'est toute la question.

Paulo Coelho, dans son livre,
essaye de comprendre

pourquoi ça n'est pas un chiffre rond.

Et finalement, il creuse : c'est la même
largeur que les roues du wagon.

Et les roues du wagon ont
exactement la même largeur

que les charrettes et
les diligences à l'époque, OK.

Et ces charrettes et diligences étaient
mesurées selon la largeur de la chaussée.

Pourquoi la largeur de la chaussée
est-elle ainsi ?

Parce que les Romains ont décidé de
la faire ainsi, ça remonte à 2 500 ans.

Personne ne s'était posé la question.

Pourquoi les Romains ont décidé cela ?

Parce qu'ils ont pris 2 chevaux,
les ont mis l'un près de l'autre,

et ça fait exactement 143,5 cm.

On peut penser que ça ne sert
absolument à rien de savoir ça,

pourtant ça aurait pu économiser
à la NASA beaucoup d'argent.

Quand ils ont construit leur navette,
ils n'avaient pas remarqué

que pour transporter le carburant,
ils devaient passer par des trains.

Donc ils ont fait des citernes pour
le carburant qui étaient plus larges.

Ils ont dû tout changer après.

Parce qu'ils ne se sont
pas posé la question.

Encore une fois, poser la question,

ça n'est que simplement
une façon de trouver

une réponse à quelque chose
auquel on n'aurait pas pensé.

Ou de comprendre
une réponse que l'on a déjà.

C'est tout simplement
« Je veux comprendre ».

Et ce « Je veux comprendre »,
à quoi peut-il nous servir aujourd'hui ?

C'est que l'on a véritablement besoin
de penser à des solutions

auxquelles on n'aurait pas pensé avant.

Tout le monde a parlé
du régime parlementaire,

de l'Assemblée constituante, pourquoi ?

Des questions qu'on peut se poser.

Peut-être que c'est le bon chemin,
peut-être que non.

Mais qu'on se pose les bonnes questions.

Surtout, c'est une façon de mettre
des remparts au retour à la pensée unique,

au retour à l'obscurantisme,
au retour à l'extrémisme.

Parce que si on comprend
comment les choses se font,

si on comprend aussi
comment les autres sont,

on aura plus de facilités à se mettre,

comme disait Najib très bien,
dans leurs chaussures.

Je vais finir mon talk, que j'ai fait
assez rapidement, par des questions.

Je n'ai pas particulièrement envie
d'apporter de solutions,

donc je vais poser des questions,
si vous avez envie de répondre

sur le hashtag #TEDxCarthage.

Je ne comprends pas pourquoi,

lorsque les filles portent
des mini-jupes et des décolletés,

elles ne veulent pas que les garçons
les regardent, alors que bon !

En même temps,
je ne comprends pas pourquoi

pas mal de garçons portent
des t-shirts moulants

alors qu'ils ont du bide comme moi,
ce n'est pas très joli comme vous voyez.

Ce que je ne comprends pas surtout
c'est pourquoi il y a 2 jours,

deux pays ont pu s'opposer à 191 pays,
à l'Assemblée des Nations Unies.

Voilà merci, j'attends vos réponses.

(Applaudissements)