-
Je suis incarcéré à la maison d’arrêt
-
depuis le 3 septembre 2020.
-
Je suis arrivé terriblement
angoissé, stressé
-
et puis on se pose toujours
la question:
-
« pourquoi on est là ? »
-
et surtout, on se pose la question :
-
« pourquoi Dieu
nous a laissés venir là ? »
-
Virginie Toulouse et Laurent Burguière
-
ont été appelés
pour être au service
-
de l’aumônerie
de la maison d’arrêt de Caen,
-
dans le nord-ouest de la France.
-
Depuis 5 ans, ils se retrouvent
en équipe d’aumônerie
-
pour prier, partager et
préparer la mission ensemble.
-
La mission de l'aumônier
-
c’est d’assurer
-
le suivi spirituel,
-
l'assistance spirituelle
des personnes détenues
-
et d'assurer le culte.
-
Dans toutes les prisons de France,
-
il y a des équipes d'aumônerie
ou des aumôniers
-
qui sont là pour représenter
toutes les religions
-
et puis pour les chrétiens
il y a des aumôniers
-
orthodoxes, protestants et catholiques.
-
On intervient plusieurs fois par semaine
-
à la fois pour les visites en cellules ;
-
alors là ils sont plusieurs en cellule
-
donc ce n’est pas très confidentiel,
-
c'est une relation plutôt amicale
-
avec les personnes
qui fréquentent l'aumônerie.
-
On peut aussi les rencontrer
-
en entretien individuel,
-
donc là c'est beaucoup plus spirituel
-
et plus intérieur dans l'échange.
-
Et puis on les rencontre
une fois par semaine en groupe
-
et le dimanche pour la messe.
-
Quand on a démarré
il y a cinq ans,
-
on a commencé
par faire un groupe biblique
-
mais en fait il y avait un abîme
d'incompréhension,
-
parce qu’il n’y avait
aucune culture biblique
-
aucune culture religieuse.
-
Comment animer la pastorale en prison ?
-
Comment toucher les coeurs
-
de ceux qui ont soif
-
de la présence de Dieu ?
-
Laurent et Virginie vont faire appel
à l’équipe d’Alpha
-
pour trouver une méthode
-
pour accompagner les détenus
-
dans leur foi.
-
Ils commencent un parcours
Alpha prison
-
qui donne l'occasion
d'aborder des questions
-
sur le sens de la vie
-
et de découvrir comment la foi chrétienne
-
peut les libérer intérieurement
-
dans leur vie de tous les jours.
-
Au début le parcours Alpha
-
se développait
plus dans les paroisses
-
et dans les aumôneries
étudiantes et lycéennes
-
et ensuite est venue l’idée
de le faire dans les prisons
-
avec un terreau relativement fertile
et normal puisque
-
beaucoup de détenus arrivent
-
et se posent des questions
existentielles.
-
Les aumôniers de prisons
-
ont besoin à chaque fois d’avoir
un outil stable,
-
réplicable,
-
qui permette de découvrir
la foi chrétienne
-
pour la première fois
-
et aussi de faire communauté.
-
C’est aussi un petit peu le génie
du parcours Alpha
-
semaine après semaine, de cheminer,
-
et en fait les participants,
les invités
-
on ne sait plus d’ailleurs
qui est l’invité l’organisateur
-
à la fin du parcours
-
font comme une famille.
-
La maison d'arrêt de Caen
-
est une des premières prisons en France
-
à avoir mis en place
le parcours Alpha.
-
Alpha permet de découvrir l'amour de Dieu,
-
de rencontrer Jésus
-
et d'expérimenter
la puissance de l'Esprit Saint.
-
La parole se libère.
-
Ils sont d'abord spectateurs,
-
et puis ensuite
ils sont participants
-
et puis après ils sont acteurs
-
et ça c'est, ça c'était
c'est une des belles joies
-
qu'on a reçues
-
en faisant le parcours Alpha
au sein de l'aumônerie.
-
A la fois la parole se libère
-
et à la fois elle est extrêmement pudique,
-
parce que la parole,
la parole qui vient des tripes,
-
en prison c'est vraiment compliqué
-
parce que quelqu'un qui va partager
-
quelque chose d'important
-
n’a pas très envie d'entendre répéter
ce qu'il a dit.
-
Gwenaël Cormier, 32 ans,
est issu d’une famille ouvrière.
-
Il grandit dans une petite ville, Orbec,
à une heure de Caen.
-
A 13 ans ses parents divorcent
-
et il se retrouve avec son père
-
avant d’être placé dans un foyer.
-
Un an plus tard il fait le choix de vivre
-
dans un logement autonome.
-
Les soirées où j’arrivais
à rentrer chez moi,
-
c'était des soirées
-
qui se terminaient
bien pour moi.
-
Mais il y avait des soirées également
-
où on pouvait se faire emmener
par la police
-
si on se retrouvait
dans des bagarres
-
Oui, c’est ça, il y a eu des bagarres,
-
et quand tu faisais une bagarre,
-
tu te faisais arrêter, tu finissais...
-
Ben je finissais en garde à vue,
-
je ressortais de garde à vue
-
avec une convocation au tribunal,
-
rendez-vous où je n’allais pas
-
donc j’accumulais des peines.
-
Ma première incarcération
quand j’avais 20 ans.
-
A l’époque j’étais recherché par la police
depuis 8 mois
-
mais je n’en n’avais
vraiment pas connaissance.
-
C’est arrivé très rapidement,
-
je ne m’attendais pas
-
à ce qu’une chose comme ça
puisse m’arriver,
-
en fait c’est simplement
les conséquences de mes actes.
-
Très rapidement livré à moi-même,
-
je ne fais pas de grandes études,
-
je ne gagne pas de salaire mirobolant,
-
mais je souhaite vraiment pouvoir m’offrir
-
tout ce que je veux en fait
-
je souhaite briller auprès des autres.
-
Pour moi l’argent,
c’est un signe de liberté et de réussite,
-
donc je commets des délits
-
pour obtenir de l’argent.
-
Après quelques mois de détention,
Gwenaël est libéré par les juges.
-
Il se retrouve seul
-
face à lui même et à ses limites.
-
Il recommence ses délits
-
et ses remises en liberté
-
ne durent
qu’entre 2 et 8 mois maximum.
-
De nouveau il se retrouve incarcéré
à plusieurs reprises.
-
Pendant 10 ans,
il va faire des allers-retours en prison.
-
Il s’est mis à faire des bêtises.
-
J’ai été obligée de le mettre dehors
parce qu’il n’arrêtait pas.
-
Il a fait sa première incarcération
-
et nous avons été coupés.
-
Pour moi, j’avais loupé quelque chose
-
ça aurait pas dû se passer.
-
Je suis jamais allée le voir,
-
j’avais toujours dit
que j’irais jamais le voir.
-
La première fois,
je lui ai pas écrit,
-
c’est quelqu’un qui m’a appelée
pour me demander de lui écrire.
-
Je lui ai écrit
parce qu’on me l’a demandé ;
-
j’avais pas envie.
-
C’ est qu’à la troisième fois
-
qu’on a communiqué un peu,
-
mais pour moi, j’y arrivais pas.
-
Le fait que Gwenaël fasse
plusieurs allers-retours en maison d'arrêt
-
m'a généré différentes émotions
-
dans un premier temps
j'ai été triste, pleine de doutes,
-
je ne comprenais pas
comment il pouvait en arriver là
-
et après c'est vrai quand j'ai vu que
il y retournait assez régulièrement
-
j'avais un petit peu lâché prise
-
et je pensais qu'il changerait pas.
-
Ce qui m’a décidé de changer avant tout,
-
c’est peut-être
le fait de mûrir,
-
le fait que j’avais fait le tour
-
de ce que la détention pouvait m’offrir,
si on peut dire.
-
Et je me souviens que
sur une peine précédente,
-
je m’étais mis à lire une Bible
que j’avais trouvée,
-
qui traînait derrière une télé
-
dans une cellule.
-
Je m’étais mis à lire ça
-
mais au début c’était une recherche
-
vraiment des aventures historiques
-
de l’Exode tout ça,
je lisais ça comme un livre.
-
Il n’y avait pas de recherche.
-
Et du coup, sur cette dernière peine,
-
j’ai écrit aux aumôniers
pour avoir une Bible
-
pour continuer les aventures.
-
Une fois par semaine,
-
Gwenaël rencontre Virginie dans le parloir
-
pour partager ce qu’il vit interieurement
-
et ce qu’il découvre
dans la Parole de Dieu.
-
J’avais plus besoin de trouver
des réponses à des questions
-
qui, pour moi,
pouvaient me paraître importantes :
-
qu’est-ce que je fais ici ?
-
Pourquoi je suis là ?
-
Pourquoi je connais
telle personne et que je suis pas là ?
-
Pourquoi mon ami d’enfance a ça
et pourquoi moi j’ai ça ?
-
Les questions disparaissaient
-
et je n’avais plus besoin
de cette réponse pour avancer.
-
Douce neige en silence
-
doux feux du froid qui dansent,
-
les maisons minuscules
brûlent dans le blanc.
-
Puis la nuit s'illumine
-
et les branches s’inclinent…
-
Sur la pointe des pieds
-
elle a fait son entrée
-
ta grâce
-
J'avais cette solitude
-
qui avait totalement disparu
comme si quelqu’un vraiment...
-
Il y'avait une présence avec moi
j'étais pas seul, j'étais pas seul
-
J’ai débuté un parcours Alpha
-
et en fait tout ça a continué à alimenter
-
cette foi qui pour moi grandissait,
-
parce que je me sentais changer.
-
Un détenu qui me regardait mal, à l’époque
-
il fallait que j’aille le voir
pour qu’il arrête.
-
Là, en fait, la pensée,
mes pensées étaient différentes,
-
Ca continuait à me gêner,
bien entendu,
-
mais dans le regard de la personne,
-
je ne sentais plus une rivalité,
-
je sentais quelque chose de...
-
Il me regarde.
-
Moi, je crois que j'ai découvert
que Jésus était là,
-
que je n’apportais pas Jésus
mais que Jésus était vraiment là
-
et que j'avais juste à
à aider à lever le voile
-
pour que les personnes
découvrent ce trésor qu'ils ont en eux.
-
C'est vraiment notre objectif :
-
c'est qu'en fait ils sentent
tout cet amour de Dieu pour eux
-
et qu'ils entendent cette parole :
"en toi j'ai mis tout mon amour".
-
Après quelques années d’incarcération,
-
les juges libèrent Gwenaël
-
et comme à chaque remise en liberté
-
il n’a plus de logement ni de travail.
-
Il compte intégrer un centre
pour personnes sans domicile fixe.
-
mais les aumôniers de la maison d’arrêt
-
lui proposent
de contacter la communauté
-
des frères missionnaires
de Sainte Thérèse.
-
Gwenaël rencontre le frère Jean-Pierre,
-
responsable de cette communauté,
pour un entretien.
-
Il est accueilli dans cette grande famille
-
et y retrouve un cadre religieux
-
avec un quotidien rythmé par la prière,
le travail et la fraternité.
-
Cette découverte de Gwenaël
elle s’est faite tranquillement, je crois,
-
avec moi,
c’est quelqu’un qui s’est vite confié
-
et que j’ai senti vrai
dans ce qu’il pouvait vivre.
-
Ce qui a pu être difficile,
à certains moments,
-
c’est que Gwenaël
n’avait pas forcément toujours conscience
-
qu’il lui fallait rompre
avec peut-être ses chaînes d’autrefois.
-
Au fond ça a fait partie
d’un processus de liberté
-
qu’il a vécu avec des hauts et des bas
mais qui progressait quand même.
-
Et ce que j’ai beaucoup apprécié avec lui,
-
c’est la justesse de cette écoute
de la parole de Dieu dans sa vie.
-
Ce qu’il exprimait à chaque fois
me paraissait profondément juste
-
et c’était pas du tout ‘éthéré’,
-
non c’était vraiment ancré
dans son histoire
-
et dans son aujourd’hui.
-
Et j’ai senti vraiment une progression
-
de sa vie spirituelle
à travers ces petits partages.
-
Ça l’a conduit je crois aussi
sur un chemin
-
vers davantage d’humilité au sens que,
-
au départ,
il était sûr de ce qu’il faisait
-
et puis il avait peut-être
une petite tendance
-
à vouloir encore paraître
-
comme quelqu’un d’important
et de le faire sentir.
-
Au fur et à mesure qu’il a avancé
dans cet itinéraire spirituel,
-
j’ai senti une sorte de
descente dans l’humilité,
-
d’avoir moins besoin d’exprimer les choses
par son extérieur,
-
par la multiplicité des habits
ou des chaussures…
-
Même avec tout l’amour du Seigneur,
-
avec tous les proches,
-
tous ces nouveaux proches
-
que j’avais
autour de moi
-
je ne pouvais pas changer
du jour au lendemain,
-
ce n’est pas possible.
-
Ce cheminement doit être progressif
-
il faut limiter la casse.
-
« Chaque jour,
nous sommes confrontés
-
au choix
d’être de bons samaritains ou
-
des voyageurs indifférents
qui passent outre »
-
dit le Pape François dans l’encyclique
Fratelli Tutti (§ 69)
-
La fraternité animée
par la Communauté du Chemin Neuf
-
est un de ces lieux
-
où Gwenaël continue à grandir
dans la foi avec d’autre jeunes.
-
Ils se retrouvent chaque mois
et partagent sur ce qui fait leur vie,
-
prient et parfois se détendent ensemble.
-
Virginie nous avait interpellés
en nous disant :
-
il faut qu’il arrive
comme un frère parmi d’autres,
-
sans être étiqueté,
-
pour être pleinement libre
-
d’avoir une prise de parole personnelle.
-
En même temps
ça nous demande à nous d’être
-
très bienveillants
-
et attentifs sur son intégration
-
au sein de cette frat
-
et puis ça demande un engagement
humain et fraternel,
-
puisqu’à partir du moment
où on tend la main
-
on ne peut plus trop se permettre
de la retirer…
-
Quand on s’engage
on s’engage plein et tout entier,
-
on se mouille jusqu’au cou.
-
C’est vrai qu’au début
il était plutôt discret,
-
il avait du mal à parler.
-
Ça m’a interpellé en me disant :
-
si ça se trouve
il n’est pas à sa juste place,
-
il a du mal à se positionner.
-
Comment être en fraternité,
-
comment être frères
les uns avec les autres
-
et les uns pour les autres ?
-
Je dirais pour moi c’était l’occasion
-
de le mettre en pratique véritablement
-
et d’en prendre conscience.
-
Ça m’interroge beaucoup
sur notre capacité de rester ouverts,
-
de rester ouverts sur le monde.
-
Quand j’étais étudiant
j’étais pas mal interpellé
-
par la parole du pape François
-
qui disait qu’il fallait
aller aux frontières.
-
Chaudronnier pendant quelques temps,
-
Gwenaël reprend le travail
dans ce domaine.
-
Mais il ne reste pas longtemps
-
car il n’y retrouve plus
de goût ni de repères.
-
Démotivé et moins efficace,
il se fait virer à chaque fois.
-
Il demande à quelques amis de la paroisse
-
de l’aider à trouver un travail
-
dans un domaine
différent.
-
Une semaine après,
-
il est embauché
pour s’occuper d’une personne
-
en situation d’handicap.
-
Bonsoir Manu, comment ça va ?
-
Ça a été la matinée ?
-
Tu as bien mangé ce midi ?
-
Il fait un petit peu froid dehors,
-
mais je t’aurais bien proposé
d’aller faire un petit tour.
-
Qu’est-ce que tu en penses ?
-
Un petit tour à l’hippodrome ? OK.
-
Je pense vraiment que le Seigneur m’a fait
cette grâce de la charité.
-
J’adore aider les gens dans le besoin.
-
Bonjour,
je m’appelle Emmanuel, j’ai 36 ans.
-
Gwenaël et trois autres personnes
-
m’aident quotidiennement
-
dans mes besoins
les plus essentiels,
-
mais aussi
dans mes tâches administratives,
-
mes loisirs.
-
Ils m’apportent au quotidien
une aide précieuse.
-
Bien plus tard,
j’ai appris le passé de Gwenaël
-
mais cela n’a pas changé
mon regard au quotidien sur lui.
-
Lors du recrutement
-
j’ai fait confiance
à Xavier et Virginie
-
qui m’ont présenté Gwenaël.
-
Si j’avais su son passé,
-
ça aurait probablement
inquiété mon entourage.
-
J’ai rencontré Aminata quelques mois
après ma sortie de détention,
-
à cette époque où j’étais fragile,
-
où je commettais encore des délits.
-
Elle a été vraiment
d’un grand soutien pour moi.
-
Je ne savais pas qu’il avait été en prison
-
il me l’a appris
-
pas tout de suite mais assez rapidement
dans notre relation.
-
Voilà, je l’ai accepté comme il était
dans son entièreté...
-
Il m’a dit très rapidement
qu’il était en communauté,
-
qu’il habitait dans une communauté
avec des frères
-
et il parlait beaucoup
du fait d’aller à la messe
-
d’être dans une frat avec des jeunes pro.
-
Et du coup le fait de savoir
qu’il avait aussi cet entourage
-
cet environnement autour de lui,
-
moi ça m’a énormément rassurée,
-
ça m’a énormément rassurée
par rapport à son parcours.
-
Voilà, il a fait de la prison, maintenant
il veut passer à autre chose dans sa vie,
-
il le verbalisait très clairement.
-
Il ne l’a pas mis en place tout de suite
-
parce qu’il était encore tenté
par son ancienne vie,
-
ses anciennes habitudes
-
et puis on sentait
qu’il était un peu tiraillé, en fait,
-
par ces deux mondes :
-
le monde qu’il a toujours connu
-
et le monde qu’il découvrait,
qui était bienveillant,
-
qui était cette espèce de petit cocon
-
qui l’accueille
de manière inconditionnelle,
-
enfin il était un peu
en mode « grand écart » !
-
Ça n’a pas été simple
pour elle tout le temps
-
parce que je continuais
mes délits tout en étant avec elle.
-
Mes délits,
ou disons mes comportements de fêtard.
-
Moi j’ai pu du coup rencontrer Virginie,
-
j’ai pu échanger aussi
avec frère Jean-Pierre :
-
« mais Gwenaël là ça ne va pas,
-
il fait n’importe quoi,
vous êtes d’accord ? »
-
« Oui, on est tous d’accord,
-
il fait n’importe quoi, ça ne va pas… »
-
Par rapport aux dérapages
que pouvait vivre Gwenaël,
-
d’une part
je ne m’en étonnais pas trop
-
parce que je sais bien
que les choses
-
ne changent pas
du jour au lendemain.
-
Je n’ hésitais pas trop à pouvoir dire :
-
« attends là
il y a quelque chose qui ne va pas,
-
prends conscience
qu’avec ce que tu es en train de faire,
-
tu te remets dans un système
qui va peut-être te détruire
-
et non pas te construire ».
-
C’est marrant,
je n’ai jamais désespéré de lui.
-
Je ne sais pas pourquoi…
-
Peut-être parce
qu’il y avait chez lui une honnêteté,
-
une vérité qui faisait que
quand on est dans cette attitude-là,
-
l’esprit de vérité
fait son chemin et fait vivre.
-
C’était un soir, enfin une nuit
-
où il m’a appelé
à 1 heure ½ du matin en me disant :
-
« je suis dans une mauvaise posture,
-
j’ai besoin d’un coup de main,
-
est-ce que tu peux venir me chercher ? »
-
c'était un petit peu compliqué
-
Il a fallu s’exfiltrer d’une relation
-
un peu complexe de bagarre.
-
Du coup ça oblige à puiser
un peu plus dans la relation,
-
d’être un peu plus en vérité
-
et encore une fois
de ne pas être dans le jugement
-
mais juste dans l’accueil de l’autre.
-
Ça m’a permis d’ouvrir les yeux aussi
-
sur le besoin de Gwenaël
à ce moment-là dans sa vie,
-
sur les difficultés,
-
sur le fait que c’est pas parce
qu’on rencontre le Christ en prison
-
et qu’on sort libre que tout est gagné,
-
que tout est facile,
-
qu’il n’y a plus de combat ;
il y a encore du combat.
-
Oui ça nous arrive d'être déçus.
-
Ce n’est pas un sentiment
que j'aime éprouver
-
et je me bats un peu
avec ce sentiment de déception
-
parce que qui suis-je pour être déçue ?
-
Et puis à la fois je sais,
Bonhoeffer le dit :
-
il faut être déçu,
-
déçu par les autres
pour vraiment les aimer,
-
pour éprouver vraiment
notre amour pour eux.
-
Grâce !
-
Millier de fleurs
fondues, de blanches flammes,
-
Mille touchers d’amour dans l’âme
-
Déchire enfin le voile
que je voie ton visage !
-
Grâce !
-
Grâce d’un roi qui se tient caché là,
-
grâce de toi qui me tend les bras,
-
O que je voie ton visage !
-
Et petit à petit avec cette personne,
-
donc Aminata,
je me suis dit : mais elle reste là ?
-
Je continue à casser des voitures,
-
à rouler sans permis…
-
je n’ai rien à lui apporter en fait.
-
Qu’est ce qu’elle fait avec moi ?
-
Elle a deux enfants,
qu’est-ce qu’elle fait ?
-
Ça m’a interpellé.
-
Et donc j’ai pris la decision
-
de ne plus fréquenter
le milieu de la nuit,
-
qui a toujours été la chose
qui m’a tiré vers le bas
-
Je suis très habitée par cette parole
d'Etty Hillesum
-
qui dit que "la saloperie des autres
est aussi en nous".
-
Et moi j'ajoute toujours :
mais la beauté aussi.
-
Et la beauté des autres est aussi en moi.
-
Gwenaël est quelqu’un de croyant,
-
donc sa foi est très présente chez lui,
-
il est très pratiquant en fait.
-
Du coup il y a quelque chose
-
qui l’habite intérieurement,
et il le pratique tous les jours.
-
Moi je n’ai pas adhéré forcément
à une pratique religieuse
-
mais je trouve ça chouette
qu’il y ait des gens qui aient la foi
-
et qui sont heureux comme ça,
-
qui trouvent de l’espoir comme ça,
-
pour qui la vie fait un sens et tout.
-
Il m’a expliqué que des fois je pouvais
lui mettre des petits papiers
-
pour qu’il fasse une prière,
-
donc des fois quand j’ai
des demandes particulières,
-
je pose ça sur son petit lieu de prière.
-
Moi je trouve que c‘est
quelque chose en plus, oui.
-
En fait il a une excuse ou une obligation
-
pour avoir toujours son cœur ouvert.
-
On peut être chez soi
et pouvoir ouvrir ses fenêtres,
-
voir les petits oiseaux, l'herbe,
les arbres, aller et venir
-
et être profondément enchaîné,
emprisonné, en soi.
-
Et on peut être derrière les barreaux
-
et être profondément libre.
-
Libre d'aimer, libre de pardonner,
libre de témoigner.
-
Et ça nous bouleverse à chaque fois
-
quand on voit ces hommes
accéder à la liberté intérieure.
-
Je pense que la religion rend moins seul,
-
crée des liens et des contacts
-
qu'il n'avait peut-être pas forcément
-
lors de toutes ses sorties auparavant.
-
C'est peut-être pour ça
-
qu'il n’avait jamais
changé finalement avant.
-
Ça m'a permis de me rendre compte
-
que tout le monde peut changer en fait
-
si on s'en donne la peine,
si on est bien entouré surtout.
-
Il est heureux !
-
C’est la seule chose qu’on veut
pour ses enfants,
-
donc là,
je sais qu’il est heureux maintenant.
-
Même si je ne lui dis pas,
je suis très fière de lui.
-
Des chaînes sont tombées,
des liens se retissent,
-
la famille de Gwenael le redécouvre.
-
Parfois les moments sont assez longs
-
parce que l’on ne sait pas trop
quoi se dire.
-
Mais on est ensemble et
ça nourrit suffisamment
-
pour libérer la parole par la suite.
-
Ce qui est bien
avec notre Seigneur Jésus-Christ,
-
on a cette liberté intérieure
-
qui nous permet
de supporter cette incarcération.
-
Personnellement je me dis toujours
-
que j’ai de la chance de l’avoir.
-
C’est lui qui me dirige
et qui me construit,
-
chaque jour, chaque instant.
-
Mon espérance par rapport aux jeunes,
-
c’est de croire que si on a un cœur ouvert
-
à leur présence, à leurs difficultés,
-
à ce qu’ils peuvent vivre
y compris les pires choses
-
le fait de les écouter
-
et qu’ils puissent rencontrer
un regard bienveillant et espérant,
-
alors il y a plein de choses
qui peuvent s’ouvrir en eux.
-
Je suis sûr que c’est ce dont
ils ont le plus besoin,
-
qu’ils puissent rencontrer des gens
qui les aiment tout simplement,
-
qui les accueillent avec ce qu’ils sont
et qui espèrent en eux.
-
C’est bien ça il me semble
l’appel que le Seigneur nous fait
-
auprès de ceux que nous pouvons rencontrer
-
Moi j’ai un espoir
j’ai un peu une vision ou un rêve :
-
c’est de voir des anciens détenus
prendre le micro dans les églises,
-
dans les cultes, dans les messes et
témoigner de ce qu’ils ont vécu !
-
Et je rêve de voir des paroissiens
-
totalement éberlués
de ce que Dieu peut faire en prison,
-
d’être éberlués du courage aussi
de ces anciens détenus,
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de témoigner de Dieu, de Jésus,
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de témoigner ouvertement
de ce qu’il a fait dans leur vie.
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Et mon rêve c’est
que les familles de ces détenus
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qui ont vu ces transformations
cette libération,
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soient sur ces bancs d’église,
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pour accompagner
les membres de leur famille
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qui étaient en prison
et sont maintenant libérés.
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De la lettre de St Paul aux Galates
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« Frères, vous avez été appelés à la liberté,
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seulement ne faites pas de cette liberté
un prétexte de vivre selon la chair !
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mais rendez-vous, par la charité,
serviteurs les uns des autres.
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Car toute la loi est accomplie
dans une seule parole, dans celle-ci :
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Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
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Nous pouvons prier pour que le Seigneur
vienne visiter toutes nos prisons intérieures
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et tout ce qui nous empêche de vivre
pleinement libres.
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Que le Seigneur fasse son travail
de libération en profondeur.
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Nous pouvons confier
au Seigneur
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toutes les personnes détenues
à ce moment délicat de la sortie.
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Qu'elles trouvent, dans l'Eglise
et en chacun de nous,
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des frères et sœurs pour les accueillir
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et les accompagner sur un chemin de vie.