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Parlons de la mort | Stephen Cave | TEDxBratislava

  • 0:12 - 0:14
    Bonsoir Mesdames et Messieurs.
  • 0:15 - 0:17
    Je voudrais vous poser une question :
  • 0:18 - 0:23
    qui parmi vous se souvient du moment
    où il a réalisé qu'il mourrait un jour ?
  • 0:24 - 0:26
    Je m'en souviens.
  • 0:26 - 0:30
    J'étais un gamin
    et mon grand-père venait de mourir.
  • 0:30 - 0:33
    Je me rappelle que,
    quelques jours plus tard,
  • 0:33 - 0:37
    j'étais dans mon lit,
    en train d'essayer de comprendre.
  • 0:37 - 0:40
    Qu'est-ce que ça signifie
    qu'il soit mort ?
  • 0:40 - 0:42
    Où était-il parti ?
  • 0:42 - 0:47
    Il me semblait qu'un vide
    s'était ouvert et l'avait englouti.
  • 0:48 - 0:50
    Très vite, la réalité m'a rattrapé :
  • 0:50 - 0:53
    si mon grand-père pouvait mourir,
    moi aussi alors ?
  • 0:54 - 0:57
    Ce vide allait-il apparaître
    pour moi et m'engloutir ?
  • 0:57 - 1:00
    Se cachait-il sous mon lit
    pour m'engloutir durant mon sommeil ?
  • 1:02 - 1:07
    Tous les enfants prennent conscience
    de la mort à un moment.
  • 1:07 - 1:10
    Ça arrive sous des formes différentes,
    souvent progressivement.
  • 1:10 - 1:13
    Notre idée de la mort se développe
    quand nous grandissons.
  • 1:13 - 1:18
    Si vous fouillez les coins sombres
    de votre mémoire,
  • 1:18 - 1:22
    vous pourrez vous rappeler
    un sentiment similaire au mien
  • 1:22 - 1:26
    à la mort de mon grand-père et au moment
    où j'ai compris que ça m'arriverait aussi.
  • 1:26 - 1:31
    Ce sentiment que, derrière tout ça,
    le vide nous attend.
  • 1:32 - 1:34
    Ce développement
    au moment de notre enfance
  • 1:34 - 1:37
    est le reflet du développement
    de notre espèce.
  • 1:37 - 1:42
    C'est comme s'il y avait
    un moment charnière dans l'enfance
  • 1:42 - 1:46
    où notre conscience de soi et du temps
    devient suffisamment sophistiquée
  • 1:46 - 1:49
    pour réaliser que nous sommes mortels.
  • 1:50 - 1:53
    Par conséquent, à un moment donné
    de l'évolution des espèces,
  • 1:53 - 1:57
    une conscience de soi et du temps
    des premiers humains
  • 1:57 - 1:59
    est devenue suffisamment sophistiquée
  • 1:59 - 2:03
    pour qu'ils soient les premiers humains
    à réaliser qu'ils allaient mourir.
  • 2:05 - 2:08
    C'est, en quelque sorte,
    notre malédiction.
  • 2:08 - 2:11
    C'est le prix à payer pour être si malin.
  • 2:12 - 2:14
    Nous devons vivre avec le savoir
  • 2:14 - 2:18
    que la pire des choses qui puisse
    nous arriver, nous arrivera un jour.
  • 2:18 - 2:23
    La fin de tous nos projets, nos espoirs,
    nos rêves, notre monde personnel.
  • 2:23 - 2:28
    Nous vivons tous dans l'ombre
    d'une apocalypse personnelle.
  • 2:29 - 2:33
    C'est effrayant et terrifiant.
    C'est pour ça que nous éludons le sujet.
  • 2:33 - 2:36
    Dans mon cas, quand j'avais 5 ans environ,
  • 2:36 - 2:39
    cela c'est traduit
    par une question à ma mère.
  • 2:40 - 2:44
    Quand je lui ai demandé :
    « Que se passe-t-il quand on meurt ? »,
  • 2:44 - 2:48
    les adultes de mon entourage
    m'ont répondu dans un anglais confus,
  • 2:48 - 2:51
    mêlant maladresse
    et foi chrétienne sans conviction.
  • 2:52 - 2:55
    Mon grand-père était
    « là-haut et veillait sur nous ».
  • 2:55 - 2:58
    Voilà la phrase qui m'a été serinée.
  • 2:58 - 3:01
    Et si je devais mourir,
    mais ça n'allait pas arriver bien sûr,
  • 3:01 - 3:04
    alors, moi aussi, j'irais là-haut.
  • 3:04 - 3:07
    Ça faisait de la mort une sorte
    d'ascenseur existentiel.
  • 3:09 - 3:11
    Ça n'était pas très plausible,
    bien entendu.
  • 3:12 - 3:15
    A l'époque, je regardais beaucoup
    d'émissions pour enfants.
  • 3:15 - 3:17
    C'était l'époque
    de l'exploration spatiale.
  • 3:17 - 3:20
    On lançait souvent
    des fusées dans le ciel,
  • 3:20 - 3:22
    dans l'espace, « là-haut ».
  • 3:22 - 3:24
    Mais une fois de retour,
    aucun des astronautes
  • 3:24 - 3:27
    n'a jamais mentionné
    qu'il y avait rencontré mon grand-père.
  • 3:27 - 3:30
    Ou n'importe quelle autre personne morte.
  • 3:30 - 3:31
    J'avais peur.
  • 3:31 - 3:33
    L'idée d'utiliser un ascenseur existentiel
  • 3:33 - 3:36
    pour rencontrer mon grand-père
    était plus attrayante
  • 3:36 - 3:39
    que celle d'un vide qui m'avalerait
    pendant mon sommeil.
  • 3:40 - 3:44
    J'y ai donc cru, même si
    la proposition était absurde.
  • 3:45 - 3:48
    Ce processus de pensée
    que j'ai traversé enfant,
  • 3:48 - 3:51
    et retraversé à de nombreuses reprises
    une fois devenu adulte,
  • 3:51 - 3:55
    est le produit d'un phénomène
    que les psychologues appellent « biais ».
  • 3:55 - 3:57
    Un biais est un travers
  • 3:57 - 4:00
    qui fait que notre compréhension
    est systématiquement faussée,
  • 4:00 - 4:04
    qui fait que nous méprenons,
    évaluons mal et distordons la réalité,
  • 4:04 - 4:06
    qui fait que nous voyons
    ce que nous voulons voir.
  • 4:06 - 4:10
    Ce biais agit ainsi :
  • 4:10 - 4:14
    quand on confronte quelqu'un
    avec le fait qu'il mourra un jour,
  • 4:14 - 4:18
    il croira n'importe quelle histoire
    qui lui affirme que ce n'est pas vrai
  • 4:18 - 4:21
    et qu'il pourra vivre éternellement.
  • 4:21 - 4:24
    Même si cela signifie
    l'usage d'un ascenseur existentiel.
  • 4:26 - 4:30
    C'est sans doute
    le plus grand biais au monde.
  • 4:30 - 4:34
    Plus de 400 études empiriques
    l'ont démontré.
  • 4:34 - 4:38
    Ces études sont autant ingénieuses
    qu'elles sont simples :
  • 4:38 - 4:41
    on réunit deux cohortes
    de personnes similaires
  • 4:41 - 4:43
    sur tous les aspects pertinents.
  • 4:43 - 4:47
    On rappelle à une cohorte seulement
    qu'ils mourront un jour.
  • 4:47 - 4:49
    On compare ensuite leur comportement.
  • 4:49 - 4:52
    On peut ainsi observer comment
    la conscience de sa propre mortalité
  • 4:52 - 4:55
    influence le comportement des gens.
  • 4:56 - 4:59
    A chaque étude,
    on obtient le même résultat :
  • 4:59 - 5:01
    ceux à qui on a rappelé leur mortalité
  • 5:01 - 5:04
    croient plus facilement les histoires
  • 5:04 - 5:07
    qui leur disent qu'ils échapperont
    à la mort, pour vivre éternellement.
  • 5:07 - 5:12
    Voici un exemple : une étude récente
    a sélectionné deux cohortes d'agnostiques,
  • 5:12 - 5:16
    des personnes qui n'ont pas fait de choix
    de croyance religieuse, en l'occurrence.
  • 5:16 - 5:20
    On a demandé au premier groupe
    de penser à la mort,
  • 5:20 - 5:23
    et, au deuxième groupe,
    de penser à la solitude.
  • 5:23 - 5:27
    On les a ensuite questionnés
    sur leurs croyances religieuses.
  • 5:27 - 5:29
    Ceux qui avaient pensé à la mort
  • 5:29 - 5:35
    étaient deux fois plus susceptibles
    d'exprimer leur foi en Dieu et Jésus.
  • 5:35 - 5:36
    Deux fois plus,
  • 5:36 - 5:39
    alors que les deux groupes
    sont caractérisés par leur agnosticisme.
  • 5:39 - 5:43
    Implantez la peur de la mort
    dans leur esprit et ils embrassent Jésus.
  • 5:45 - 5:49
    Ceci montre que rappeler la mort
    crée un biais chez les gens
  • 5:49 - 5:52
    qui les poussent à croire,
    faisant fi de toutes preuves.
  • 5:52 - 5:56
    Ça fonctionne avec la religion
    et tous les systèmes de croyance
  • 5:56 - 5:59
    qui promettent l'immortalité
    sous une forme ou une autre :
  • 5:59 - 6:04
    la célébrité, avoir des enfants,
    voire le patriotisme
  • 6:04 - 6:07
    qui nous promet de pouvoir survivre
    au sein d’un ensemble qui nous dépasse.
  • 6:07 - 6:11
    Ce biais a formé la trajectoire
    de l'histoire de l'humanité.
  • 6:12 - 6:17
    On appelle la théorie qui vient étoffer
    ce biais dans plus de 400 études
  • 6:17 - 6:19
    la théorie de la gestion de la terreur.
  • 6:19 - 6:20
    C'est une idée simple :
  • 6:20 - 6:26
    on développe notre vision du monde,
    ces histoires que nous nous racontons,
  • 6:26 - 6:28
    sur l'univers, et notre place,
  • 6:29 - 6:32
    avec pour but de nous aider
    à gérer notre terreur de la mort.
  • 6:34 - 6:38
    Ces histoires sur l'immortalité
    ont des centaines de visages différents.
  • 6:38 - 6:42
    Je pense que derrière
    cette diversité apparente,
  • 6:42 - 6:48
    il y a 4 fils conducteurs de base
    que peuvent adopter ces histoires.
  • 6:50 - 6:53
    Nous pouvons les distinguer
    alors qu'ils se répètent dans l'histoire.
  • 6:53 - 6:57
    Il y a, certes, quelques variantes
    qui reflètent les termes à la mode.
  • 6:57 - 7:02
    Je vais vous présenter
    ces 4 histoires sur l'immortalité.
  • 7:02 - 7:04
    Je voudrais vous donner un aperçu
  • 7:04 - 7:06
    sur les mots utilisés pour les conter
  • 7:06 - 7:08
    par chaque culture ou génération,
  • 7:08 - 7:10
    avec un vocabulaire qui leur est propre.
  • 7:10 - 7:16
    La première narration est la plus simple :
    nous voulons éviter la mort.
  • 7:17 - 7:20
    Le rêve de réaliser cela dans ce corps,
    dans ce monde, pour toujours,
  • 7:20 - 7:23
    est le premier et le plus simple
    des fils narratifs sur l'immortalité.
  • 7:23 - 7:26
    Ça peut sembler incroyable,
  • 7:26 - 7:29
    mais presque toutes les cultures
    dans l'histoire de l'humanité
  • 7:29 - 7:34
    possèdent un mythe,
    une légende, un élixir de vie,
  • 7:34 - 7:37
    une fontaine de jouvence
    ou autre chose qui contient la promesse
  • 7:37 - 7:39
    de nous laisser vivre éternellement.
  • 7:41 - 7:44
    On en trouve dans l’Égypte ancienne,
    à Babylone, l'Inde antique,
  • 7:44 - 7:48
    durant toute l'histoire de l'Europe,
    dans les expériences des alchimistes
  • 7:48 - 7:50
    et, bien entendu, nous y croyons
    toujours aujourd'hui,
  • 7:50 - 7:54
    en utilisant le vocabulaire scientifique
    pour narrer cette histoire.
  • 7:55 - 7:58
    Il y a cent ans, on a découvert
    les hormones.
  • 7:58 - 8:01
    On a cru que les traitements hormonaux
    allaient nous guérir
  • 8:01 - 8:02
    de la vieillesse et de la maladie.
  • 8:02 - 8:05
    Maintenant, nous fondons nos espoirs
    sur les cellules souches,
  • 8:05 - 8:08
    l'ingénierie génétique
    et les nanotechnologies.
  • 8:08 - 8:11
    Cependant, le concept
    que la science peut guérir la mort
  • 8:11 - 8:16
    est un chapitre supplémentaire
    ajouté à l'histoire de l'élixir magique,
  • 8:16 - 8:20
    qui est aussi vieille que la civilisation.
  • 8:20 - 8:23
    Miser sur l'idée de découvrir un élixir,
  • 8:23 - 8:26
    s'avère pourtant une stratégie risquée.
  • 8:26 - 8:28
    Si on relit bien l'histoire,
  • 8:28 - 8:32
    tous ceux qui ont tenté
    de trouver un élixir,
  • 8:32 - 8:35
    ont une seule chose en commun :
    ils sont tous morts.
  • 8:35 - 8:36
    (Rires)
  • 8:36 - 8:40
    On a donc besoin d'un plan B.
  • 8:40 - 8:43
    Le deuxième fil narratif
    nous offre ce plan B :
  • 8:43 - 8:45
    la résurrection.
  • 8:45 - 8:48
    C'est le concept que je suis
    dans cette enveloppe charnelle,
  • 8:48 - 8:49
    je suis un organisme physique,
  • 8:49 - 8:51
    qui accepte que je mourrai,
  • 8:51 - 8:55
    mais qui, en dépit de ça,
    je peux m'élever et vivre à nouveau.
  • 8:56 - 8:58
    En d'autres mots, je peux faire
    ce que Jésus a fait.
  • 8:58 - 9:01
    Jésus est mort,
    enseveli pendant trois jours,
  • 9:01 - 9:03
    il s'est levé et était à nouveau vivant.
  • 9:03 - 9:05
    L'idée que nous pouvons tous ressusciter
  • 9:05 - 9:08
    pour vivre à nouveau
    est une croyance orthodoxe,
  • 9:08 - 9:09
    qui n'est pas limitée aux Chrétiens,
  • 9:09 - 9:11
    mais aussi chez les Juifs
    et les Musulmans.
  • 9:11 - 9:15
    Notre désir de croire cette histoire
    est si ancré en nous
  • 9:15 - 9:19
    que nous la ré-inventons à nouveau
    à la sauce scientifique.
  • 9:19 - 9:21
    La cryogénisation, par exemple.
  • 9:21 - 9:25
    Il s'agit de l'idée que nous pouvons
    être congelé quand nous mourrons,
  • 9:26 - 9:29
    et que dans le futur, quand la technologie
    aura suffisamment évolué,
  • 9:29 - 9:33
    on pourra nous dégeler, nous réparer,
    nous réanimer et nous ressusciter.
  • 9:33 - 9:37
    D'autres croient en un Dieu omnipotent
    qui les ressuscitera pour vivre à nouveau.
  • 9:37 - 9:40
    D'autres croient qu'un scientifique
    omnipotent le fera.
  • 9:41 - 9:44
    Pour d'autres, la résurrection,
  • 9:44 - 9:48
    l'idée de sortir de sa tombe,
    ressemble à un mauvais film de zombies.
  • 9:48 - 9:51
    Ils trouvent leur corps trop brouillon,
  • 9:51 - 9:53
    trop peu fiable
    pour garantir la vie éternelle.
  • 9:53 - 9:59
    Ils fondent leur espoir dans le troisième
    type de fil narratif sur l'immortalité,
  • 9:59 - 10:03
    le concept de quitter son corps
    et vivre comme une âme.
  • 10:03 - 10:07
    La majorité des hommes sur Terre
    croient avoir une âme.
  • 10:07 - 10:10
    Cette idée est fondamentale
    pour de nombreuses religions.
  • 10:10 - 10:14
    Que ce soit sous sa forme actuelle
    ou sous sa forme traditionnelle,
  • 10:14 - 10:16
    l'idée d'une âme est très populaire.
  • 10:16 - 10:20
    On ne peut pas s'empêcher
    de l'adapter au monde digital.
  • 10:20 - 10:23
    Par exemple, l'idée qu'on peut
    quitter son corps
  • 10:23 - 10:27
    en téléchargeant son esprit, son essence,
    son véritable moi, sur un ordinateur.
  • 10:27 - 10:30
    Nous pouvons ainsi vivre
    en tant qu'avatar, dans l'éther.
  • 10:32 - 10:34
    Il y a évidemment des sceptiques
  • 10:34 - 10:36
    qui disent que la lecture
    des faits scientifiques,
  • 10:36 - 10:38
    en neuroscience principalement,
  • 10:38 - 10:41
    suggère que notre esprit,
    notre essence, notre vrai moi,
  • 10:41 - 10:44
    est fortement lié
    à un organe précis de notre corps :
  • 10:44 - 10:45
    notre cerveau.
  • 10:45 - 10:48
    Ces sceptiques trouvent du réconfort
  • 10:48 - 10:52
    dans la quatrième histoire
    sur l'immortalité : l'héritage.
  • 10:52 - 10:54
    Il s'agit du concept qu'on peut vivre
  • 10:54 - 10:57
    à travers l'écho
    que l'on laisse dans ce monde.
  • 10:57 - 11:01
    Comme Achille, le valeureux soldat grec,
    qui a sacrifié sa vie à Troie,
  • 11:01 - 11:04
    afin de gagner sa gloire éternelle.
  • 11:05 - 11:08
    La poursuite de la gloire
    est très répandue et très populaire.
  • 11:08 - 11:09
    Aujourd'hui plus que jamais.
  • 11:09 - 11:12
    A l'ère digitale, c'est même encore
    plus facile d'y parvenir.
  • 11:12 - 11:16
    Pas besoin d'être un soldat courageux
    comme Achille, un grand roi, un héros.
  • 11:16 - 11:19
    On a juste besoin d'une connection
    internet et d'un chat rigolo.
  • 11:19 - 11:21
    (Rires)
  • 11:21 - 11:25
    Certains privilégient un héritage
    plus tangible, biologique :
  • 11:25 - 11:26
    les enfants, par exemple.
  • 11:26 - 11:30
    Ils peuvent aussi être attirés par une vie
    qui les transcende pour un bien plus grand
  • 11:30 - 11:34
    comme une nation, une famille, une tribu,
    leur patrimoine génétique.
  • 11:35 - 11:38
    Il reste encore quelques sceptiques
    qui remettent en question
  • 11:38 - 11:40
    l'héritage comme immortalité.
  • 11:40 - 11:42
    Woody Allen, par exemple, dit ceci :
  • 11:42 - 11:45
    « Je ne veux pas vivre dans le souvenir
    de mes compatriotes,
  • 11:45 - 11:47
    je veux vivre dans mon appartement ».
  • 11:47 - 11:48
    (Rires)
  • 11:48 - 11:50
    Pour continuer de vivre
    dans son appartement,
  • 11:50 - 11:52
    on a besoin d'un élixir.
  • 11:52 - 11:55
    Notre première narration
    sur l'immortalité.
  • 11:56 - 11:59
    Il y a donc 4 narrations de base
    sur l'immortalité.
  • 11:59 - 12:01
    Je viens d'essayer d'expliquer
  • 12:01 - 12:03
    la manière dont
    chaque génération les raconte,
  • 12:03 - 12:06
    avec des petites nuances
    qui sont une adaptation au goût du jour.
  • 12:06 - 12:12
    Le fait même qu'elles se répètent ainsi,
    sous de formes similaires,
  • 12:12 - 12:15
    mais dans des systèmes de croyances
    si différents est une indication,
  • 12:15 - 12:16
    que nous devrions être réservés
  • 12:16 - 12:20
    sur la vérité de toutes ces narrations.
  • 12:21 - 12:24
    Le fait que certains croient
    en un Dieu omnipotent
  • 12:24 - 12:27
    qui va les ressusciter
    pour qu'ils puissent vivre à nouveau
  • 12:27 - 12:30
    et que d'autres croient qu'un scientifique
    omnipotent s'en chargera
  • 12:30 - 12:35
    suggère qu'aucun n'y croit vraiment
    sur base de preuves scientifiques.
  • 12:35 - 12:40
    Nous croyons ces histoires
    car nous avons un biais qui nous y pousse.
  • 12:40 - 12:45
    Si nous avons ce biais,
    c'est parce que nous craignons la mort.
  • 12:46 - 12:51
    La question à se poser est donc celle-ci :
    sommes-nous condamnés à mener une vie
  • 12:51 - 12:55
    pétrie par la peur et le déni ?
  • 12:55 - 12:58
    Sommes-nous capables
    de dépasser ce biais ?
  • 12:58 - 13:02
    Le philosophe grec Épicure le pensait.
  • 13:03 - 13:08
    Il argumente que la peur de la mort
    est naturelle mais pas rationnelle.
  • 13:09 - 13:12
    La mort, dit-il, n'est rien pour nous,
  • 13:12 - 13:14
    parce que quand nous sommes ici,
    la mort n'est pas,
  • 13:14 - 13:17
    et si la mort est là,
    c'est que nous ne sommes plus là.
  • 13:19 - 13:22
    C’est une cette citation très connue
    mais difficile à vraiment comprendre
  • 13:22 - 13:23
    et à internaliser.
  • 13:23 - 13:26
    Car c'est précisément
    cette idée de n'être plus là
  • 13:26 - 13:27
    qui est si difficile à imaginer.
  • 13:27 - 13:31
    Un autre philosophe, Ludwig Wittgenstein,
    a tenté de l'expliquer 2000 ans plus tard.
  • 13:31 - 13:32
    Voici ce qu'il dit :
  • 13:32 - 13:35
    « La mort n'est pas
    un événement de la vie.
  • 13:35 - 13:39
    On ne vit pas la mort. »
  • 13:39 - 13:43
    Il a ajouté : « En quelque sorte,
    que la vie n'a pas de fin. »
  • 13:44 - 13:49
    Si, enfant, il était naturel de craindre
    d'être englouti par le vide,
  • 13:49 - 13:53
    ce n'était pas rationnel, parce que
    personne d'entre nous ne vivra jamais
  • 13:53 - 13:57
    un engloutissement par le vide.
  • 13:58 - 14:00
    Dépasser ce biais
    n'est cependant pas aisé,
  • 14:00 - 14:03
    car la crainte de la mort est enracinée
    profondément en nous.
  • 14:03 - 14:08
    Mais si on reconnaît que la peur elle-même
    n'est pas rationnelle
  • 14:08 - 14:10
    et qu'on la dévoile,
  • 14:10 - 14:15
    on peut commencer à tenter
    de minimiser son influence sur notre vie,
  • 14:15 - 14:19
    la manière dont elle nous déforme
    inconsciemment.
  • 14:19 - 14:24
    Certes, je pense que c'est utile de voir
    nos vies comme dans un roman.
  • 14:24 - 14:28
    Mais comme un roman,
    qui a une couverture, un début et une fin,
  • 14:28 - 14:31
    nos vies sont reliées
    par la naissance et la mort.
  • 14:31 - 14:35
    Même si un livre est limité
    par son début et sa fin,
  • 14:35 - 14:39
    il peut traverser des territoires éloignés
    et rencontrer des personnes exotiques,
  • 14:39 - 14:40
    vivre des aventures fantastiques.
  • 14:40 - 14:44
    Même si un livre est limité
    par son début et sa fin,
  • 14:44 - 14:48
    ses héros ne connaissent pas d'horizon.
  • 14:48 - 14:52
    Ils ne connaissent que les moments
    qui constituent leur histoire,
  • 14:52 - 14:53
    même quand le livre est refermé.
  • 14:55 - 15:00
    Les personnages du livre ne sont donc
    pas effrayés d'atteindre la dernière page.
  • 15:00 - 15:03
    Long John Silver ne craint pas
    que vous terminiez votre copie
  • 15:03 - 15:04
    de l'« Île au trésor ».
  • 15:04 - 15:07
    Ça devrait être pareil pour nous.
  • 15:07 - 15:09
    Imaginez que le livre de votre vie,
    sa couverture,
  • 15:09 - 15:12
    son début, sa fin sont
    votre naissance et votre mort.
  • 15:12 - 15:14
    On ne peut connaître
    que les instants liminaux,
  • 15:14 - 15:16
    ces instants qui forment notre vie.
  • 15:16 - 15:20
    Ça n'a pas de sens de craindre
    ce qui est en dehors de ces couvertures,
  • 15:20 - 15:23
    que ce soit avant la naissance
    ou après la mort.
  • 15:23 - 15:26
    Inutile de se soucier
    de la longueur du livre.
  • 15:26 - 15:29
    Peu importe que ce soit une BD
    ou un roman épique.
  • 15:29 - 15:34
    La seule chose qui compte,
    c'est de créer une bonne histoire.
  • 15:34 - 15:36
    Merci.
  • 15:36 - 15:38
    (Applaudissements)
Title:
Parlons de la mort | Stephen Cave | TEDxBratislava
Description:

Cette présentation a été faite lors d'un événement TEDx local, produit indépendamment des conférences TED.

La mort est un sujet un peu morose. Selon Stephen Cave, nous la craignons tant que nous évitons d'en parler à tout prix, même quand nous pensons en parler. Stephen identifie les quatre fils narratifs de la mort que les cultures tout au long de l'histoire ont utilisés pour éviter d'y penser. Il nous donne une bonne raison d'arrêter de ne pas vivre pleinement par crainte de la mort.

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Video Language:
English
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
15:59

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