Alors, qui ici cuisine à l'inspiration, sans recette, au feeling ? Pas mal de monde. (Rires) Qui, au contraire, cuisine en suivant une recette qui vient de votre enfance, votre famille, ou en suivant un livre ? Okay, pas mal, donc il y a un peu des deux. Alors à tous ceux qui cuisinent à l'inspiration, bravo. Vous avez sûrement un vrai don de chimiste. Et, bon, je n'ai pas gouté vos créations, donc je m'avance un peu, peut-être. Et à tous les autres, une grande majorité parfois, qui suivez une recette que vous connaissez par cœur, toutes mes félicitations. Vous avez appris, ou vous avez trouvé tout seul, ou on vous a appris, excusez-moi, qu'il y a une méthode pour produire un repas comestible, voire délicieux. Et cette méthode, c'est la recette qui a été pré-testée pour vous par des chefs, des pères et mères de famille, des amateurs d'un bon repas, et améliorée au fil des ans. Et si maintenant je vous demande, qui ici a une méthode pour mémoriser ? Qui a une méthode pour se concentrer ? Qui a une méthode pour réfléchir, résoudre des problèmes ? Il y en a. Qui a une méthode pour gérer ses émotions, pour comprendre les autres, pour se faire comprendre des autres ? Qui a une méthode pour aller chercher un souvenir bien enfoui au fond de sa tête ? Et si à l'inverse, je vous demande qui fait tout ça au feeling ? La grande majorité d'entre vous fait ça de façon un peu intuitive et très peu, mais quelques-uns, font ça en ayant une méthode, une recette. Et de fait, quand on n'a pas de recette, le résultat n'est pas toujours à la hauteur de nos attentes. On n'a pas du tout réussi à retenir le prénom des trois personnes hyper importantes qu'on vient de nous présenter dans le couloir, ou alors on n'a rien retenu de la réunion de ce matin et là, pas de bol, il faut faire un petit compte-rendu. À l'inverse, nous, à cette même réunion, on a dit plein de choses, les gens n'ont rien compris, et tout au long de la journée, on subit nos émotions, on ne sait pas pourquoi, on ne comprend rien. Ou on n'arrive pas à se concentrer, on est distrait, c'est l'enfer. Et à la fin de la journée, on va en conclure qu'on est nuls, qu'on n'est pas à la hauteur, alors qu'en fait, on n'a pas la recette. On ne sait pas comment faire. Si maintenant je vous demande si ça ne serait pas plus intéressant d'utiliser notre cerveau comme quand on fait de la cuisine. Si on l'utilisait de façon un peu plus méthodique, avec une recette. Si on utilisait notre cerveau, en comprenant un petit peu mieux juste ce qu'il faut pour améliorer nos performances, pour éviter de gâcher de l'énergie dans tous les sens. Et c'est ça que je veux transmettre ce soir. En comprenant mieux notre cerveau, nous avons la possibilité d'obtenir un résultat attendu, comme une recette bien rodée qui nous donne satisfaction à tous les coups. Et la grande nouvelle, c'est qu'on a les connaissances modestes, mais suffisamment utiles et applicables pour tous, pour que chacun apprenne le fonctionnement de son cerveau, le comprenne, et améliore toutes ses tâches quotidiennes, même les plus petites d'entre elles. Ces connaissances, une méthode, c'est la métacognition. La métacognition, c'est la capacité que nous avons à réfléchir sur nos propres processus mentaux. La métacognition, c'est comprendre nos propres fonctionnements, et en comprenant notre fonctionnement, nous allons mieux utiliser notre cerveau, un peu comme un sportif qui connaît bien son corps, qui connaît ses limites et qui sait ce dont il a besoin pour courir son marathon. Il y a pas mal d'études, peut-être que ça va parler à certains ici, qui montrent qu'un étudiant à qui on a appris comment apprendre, à qui on a appris la métacognition, comment utiliser son cerveau, aura de meilleurs résultats scolaires qu'un étudiant qui n'a pas appris tout ça. Donc c'est vraiment une recette formidable, la métacognition, pour améliorer l'apprentissage et pour aider les enfants, et les adultes aussi, à mieux apprendre. Prenons l'exemple de la mémorisation. La mémorisation, ça fait des années qu'on connaît les stratégies pour l'améliorer ou pour s'aider. La mémorisation, c'est une histoire de mettre des informations en mémoire. Et cette mémoire, elle est très limitée. Elle est vraiment très limitée au moment de mettre de nouvelles informations à l'intérieur. Une fois qu'on a bien appris, qu'on a tout retenu, la mémoire à long terme, là, il y a plus de limite. Mais au moment de l'apprentissage, c'est un peu compliqué. Si on sait tout de suite à ce moment-là que cette mémoire à court terme est limitée, qu'on ne peut pas retenir trop d'informations en même temps, qu'on peut pas manipuler trop d'informations en même temps, on n'essaiera juste pas, et on évitera de se mettre en échec. Si en plus, on connaît les quelques stratégies qui nous permettent d'améliorer notre mémoire, là, c'est bingo. On va se mettre en situation de réussite tout de suite. Il y a un autre levier incroyable qui nous permet de booster nos performances, peut-être une autre méthode potentielle, que nous connaissons tous, mais que nous maîtrisons vraiment très mal, à ma connaissance. Ce sont les émotions. Les émotions, pour la recherche actuelle, ce sont des états biologiques qui nous signalent quelque chose sur notre monde interne ou sur le monde externe. Ce sont des indicateurs que quelque chose va mériter notre attention. Je vous invite, peut-être chez vous ou ici, à essayer de chercher pourquoi vous ressentez les émotions que vous ressentez. Qu'est-ce qui cause chacune de ces émotions ? Pourquoi votre cerveau vous invite à faire attention à cette cause ? Vous êtes en colère. Qu'est-ce qui mérite à ce point-là votre attention que ça vous mette dans cet état ? Vous êtes triste. Pourquoi ? Cette métacognition de nos émotions, comprendre nos émotions, ça va être aussi un excellent début pour les réguler. Mais on peut aller un peu plus loin que cette compréhension. Tous nos fonctionnements cognitifs, nos performances cognitives, dépendent de nos états émotionnels. Par exemple, un peu de stress peut vraiment améliorer nos performances. En examen, c'est un peu le cas. On peut peut-être réfléchir un peu mieux, on peut raisonner peut-être un petit peu plus fort, on peut mémoriser, on peut se concentrer peut-être un peu mieux aussi. Évidemment, le stress quotidien, le stress du travail, le stress chronique, c'est très délétère, et ça empêche plutôt la bonne performance. Mais là, on peut imaginer déclencher soi-même un tout petit peu de stress, juste ce qu'il faut, à volonté, pour améliorer nos performances. Ce serait pas mal. Alors, je vais être un petit peu provocatrice. On sait que la psychologie humaine, ce n'est pas juste une question d'action et de réaction. Seulement à l'heure actuelle, dans nos sociétés, les émotions ne sont pas du tout considérées comme bienvenues, ni même intéressantes, et encore moins utiles. Est-ce qu'on ne peut pas se servir de ses émotions en les comprenant mieux et en les utilisant pour booster nos performances ? Je reprends l'exemple de la mémorisation. La mémorisation, je disais, c'est une question de répétition d'informations nouvelles, une question de répétitions utiles. C'est à dire qu'une nouvelle information, on va l'utiliser, et la répétition de cette utilisation va faire que ça va passer dans notre mémoire à long terme, qu'on va s'en souvenir. Il y a certains événements, certaines informations, qui passent directement dans cette mémoire à long terme qui vont directement s'ancrer pour la vie entière. C'est le cas des événements traumatisants, hélas, très négatifs, mais c'est aussi le cas des événements personnels assez forts, exceptionnels, uniques, joyeux, et ceux-là sont plutôt positifs. On peut donc se dire : si j'arrive à déclencher cette émotion forte, peut-être que j'arriverais derrière à mémoriser en un coup, en une seule fois, les informations pertinentes que j'essaie de retenir. Alors, évidemment, je ne prône pas du tout de traumatiser toute la population, mais avec une émotion positive, c'est vraiment possible. Et là, je vous laisse imaginer un peu la puissance de ce mode de mémorisation. C'est quand même assez phénoménal. En une fois, on retient tout. Pas de répétition. Finalement, comprendre nos émotions et les connaître, connaître les causes de ces émotions va nous permettre de les déclencher pour permettre d'améliorer nos performances cognitives. De la même façon, comprendre et connaître nos fonctions cognitives, avoir une bonne métacognition, nous permettra les améliorer. Et donc là, il n'y a pas besoin de matériel. Il n'y a pas besoin d'outils. Il n'y a pas besoin de petites pilules. Il y a juste besoin d'une bonne connaissance de soi, une bonne connaissance de cette recette, la bonne métacognition. Merci. (Applaudissements)