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Ce que les gens de la forêt amazonienne savent et ce que nous ignorons

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    Je suis ethnobotaniste, un scientifique
    qui travaille dans la forêt tropicale
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    pour étudier l'usage des plantes
    locales par les populations.
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    Je fais ce métier depuis longtemps,
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    et je tiens à vous dire
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    que ces gens connaissent
    ces forêts et ces trésors médicaux
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    mieux que nous ne pourrons
    jamais les connaître.
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    Mais ces cultures,
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    ces cultures indigènes,
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    sont en train de disparaître
    plus vite que les forêts elles-mêmes.
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    Et l'espèce la plus noble
    et la plus menacée
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    de la forêt amazonienne
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    n'est pas le jaguar,
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    ni la harpie féroce.
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    Ce sont les tribus autochtones isolées.
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    Il y a quatre ans, je me suis blessé
    au pied dans un accident d'escalade
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    et je suis allé chez le médecin.
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    Elle m'a donné du chaud,
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    du froid, de l'aspirine,
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    des antidouleurs narcotiques,
    des anti-inflammatoires,
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    des doses de cortisone.
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    Ça n'a pas marché.
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    Plusieurs mois après,
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    j'étais dans le nord-est de l'Amazonie.
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    Je suis arrivé dans un village,
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    et le chaman m'a dit :
    « Tu boites. »
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    Je m'en rappellerai toute ma vie.
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    Il m'a regardé droit
    dans les yeux et m'a dit :
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    « Enlève ta chaussure
    et donne-moi ta machette. »
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    (Rires)
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    Il s'est dirigé vers un palmier
    et a arraché une fougère,
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    l'a jetée dans le feu,
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    appliquée sur mon pied,
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    puis plongée dans de l'eau
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    et il m'a fait boire l'infusion.
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    Je n'ai plus eu mal pendant sept mois.
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    Lorsque la douleur revint,
    je suis retourné le voir.
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    Il m'a donné le même remède,
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    et je suis guéri
    depuis maintenant trois ans.
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    Par qui préféreriez-vous être soigné ?
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    (Applaudissements)
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    Ceci étant dit — la médecine occidentale
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    est le système de soins le plus efficace
    qui ait jamais été inventé,
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    mais il a beaucoup de failles.
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    Où est le remède au cancer du sein ?
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    Où est le remède à la schizophrénie ?
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    Où est le remède aux reflux acides ?
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    Où est le remède à l'insomnie ?
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    Le fait est que ces gens
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    peuvent parfois guérir
    ce que nous ne pouvons pas guérir.
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    Ici vous voyez un médecin
    dans le nord-est de l'Amazonie
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    qui traite la leishmaniose,
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    une méchante affection protozoaire
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    qui touche 12 millions
    de gens dans le monde.
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    Les traitements occidentaux
    sont des injections d'antimoine.
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    Elles sont douloureuses,
    elles sont chères,
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    et sûrement mauvaises pour le cœur :
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    il s'agit d'un métal lourd.
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    Cet homme la guérit avec trois plantes
    de la forêt amazonienne.
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    Voici la grenouille magique.
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    Mon défunt collègue,
    le grand Loren McIntyre,
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    qui a découvert la source de l'Amazone,
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    le Laguna McIntyre
    dans les Andes péruviennes,
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    était perdu à la frontière entre
    le Brésil et le Pérou il y a 30 ans.
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    Il a été secouru par un groupe
    d'Indiens isolés appelés les Matsés.
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    Ils lui ont fait signe de les suivre
    dans la forêt, ce qu'il a fait.
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    Là, ils ont sorti des paniers
    en feuilles de palmier.
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    Ils en ont sorti ces grenouilles
    singes vertes —
  • 2:51 - 2:54
    elles sont très grosses,
    de cette taille-là —
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    et ils ont commencé à les lécher.
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    Il se trouve qu'elles sont
    fortement hallucinogènes.
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    McIntyre a écrit un article à ce sujet,
    lu par l'éditeur du High Times magazine.
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    Les ethnobotanistes ont des amis
    dans toutes sortes de cultures étranges.
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    Cet éditeur a décidé de descendre
    en Amazonie pour essayer,
  • 3:12 - 3:16
    ou plutôt lécher,
    ce qu'il a fait, et il écrit :
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    « Ma pression artérielle
    est montée en flèche,
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    j'ai perdu tout contrôle de mon corps,
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    je me suis évanoui comme une masse,
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    je me suis réveillé
    dans un hamac six heures plus tard,
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    j'ai cru que j'étais Dieu
    pendant deux jours. »
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    (Rires)
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    Un chimiste italien l'a lu et a dit :
  • 3:30 - 3:33
    « L'aspect théologique
    de la grenouille singe ne m'intéresse pas.
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    Qu'en est-il des variations
    de la pression artérielle ? »
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    Maintenant, ce chimiste italien
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    travaille sur un nouveau traitement
    contre l'hypertension
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    basé sur les peptides de la peau
    de la grenouille singe verte,
  • 3:44 - 3:47
    et d'autres scientifiques
    cherchent le remède
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    contre un staphylocoque
    résistant aux médicaments.
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    Quelle ironie si ces Indiens isolés
    et leur grenouille magique
  • 3:54 - 3:56
    se trouvaient détenir le remède.
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    Voici un chaman de l'ayahuasca
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    dans le nord-ouest de l'Amazonie,
    au cours d'une cérémonie.
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    Je l'ai emmené à Los Angeles
    rencontrer le responsable d'une ONG
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    qui cherche des fonds
    pour protéger leur culture.
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    Ce monsieur a regardé
    l'homme-médecine et a dit :
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    « Vous n'êtes pas allé
    en école de médecine, si ? »
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    Le chaman a dit : « Non, en effet. »
  • 4:15 - 4:18
    Il a répondu : « Comment
    pouvez-vous prétendre soigner ? »
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    Le chaman l'a regardé et a dit :
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    « Vous savez quoi ? Si vous avez
    une infection, allez voir un docteur.
  • 4:24 - 4:30
    Mais beaucoup d'afflictions humaines
    sont des maladies du cœur et de l'esprit.
  • 4:30 - 4:34
    La médecine occidentale n'y peut rien.
    Moi, je les soigne. »
  • 4:34 - 4:38
    (Applaudissements)
  • 4:38 - 4:42
    Mais tout n'est pas rose dans l'apport
    de la nature à la médecine moderne.
  • 4:42 - 4:44
    Voici une vipère brésilienne,
  • 4:44 - 4:48
    dont le venin a été étudié
    à l'université de São Paulo.
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    Il a été transformé
    en inhibiteur de l'ECA.
  • 4:51 - 4:53
    C'est un traitement phare
    contre l'hypertension.
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    L'hypertension engendre plus de 10 %
    des morts dans le monde chaque jour.
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    C'est une industrie
    à 4 milliards de dollars
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    basée sur le venin d'un serpent brésilien,
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    et les Brésiliens
    n'ont pas touché un centime.
  • 5:06 - 5:10
    Ce n'est pas une pratique
    acceptable du commerce.
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    La forêt tropicale est reconnue
    comme la plus belle expression de la vie.
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    Il y a un proverbe surinamais
    que j'affectionne :
  • 5:18 - 5:20
    « Les forêts tropicales
    ont les réponses aux questions
  • 5:20 - 5:23
    qui n'ont pas encore été posées. »
  • 5:23 - 5:26
    Comme vous le savez,
    elles sont en train de disparaître.
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    Ici au Brésil, en Amazonie,
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    dans le monde.
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    J'ai pris cette photo
    depuis un petit avion
  • 5:32 - 5:34
    survolant la frontière est
    de la réserve Xingu
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    dans l'état du Mato Grosso,
    au nord-est d'ici.
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    Sur la première moitié de la photo,
    vous voyez où vivent les Indiens.
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    La ligne au milieu
    est la frontière est de la réserve.
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    En haut les Indiens, en bas les Blancs.
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    En haut, les « remèdes-miracle »,
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    en bas, juste une bande
    de vaches maigrichonnes.
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    En haut, le carbone stocké
    dans la forêt, à sa place,
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    en bas, le carbone dans l'atmosphère
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    où il provoque
    des changements climatiques.
  • 6:02 - 6:05
    En fait, la deuxième cause
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    des rejets de carbone dans l'atmosphère
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    est la destruction des forêts.
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    Quand on parle de destruction,
    il est important de garder à l'esprit
  • 6:14 - 6:18
    que l'Amazonie est le territoire
    le plus puissant au monde.
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    C'est un endroit
    d'une beauté exceptionnelle.
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    Le plus grand fourmilier du monde
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    vit dans la forêt amazonienne.
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    Il pèse 40 kg sur la balance.
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    L'araignée goliath mangeuse d'oiseaux
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    est l'araignée la plus grosse au monde.
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    On la trouve en Amazonie elle aussi.
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    L'envergure de la harpie féroce
    est de plus de 2 m.
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    Et le caïman noir —
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    ces monstres peuvent peser
    plus d'une demi-tonne.
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    Ce sont des mangeurs d'hommes.
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    L'anaconda, le plus gros serpent,
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    le capybara, le plus gros rongeur.
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    Un spécimen d'ici, au Brésil,
    pesait plus de 90 kg.
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    Découvrons l'habitat de ces créatures,
  • 7:00 - 7:02
    le nord-est de l'Amazonie,
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    où vivent les Akuriyos.
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    Les peuples isolés
    tiennent un rôle mystique et légendaire
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    dans notre imaginaire.
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    Ce sont ceux qui connaissent
    le mieux la nature.
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    Ce sont ceux qui vivent réellement
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    en totale harmonie avec la nature.
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    Selon nos critères,
    certains les appellent « primitifs ».
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    « Ils ne savent pas faire du feu,
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    ou ils ne savaient pas
    avant qu'on ne les contacte. »
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    Mais ils connaissent la forêt
    bien mieux que nous.
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    Les Akuriyos ont 35 mots pour « miel »,
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    et les autres Indiens les admirent
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    comme les véritables maîtres
    du royaume d'émeraude.
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    Ici vous voyez le visage
    de mon ami Pohnay.
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    Quand j'étais adolescent, à écouter
    les Rolling Stones à la Nouvelle-Orléans,
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    Pohnay était un nomade de la forêt
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    qui parcourait la jungle
    du nord-est de l'Amazonie
  • 7:49 - 7:53
    dans un petit groupe,
    à la recherche de gibier,
  • 7:53 - 7:54
    à la recherche de plantes médicinales,
  • 7:54 - 7:56
    à la recherche d'une épouse,
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    auprès d'autres groupes nomades.
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    Mais ce sont des gens comme eux
  • 8:01 - 8:03
    qui savent ce que nous nous ignorons,
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    et ils ont beaucoup de choses
    à nous apprendre.
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    Pourtant, si vous allez dans la plupart
    des forêts d'Amazonie,
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    il n'y a pas de peuples autochtones.
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    Voici ce que vous trouvez :
  • 8:14 - 8:17
    des roches taillées que ces peuples,
  • 8:17 - 8:22
    sans contact avec l'extérieur,
    utilisaient pour aiguiser les haches.
  • 8:22 - 8:24
    Ces cultures qui autrefois dansaient,
  • 8:24 - 8:26
    aimaient, chantaient pour les dieux,
  • 8:26 - 8:28
    vénéraient la forêt,
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    tout ce qu'il en reste sont des gravures,
    comme vous le voyez.
  • 8:31 - 8:34
    Passons à l'ouest de l'Amazonie,
  • 8:34 - 8:37
    qui est vraiment l'épicentre
    des peuples isolés.
  • 8:37 - 8:39
    Chacun de ces points représente
  • 8:39 - 8:41
    un groupe isolé,
    sans contact avec l'extérieur.
  • 8:41 - 8:46
    La grande révélation est que l'on estime
    ces groupes à 14 ou 15,
  • 8:46 - 8:50
    rien qu'en Amazonie colombienne.
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    Pourquoi sont-ils isolés ?
  • 8:52 - 8:54
    Ils savent que nous existons,
    qu'il y a un monde dehors.
  • 8:54 - 8:57
    C'est une forme de résistance.
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    Ils ont choisi de rester isolés,
  • 8:59 - 9:02
    et je pense qu'ils sont
    en droit de le rester.
  • 9:02 - 9:05
    Pourquoi ces tribus
    qui se cachent de nous ?
  • 9:05 - 9:06
    Voici pourquoi.
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    Clairement, certaines
    des raisons remontent à 1492.
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    Mais au tournant du 20e siècle
    existait le commerce du caoutchouc.
  • 9:13 - 9:15
    La demande en caoutchouc naturel,
  • 9:15 - 9:16
    provenant d'Amazonie,
  • 9:16 - 9:20
    a entraîné l'équivalent botanique
    d'une ruée vers l'or.
  • 9:20 - 9:22
    Du caoutchouc pour les pneus de vélo,
  • 9:22 - 9:23
    pour les pneus de voiture,
  • 9:23 - 9:25
    pour les zeppelins.
  • 9:25 - 9:28
    C'était une course effrénée
    pour le caoutchouc,
  • 9:28 - 9:31
    et l'homme sur la gauche, Julio Arana,
  • 9:31 - 9:33
    est l'un des méchants de l'histoire.
  • 9:33 - 9:35
    Ses employés, sa société,
  • 9:35 - 9:37
    et d'autres sociétés comme la sienne,
  • 9:37 - 9:41
    ont tué, massacré, torturé,
    exécuté des Indiens,
  • 9:41 - 9:46
    comme les Witotos que vous voyez
    sur la droite de l'écran.
  • 9:46 - 9:48
    Même aujourd'hui, lorsque
    des gens sortent de la forêt,
  • 9:48 - 9:50
    l'histoire finit rarement bien.
  • 9:50 - 9:52
    Voici des Nukaks.
  • 9:52 - 9:54
    On est entré en contact
    avec eux dans les années 80.
  • 9:54 - 9:58
    En un an, tous ceux de plus
    de 40 ans étaient morts.
  • 9:58 - 10:00
    Rappelez-vous,
    ce sont des sociétés sans écriture.
  • 10:00 - 10:02
    Les anciens sont les dépositaires
    du savoir.
  • 10:02 - 10:04
    Chaque fois qu'un chaman meurt,
  • 10:04 - 10:07
    c'est comme
    si une bibliothèque disparaissait.
  • 10:07 - 10:09
    Ils ont été expulsés de leurs terres.
  • 10:09 - 10:14
    Les trafiquants de drogue
    se sont emparés des terres nukaks,
  • 10:14 - 10:19
    et les Nukaks sont réduits à mendier
    dans les jardins publics en Colombie.
  • 10:19 - 10:22
    Depuis le territoire nukak, je vais
    vous emmener au sud-est,
  • 10:22 - 10:27
    dans le paysage le plus fabuleux du monde,
    le parc national de Chiribiquete.
  • 10:27 - 10:29
    Il était cerné par trois tribus isolées,
  • 10:29 - 10:31
    et grâce au gouvernement
    et aux collègues colombiens,
  • 10:31 - 10:33
    il a été étendu.
  • 10:33 - 10:35
    Il est plus grand que l'état du Maryland
  • 10:35 - 10:39
    et renferme des trésors
    de biodiversité botanique.
  • 10:39 - 10:42
    Il a été exploré
    pour la première fois en 1943
  • 10:42 - 10:44
    par mon mentor, Richard Schultes,
  • 10:44 - 10:47
    que l'on voit ici au sommet
    de Bell Mountain,
  • 10:47 - 10:49
    dans les montagnes sacrées des Karijonas.
  • 10:49 - 10:52
    Voici à quoi le lieu
    ressemble aujourd'hui.
  • 10:52 - 10:54
    En survolant Chiribiquete,
  • 10:54 - 10:56
    on voit que ces montagnes
    perdues le sont toujours.
  • 10:56 - 10:58
    Aucun scientifique ne les a gravies.
  • 10:58 - 11:02
    Personne n'a été au sommet
    de Bell Mountain depuis Schultes en 1943.
  • 11:02 - 11:05
    Et on s'arrête ici, avec la Bell Mountain,
  • 11:05 - 11:07
    juste à l'est sur la photo.
  • 11:07 - 11:10
    Laissez-moi vous les montrer aujourd'hui.
  • 11:10 - 11:13
    Non seulement elles recèlent
    des trésors de la biodiversité,
  • 11:13 - 11:15
    non seulement elles abritent
    trois tribus isolées,
  • 11:15 - 11:18
    mais elles sont aussi le plus grand trésor
  • 11:18 - 11:21
    de l'art pré-colombien au monde :
  • 11:21 - 11:24
    plus de 200 000 peintures.
  • 11:24 - 11:26
    Le scientifique néerlandais
    Thomas van der Hammen
  • 11:26 - 11:31
    a décrit ce site comme la chapelle Sixtine
    de la forêt amazonienne.
  • 11:32 - 11:34
    Mais allons de Chiribiquete
    jusqu'au sud-ouest,
  • 11:34 - 11:36
    toujours en Amazonie colombienne.
  • 11:36 - 11:39
    Cette région est plus grande
    que la Nouvelle-Angleterre.
  • 11:39 - 11:41
    L'Amazonie est une grande forêt,
  • 11:41 - 11:42
    en grande partie brésilienne,
  • 11:42 - 11:44
    mais pas entièrement.
  • 11:44 - 11:47
    Descendons dans les deux parcs
    nationaux de Cahuinari et Puré
  • 11:47 - 11:49
    en Amazonie colombienne —
  • 11:49 - 11:51
    la frontière brésilienne
    est sur la gauche —
  • 11:51 - 11:56
    ils abritent plusieurs groupes
    isolés et sans contact avec nous.
  • 11:56 - 12:00
    Un œil exercé peut regarder les toits
    de ces malocas, ces maisons longues,
  • 12:00 - 12:02
    et reconnaître ici
    la diversité culturelle.
  • 12:02 - 12:04
    Ce sont différentes tribus.
  • 12:04 - 12:06
    Aussi isolées que sont ces régions,
  • 12:06 - 12:10
    vous allez voir comment le monde
    extérieur les envahit.
  • 12:10 - 12:13
    On voit l'augmentation du commerce
    et des transports à Putumayo.
  • 12:13 - 12:15
    Avec le recul
    de la guerre civile en Colombie,
  • 12:15 - 12:18
    le monde extérieur fait son apparition.
  • 12:18 - 12:21
    Au nord, l'exploitation aurifère illégale,
  • 12:21 - 12:23
    ainsi qu'à l'est, en partant du Brésil.
  • 12:23 - 12:27
    Il y a de plus en plus de chasse
    et de pêche commerciales.
  • 12:27 - 12:29
    On voit l'exploitation forestière
    illégale venant du sud,
  • 12:29 - 12:33
    et les trafiquants de drogue essaient
    de traverser le parc pour aller au Brésil.
  • 12:34 - 12:36
    C'est pourquoi, par le passé,
  • 12:36 - 12:39
    il ne valait mieux pas
    avoir affaire aux Indiens isolés.
  • 12:39 - 12:41
    Et si cette photo est floue,
  • 12:41 - 12:44
    comme si elle avait été prise à la hâte,
    voilà pourquoi.
  • 12:44 - 12:46
    (Rires)
  • 12:46 - 12:48
    Ça ressemble à —
  • 12:48 - 12:52
    (Applaudissements)
  • 12:52 - 12:55
    Ça ressemble à un hangar
    en Amazonie brésilienne.
  • 12:55 - 12:57
    C'est une exposition d'art
    à La Havane, à Cuba.
  • 12:57 - 12:59
    Un groupe appelé Los Carpinteros.
  • 12:59 - 13:04
    C'est pourquoi selon eux on ne doit pas
    chercher des ennuis aux Indiens.
  • 13:04 - 13:05
    Mais le monde change.
  • 13:05 - 13:08
    Voici des Mashco-Piros à la frontière
    entre le Brésil et le Pérou,
  • 13:08 - 13:12
    qui sont sortis de la forêt
    parce qu'ils en ont été chassés
  • 13:12 - 13:15
    par les trafiquants de drogue
    et les exploitants de bois.
  • 13:15 - 13:17
    Et au Pérou, il y a un commerce
    sale qui s'exerce.
  • 13:17 - 13:19
    Ce sont des safaris humains.
  • 13:19 - 13:23
    On vous emmène dans des groupes isolés
    pour les prendre en photo.
  • 13:23 - 13:25
    Quand vous leur donnez
    des vêtements, des outils,
  • 13:25 - 13:27
    vous leur donnez aussi des maladies.
  • 13:27 - 13:30
    On les appelle les « safaris inhumains ».
  • 13:30 - 13:32
    Ce sont des Indiens
    à la frontière du Pérou,
  • 13:32 - 13:35
    que des vols sponsorisés
    par des missionnaires ont survolé.
  • 13:35 - 13:38
    Ils veulent s'immiscer
    et en faire des chrétiens.
  • 13:38 - 13:41
    On sait comment cela se termine.
  • 13:41 - 13:42
    Que faire à présent ?
  • 13:42 - 13:45
    Introduire la technologie
    dans les groupes contactés,
  • 13:45 - 13:47
    pas ceux non contactés,
  • 13:47 - 13:50
    de façon culturellement responsable.
  • 13:50 - 13:54
    C'est l'alliance parfaite
    de la sagesse chamanique ancestrale
  • 13:54 - 13:57
    et de la technologie du 21ème siècle.
  • 13:57 - 14:00
    Nous avons fait ça
    pour plus de trente tribus :
  • 14:00 - 14:03
    cartographier, gérer
    et augmenter la protection
  • 14:03 - 14:07
    de plus de 70 millions d'acres
    de forêt tropicale ancestrale.
  • 14:07 - 14:13
    (Applaudissements)
  • 14:13 - 14:16
    Ça permet aux Indiens
    de reprendre contrôle
  • 14:16 - 14:19
    de leur destinée
    environnementale et culturelle.
  • 14:19 - 14:23
    Ils installent aussi des postes de garde
    pour tenir les étrangers éloignés.
  • 14:23 - 14:25
    Voici des Indiens formés
    comme gardes forestiers,
  • 14:25 - 14:29
    qui patrouillent les frontières
    pour tenir le monde extérieur à distance.
  • 14:30 - 14:33
    Voici une image de prise de contact.
  • 14:33 - 14:35
    Ce sont des Indiens Chitonahuas
  • 14:35 - 14:37
    à la frontière
    entre le Brésil et le Pérou.
  • 14:37 - 14:40
    Ils sont sortis de la jungle
    pour demander de l'aide.
  • 14:40 - 14:42
    On leur a tiré dessus,
  • 14:42 - 14:44
    on a brûlé leurs malocas,
    leurs maisons longues.
  • 14:44 - 14:48
    Certains ont été massacrés.
  • 14:48 - 14:53
    Faire usage d'armes automatiques
    pour massacrer des peuples isolés
  • 14:53 - 14:57
    est la violation des droits de l'homme
    la plus infâme et la plus honteuse
  • 14:57 - 15:00
    aujourd'hui sur cette planète,
    et elle doit cesser.
  • 15:00 - 15:06
    (Applaudissements)
  • 15:06 - 15:09
    Mais je voudrais conclure en disant
  • 15:09 - 15:12
    que ce travail peut être
    spirituellement enrichissant,
  • 15:12 - 15:15
    mais il est aussi difficile
    et peut être dangereux.
  • 15:15 - 15:18
    Deux de mes collègues
    sont morts récemment
  • 15:18 - 15:20
    dans un accident d'avion.
  • 15:20 - 15:22
    Ils s'étaient mis au service de la forêt
  • 15:22 - 15:24
    pour protéger ces peuples isolés.
  • 15:24 - 15:26
    La question est, en conclusion,
  • 15:26 - 15:28
    de savoir ce que réserve le futur.
  • 15:28 - 15:30
    Ce sont des Urays au Brésil.
  • 15:30 - 15:32
    Que leur réserve le futur,
  • 15:32 - 15:34
    et que nous réserve le futur ?
  • 15:35 - 15:37
    Nous devons penser différemment.
  • 15:37 - 15:39
    Nous devons œuvrer à un monde meilleur.
  • 15:39 - 15:41
    Si le climat doit changer,
  • 15:41 - 15:45
    faisons en sorte qu'il change
    pour le mieux plutôt que pour le pire.
  • 15:45 - 15:48
    Choisissons de vivre sur une planète
  • 15:48 - 15:51
    à la végétation luxuriante,
  • 15:51 - 15:53
    sur laquelle les peuples isolés
  • 15:53 - 15:55
    peuvent rester dans l'isolement,
  • 15:55 - 15:57
    peuvent conserver ce mystère
  • 15:57 - 15:58
    et ces connaissances
  • 15:58 - 16:00
    si tel est leur choix.
  • 16:00 - 16:02
    Choisissons de vivre dans un monde
  • 16:02 - 16:05
    où les chamans vivent dans ces forêts,
  • 16:05 - 16:08
    se soignent et nous soignent
  • 16:08 - 16:10
    grâce à leurs plantes mystiques
  • 16:10 - 16:12
    et leur grenouilles sacrées.
  • 16:12 - 16:14
    Merci encore.
  • 16:14 - 16:18
    (Applaudissements)
Title:
Ce que les gens de la forêt amazonienne savent et ce que nous ignorons
Speaker:
Mark Plotkin
Description:

« L'espèce la plus noble et la plus menacée de la forêt amazonienne n'est pas le jaguar ni la harpie féroce », dit Mark Plotkin. « Ce sont les tribus isolées et sans contact avec l'extérieur. » Dans une conversation dynamique et solennelle, l'ethnobotaniste nous amène dans le monde des tribus indigènes de la forêt amazonienne et des incroyable plantes médicinales que les chamans utilisent pour soigner. Il décrit les défis et les périls qui les menacent — ainsi que leur sagesse — et nous exhorte à protéger cette mine de savoir irremplaçable.

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Video Language:
English
Team:
closed TED
Project:
TEDTalks
Duration:
16:35

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